Jurisprudence : Cass. soc., 01-12-2015, n° 14-18.454, F-D, Rejet

Cass. soc., 01-12-2015, n° 14-18.454, F-D, Rejet

A6897NY4

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2015:SO01844

Identifiant Legifrance : JURITEXT000031578665

Référence

Cass. soc., 01-12-2015, n° 14-18.454, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/27708258-cass-soc-01122015-n-1418454-fd-rejet
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SOC. LM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 1er décembre 2015
Rejet
M. HUGLO, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt n 1844 F D Pourvoi n Y 14-18.454 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par Mme Z Z, domiciliée Bordeaux,
contre l'arrêt rendu le 1 avril 2014 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à la société Cabinet Redon et associés, société par actions simplifiée, dont le siège est Mérignac cedex,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 13 octobre 2015, où étaient présents M. Huglo, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Farthouat-Danon, conseiller rapporteur, Mme Reygner, conseiller, M. Petitprez, avocat général, Mme Hotte, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Farthouat-Danon, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme Z, de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de la société Cabinet Redon et associés, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1 avril 2014), que Mme Z a été engagée le 21 octobre 2008 en qualité de collaboratrice comptable par la société Cabinet Beylard, devenue société Cabinet Redon et associés ; qu'elle a obtenu son diplôme et a accédé au poste d'expert-comptable en décembre 2009, après inscription au tableau de l'ordre ; qu'elle a été licenciée le 27 juin 2010 pour cause réelle et sérieuse ; que, contestant le bien-fondé de son licenciement, et soutenant avoir été l'objet de harcèlement moral et de discrimination, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, alors, selon le moyen
1 / que lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en déboutant la salariée de sa demande de dommages-intérêts fondée sur une discrimination salariale, en s'intéressant uniquement à la question de la classification de Mme Z, sans rechercher, comme il était soutenu, si elle n'avait pas subi une discrimination quant à sa rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
2 / que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; qu' en jugeant que le fait que Mme Z ait menacé son employeur de faire appel à un avocat pour obtenir cette classification puis ce rappel de salaire est insuffisant pour caractériser une quelconque discrimination seulement révélateur de l'esprit revendicatif et de chicane de cette jeune salariée, la cour d'appel, qui a statué par des motifs manifestement incompatibles avec les exigences d'impartialité, a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu d'abord qu'en retenant que la salariée, qui avait accédé au poste d'expert-comptable en décembre 2009, avait bénéficié dès mai 2010 d'un rappel de salaire prenant en compte sa nouvelle classification, et la mettant à égalité avec une autre expert-comptable, dont l'ancienneté était plus importante que la sienne, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise ;
Attendu ensuite que l'impartialité personnelle des juges est présumée et que les expressions contenues dans les motifs critiqués par la deuxième branche peuvent recevoir une acception dénuée de caractère péjoratif ; qu'ils ne sont pas manifestement incompatibles avec l'exigence d'impartialité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts au titre du préjudice résultant du harcèlement moral, alors, selon le moyen
1 / que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; que la cour d'appel, en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2 / que le salarié n'a pas à rapporter la preuve du harcèlement dont il prétend être victime mais seulement d'éléments de nature à faire présumer l'existence de celui-ci ; que l'arrêt constate que la situation a conduit la salariée à une impasse tant sur le plan professionnel que psychique, l'amenant à multiplier les arrêts de travail pour syndrome anxio-dépressif ; que ces éléments étaient suffisants pour faire présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en retenant le contraire la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3 / qu'en matière de harcèlement moral, le juge doit examiner l'ensemble des éléments dont fait état le salarié et qui peuvent laisser présumer un harcèlement, l'employeur devant prouver, quant à lui, que ceux-ci