CIV. 2 LM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 22 septembre 2011
Cassation sans renvoi
M. LORIFERNE, président
Arrêt no 1711 F-P+B
Pourvoi no A 11-10.118
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ M. José Pimentel Z,
2o/ Mme Margarita Gonzalez ZY, épouse ZY ZY,
domiciliés Saint-Mandé,
contre le jugement no RG 09/00135 rendu le 24 décembre 2010 par le juge de l'exécution, saisies immobilières, tribunal de grande instance de Créteil, dans le litige les opposant à la caisse régionale d'assurance maladie (CRAM) de Champagne-Bourgogne, venant aux droits de la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne, elle-même aux droits de la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Aube, dont le siège est Troyes,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 septembre 2011, où étaient présents M. Loriferne, président, Mme Robineau, conseiller rapporteur, M. Moussa, conseiller, Mme Genevey, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Robineau, conseiller, les observations de Me Foussard, avocat de M. et Mme Z Z, ... ... SCP Defrenois et Levis, avocat de la CRCAM de Champagne-Bourgogne, l'avis de M. Marotte, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement attaqué et les productions, que, sur des poursuites de saisie immobilière engagées par la société caisse régionale de crédit agricole mutuel de Champagne-Bourgogne (la banque) à l'encontre de M. et Mme Z Z, un juge de l'exécution, par jugement du 4 mars 2010, a validé la procédure de saisie immobilière et fixé la date d'adjudication ; que M. et Mme Z Z, ayant interjeté appel, un arrêt confirmant la vente forcée a été rendu le 21 octobre 2010 ; que la banque a saisi le juge de l'exécution d'une requête en rectification d'erreur matérielle portant sur la désignation des biens dont la vente forcée était ordonnée ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense
Attendu que la banque conteste la recevabilité du pourvoi, aux motifs que la décision rectificative a, quant aux voies de recours, le même caractère et est soumise aux mêmes règles que la décision rectifiée et qu'elle est donc susceptible d'appel ;
Mais attendu que la décision rectifiée, confirmée en ce qu'elle ordonnait la vente forcée, étant passée en force de chose jugée avant le dépôt de la requête en rectification, la décision rectificative ne pouvait être attaquée que par la voie du recours en cassation ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Vu l'article 462 du code de procédure civile ;
Attendu qu'après son dessaisissement, la cour d'appel reste seule compétente pour réparer une erreur ou une omission matérielle affectant les dispositions du jugement qui lui a été déféré et ce, même si elle a déjà statué ;
Attendu qu'en se prononçant sur la requête en rectification du jugement d'orientation, présentée le 17 décembre 2010, alors que ce jugement avait été déféré à la cour d'appel qui avait statué par arrêt du 21 octobre 2010, le juge de l'exécution a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement (RG 09/00135) rendu le 24 décembre 2010, entre les parties, par le juge de l'exécution, saisies immobilières, tribunal de grande instance de Créteil ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable la requête en rectification du jugement du 4 mars 2010 présentée par la caisse régionale au juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil ;
Condamne la CRCAM de Champagne-Bourgogne aux dépens exposés tant devant les juges du fond que devant la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. et Mme Z Z.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le jugement attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a, déclarant procéder à une rectification d'erreur matérielle, substitué au libellé page 17 ainsi rédigé " dit que la vente forcée du bien situé à Saint Mandé (94) 70 et 70 bis avenue ... Marie, cadastré section K no 113 lots no 18 et 27 aura lieu à la barre du tribunal de grande instance de Créteil le ... ", le libellé exact à savoir " dit que la vente forcée des biens situés à Saint Mandé (94), à Saint Mandé (94), 70 et 70 bis avenue ... Marie, cadastré section K no 113 lots no 18 et 27 aura lieu à la barre du tribunal de grande instance de Créteil le " ;
AUX MOTIFS QUE " le jugement du 4 mars 2010 est affecté d'une omission purement matérielle en ce qu'il a omis de mentionner dans le dispositif la totalité des biens immobiliers concernés par la procédure de saisie immobilière visée dans le commandement de payer délivré le 8 juin 2009 et rappelés en page 2 du jugement dans l'exposé des motifs " ;
ALORS QUE premièrement, dès lors que le jugement du 4 mars 2010 avait fait l'objet d'un appel, qui a d'ailleurs donné lieu à un arrêt du 21 octobre 2010, seule la cour d'appel de Paris, à l'exclusion du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil avait le pouvoir, le cas échéant, de procéder, à supposer qu'il y eut erreur matérielle du jugement du 4 mars 2010, à la rectification de cette erreur matérielle; qu'en décidant le contraire les juges du fond ont violé les articles 481 et 462 du Code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, dès lors que par son arrêt du 21 octobre 2010, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du 4 mars 2010, seul l'arrêt du 21 octobre 2010 pouvait être regardé comme affecté de l'erreur, et pouvait donner lieu à rectification ; que de ce point de vue également les juges du fond ont violé les articles 462, 481, 542 et 561 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le jugement attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a, déclarant procéder à une rectification d'erreur matérielle, substitué au libellé page 17 ainsi rédigé " dit que la vente forcée du bien situé à Saint Mandé (94) 70 et 70 bis avenue ... Marie, cadastré section K no 113 lots no 18 et 27 aura lieu à la barre du tribunal de grande instance de Créteil le ... ", le libellé exact à savoir " dit que la vente forcée des biens situés à Saint Mandé (94), à Saint Mandé (94), 70 et 70 bis avenue ... Marie, cadastré section K no 113 lots no 18 et 27 aura lieu à la barre du tribunal de grande instance de Créteil le " ;
AUX MOTIFS QUE " le jugement du 4 mars 2010 est affecté d'une omission purement matérielle en ce qu'il a omis de mentionner dans le dispositif la totalité des biens immobiliers concernés par la procédure de saisie immobilière visée dans le commandement de payer délivré le 8 juin 2009 et rappelés en page 2 du jugement dans l'exposé des motifs " ;
ALORS QUE dans le cadre d'une requête en rectification d'erreur matérielle, le juge s'il peut purger la décision d'une erreur qui peut être rétablie sans équivoque à partir des énonciations de la décision rendue ou du dossier, ne peut en aucune façon modifier les droits ou obligations des parties telles qu'elles résultent de la décision primitive ; qu'en l'espèce le jugement du 4 mars 2010 se bornait à ordonner la vente forcée du bien situé 70 et à Saint Mandé (94) ; qu'en rectifiant le dispositif pour que la vente porte non seulement sur le bien situé 70 et 70 bis avenue Sainte ..., mais également sur celui situé au no 83 de la même avenue, le juge du fond a modifié les droits et obligations des parties telles qu'elles résultaient du dispositif de la décision originaire ; que ce faisant le juge de l'exécution a excédé ses pouvoirs et violé les articles 462 et 481 du Code de procédure civile.