Jurisprudence : TA Cergy-Pontoise, du 14-09-2011, n° 1107539

TA Cergy-Pontoise, du 14-09-2011, n° 1107539

A0163HZ3

Référence

TA Cergy-Pontoise, du 14-09-2011, n° 1107539. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5618274-ta-cergypontoise-du-14092011-n-1107539
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Abstract

Une conseillère municipale de l'opposition socialiste d'une commune souhaite publier une tribune dans le bulletin municipal mensuel du mois de septembre 2011, comme les dispositions de l'article L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales (lire) le lui permettent, concernant les règles et la localisation des bureaux de vote des primaires socialistes sur le territoire de la commune.




TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE CERGY-FONTOISE


Mme GOURIET

Mme Doumergue Vice-président

Ordonnance du

14 septembre 2011

54-035-03


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COPIE

Le juge des référés,


en


Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2011, présentés pour Mme A, demeurant … … … … … … (…), par Me Gaborit ; Mme GOURIET demande au juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, statuant par application de l'article 1) d’ordonner à la commune de Châtillon de publier dans le numéro de septembre 2011 du Journal « Châtillon informations », sous astreinte de 2000 euros par jour de retard, l'encart de la tribune de Mme A consacré aux élections primaires du socialiste, avec la mention que cette publication a été ordonnée par le Président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise statuant référé ; 7 de condamner la commune À lui verser la somme de 3000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative🏛 ;

Elle soutlent que

Sur l'urgence :

-le journal « Châtillon informations » dans lequel l’encart refusé doit figurer parait le 15. de €hnque mois alors que les primaires organisées pur le parti soclélisic ont fieu les 9 et 16 octobre prochains, aussi, il ne peut être remédié à l'atteinte portée: à la liberté d’ des élus d'opposition que par la publication dans le numéro de septembre 2011 de l'article censuré par la commune de Châtilfon ; que la situation d'urgence est donc caractérisée et nécessite que soit décidée une mesure visant à sauvegarder la liberté d'expression des élus par le juge des référés

Sur l'atteinte à une liberté fondamentale

- l'article L 2121-27-1 du code des collectivités territoriales🏛 organise, au bénéfice des élus


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2 de l'opposition, un droit d'expression dans les supports d’information édités par les collectivités territoriales ; qu’il est de jurisprudence constante que, sauf À ce que les écrits en causc présentent un caractère injurieux ou diffamatoire où représentent un risque pour l'ordre, la sécurité ou ln tranquillité publique, l'autorité municipale ne peut refuser de publier la contribution des conseillers municipaux n’appartenant pas à la majorité ( Cour admigistrative d'appel de Versailles, 27 septembre 2007, n°06 VE02569,commune d'Asnières-sur-Seine ; Cour administrative d’appel de Nancy, 14 avril 2005, commune de Clouange, n°03NC00869⚖️ ; TA d'Orléans, 5 Janvier 2007, Commune de Chateaudun, n°0400702⚖️) ; qu’en l’espèce, latribune litigieuse n'entre dans aucune des catégories précitées, le directeur de'publication du journal « Châtillon informations» a en conséquence porté atteinte au droit d'expression d’un groupe municipal prévu par la loi;

- que la liberté d'expression des conseillers mubicipaux.n le caractère d’une liberté fondamentale au sens de l'article L 521-2 du code de justice administrative🏛 (CE 18 janvier 2001, Commune de Venelles, n°229247⚖️ ; TA de Besançon, ordonnance n°03.0218 du 21 février 2003);

- l'encart litigioux consiste en une information à destination des électeurs de la commune de Chatillon sur leur droit à participer aux primaires organisées par le parti socialiste et précisant les modalités pratiques de cette notamment relatives aux lieux de vote ; qu’ il ne s’agit donc en aucun cas de dévoyer à des fins de politique nationale un espace de libre expression des élus, contrairement à ce qu'a indiqué 1e maire.de Châtillon, dans la triesure où toutes les personnes lmscrites sur les listes électorales disposent du droit de participer à cette consultation et que cet encart ne comporte aucune préférence pour un candidat futur à l’élection présidentielle ni aucune préférence partisane ;

-en outre la décision de refus de publication prise par le maire de Châtillon par courrier du 5 septembre 2011 qui n’est pas fe directeur de publication a donc été prise par une autorité incompétente

il y a donc atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'expression des conseillers municipaux d’opposition de Châtillon,

Vu te mémoire, enregistré le 13 septembre 2011, présenté pour Ia commune de Châtillon, par Me Bernard par lequel elle conclut au rejot de la requête et à la condamnation de ia requérante à lui verser la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que

Sur recevabilité la de la requête :

