Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRÊT DU 03 JUILLET 2015
(n°122, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 15/06609
sur defere à l'encontre d'une ordonnance du conseiller de la mise en état du pôle 5 chambre 2 de la Cour d'appel de PARIS rendue le 19 mars 2015 (RG n°12/05915)
DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ
S.A. LEVO AG WOHLEN société de droit suisse, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
Anglikerstrasse 20
5610 WOLHEN
SUISSE
Représentée par Me Jacques ARMENGAUD de la SEP ARMENGAUD - GUERLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque W 07
Assistée de Me Catherine MATEU plaidant pour la SEP ARMENGAUD - GUERLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque W 07
DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ
S.A.S. INVACARE POIRIER prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
La Perree
FONDETTES
Immatriculée au rcs de Tours sous le numéro 479 207 060
Représentée par Me Grégoire DESROUSSEAUX de la SELARL HIRSCH & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque P 434
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 juin 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme
Marie-Christine AIMAR, Présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme Marie-Christine ... a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente
Mme Marie-Annick PRIGENT, Conseillère, désignée par ordonnance de la Première Présidente en remplacement de Mme Sylvie NEROT, Conseillère, empêchée
Mme Anne-Marie BELLOT, Conseillère, désignée par ordonnance de la Première Présidente en remplacement de Mme Véronique RENARD, Conseillère, empêchée
Greffière lors des débats Mme Carole TREJAUT
ARRÊT
Contradictoire
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
Vu l'assignation en contrefaçon du brevet européen EP-B-O 815 822 désignant la France, intitulé " fauteuil roulant élévateur ", et en concurrence déloyale délivrée le 14 avril 2008 par la société Levo AG Wohlen (ci-après Levo) à l'encontre de la société Invacare Poirier Poirier (ci-après Invacare Poirier ,
Vu le jugement rendu contradictoirement le 02 avril 2010 par le tribunal de grande instance de Paris qui a, en substance, débouté la défenderesse de sa demande de nullité des revendications 1 à 3 dudit brevet ainsi qu'en sa demande indemnitaire et débouté la demanderesse de ses actions en contrefaçon et en concurrence déloyale,
Vu l'appel interjeté le 29 mars 2012 par la société Levo AG Wolhen
Vu les dernières conclusions au fond de la société Levo en date des 29 et 30 octobre 2012,
Vu une première procédure d'incident portant sur le caractère tardif de la communication, par l'appelante, de ses pièces, initiée le 28 août 2012 par la société Invacare Poirier intimée, plaidée le 20 décembre 2012 après échange de conclusions, et ayant donné lieu au prononcé d'une ordonnance, par le conseiller de la mise en état, à la date du 10 janvier 2013,
Vu la constitution, le 10 janvier 2013, d'un nouveau conseil pour la société Levo aux lieu et place d'un précédent conseil,
Vu l'avis de fixation des dates de clôture au 19 février 2015 et de plaidoiries au 16 avril 2015 adressé au parties le 22 février 2013,
Vu la communication de deux pièces de procédure (une décision du 31 octobre 2014 de la Cour d'appel de Dussldorf et la traduction en langue française de cette décision) par la société Levo le 09 janvier 2015,
Vu l'ordonnance sur incident du conseiller de la mise en état en date du 19 mars 2015 ayant constaté la péremption de l'instance à la date du 20 décembre 2014 et condamné la société Levo AG Wohlen à verser à la société Invacare Poirier la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance éteinte.
