Jurisprudence : Cass. soc., 12-05-2015, n° 14-11.534, F-D, Rejet

Cass. soc., 12-05-2015, n° 14-11.534, F-D, Rejet

A8658NH7

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2015:SO00791

Identifiant Legifrance : JURITEXT000030606593

Référence

Cass. soc., 12-05-2015, n° 14-11.534, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/24438487-cass-soc-12052015-n-1411534-fd-rejet
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Abstract

L'application du principe du maintien des contrats de travail des salariés affectés à une activité transférée ne s'applique pas que lors de transferts de grosses unités, mais peut également intervenir lors de petites opérations courantes, comme le montrent deux arrêts inédits rendus par la Chambre sociale de la Cour de cassation, le 12 mai 2015, dans deux affaires concernant une aire d'accueil pour les gens du voyage (I) et une boutique de vêtements pour homme (II)..



SOC. CH.B
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 mai 2015
Rejet
M. CHAUVET, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt no 791 F-D
Pourvoi no B 14-11.534
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la Société de gestion des aires d'accueil (SGAA), société par actions simplifiée, dont le siège est Rillieux-la-Pape,
contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2013 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant
1o/ à Mme Z Z, domiciliée Castanet-Tolosan,
2o/ à l'association Pact Arim de la Haute-Garonne, dont le siège est Toulouse,
défenderesses à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 31 mars 2015, où étaient présents M. Chauvet, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et rapporteur, M. Déglise, Mme Reygner, conseillers, M. Petitprez, avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chauvet, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat de la Société de gestion des aires d'accueil, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de Mme Z, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de l'association Pact Arim de la Haute-Garonne, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 13 décembre 2013), que Mme Z a été engagée par l'association Pact Arim 31 (l'Association) le 10 octobre 2007 en qualité de gestionnaire d'une aire d'accueil de gens du voyage et que le 28 octobre 2009, l'Association lui a fait connaître que son contrat de travail était transféré à la Société gestionnaire des aires d'accueil (SG2A) qui reprenait la gestion de l'aire d'accueil ; que la société SG2A a contesté le transfert du contrat de travail et le 4 janvier 2010, l'Association a licencié la salariée au motif notamment de la perte du marché qu'elle détenait auprès de la mairie de Toulouse pour la gestion de l'aire d'accueil ;