seraient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en refusant de prendre en considération l'ensemble des faits et éléments répétés établis par le salarié, portant atteinte aux droits et à la dignité du salarié, à sa santé mentale et à son avenir professionnel, invoqués dans les conclusions d'appel, pour dire que "les faits déplorés par Mme Z sont étrangers à tout acte de harcèlement", la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le point de savoir si les faits établis n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a procédé à l'examen dans leur ensemble des faits invoqués par la salariée comme étant susceptibles de constituer un harcèlement moral, a constaté qu'ils étaient, pour certains, non établis matériellement, et que, pour les autres, il ressortait des éléments fournis par l'employeur, qu'elle a analysés, la preuve que ses décisions étaient justifiées par des éléments étrangers à tout harcèlement ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ; qu'en retenant que le grief de contestation de la salariée aux choix stratégiques de l'entreprise était suffisamment grave pour justifier son licenciement, alors que les propos et critiques formulés par Mme Z quant au choix stratégique et à l'organisation de l'entreprise ne comportaient aucun termes injurieux, diffamatoires ou excessifs et ne caractérisaient pas un abus de la liberté d'expression de la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1121-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la salariée avait, dans de nombreux courriers et courriels, dénigré son supérieur hiérarchique, contestant son autorité et sa compétence et refusant tout lien hiérarchique avec lui, en prenant à parti les autres associés, qu'elle usait d'un ton menaçant, multipliant les courriers recommandés, qu'elle dénigrait également ses collègues, critiquait violemment l'organisation des agences et que, malgré les réponses précises et circonstanciées apportées par les associés, elle avait persisté dans cette attitude vindicative et polémique, la cour d'appel
a caractérisé un abus de la liberté d'expression ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme Z
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de dommages et intérêts de Madame Z pour exécution déloyale de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE Madame Z reproche à son employeur une discrimination salariale. Or, comme l'a justement retenu le conseil et que reconnaît Madame Z dans ses écritures, elle a accédé au poste d'expert-comptable seulement en décembre 2009, après inscription au tableau de l'Ordre d'expert-comptable. Or, son bulletin de salaire de janvier 2010 fait état de sa nouvelle classification (pièces 38, 39 de l'employeur). Et elle a bénéficié dès mai 2010 d'un rappel de salaire, prenant en compte sa nouvelle classification, et la mettant à égalité avec Madame ..., expert-comptable, dont l'ancienneté était plus importante que la sienne. Le fait que Madame Z ait jugé nécessaire de "menacer son employeur de faire appel à un avocat, dès décembre 2009 puis écrit de très nombreux courriers à son employeur de février 2010 à mai 210 pour obtenir cette classification puis ce rappel de salaire" page 12 de ses conclusions, est insuffisant pour caractériser une quelconque discrimination seulement révélateur de l'esprit revendicatif et de chicane de cette jeune salariée ;
ALORS, PREMIEREMENT, QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en déboutant la salariée de sa demande de dommages et intérêts fondée sur une discrimination salariale, en s'intéressant uniquement à la question de la classification de Madame Z sans rechercher, comme il était soutenu (Conclusions page 9 § 5 et 6 et page 10 § 5 et 9), si elle n'avait pas subi une discrimination quant à sa rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du Code du travail ;
ALORS, DEUXIÈMEMENT, QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; qu'en jugeant que le fait que Madame Z ait menacé son employeur de faire appel à un avocat pour obtenir cette classification puis ce rappel de salaire est insuffisant pour caractériser une quelconque discrimination seulement révélateur de l'esprit revendicatif et de chicane de cette jeune salariée, la cour d'appel, qui a statué par des motifs manifestement incompatibles avec les exigences d'impartialité, a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de dommages et intérêts de Madame Z au titre du préjudice résultant du harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE Madame Z, au soutien de son appel indique " n'avoir jamais accusé Monsieur ... d'agissements d'harcèlement moral à son encontre " page 23 