Vu la requête en déféré de cette ordonnance sur le fondement de l'article 916 du code de procédure civile, formée le 31 mars 2015 par la société Levo AG Wohlen complétée par dernières écritures du 2 juin 2015 tendant à la réformation de cette ordonnance et à la condamnation de la société Invacare Poirier au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu la convocation des parties à l'audience du 17 avril 2015 renvoyée contradictoirement au 5 juin 2015,
La société Levo AG fait valoir à cet effet que
- à titre principal, une affaire fixée ne peut être périmée car dans l'avis de fixation et de clôture adressé le 22 février 2013 qui fait référence à l'article 912 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état n'a pas fixé de calendrier de sorte qu'il a estimé que l'affaire était en état et ne nécessitait pas de nouveaux échanges de conclusions,
- en formulant sa demande de péremption d'instance la société intimée vise en réalité à mettre à la charge de l'appelante le calendrier de la Cour et s'en suivrait un déséquilibre entre les parties portant atteinte au droit au procès équitable notamment protégé par l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme,
- dès lors que les parties avaient conclu dans les délais légaux à la date de la fixation de l'affaire, elles n'avaient plus de diligence particulière à faire et le cours de la péremption était suspendu,
- les conclusions régularisées avait pour but de faire état de la décision allemande concernant le même brevet et les mêmes produits argués de contrefaçon, ce qui constitue un élément nouveau et correspondait au libre choix de cette partie de faire valoir un fait juridique à sa cause,
- c'est la fixation de l'affaire qui suspend le délai de péremption et non la clôture ou le fait que l'affaire soit en état,
Subsidiairement, elle soutient que la constitution du 10 janvier 2013 de Maître ... aux lieu et place de la SCP Monin société en liquidation, qui manifestait la volonté de la société Levo de continuer l'instance était de nature à faire progresser l'affaire et a interrompu la péremption et que le point de départ du délai de péremption court si l'on devait considérer la fixation comme inopérante, à compter du 10 janvier 2013, et ajoute que la communication de deux nouvelles pièces le 9 janvier 2015 constituent des diligences interruptives de péremption.
Elle demande l'infirmation de l'ordonnance déférée, le rejet des demandes de la société intimée et sa condamnation à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Invacare Poirier Poirier demande dans ses dernières écritures du 2 juin 2015 de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état en ce qu'elle a constaté la péremption d'instance et de réévaluer à hauteur de la somme de 62.791, 46 euros les frais visés à l'article 700 du code de procédure civile et d'y ajouter la somme de 5.000 euros pour les frais exposés dans le cadre du déféré.
Elle expose à cet effet que
- la simple fixation de l'affaire qui n'est pas un acte émanant d'une des parties ne suffit pas à exonérer les parties de toutes diligences et éviter la péremption,
- il faut vérifier si l'affaire était en état et si des diligences étaient encore possibles,
- il est d'usage de fixer les dates de clôture et de plaidoirie bien avant que les affaires soient en état d'être jugées pour tenir compte des calendriers très chargés des juridictions, pratique qui a le mérite de rendre plus efficace l'exigence de célérité et de rapidité dans la résolution des litiges voulues par le décret dit Magendie,
- en l'espèce l'affaire n'était pas en état d'être jugée lorsque la date de plaidoirie a été fixée, puisque le conseiller de la mise en état envisageait très explicitement dans les termes du bulletin de nouvelles conclusions, alors qu'il n'était pas obligé de fixer un calendrier,
- l'affaire n'était pas en état d'être jugée puisqu'elle a été rappelée à l'audience de procédure du 20 mars 2014 pour 'avancement éventuel du calendrier' qui a été refusé par les parties et notamment par la société Levo pour pouvoir déposer de nouvelles conclusions et à l'audience de mise en état du 19 février 2015 le conseiller de la mise en état a interrogé la société Invacare Poirier pour savoir si sa demande tendant à faire écarter les pièces de procédure communiquées tardivement serait présentée au fond, dès lors que le conseiller de la mise en état s'était déclaré incompétent pour connaître de cette contestation, et qu'il lui appartenait de répliquer au fond,
- d'ailleurs la société Levo considérait elle-même que l'affaire n'était pas en état puisqu'elle a conclu au fond à nouveau, spontanément le 29 janvier 2015 avant la clôture, s'agissant d'une affaire complexe de brevet nécessitant plusieurs jeux de conclusions,
- la simple constitution en lieu et place en date du 10 janvier 2013 n'est pas de nature à faire progresser l'affaire et ne peut être considérée comme une diligence interruptive de prescription s'agissant d'une simple démarche administrative,
- le délai de péremption a couru à compter de ses dernières conclusion du 19 décembre 2012, en duplique sur l'incident de communication de pièces,
- les pièces communiquées, déjà connues des parties, relatives à une procédure allemande sans lien direct et nécessaire avec le litige français n'étaient pas de nature à faire progresser l'affaire, et ce d'autant qu'elles n'étaient pas accompagnées de conclusions.
SUR CE
Aux termes de l'article 386 du Code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
Seules les diligences de nature à faire progresser l'instance peuvent être prises en compte au titre de cet article.
