Jurisprudence : CA Dijon, 14-01-2016, n° 14/00343, Infirmation



RV / JA
Nelly Z
C/
RÉGIE OPÉRA DE DIJON
Association LA CAMERATA ORCHESTRE DIJON BOURGOGNE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 14 JANVIER 2016

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N° 14/00343
Décision déférée à la Cour AU FOND du 04 AVRIL 2014, rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE DIJON
RG 1ère instance 12/00832

APPELANTE
Nelly Z

MONTCEAU-LES-MINES
représentée par Maître Michel DEFOSSE, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE
RÉGIE OPÉRA DE DIJON

DIJON
représentée par Maître Yann BOISADAM de la SCP JOSEPH AGUERA ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON
Association LA CAMERATA ORCHESTRE DIJON BOURGOGNE
2 rue de l'Hôpital
21000 DIJON
représentée par Maître L oïc DUCHANOY dela SCP BERTHAT-SCHIHIN-DUCHANOY-HERITIER, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2015 en audience publique devant la Cour composée de
Roland VIGNES, Président de chambre, Président,
Gérard LAUNOY, Conseiller,
Marie-Aleth TRAPET, Conseiller,
qui en ont délibéré,
GREFFIER LORS DES DÉBATS Emilie COMTET,
ARRÊT rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Roland VIGNES, Président de chambre, et par Emilie COMTET, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
Mme Z Z a été embauchée en qualité de violoniste, le 19 novembre 1994, par la société Filippi, concessionnaire du Grand Théâtre, sans qu'aucun contrat de travail écrit n'ait été établi. Son contrat a ensuite été transféré à la régie du Grand théâtre de Dijon, avec effet au 1er septembre 2002, à la suite de la décision de la ville de Dijon de reprendre l'exploitation du Grand théâtre. La convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles s'applique aux relations des parties.
Mme Z a été désignée déléguée syndicale, puis représentante syndicale au comité d'entreprise à compter du 10 juillet 2006.
Au début de l'année 2009, la régie Opéra de Dijon a présenté au comité d'entreprise un projet de transfert de l'orchestre à l'association La Camerata de Bourgogne.
Une procédure a été initiée par le comité entreprise devant le tribunal de grande instance de Dijon aux fins d'annulation des délibérations.
Les salariés ont été informés du transfert de plein droit des contrats de travail à l'association La Camerata avec effet au 8 avril 2009.
Mme Z étant salarié protégée, une demande d'autorisation de transfert du contrat de travail a été adressée le 15 avril 2009 à l'inspection du travail et, dans l'attente de la décision, l'Opéra de Dijon et La Camerata ont signé plusieurs conventions tripartites avec Mme Z, aux termes desquelles celle-ci a été ponctuellement mise à la disposition de La Camerata afin d'apporter son concours temporaire dans le cadre de plusieurs représentations, les parties ayant expressément convenu que l'Opéra de Dijon demeurait son employeur.
La demande d'autorisation de transfert du contrat de travail de Mme Z a abouti à une décision implicite de rejet, l'administration précisant, sur demande de motivation, s'être fondée sur l'absence d'un contrat de travail en cours entre l'intéressée et l'Opéra de Dijon au moment de la demande d'autorisation de transfert. Sur recours hiérarchique, le ministre du travail a, le 3 décembre 2009, confirmé la décision de rejet de l'inspection du travail.
À la suite de cette décision, cinq des neuf salariés protégés de l'Opéra de Dijon ont démissionné de leur mandat et de leur poste afin d'intégrer immédiatement La Camerata et d'y poursuivre leur activité musicale.
Par courrier du 21 décembre 2009, le directeur de l'Opéra de Dijon a alors indiqué à Mme Z qu'elle n'était plus contractuellement liée à l'Opéra de Dijon et l'a invitée à s'adresser à La Camerata;
Le 1er février 2010, Mme Z a sollicité du directeur général de La Camerata la poursuite de son activité de violoniste au sein de cette entité.
Mme Z a par la suite fait constater par huissier de justice qu'elle ne faisait pas partie des musiciens participant aux productions de La Camerata et se voyait refuser l'accès aux répétitions, ainsi qu'aux locaux de La Camerata.
L'Opéra de Dijon ayant formé un recours contentieux en annulation de la décision implicite de rejet de l'inspection du travail et de la décision du ministre du travail du 3 décembre 2009, a, dans l'attente de la décision, proposé à Mme Z un poste d'ouvreuse spécialement créé pour elle, l'intéressée ayant toutefois refusé cette proposition.
