Jurisprudence : CA Paris, 6, 4, 25-10-2011, n° S 10/00937, Infirmation



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6 - Chambre 4
ARRÊT DU 25 Octobre 2011 (n°, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général S 10/00937
Décision déférée à la Cour jugement rendu le 09 Septembre 2009 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY RG n° 08/02525

APPELANT
Monsieur Philippe Z
23 Résidence de la Forêt

MONTMORENCY
comparant en personne, assisté de Me Judith SCHOR, avocat au barreau de PARIS, toque P0329
INTIMÉE
SOCIÉTÉ UNIJET
Aéroport du Bourget

LE BOURGET
représentée par Me Louis BOUDIAS, avocat au barreau de PARIS, toque P 475

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Madame Dominique LEFEBVRE LIGNEUL, Conseillère
Greffier Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, président et par Mademoiselle Sandrine CAYRE, greffier présent lors du prononcé.
La cour est saisie de l'appel interjeté par M. Z du jugement du Conseil de Prud'hommes de Bobigny section Encadrement du 9 décembre 2009 qui l'a condamné à payer à la société Unijet les sommes de 15 777.62 euros au titre de l'indemnité de dédit formation et 500 euros pour frais irrépétibles.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
M. Z a été engagé le 19 août 2002 en qualité de pilote stagiaire Fa 50 pendant 18 mois et ensuite officier pilote.
Le contrat de travail stipulait l'engagement d'accepter les qualifications de type demandées par Unijet. Un refus constituerait une rupture du contrat de travail de sa part ;
Le 19 août 2002 il a signé une clause de dédit formation pour un stage de formation de pilotage d'avions spécifiques et adaptation en ligne amortie sur 3 ans.
Le 22 février 2007 il a signé une seconde clause de dédit formation pour un stage de qualification sur l'avion canadien Global Express entre février et mars 2007 fixé au coût total de 48 000 euros, représentant le coût direct hors taxes de la formation, tant chez Bombardier que chez Unijet, à amortir sur 48 mois suivant la fin de la formation et prorata temporis, notamment au cas de démission.
M. Z a notifié le 9 novembre 2007 une démission avec effet au 10 février 2008.
La société Unijet a saisi le Conseil des Prud'hommes le 29 mai 2008 d'une action en paiement du solde du coût de la formation.
M. Z demande d'infirmer le jugement, de requalifier la démission en prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur et de dire la société Unijet irrecevable en sa demande en paiement de dédit-formation, subsidiairement d'annuler la clause de dédit-formation du 22 février 2007 et de rejeter la demande en remboursement, et de condamner la société Unijet à lui payer les sommes de 10 769.42 euros de solde de tout compte impayé, 82 235.00 euros au titre des astreintes, 10 361 euros de jours de repos réglementaires non attribués et 5000 euros pour frais irrépétibles.
La société Unijet demande par voie de réformation de condamner M. Z à payer la somme de 30 144 euros à titre de solde d'indemnité de dédit formation et 5000 euros pour frais irrépétibles.