- la requête est irrecevable en ce qu’elle est dirigée contre une personne physique, M B directeur de ia publication du bulletin d’information municipal et non contre la commune elle- même ;


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Sur l'urgence :

- d’une part, la condition d’urgence n’est pas caractérisée dés lors qu'en matière de liberté d'expression de lopposition municipale, si celle-ci a la possibilité de s'exprimer par le biais d’un autre support, la jurisprudence considère qu’il n’y à pas urgence ; qu’en l’espèce, la requérante a pu communiquer aux électeurs l'information relative aux modalités d'organisation des primaires du parti socialiste par le biais du site internet du parti, de la « lettre aux Châtillonais » rédigée par Mme A où encore de tracts distribués les jours de marché ;

« d'autre part, le recours a été formé tardivement dans la mesure où Mme A a été informée du refus du maire de publier l'encart litigieux par un courrier en date du S septembre et un courrier électronique du 8 septembre ;

Sux l’absence d'atteinte grave et manifestement illégale à vus liberté fondamentale :

«si les élus de l’opposition sont, en application des distiositions de l’article L 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, libres d'exprimer leurs opinions dans une tribune dédiée, | Üls doivent s’en tenir À des sujets regardant les attributions de la commune ; qu’en conséquence, la suppréssion d’une infime partié d'un-urticle relatifà l'organisation des primaires socialistes en vue de désigner le prochain candidat de ce parti aux élections présidenticllcs ne porte pas une atteinte manifestement illégals à la liberté d'expression ;

« le directeur de fa publication n’a pus outrepassé ses droits en veillant au respect des dispositions du code général des collectivités territoriales et notamment celles de l’article L ;2121- 27-1 qui s'inscrivent dans le cadre plus global des articles L.2121-19 etL.2121-29 qui circonserivent le cadre dè l'action du consei] municipal ct de l'ensemble des élus locaux, et donc de leur tribune, aux seules questions des réalisations et de la gestion conmmumale ; qu’il n’a donc pas porté une atteinte manifestement illégale au droit d'expression des élüs de l'opposition en supprimant va encart relatif à des élections internes à un parti politique ;

- le refus de publication de l’encart a été pris par une autorité compétente à savoir le directeur de publication, matérialisé par lc bon à tirer (BAT) envoyé par Mme Aa, coliabortrice de M. B, directeur de la publication j que le maire de la commune n’est intervenu qu’en tant que titulaire d’une sorte de magistère moral, garant du bon fonctionnement des institutions et de la démocratie locale;

- il n’y a pas d'atteinte grave à la liberté d'expression dés lors que les citoyens de la commune sont suffisamment informés par d’autres biais de la tenue des primaires du parti socialiste ; de plus, la suppression d’une petite partie d'un article relatif à de fa propagande politique nationale ne peut être qualifiée d’atteinte grave, alors que l’ensemble de la tribune relative à une opinion politique portée sur Jes réalisations et la gestion communale a été maintenue ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 29 juillet 1881 modifiée ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;


Vu la décision par laquelle le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a désigné Mme Doumergue, vice-président, pour statuer sur les demandes cn référé ;

Après avoir convoqué à une audience publique :

- Me Gaborit, représentant Mme A ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 13 septembre 201 1 à 16 heures au cours de’ laquelle ont été entendus :

- le rapport de Madame Ab;

- les observations de Me Gaborit représentant Mme A ;

- les observations de Mc Ac représentant la commune de Chatillon ;

Après avoir prononcé, à l'issue de l'audience la clôture de l’instruction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : "Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordorner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public où tn organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures.” et qu'aux termes de l'article L. 522-1 dudit code : "Le jugc des référès siatue au terme d'une procédure contradicroire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 ct L. 521-2, de les modifier ou d'y mèttre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique (...)" ;

Sur la fin de non recevoir opposée pur lu commune de Châtillon :

Considérant qu’il résulte des débats qui se sont tenus à l’audience et qu’il est constant que la commune de Châtillon est propriétaire du journal « Châtillon informations » dont le directeur de publication est M. B, adjoint au député-maire de la commune de Châtillon ; que par suite, la commune de Châtillon n’est pas fondée À soutenir que le requête présentée au juge des référés est irrecevable au seul motif qu’elle est formée « contre M. B » directeur de fa publication alors que les conclusions de la requête tendent à obtenir du juge des référés que soit ordonné à la commune de Châéillon de publier dans son journal intitulé « Châtillon informations » un encart proposé par une conseillère municipale présidente d’un groupe politique d’opposition ; que la fin de non recevoir opposée par l« commune de Chârillon doit donc être écartée ;

Considérant en premier lieu qu’il résulte des pièces du dossier et des débats qui se sont tenus à l’audience que le journal « Châtillon informations », publié chaque mois par la commune de