Par jugement du 1er décembre 2011, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la requête en annulation formée par l'Opéra de Dijon au motif que l'administration était tenue de rejeter la demande de transfert, compte tenu du statut d'intermittente du spectacle de Mme Z et de l'absence de tout contrat de travail en cours à la date de la demande d'autorisation de transfert.
Dans le cadre du recours contentieux concernant une autre salariée, il a été considéré par la juridiction administrative que l'orchestre de l'Opéra de Dijon devait être considéré comme une entité économique autonome qui avait été transférée à La Camerata.
Mme Z a, le 14 septembre 2012, saisi le conseil de prud'hommes de Dijon d'une demande de requalification de la relation de travail avec l'Opéra de Dijon en contrat à durée indéterminée de droit commun à temps complet et de condamnation sous astreinte de l'Opéra de Dijon à régulariser sa situation envers les organismes sociaux et à lui payer la somme de 151'284,87 euros à titre de rappel de salaire, outre congés payés afférents. Subsidiairement elle a sollicité la requalification de la relation de travail en contrat à temps partiel.
Mme Z a également demandé à la juridiction prud'homale de constater que l'Opéra de Dijon a manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail en ne lui fournissant plus de travail depuis 2009.
Elle a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail et la condamnation de l'Opéra de Dijon à lui payer
- 7 264,34 euros à titre d'indemnité de préavis et 726,43 euros pour les congés payés afférents,
- 36'321,77 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 20'000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
- 65'000 euros à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice occasionné par la rupture de la relation de travail,
- 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 4 avril 2014, le conseil de prud'hommes, statuant en formation de départage, a jugé que Mme Z était liée à l'Opéra de Dijon par une succession de contrats à durée déterminée distincts conclus conformément à l'usage en vigueur pour chaque prestation musicale à laquelle elle participait, sous forme d'un tableau de service signé entre l'employeur et la salariée, et donnant lieu à une rémunération au cachet pour chaque participation. Il a également considéré que l'Opéra de Dijon n'avait aucune obligation de continuer à proposer des services à Mme Z suite au transfert de l'activité d'orchestre à l'association La Camerata de Bourgogne.
En conséquence, Mme Z a été déboutée de sa demande de requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminé à temps complet, subsidiairement à temps partiel, ainsi que de sa demande de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur.
Elle a également été déboutée de l'ensemble de ses demandes en paiement de rappels de salaire, d'indemnité de rupture et de dommages-intérêts, ainsi qu'en paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles.

Mme Z a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par conclusions contradictoirement échangées, visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience, Mme Z demande à la cour d'infirmer le jugement et de
* requalifier le contrat de travail liant les parties en un contrat à durée indéterminée de droit commun, à temps complet,
* condamner l'Opéra de Dijon
- à régulariser sa situation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 30e jour suivant l'arrêt intervenir, par le paiement du salaire dû, des congés payés afférents, des cotisations auprès des organismes sociaux et des caisses de retraite,
- à lui payer, à titre provisionnel, 305'472,25 euros à titre de rappel de salaire, outre 30'547,22 euros pour les congés payés afférents, subsidiairement 248'137,57 euros et 24'813,75 euros pour les congés payés afférents,
* ordonner en tant que de besoin toute mesure d'instruction utile,
* constater l'exécution déloyale, par l'employeur, de ses obligations et le non-respect de l'obligation de sécurité,
* prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, avec effet à la date de l'arrêt à intervenir,
* dire que cette résiliation doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, * condamner en conséquence l'Opéra de Dijon à payer à Mme Z les sommes de
- 14'968,48 euros à titre d'indemnité de préavis, outre 1 496,85 euros au titre des congés payés afférents, subsidiairement 11'786,20 euros et 1 178,62 euros pour les congés payés afférents,
- 38'824,49 euros nets, subsidiairement 30'560,46 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 20'000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et non-respect du principe de bonne foi,
- 85'000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse,
* condamner l'Opéra de Dijon à lui remettre un bulletin de paie et une attestation pour Pôle emploi rectifiés,
* débouter l'Opéra de Dijon de ses demandes reconventionnelles et le condamner, outre aux dépens, au paiement d'une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions contradictoirement échangées, également visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience, l'Opéra de Dijon demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, de débouter Mme Z de l'ensemble de ses demandes et de la condamner aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte d'huissier du 25 juin 2015, l'Opéra de Dijon a assigné en l'intervention forcée devant la cour d'appel l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne afin de faire juger, à titre principal, que l'association est l'employeur de Mme Z depuis le 8 avril 2009 et d'en tirer toutes conséquences de droit, subsidiairement, de condamner l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne à le relever et garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre pour la période postérieure au 8 avril 2009.