SUR CE
Sur la rupture du contrat de travail
M. Z impute à faute les rappels de salaire et le fait qu'il n'a pu prendre entièrement ses congés payés chaque année causant un préjudice au-delà de leur indemnisation (en fin de contrat) et retenue par compensation par la société Unijet.
La démission a été faite sans grief, en vue de prendre un nouvel emploi dans une autre Compagnie aérienne et les réclamations de M. Z sont postérieures à la démission et formées de manière reconventionnelle à l'occasion de la demande principale formée par la société Unijet qui est à l'origine de la saisine de la juridiction prud'homale ; Dans ces conditions la démission n'apparaît pas équivoque;
Sur l'avenant de dédit-formation
La conjugaison de la clause du contrat de travail imposant de suivre les qualifications à peine de licenciement et l'importance du coût global de 48 000euros de la formation et de la durée
d'amortissement de 4 ans porte atteinte à la liberté du salarié de démissionner ;
Par ailleurs l'avenant stipule un coût global sans indiquer le coût réel pour l'entreprise des frais de formation notamment auprès de l'entreprise extérieure Bombardier, ni la durée de celle-ci, (suivie entre le 26 février et le 18 mars 2007) et la somme de 48 000 euros comprend le salaire de base avec minimum garanti de 55H de vol outre les primes, congés payés et charges sociales afférentes versées par Unijet à M. Z pendant le temps de sa formation calculé sur 32 jours incluant 7 jours de repos, alors que pendant les actions de formation demandées par l'employeur, celui-ci doit supporter seul et en tout état de cause, le maintien de la rémunération de son salarié;
La réponse du salarié à la demande du 30 novembre 2007 de la société Unijet sur le mode de remboursement de la somme de 38 367 euros à son départ, dans sa lettre du 11 décembre 2007, qu'il s'acquittera de ses droits et devoirs le dernier jour du préavis, ne vaut pas ratification de la demande en paiement du solde de dédit-formation ;
Dans ces conditions M. Z n'a pas été à même de souscrire librement et en connaissance du coût réel de la formation la clause de dédit-formation du 22 février 2007 qui sera annulée ; La société Unijet sera donc déboutée de sa demande en remboursement et condamnée à payer la somme de 10 769.42 euros figurant comme due dans le dernier bulletin de salaire de février 2008, sauf à déduire l'acompte versé pour avance de 480 euros de pension alimentaire devant rester à la charge de M. Z, soit 10 289.42 euros, qui n'a pas été payée par compensation avec le solde de dédit-formation effectué sur le dit bulletin pour un montant de 38 367 euros donnant un solde négatif de - 30 144.62 euros;
Sur les demandes en rappel de salaire pour astreinte et jours réglementaires de repos non pris ;
Le contrat de travail stipule que M. Z sera soit en mission, soit en réserve à moins d'une heure du Bourget, avec la possibilité d'être joint instantanément, soit en repos au minimum 4 jours réglementaires par mois ou en congés payés qui sont de 3jours par mois. Sa rémunération est fixée selon un salaire de base doublé d'un montant identique représentant un minimum garanti correspondant à 55 H de vol, outre un salaire variable correspondant aux heures de vol effectuées au-delà de 55H ;
M. Z demande le paiement de 500 jours d'astreinte sur les années 2003 à 2007 selon la rémunération perçue pour les temps de travail effectif ;
Il demande en outre le paiement de 63 jours de repos réglementaires non pris entièrement sur la base de 7 jours par mois en visant l'article L 422-6 du code de l'aviation civile sur les années 2005 à 2007 ;
L'article L 422-6 du Code de l'Aviation Civile modifié par l'ordonnance du 12 juillet 2004 stipule qu'outre les périodes de congé légal définies par les articles L 223 ( tirets2 à -17) du code du travail, les salariés mentionnés à l'article L 422-5 doivent bénéficier d'au mois 7 jours par mois et 96 jours par année civile libres de tout service et de toute astreinte. Ces jours notifiés à l'avance, peuvent comprendre des périodes de repos et tout ou partie des temps d'arrêt déterminés par la loi ou le règlement.
Il ressort de l'analyse de l'activité de vol de M. Z telle qu'établie par la société Unijet et reprise par le salarié, que sur les années 2003 à 2007, il a été rémunéré sur de nombreux mois au minimum des 55 H de vol alors qu'il avait effectué un nombre moindre d'heures effectives de vol ;
Il a bénéficié pendant l'exécution de son contrat de travail d'au moins 4 jours de repos et de congés payés mensuels de 3 jours au delà des congés légaux de 2.5 jours par mois ; Il sera ci-après indemnisé des jours de repos manquant à raison de 96 jours par année civile sur les années 2005/2007, après l'entrée en vigueur du texte susvisé du 12 juillet 2004 ; M. ..., chef pilote organisant le roulement des pilotes, a attesté qu'il existait un roulement de première réserve de telle sorte que le risque d'être appelé pour vol n'était pas permanent pour tous les pilotes; L'astreinte n'implique pas de rester à son domicile et permet des déplacements dans la limite géographique d'un transport d'une heure autour du Bourget, lieu du travail ; Le salaire de base dans sa première fraction est indépendant des heures de vol accomplies représentant le travail effectif du salarié ;
Dans ces conditions la cour estime que le salaire de base garanti ainsi que les bonifications propres à l'entreprise de congés payés et les jours de repos réglementaires imposés par l'aviation civile au-delà des jours légaux de congés payés prévus par le Code du Travail constituent une compensation en repos et pécuniaire suffisante pour indemniser l'astreinte supportée et il n'y a pas lieu à rappel de salaire de ce chef;
Sur la réclamation de 63 jours de repos non pris sur les années 2005/2007 par rapport aux 96 jours annuels prévus à l'article L422-6 du code civil, elle doit être réduite de 18 jours à raison des congés payés de 0.5 jours contractuels par mois consentis par la société Unijet au-delà des congés légaux de 2.5 jours par mois ; Il sera donc alloué de ce chef la somme de 45 jours X 164.47 euros = 7 401.15 euros ;

PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement et statuant à nouveau
Dit la démission de M. Z non équivoque.
Dit nulle la clause de dédit formation signée le 22 février 2007;
Condamne la société Unijet à payer à M. Z les sommes de 10289.42 euros de solde impayé sur le bulletin de salaire de février 2008, 7 401.15 euros de jours de repos réglementaires non attribués sur les années 2005 à 2007 et 2000 euros pour entiers frais irrépétibles.
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société Unijet aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Décisions similaires

Lancer la recherche par visa

Domaine juridique - CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par thème
La Guadeloupe
La Martinique
La Guyane
La Réunion
Mayotte
Tahiti

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.