de ses conclusions " ce sont les méthodes de gestion et d'organisation du travail au sein de l'agence de Martignas qui sont constitutives du harcèlement dont elle a été victime ", elle invoque que l'effectif de l'agence de Martignas a diminué. A son embauche il y avait 4,5 équivalents temps plein, un an après ils n'étaient plus que trois temps plein. En février 2010 elle reprochait à son employeur de ne pas avoir d'ordinateur portable personnel alors que lui-même et Madame ..., expert comptable en possédaient chacun un ; qu'elle ne disposait pas d'un bureau personnel à l'agence de Martignas, et que le chauffage du bureau qu'elle partageait avec sa collègue était en panne ce qui l'obligeait à utiliser un chauffage d'appoint, de s'être aperçue que les dossiers les plus intéressants étaient redirigés sur Mérignac, ne demeurant à l'agence de Martignas que les dossiers litigieux qui généraient peu d'honoraires. Le 17 février 2010 elle alertait sa hiérarchie de cette situation, elle faisait valoir que son poste d'expert comptable ne serait plus justifié sur Martignas si le chiffre d'affaires de cette agence continuait à chuter, au profit de l'agence de Mérignac. Elle a obtenu son diplôme d'expert comptable en décembre 2009, si sa rémunération et sa classification ont été revalorisées, elle estime qu'elle n'a jamais été positionnée en tant qu'expert comptable vis à vis des clients ni de ses collègues elle en veut pour preuve l'absence de cartes de visite et l'absence de fiches de postes (pour chacun des trois personnels de l'agence de Martignas) mentionnant son statut. Elle indique avoir bénéficié lors de son embauche d'une classification bien plus importante que celle que se sont vue attribuer les personnes qui lui ont succédé, elle estime que cela caractérise des actes de harcèlement moral. Elle a fait l'objet d'arrêts médicaux successifs pour syndrome anxio-dépressif ce qui conduit son médecin traitant à l'adresser au médecin du travail. Après avoir fait l'objet d'un avis d'aptitude temporaire le 10 mai 2010, Madame Z proposait à son employeur une rupture conventionnelle le 27 mai 2010 qu'elle refusait de signer le 7 juin 2010 (pièces 16, 17, 18, 19 de la salariée). Postérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement, le médecin du travail déclarait le 13 août 2010 Madame Z inapte à son poste de travail (pièce 25 de la salariée). L'employeur produit des attestations de salariés qui démentent que les conditions matérielles n'aient pas été satisfaisantes à Martignas (pièces 40, 42, 46) plusieurs salariés travaillant en partie sur Mérignac et Martignas, l'agence de Martignas n'a jamais souffert d'un manque d'effectif. Il a été proposé à Madame Z un bureau où travailler seule, ce qu'elle a refusé, à la suite du licenciement de Madame Z Z Z, le gérant du cabinet d'expertise comptable SARL Cabinet Beylard, devenue SAS Cabinet Redon et associés, a repris ses dossiers. L'employeur fait valoir qu'il a pris en compte, dès leur origine les réclamations de Madame Z, ainsi la nouvelle qualification d'expert comptable de Madame Z a été prise en compte dans son bulletin de salaire dès janvier 2010, elle a été reçue, dès le 15 février 2010, au cours de deux déjeuners successifs par Monsieur ..., un des associés, auquel elle avait adressé plusieurs rapports et synthèse dans lesquels elle critiquait ouvertement et précisément l'organisation et le fonctionnement des agences de Mérignac et de Martignas du cabinet comptable, ainsi que la gestion du cabinet par le gérant du cabinet, Monsieur .... Au cours de ces déjeuners il lui a non seulement été expliqué que son emploi n'était pas menacé à Martignas mais lors du deuxième déjeuner il a même été proposé à Madame Z d'être nommée responsable d'une agence à Cestas que le cabinet Beylard envisageait de créer (pièce 48 de l'employeur) ; ce que ne dément pas la salariée dans ses écritures. Ce qui n'a pas empêché Madame Z de transmettre à nouveau des courriers vilipendant ce qu'elle estimait être des dysfonctionnements au sein des agences de Mérignac et de Martignas et de déplorer une insuffisante reconnaissance de son statut d'expert comptable au sein de l'agence. Le 11 mai 2010, elle était à nouveau reçue, à sa demande, par deux autres associés, le gérant Monsieur ... et madame ..., qui lui proposaient par courrier recommandé daté du 12 mai 2010 " pour faire suite à votre courrier du 6 mai 2010 en vue de clarifier votre positionnement et vos missions... de l'intégrer sur des missions de commissariat aux comptes et d'expertise légale auprès des comités d'entreprise, missions réalisées par GCl Audit et Conseil. Cette proposition vous