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Châtillon, est destiné à être publié le 15 septembre 2011, sans insertion dans la tribune du groupe d'opposition à la majorité municipale présidé par Mme A de l’cucert rejatif aux modalités pratiques de l'organisation dans la commune de Châtilloi des primaires organisées par le parti socialiste et fixées aux 9 et 16 octobre 2011 ; qu’ À la date du 13 septembre 2011,lc numéro n°256 de septembre 2011 est en cours de façonnage chez l'imprimeur ;que, dans ces circonstances, la condition d'urgence exigée par les dispositions précitées de l’article L.521-2 du code de justice administrative doit être regurdée comme remplie ;

Considérant, en deuxième lieu que, pour toute personne, Îe droit d'expression et de communication de sa pensée est une liberté fondamentale, reconnue aussi bien par des sources normatives internationales telles que J’artiale 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales🏛, que par des textes de droit interne comme l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ; que, la manifestation publique de leurs opinions est, de surcroît, pour les élus, une garantie consubstantlelle de leur statut ; qu’en outre, le droit d'expression des élus est une condition essentielle du débat démocratique ; que, par suite, la liberté d'expression des élus constitue une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative précité ;

Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales : n Dans les communes de 3 500 habitants et plus, lorsque la conraune diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d'information générele sur les réalisations et ja gestion du conseil municipal, un espace est réservé à l'expression des canseillers n'appartenant pas à la majorité municipalo, Les modalités d'application de cette disposition sont définies par lo règlement intérieur. » ; qu’aux termes de l'ænticle 24 du règlement intérieur du conseil municipal de Châtillon pris pour l'application de ces dispositions : « Conformément aux dispositions de l'article L. 2121-27- 1, le journal municipal « Châtillon-informations » comporte un espacé réservé à l'expression des conseillers municipaux n’appartenant pas à la majorité municipale. » ;

Considérant que pour s'opposer à la publication de l’encart précité, la commune de Châtillon n’établit pas ni même n’allègue l'existence d’un délit défini par la Joi relative à ja liberté de la presse ou d' une atteinte à l’ordre public ; que si elle soutient qu’elle ne peut permettre la publication de l’encart en cause au motif qu'il détourne un espace de liberté d'expression dédié aux problématiques locales à des fins de politique nationale, il ressort toutefbis de l'examen dudit encart qu’il a pour objectif de délivrer aux électeurs, habitants de le commune de Châtillon, les informations pratiques en vue de la participation aux primaires dù parti socialiste, et notarament de leur indiquer la situation des bureaux de vote ouverts dans la cormune pour la tenue du scrutin ; que cette communication entre dans le champ des dispositions de l’article L 2121-27-1 précité du code général des collectivités territoriales ct du règlement intérieur-voté par le conseil numicipal de Châtillon ; que dans ces conditions, le refus opposé à Mme A par la commune de Chétillon de publier dans 1e journal local « Châtillon informations » l'encart en causo doit être regardé corime constituant nue atteinte grave et manifestement illégale à fa iberté d'expression de ln requérante et du groupe d'élus qu’elle représente, quand bien même ces informations scraient diffusées par d’autres supports ; qu'il y a lieu dès lors d’enjoindre à la commune de Chatillon de prendre toutss les mesures nécessaires pour que l’encart litigieux soit publié dans le journal « Châtillon informations » du mois de septembre 2011 ;qu’il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce d’assortir cette injonction d’une astreinte ;


Considérant qu’aux termes de l’article L.761-I du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamme la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie Ja somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans fes dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas Heu à cette condamnation » ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l’article JL. 761-1 du code de justice administrative ct de mettre à lu charge de la commune de Châtillon la somme que Mme A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens : que les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que les sommes demandées à ce tître par la commune dé Châtillon soient mises à la charge de Mme A , qui n’est pas la partie perdante ;


ORDONNE :

Article fer: Il est fait injouction à la commune de Châtillon de prendre toutes les mesures nécessaires pour que l'encart rédigé par Mme A relatif aux primaires Organisées par le parti socialiste les 9 et 16 etobre 2011 et aux modalités pratiques ce scrutin dans la commune de Châtillon soît inséré dans le numéro du mois de septembre 2011 du journal « Châtillon informations ».

Article2: | Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article3: | Les conclusions de la commune de Châtillon tendant à l'application des dispositions de l’article L'761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article4: — La présente ordonnance sera notifiée à Mme A ct à la commune de Châtillon,

Fait à Cergy-Pontoise, le 14 septembre 201 1.

Le juge des référés, Le greffier,

Signé Signé

M. Ab M. Ad

La République mande et ordonne au préfer des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne et

à tous huissiers de Justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun,

contre les parties privéss, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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