Par conclusions contradictoirement échangées, visées par le greffier et reprises oralement à l'audience, l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne demande à la cour de déclarer irrecevable l'assignation en intervention forcée formée pour la première fois en cause d'appel, la privant ainsi du bénéfice du double degré de juridiction, subsidiairement, de déclarer cet appel en garantie mal fondé aux motifs, d'une part, que Mme Z ne revendique pas son transfert au sein de l'association, ne forme aucune demande à l'encontre de celle-ci et que l'Opéra de Dijon ne peut lui reprocher la moindre faute de nature à fonder l'appel en garantie, d'autre part qu'aux termes d'un protocole d'accord signé entre La Camerata et l'Opéra de Dijon le 8 avril 1999, suite au transfert de l'orchestre à l'association, il a été expressément stipulé que l'Opéra conservera la charge des réclamations fondées sur sa gestion passée de son personnel.
Elle sollicite donc le débouté de l'Opéra de Dijon de son appel en garantie et sa condamnation au paiement d'une indemnité de 3 000 euros pour ses frais irrépétibles.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux conclusions précitées pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties.

DISCUSSION
Sur la qualification de la relation de travail
Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats et, notamment, des feuilles de paie et des tableaux de service, que Mme Z a été embauchée par la société Filippi à compter du 19 novembre 1994 sans régularisation d'un contrat de travail écrit et qu'il s'est poursuivi avec la régie de l'Opéra de Dijon, ainsi que cela résulte également d'un écrit du 24 octobre 2003 cosigné par Mme ..., directrice générale, et Mme Z, aux termes duquel il a été mentionné que le contrat de travail de l'intéressée a été repris par la régie du Grand Théâtre en application de l'article L.122-12 du code du travail, la nature et les termes du contrat de travail n'étant pas modifiés ; que l'ancienneté de l'intéressée a été maintenue et que depuis cette date Mme Z fait partie de l'effectif permanent de l'orchestre et est engagée pour la totalité des services proposés par la direction à l'orchestre pour son poste de musicienne chaque année';
Que Mme Z ne peut revendiquer le bénéfice d'un contrat de travail intermittent lors de son embauche en raison de l'abrogation du travail intermittent par la loi quinquennale de 1993, avant le rétablissement d'un nouveau régime du travail intermittent par la loi du 19 janvier 2000 ;
Que nonobstant l'usage invoqué par l'Opéra de Dijon en matière d'activités de spectacle et d'action culturelle, en l'absence d'écrit la relation de travail ayant existé entre, successivement, Mme Z et la société Filippi, puis la régie de l'Opéra de Dijon, doit être requalifiée en un contrat de travail à durée indéterminée présumé à temps plein ;
Attendu qu'en l'absence d'un écrit constatant l'existence d'un contrat de travail à'temps'partiel, faisant'présumer'que ce dernier a été conclu pour un horaire à'temps'complet, il incombe à l'employeur qui conteste cette'présomption d'apporter la preuve qu'il s'agissait bien d'un contrat à'temps'partiel';
Attendu, en l'espèce, qu'il résulte tant des bulletins de paie mentionnant quelques heures ou journées de travail par mois au cours de l'année 2009, que des tableaux de service produits pour la période de janvier 2005 à juin 2008, que Mme Z n'exerçait pas son activité de violoniste au sein de l'orchestre à temps plein, mais qu'elle était engagée dans le cadre de services ou représentations pour un temps fixé à l'avance et qu'elle connaissait, avant le début de la saison, la programmation des spectacles auxquels elle participait et le nombre de services requérant sa présence pour chaque production';
Que la preuve est rapportée qu'elle n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler, au regard des plannings détaillés établis mensuellement par son employeur, et que, contrairement à ce qu'elle soutient, elle n'était pas contrainte de se tenir à la disposition permanente de celui-ci, mais pouvait prévoir d'autres engagements dans le cadre de productions musicales distinctes ;
Que dès lors, contrairement à l'appréciation des premiers juges, la relation de travail de Mme Z doit être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, à compter du 19 novembre 1994, date de son embauche par la société Filippi, puis du 1er septembre 2002, date de son transfert à la régie de l'Opéra de Dijon ;
Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail
Attendu qu'au cours du second semestre 2009, des accords et conventions de mise à disposition de Mme Z à La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne ont été signés entre l'Opéra de Dijon et La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne, lesdits accords stipulant que l'Opéra de Dijon reste l'employeur de l'intéressée qui conserve son contrat de travail et continue d'être rémunérée par l'Opéra de Dijon ;