offrira de mettre en valeur vos compétences... " (pièce 4 de l'employeur). Par courrier recommandé du 19 mai 2010 Madame Z répondait " votre courrier ne rend nul compte de notre entretien... ni la collaboration sur des missions de Comité d'entreprise ni relevant des missions de commissariat aux comptes ne faisaient partie de mes objectifs de carrière...l'orientation de ce courrier ne règle en rien les problèmes d'organisation et de gestion de l'agence... et elle reprenait les mêmes leitmotivs, (ticket de restaurants, dégradations des conditions de travail, reconnaissance de son statut d'expert comptable, positionnement par rapport aux autres salariés de l'agence, sachant qu'ils n'étaient que trois salariés présents à Martignac. Le 20 mai 2010 par un email de trois pages adressé à Monsieur ... ... (patron du cabinet) avec copie à Thierry Freteaud (associé du cabinet), Madame Z reprochait à Monsieur ... d'avoir traité le dossier (M. ...), durant son absence pour congés maladie, elle mettait directement en cause la compétence et la diligence de son employeur pour traiter les dossiers des clients, elle écrivait
" concernant l'impôt sur le revenu de monsieur .... Ce n'est pas la version de Monsieur ... mais peut être souhaitez vous que nous l'appelions en présence de monsieur ... et de Monsieur ... (Associés du cabinet) pour avoir la bonne version des faits. Pour information c'est moi qui ai préparé l'impôt sur le revenu de l'année 2008. C'est un client qui appréciait justement de travailler avec moi pour ma réactivité. C'est un client qui appréciait que lorsqu'il nous demande un travail ce dernier soit réalisé dans un délai raisonnable. Il est certain que Monsieur ... ne tenait pas particulièrement à ce que ce soit vous qui preniez en charge son impôt ". Elle reprochait en outre à son supérieur hiérarchique de ne pas lui avoir rendu compte de ce qu'il avait fait au retour de son arrêt maladie (pièce 6 de l'employeur). L'employeur par email du 21 mai 2010 répondait à Madame Z en lui donnant toutes les explications et en s'excusant presque d'avoir répondu au client durant l'absence de la salariée en congé maladie (pièce 7 de l'employeur).
Il ressort de l'ensemble de ces éléments ainsi que des attestations de la quasi totalité des salariés (présents ou anciens) de l'entreprise que les faits décrits par Madame Z ne reflètent en rien la réalité des relations de travail existants au sein de l'agence, qui au contraire l'employeur aà plusieurs reprises proposés des solutions à Madame Z afin de lui permettre d'évoluer au sein de l'agence, qui les a toutes refusées, s'entêtant dans une position intenable, en tant que salariée refusant d'être soumise au pouvoir hiérarchique, qui l'a conduite à une impasse tant sur le plan professionnel que physique l'amenant à multiplier les arrêts de travail pour syndrome anxio-dépressif. C'est elle qui dès l'origine a usé d'un ton menaçant, de méthodes harcelantes, en multipliant les courriers recommandés et en exerçant des pressions à l'égard de son employeur, qui, au contraire, rapporte la preuve d'avoir pris au sérieux toutes les demandes de la salariée et tenté, en vain, d'y faire droit. Aucune pression d'aucune sorte n'est matériellement établie, en l'espèce, à l'encontre de Madame Z. Dès lors il ressort des éléments fournis par l'employeur la preuve que les faits déplorés par Madame Z sont étrangers à tout acte de harcèlement. Curieusement Madame Z indique dans ses conclusions avoir fait le choix de ne pas révéler à son employeur qu'elle était enceinte au moment de son licenciement ni donc d'avoir demandé l'annulation de celui-ci. Dès lors la cour ne trouve pas motifs à réformer la décision attaqué qui a débouté Madame Z de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale de son contrat de travail.
ALORS, PREMIEREMENT QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, s'il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; que la Cour d'appel, en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis, laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail ;
ALORS DEUXIÈMEMENT QUE le salarié n'a pas a rapporter la preuve du harcèlement dont il prétend être victime mais seulement d'éléments de nature à faire présumer l'existence de celui ci ; que l'arrêt constate que la situation a conduite Madame Z à une impasse tant sur le plan professionnel que psychique l'amenant à multiplier les arrêts de travail pour syndrome anxio-dépressif ; que ces éléments étaient suffisants pour faire présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en retenant le contraire la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail.