Attendu que la société SG2A fait grief à l'arrêt de dire que le contrat de la salariée lui a été transféré, alors, selon le moyen, que l'article L. 1224-1 du code du travail s'applique à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un autre exploitant ; qu'au cas présent, le marché public repris par la société SG2A avait pour objet la gestion de l'aire d'accueil de gens du voyage de la Mounède appartenant à la ville de Toulouse en contrepartie d'un prix forfaitaire ; que la société SG2A n'était donc pas en charge d'exploiter l'aire d'accueil à titre onéreux mais seulement d'en assurer la gestion quotidienne, l'entretien et la réparation de petits travaux ; que la société SG2A faisait valoir qu'aucun élément corporel nécessaire à l'exercice de ses missions de gestion et d'entretien ne lui avait été transféré et que le
terrain et les équipements qui étaient mis à la disposition des gens du voyage, clients de l'aire, restaient exploités par la commune - qui percevait les redevances, qui supportait l'ensemble des dépenses de fonctionnement, qui établissait les règles de fonctionnement de l'aire et décidait notamment de la mise en oeuvre de la procédure d'exclusion en cas d'impayé ; qu'en jugeant que la société SG2A aurait repris des terrains, installations électriques, l'alimentation en eau et les emplacements aménagés permettant l'accueil des gens du voyage, cependant que ces éléments appartenaient à la commune qui percevait une redevance versée par les personnes accueillies et exploitait l'aire d'accueil, n'étaient pas des moyens nécessaires à l'activité de gestion quotidienne et d'entretien qui avait été seule reprise par la société SG2A, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que l'Association gérait l'aire d'accueil des gens du voyage de la Mounède avec des moyens matériels et humains organisés, destinés exclusivement à cette activité et comportant des aires de stationnement, des installations électriques et en eau, un fichier informatique et des supports documentaires au service de l'activité ; qu'ayant ainsi caractérisé l'entité économique et mis en évidence son autonomie d'organisation, elle en a exactement déduit que la société SG2A qui avait repris cette activité, avec les mêmes moyens, devait poursuivre en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, le contrat de travail de la salariée qui avait été spécialement recrutée pour les besoins du service ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société de gestion des aires d'accueil aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Société de gestion des aires d'accueil et condamne celle-ci à payer à Mme Z et à l'association Pact Arim, à chacune la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la Société de gestion des aires d'accueil.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de travail de Madame Z avait été transféré à la société SG2A en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, d'AVOIR dit que le licenciement notifié par l'association PACT ARIM était dépourvu d'effet, d'AVOIR débouté Madame Z de sa demande de condamnation solidaire à l'encontre de l'association PACT ARIM, d'AVOIR condamné la société SG2A à verser à Madame Z une somme de 16.000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR condamné la société SG2A à verser à l'association PACT ARIM la somme de 18.748,90 euros à titre de remboursement des sommes versées à Madame Z postérieurement au transfert de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE " sur l'application des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail L'article L 1224-1 du code du travail pose le principe du maintien des contrats de travail toutes les fois qu'il y a transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise, étant précisé que l'entité économique dont le transfert conditionne l'application des dispositions légales précitées s'entend d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre ou des intérêts propres. Ces dispositions légales s'appliquent, notamment, en cas de succession de prestataires dès lors que le changement de prestataires s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise, la succession de prestataires devant pour caractériser un tel transfert s'accompagner dans le même temps d'un transfert des moyens d'exploitation tels le matériel, les locaux, les terrains, les équipements, peu important que le transfert soit direct ou indirect. Au cas présent, l'association PACT ARIM puis la SAS SG2A ont été successivement désignées comme gestionnaire de l'aire d'accueil des gens du voyage de la Mounède à la suite d'un appel d'offre réalisé par la ville de Toulouse. Cette gestion met en oeuvre de moyens matériels et humains organisés destinés exclusivement à l'activité dont il s'agit puisqu'il est établi d'une part que des salariés et notamment Madame Z Z sont affectés spécifiquement à la gestion de l'aire, cette dernière ayant été, en particulier, recrutée en qualité de "gestionnaire de l'aire d'accueil des gens du voyage de la Mounède" et d'autre part que l'aire en cause dispose des équipements nécessaires afin de permettre l'accueil des gens du voyage (terrain, installations électriques, alimentation en eau, emplacements aménagés, fichier informatique, supports documentaires utiles au suivi de l'activité), tous ces moyens matériels nécessaires à l'exploitation de l'activité de gestion étant mis à la disposition des prestataires successifs par le donneur d'ordre à savoir la ville de Toulouse, Dans de telles conditions, l'activité de gestion de l'aire d'accueil de la Mounède ne peut être considérée que comme une entité économique autonome poursuivant un objectif propre (la gestion spécifique et à des fins onéreuses de l'aire des gens du voyage de la Mounède) au sens de dispositions de l'article L 1224-1 précité, étant précisé que le transfert des moyens d'exploitation par le donneur d'ordre, par leur mise à disposition à un autre exploitant, n'est pas de nature à faire obstacle à l'application de ces dispositions légales pas plus qu'une interruption limitée, à la supposer établie au cas présent, de l'activité entre deux prestataires successifs. Il est constant, par ailleurs, que l'entité