Entre le 10 janvier 2013 et le 9 janvier 2015 aucune des parties n'a accompli d'acte de procédure.
La société Levo soutient que le conseiller de la mise en état a estimé, lorsqu'il a adressé le 22 février 2013 l'avis de fixation et de clôture qui fait référence à l'article 912 du Code de procédure civile qui prévoit 'le conseiller de la mise en état examine l'affaire dans les quinze jours suivant l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces. Il fixe la date de la clôture et celle des plaidoiries. Toutefois, si l'affaire nécessite de nouveaux échanges de conclusions, il en fixe le calendrier, après avoir recueilli l'avis des avocats', que l'affaire était en état et ne nécessitait pas de nouveaux échanges de conclusions puisqu'il n'a fixé aucun calendrier.
Cependant, l'avis de fixation adressé le 22 février 2013, a fixé la clôture de l'instruction de l'affaire au 19 février 2015 pour être plaidée le 16 avril 2015 de sorte qu'avant cette clôture rien n'indique qu'elle était en l'état d'être jugée alors qu'au contraire l'affaire a de nouveau été appelée à une audience de mise en état du 20 mars 2014 pour 'avancement éventuel du calendrier' ce qui a été refusé par les parties et que postérieurement, la société Levo a communiqué le 9 janvier 2015 deux pièces de procédure alors que le nouveau conseil n'avait toujours pas conclu au fond et que l'affaire n'était donc manifestement pas en état d'être jugée puisqu'il a de nouveau conclu au fond le 29 janvier 2015 et qu'il appartenait à la société Invacare Poirier d'y répliquer notamment sur la question des pièces communiquées tardivement.
Cette information donnée sur la date de la clôture de l'instance ne dispense pas les parties d'accomplir les diligences propres à éviter la péremption d'instance lorsque, comme en l'espèce, elles estiment que des diligences lui apparaissent utiles à accomplir avant l'audience de plaidoirie et la clôture de l'affaire.
Il ne peut être reproché à l'intimée d'exercer les droits qui lui sont favorables sans qu'il y ait renversement de la charge du procès puisqu'aux termes de l'article 2 du code de procédure civile les parties conduisent l'instance sous les charges qui leur incombent. Il leur appartient d'accomplir les actes de la procédure dans les délais requis.
Par ailleurs, si l'instance a été interrompue en application des dispositions de l'article 369 du code de procédure civile en raison de la dissolution à compter du 22 décembre 2012 de la SCP d'avoués représentant la société Levo AG Wohlen et de ce fait le délai de péremption interrompu, la constitution aux lieu et place du nouveau conseil à la date du 10 janvier 2013 a fait partir un nouveau délai de péremption.
Or, la communication le 9 janvier 2015 d'un arrêt rendu le 30 octobre 2014 dans une procédure étrangère et sa traduction, en l'absence de conclusions développant les conséquences résultant de cette pièce sur le présent litige, n'est pas de nature à faire progresser la procédure.
Celles-ci sont d'ailleurs intervenues le 29 janvier 2015, alors que le délai de péremption était acquis.
Il s'en suit que c'est à bon droit que le conseiller de la mise en état a constaté la péremption d'instance de la présente procédure.
L'équité commande de confirmer la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par le conseiller de la mise en état et y ajoutant de condamner la société Levo à payer à la société Invacare Poirier la somme de 15.000 euros sur le même fondement et de rejeter la demande formée à ce titre par la société Levo
Les dépens de l'instance éteinte resteront à la charge de la société Levo en application de l'article 393 du Code de procédure civile et seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 19 mars 2015 en ce qu'elle a constaté la péremption de l'instance pendante devant la cour d'appel de Paris sous le numéro de rôle général 12/05915 à la date du 20 décembre 2014 et condamné la société Levo AG Wohlen à verser à la société Invacare Poirier la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance éteinte avec droit de recouvrement au profit des avocats de la cause.
Y ajoutant Condamne la société Levo AG Wohlen à verser à la société Invacare Poirier la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance éteinte avec droit de recouvrement au profit des avocats de la cause.
Condamne la société Levo AG Wohlen aux entiers dépens de l'instance éteinte avec droit de recouvrement au profit des avocats de la cause.
La Greffière La Présidente