Attendu que Mme Z fait valoir qu'elle a été privée de facto de travail et de toute rémunération à compter du 20 décembre 2009 ;
Que le directeur de l'Opéra de Dijon a, dans un premier temps, le 21 décembre 2009, fait connaître à Mme Z qu'il considérait n'avoir plus d'obligations à son égard et l'a invitée à s'adresser directement à La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne pour étudier les possibilités d'emploi sur ses futurs spectacles ;
Qu'il a reconnu dans un courrier du 18 mars 2010 se trouver dans l'impossibilité de proposer à la salariée un emploi similaire dans un autre service de l'entreprise et lui a proposé la création d'un poste d'ouvreuse pour lequel elle serait engagée par contrat à durée indéterminée intermittent ; que Mme Z a refusé cette proposition ;
Qu'il a ensuite admis, dans différents courriers et écrits (24 janvier, 26 avril et 23 mai 2011) que Mme Z faisait toujours partie de l'effectif permanent de l'Opéra de Dijon ;
Que faisant une interprétation des décisions rendues par l'administration et le tribunal administratif de Dijon, la direction de l'Opéra de Dijon a, en définitive, dans une lettre du 27 septembre 2013, fait connaître à Mme Z qu'elle n'avait pas d'autorisation à solliciter dans le cadre du transfert partiel d'activité à La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne et invité l'intéressée à s'adresser à cette association, considérant par là-même n'avoir plus la qualité d'employeur ;
Attendu toutefois que c'est en vain que la régie l'Opéra de Dijon invoque dans cette même lettre et à nouveau dans ses écritures devant la cour le respect de l'autorité de la chose jugée par la juridiction administrative et le respect du principe de la séparation des pouvoirs, alors, s'agissant d'un contrat de travail de droit privé, qu'il n'appartient qu'au juge judiciaire de trancher les questions relatives à la qualification, l'existence et la rupture du contrat de travail et que force est de constater que la régie l'Opéra de Dijon, qui, après le 8 avril 2009, a continué de délivrer des bulletins de paie à la salariée, signé des conventions de mise à disposition et cherché à la reclasser au sein de l'entreprise, est demeurée l'employeur de Mme Z ;
Attendu qu'en s'abstenant de fournir du travail à la salariée, la régie de l'Opéra de Dijon a manqué à ses obligations contractuelles, justifiant que soit prononcée à ses torts la résiliation judiciaire du contrat de travail dont la date doit être fixée au jour du prononcé du présent arrêt ;
Que cette résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Sur le rappel de salaire
Attendu que Mme Z est fondée à prétendre au versement, jusqu'à la date de résiliation judiciaire de son contrat de travail, d'un arriéré de salaires ;
Qu'au vu des attestations ASSEDIC et bulletins de paie produits, le total de la rémunération brute perçue au cours de l'année 2009, dernière année complète de référence, s'élève à 20'556,60 euros, soit une moyenne mensuelle de 1 713,05 euros ;
Que conformément aux prévisions de la convention collective (article X.2), s'applique une progression du salaire de base de 1,5 % tous les 36 mois à la date anniversaire de l'entrée du salarié dans l'entreprise, portant le salaire mensuel moyen brut à 1 738,75 euros à compter du 19 novembre 2012 et à 1 764,83 euros à compter du 19 novembre 2015 ;
Qu'ainsi il est dû à l'appelante
- pour la période du 1er janvier 2010 au 18 novembre 2012, 59 286,53 euros bruts,
- pour la période du 19 novembre 2012 au 18 novembre 2015, 62 595 euros bruts,
- pour la période du 19 novembre 2015 au jour de la résiliation judiciaire du contrat de travail,
3 823,79 euros bruts,
soit au total 125 705,32 euros bruts, outre 12 570,53 euros bruts pour les congés payés afférents';
Sur l'indemnité de préavis et l'indemnité de licenciement
Attendu que Mme Z, âgée de 41 ans à la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail, est en droit de prétendre à une indemnité compensatrice de préavis de quatre mois, conformément à l'article XV.1.4 de la convention collective, soit 1 764,83 x 4 = 7 059,32 euros bruts, outre 705,93 euros bruts au titre des congés payés afférents';
Attendu qu'à partir de deux ans de présence dans le cas d'un licenciement individuel quel qu'en soit le motif, l'indemnité de licenciement est égale à 1 / 2 mois de salaire par année de présence, toute année incomplète étant prise en compte au prorata, calculée par référence au salaire moyen des 12 derniers mois d'activité dans l'entreprise (article V. 11)', soit
(17 387,50 + 3 529,66) / 12 / 2 x 20 + (871,54 x 9/12) = 18 084,45 euros';