économique dont il s'agit a conservé son identité et son activité propre d'accueil des gens du voyage nonobstant son transfert à un nouveau prestataire par le donneur d'ordre. Par conséquent, il ne peut être que retenu que les dispositions de l'article 1224-1 du code du travail ont bien vocation à s'appliquer, en l'espèce, de sorte que le transfert du contrat de travail de Madame Z Z s'imposait à la société SG2A, sur la rupture du contrat de travail En s'opposant à la poursuite du contrat de travail après le transfert de l'entité économique nonobstant les dispositions d'ordre public de l'article 1224-1 du code du travail, la SAS SG2A est indéniablement à l'origine du préjudice subi par Madame Z Z tenant à la perte de son emploi. Par ailleurs, le licenciement pour motif économique qui a été notifié le 4 janvier 2010 à Madame Z Z par l'association PACT ARIM 31, soit postérieurement au transfert du contrat de travail de l'intéressée à la SAS 2SG2A intervenu en novembre 2009 et alors que cette dernière était passée au service du repreneur par l'effet de la loi, est, sans qu'il soit besoin d'examiner les conditions dans lesquelles il est intervenu, dépourvu d'effet. Il n'est justifié d'aucune collusion frauduleuse entre la SAS SG2A et l'association PACT ARIM 3, d'aucune communauté d'intérêts ou de dirigeants, de même, il n'est caractérisé à l'encontre de l'association PACT ARIM 31 aucun manquement qui soit de nature à permettre de retenir que tant le cessionnaire que le cédant ont l'un et l'autre contribué au préjudice subi par la salariée du fait de la perte de son emploi. Il s'ensuit que la SAS SG2A qui a refusé de poursuivre le contrat de travail en violation des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail et malgré la demande de la salariée doit supporter les conséquences de cette rupture, intervenue de son seul fait. Suite à cette rupture illicite de son contrat de travail, Madame Z Z a subi incontestablement un préjudice qui, au regard des circonstances de l'espèce et notamment de son âge, de son ancienneté et du fait que l'intéressée établit avoir été en arrêt de travail jusqu'au 15 avril 2011 mais ne fournit aucun élément sur sa situation postérieurement à cette date, doit être réparé par l'allocation d'une somme de 16 000 euros. Il convient, dès lors, de condamner la SAS SG2A à payer à Madame Z Z la somme de 16 000 euros à titre de dommages intérêts de ce chef et de débouter cette dernière de sa demande de condamnation solidaire de l'association PACT ARIM 31 " ;
ALORS QUE l'article L. 1224-1 du code du travail s'applique à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un autre exploitant ; qu'au cas présent, le marché public repris par la société SG2A avait pour objet la gestion de l'aire d'accueil de gens du voyage de la Mounède appartenant à la ville de Toulouse en contrepartie d'un prix forfaitaire ; que la société SG2A n'était donc pas en charge d'exploiter l'aire d'accueil à titre onéreux mais seulement d'en assurer la gestion quotidienne, l'entretien et la réparation de petits travaux ; que la société SG2A faisait valoir qu'aucun élément corporel nécessaire à l'exercice de ses missions de gestion et d'entretien ne lui avait été transféré et que le terrain et les équipements qui étaient mis à la disposition des gens du voyage, clients de l'aire, restaient exploités par la commune - qui percevait les redevances, qui supportait l'ensemble des dépenses de fonctionnement, qui établissait les règles de fonctionnement de l'aire et décidait notamment de la mise en oeuvre de la procédure d'exclusion en cas d'impayé ; qu'en jugeant que la société SG2A aurait repris des terrains, installations électriques, l'alimentation en eau et les emplacements aménagés permettant l'accueil des gens du voyage, cependant que ces éléments appartenaient à la commune qui percevait une redevance versée par les personnes accueillies et exploitait l'aire d'accueil, n'étaient pas des moyens nécessaires à l'activité de gestion quotidienne et d'entretien qui avait été seule reprise par la société SG2A, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION SUBSIDIAIRE
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société SG2A à verser à l'association PACT ARIM la somme de 18.748,90 euros à titre de remboursement des sommes versées à Madame Z postérieurement au transfert de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE " sur la demande de l'association PACT ARIM de remboursement des sommes versées à Madame Z Z postérieurement au transfert de son contrat de travail L'acte d'engagement de la SAS SG2A s'agissant du marché de la ville de Toulouse de la gestion de l'aire d'accueil des gens du voyage de la Mounède est en date du 2 novembre 2009. Il n'est pas contesté que l'association PACT ARIM 31 a continué à verser à Madame Z Z nonobstant le transfert de son contrat de travail à la SAS SG2A sa rémunération jusqu'au 6 mars 2010 et qu'elle a pris en charge les cotisations sociales dues pour la période considérée ; elle s'est, également, acquittée à l'égard de la salariée du règlement de son indemnité de licenciement le montant total de la somme qu'elle indique avoir, ainsi, versé à hauteur de 18 478,90 euros ne fait l'objet d'aucune observation. L'association PACT ARIM 31 est, dès lors, bien fondée à solliciter de la SAS SG 2A le remboursement de cette somme " ;
ALORS QUE la société SG2A faisait valoir que l'acte d'engagement, signé par la Commune de TOULOUSE le 2 novembre, lui avait été notifié le 6 novembre 2011 et qu'il résultait des stipulations de ce contrat d'une durée de 13 mois que celui-ci s'achevait le 31 décembre 2010 et débutait donc le 1er décembre 2009 ; qu'elle faisait également valoir qu'ayant repris le marché le 1er décembre 2009, elle ne pouvait donc avoir repris le contrat de travail de Madame Z le 1er novembre 2009 ; qu'en condamnant néanmoins la société SG2A à rembourser à l'association PACT ARIM l'intégralité des sommes versées à la salariée depuis le 1er novembre 2009, sans répondre au moyen déterminant de l'exposante relatif à la date de reprise de l'activité, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

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