ALORS TROISIÈMEMENT QU'en matière de harcèlement moral, le juge doit examiner l'ensemble des éléments dont fait état le salarié et qui peuvent laisser présumer un harcèlement, l'employeur devant prouver, quant à lui, que ceux-ci seraient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en refusant de prendre en considération l'ensemble des faits et éléments répétés établis par le salarié, portant atteinte aux droits et à la dignité du salarié, à sa santé mentale et à son avenir professionnel, invoqués par l'exposante dans ses conclusions d'appel (p. 18 et 19), pour dire que "les faits déplorés par Madame Z sont étrangers à tout acte de harcèlement", la Cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le point de savoir si les faits établis n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L. 1152-3 et
L. 1154-1 du Code du travail ;
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Madame Z reposait bien sur une cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, dont les motifs énoncés fixent les limites du litige, a été intégralement reprise dans la décision attaquée, à laquelle il convient de se reporter. Elle porte sur les griefs suivants l'opposition systématique de la salariée aux choix stratégiques de l'entreprise, refus de tout lien hiérarchique à l'égard de son chef d'agence
M. ..., dénigrement de l'organisation de l'entreprise, le fonctionnement de l'entreprise, un comportement agressif à l'égard des autres salariés de l'entreprise, création d'un site internet concurrentiel à l'entreprise, dans laquelle elle est salariée dont la présence a été constatée par un huissier sur l'ordinateur de l'entreprise. Selon l'article L. 1235-1 du Code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables. Madame Z à l'appui de son appel fait valoir que l'employeur n'apporte aucun élément de preuve à l'appui des griefs formés contre elle. L'opposition systématique de la salariée aux choix stratégiques de l'entreprise refus de tout lien hiérarchique à l'égard du gérant de l'agence Beylard M. .... Au contraire de ce que soutient Madame Z, la cour observe que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré par de justes motifs que la cour adopte que ce premier grief était établi par la production par l'employeur des nombreux courriers recommandés, courriels, écrits les 15, 16, 17 février, 1, 30 avril, 12 mai, 20 mai, juin 2010, dans lesquels Madame Z, jeune salariée ayant moins de deux ans d'ancienneté, dans lesquels elle dénigre son supérieur hiérarchique Monsieur ... conteste son autorité, et sa compétence et refusant tout lien hiérarchique avec lui, demande sans cesse l'aval des autres associés, elle dénigre également ses collègues en notant dans ses courriers " baisse du niveau de compétence et du niveau d'expérience des nouveaux collaborateurs " critique de manière répétée l'organisation de l'agence de Martignas, qui comprend seulement trois personnes, demandant que des fiches de poste pour chacun d'entre eux soient établies, afin de pouvoir " se positionner " à l'égard des deux autres salariés suite à l'obtention de son diplôme d'expert comptable, contestant violemment que l'agence de Mérignac bénéficie de plus de moyens et traite plus de dossiers que celle de Martignas où elle travaille, tout en refusant toutes les propositions faites par son employeur pour valoriser justement le titre d'expert comptable qu'elle a obtenu en décembre 2009, (création d'une nouvelle agence GCL dont elle serait responsable, missions de commissaire aux comptes), en dépit des réponses précises et circonstanciées apportées à de multiples reprises entre février 2010 et juillet 2010 par les différents associés du cabinet GCL qu'elle a sollicité, Madame Z a persisté dans cette attitude vindicative et polémique tant à l'égard de son chef hiérarchique direct Monsieur ... dont elle critiquait ouvertement la compétence qu'à l'égard des autres associés du cabinet comptable, rendant impossible le maintien de la relation contractuelle (pièces 2, 3, 4, 5, 6, 9, 12, 13, 14 produites par l'employeur). La Cour convient que ce grief est à lui seul suffisamment grave pour justifier le licenciement de Madame Z comme l'a justement retenu la décision attaquée. Et dès lors, confirme la décision attaquée qui a dit que le licenciement de Madame Z reposait bien sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
ALORS QUE sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ; qu'en retenant que le grief de contestation de la salariée aux choix stratégiques de l'entreprise était suffisamment grave pour justifier son licenciement, alors que les propos et critiques formulés par Madame Z quant au choix stratégique et à l'organisation de l'entreprise ne comportaient aucun termes injurieux, diffamatoires ou excessifs et ne caractérisaient pas un abus de la liberté d'expression de la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1121-1 du Code du travail.

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