Attendu que la remise des documents légaux rectifiés doit être ordonnée, sans qu'il y ait lieu à fixation d'une astreinte ;
Sur les dommages-intérêts
Attendu qu'eu égard aux éléments du dossier, notamment l'ancienneté de Mme Z, les circonstances de la rupture, le montant de sa rémunération, son âge (41 ans au moment du licenciement), et sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, une somme de 22'000 euros lui sera allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que les tergiversations et l'absence de prise de position claire de l'employeur à l'égard du maintien ou du transfert de l'emploi de Mme Z, le défaut de rémunération à partir de l'année 2010 et de fourniture d'un travail permettant à l'intéressée d'exercer son art, ainsi que la proposition de reclassement dans un poste d'ouvreuse, sans lien avec son activité de musicienne, qui ont un retentissement sur l'état de santé de la salariée, caractérisent une exécution déloyale du contrat de travail qui lui a occasionné un préjudice moral distinct de celui réparé par les dommages-intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, justifiant que lui soit allouée une somme supplémentaire de 8 000 euros à titre de réparation ;
Sur l'appel en garantie
Attendu qu'en première instance, tout comme, d'ailleurs, devant la cour, Madame Z n'a formulé de prétentions qu'à l'encontre de l'Opéra de Dijon, lequel a conclu à son débouté rappelant que l'intéressée elle-même avait refusé son transfert à l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne ;
Que les premiers juges ont retenu l'existence d'une succession de contrats à durée déterminée par prestations musicales et énoncé que l'Opéra de Dijon n'avait aucune obligation de continuer à proposer des services à Madame Z suite au transfert de l'activité d'orchestre à La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne ;
Que cette appréciation caractérise la révélation d'une circonstance de droit née du jugement, modifiant les données juridiques du procès et constituant une évolution du litige au sens de l'article 555 du code de procédure civile ;
Qu'il s'ensuit que l'appel en garantie formé par l'Opéra de Dijon à l'encontre de l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne est recevable ;
Attendu qu'un protocole d'accord a été signé entre la régie de l'Opéra de Dijon et l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne relatif à la prise en charge du passif inhérent à la gestion du personnel de l'orchestre de la régie de l'Opéra de Dijon pour la période antérieure à son transfert à l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne, stipulant que jusqu'au 31 décembre 2014 la régie de l'Opéra de Dijon conservera à sa charge les réclamations fondées sur sa gestion passée du personnel de l'orchestre';
Que Mme Z ayant engagé son action prud'homale avant cette date butoir, et la régie de l'Opéra de Dijon ne prouvant aucune faute commise par l'association, la régie doit être déboutée de son appel en garantie';
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Attendu que la régie Opéra de Dijon qui succombe sera condamnée aux dépens et ne peut prétendre au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
'
Qu'elle sera condamnée à payer à Mme Z la somme de 2 000 euros sur ce même fondement;
Attendu que la régie Opéra de Dijon sera condamnée à payer à l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau,
Requalifie le contrat de travail liant Mme Z Z à la régie Opéra de Dijon en un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 19 novembre 1994, date de son embauche par la société Philippe, puis du 1er septembre 2002, date de son transfert à l'Opéra de Dijon,
Prononce la résiliation du contrat de travail à la date du présent arrêt,
Condamne la régie Opéra de Dijon à payer à Mme Z Z les sommes de
- 125'075,32 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2010 au jour de la résiliation judiciaire du contrat de travail,
- 12'570,53 euros bruts pour les congés payés afférents,
- 7 059,32 euros bruts à titre d'indemnité de préavis,
- 705,93 euros bruts pour les congés payés afférents,
- 18'084,45 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 22'000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, - 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Déclare recevable l'appel en garantie formé par l'Opéra de Dijon à l'encontre de l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne,
Au fond, l'en déboute,
Condamne la régie Opéra de Dijon à payer à l'association La Camerata Orchestre Dijon Bourgogne 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la régie Opéra de Dijon aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffier Le président
Emilie COMTET ... ...
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