Décision AMF, 16-03-2004, à l'encontre de la Société GSD Gestion et de M. Jacques Gautier

Décision AMF, 16-03-2004, à l'encontre de la Société GSD Gestion et de M. Jacques Gautier

Lecture: 12 min

L2095DYA



Décision de sanction

du 16 mars 2004

à l'encontre de la Société GSD Gestion et de M. Jacques Gautier

La première Section de la Commission des sanctions,

Vu, le Code monétaire et financier et notamment les articles L. 532-9-4° et 5°, L. 533-4 et L. 621-15 ;

Vu, la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière, notamment ses articles 47 et 49-III et IV ;

Vu, le décret n° 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers ;

Vu, le règlement n° 96-02 de la Commission des opérations de bourse sur les prestataires de services d'investissement effectuant une activité de gestion de portefeuille pour le compte de tiers et son instruction d'application du 17 décembre 1996 ;

Vu, le règlement n° 96-03 de la Commission des opérations de bourse relatif aux règles de bonne conduite applicables au service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers ;

Vu, les notifications de griefs en date du 20 décembre 2002 adressées par le Conseil de discipline de la gestion financière à la société GSD GESTION et à M. Jacques GAUTIER à titre personnel ;

Vu, les observations écrites présentées le 7 février 2003 par Maître MERKIN pour le compte de la société GSD GESTION et de M. Jacques GAUTIER à titre personnel ;

Vu, les lettres du 29 décembre 2003 par lesquelles Mme Marielle COHEN-BRANCHE informait la société GSD Gestion et M. Jacques Gautier que la procédure ouverte dans le cadre des notifications de griefs précitées se trouvait poursuivie devant la Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers, conformément aux dispositions de l'article 49-IV de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière et qu'elle était désignée comme rapporteur ;

Vu, le compte-rendu des auditions de la société GSD Gestion, représentée par M. Jacques Gautier, et de M. Jacques Gautier en date du 23 janvier 2004 ;

Vu, la lettre de convocation du 11 février 2004 à laquelle était annexé le rapport signé du Rapporteur ;

Vu, les observations en réponse de Maître Claude MERKIN, pour le compte de la société GSD GESTION et de M. Jacques GAUTIER à titre personnel, en date du 26 février 2004 ;

Vu, les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu au cours de la séance du 16 mars 2004 :

Mme le Rapporteur en son rapport,

Mme Virginie CAYATTE, Commissaire du Gouvernement,

M. Jacques GAUTIER, pour son propre compte et celui de la société GSD Gestion dont il est le Président-directeur-général,

M. Thierry GAUTIER en qualité de conseil de M. Jacques GAUTIER,

Maître Claude MERKIN, conseil de M. Jacques GAUTIER et de la société GSD Gestion, en ses observations,

Maître Claude MERKIN et M. Jacques GAUTIER ayant pris la parole en dernier.

I. FAITS ET PROCÉDURE

Les services de la COB ont constaté des dysfonctionnements administratifs lors d'une visite d'audit effectuée le 23 août 2000 au sein de la société GSD GESTION.

Ces faits ont conduit le Directeur général de la COB à décider l'ouverture d'une enquête le 18 décembre 2000 sur les activités de la société GSD GESTION.

Par lettre du 14 octobre 2002, le Président de la Commission des opérations de bourse a saisi le Conseil de discipline de la gestion financière des griefs relevés par le Service de l'Inspection de la COB lors de son enquête.

Le Conseil de discipline de la gestion financière a adressé le 20 décembre 2002 une notification de griefs à la société GSD GESTION et, à titre personnel, à son président-directeur général,

M. Jacques GAUTIER, sur le fondement des règlements n° 96-02 et n° 96-03 de la Commission des opérations de bourse.

La société GSD GESTION et M. Jacques GAUTIER, représentés par Maître Claude MERKIN, ont fait parvenir au Président du Conseil de discipline de la gestion financière leurs observations écrites le 7 février 2003.

Le Président de la Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a désigné Mme Marielle COHEN-BRANCHE en qualité de Rapporteur dans cette affaire par décision du 28 novembre 2003.

Mme Marielle COHEN-BRANCHE a avisé, par lettres recommandées avec avis de réception en date du 29 décembre 2003, la société GSD GESTION et M. Jacques GAUTIER de sa désignation en qualité de Rapporteur et de leur droit à être entendus.

Mme Marielle COHEN-BRANCHE a entendu M. Jacques GAUTIER, tant à titre personnel qu'à titre de représentant légal de la société GSD GESTION, à sa demande, le 23 janvier 2004, en présence de Maître Claude MERKIN et de M. Thierry GAUTIER, en qualité de conseils.

Le rapport de Mme Marielle COHEN-BRANCHE a été notifié le 11 février 2004 à M. Jacques GAUTIER et à la société GSD GESTION.

Maître Claude MERKIN a déposé des observations en réponse le 26 février 2004.

II. SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRÉCÈDENT

Sur l'argumentation préalable développée par la société GSD GESTION et M. Jacques GAUTIER

Considérant que, contrairement à ce qui a été soutenu, il ressort du dossier que l'ouverture de l'enquête sur les activités de la société n'a sa source que dans le compte-rendu de la visite d'audit réalisée par le Service de la Gestion et de l'Epargne de la COB dans les locaux de la société GSD GESTION, le 23 août 2000 ;

Considérant que la poursuite diligentée à l'encontre de M. Jacques GAUTIER repose sur les articles 2 et 3 du règlement COB n° 96-03, expressément visés par la notification des griefs ;

A - Sur le fait que la société GSD Gestion n'aurait pas respecté l'une des conditions de son agrément ni ses obligations envers le régulateur

Sur le manquement à l'article L. 532-9-4° et 5° du Code monétaire et financier et à l'article 8 du règlement COB n° 96-02 relatif à l'obligation pour les sociétés de gestion d'avoir des dirigeants effectifs et expérimentés Considérant que le curriculum vitae de M. Thierry GAUTIER, fils de M. Jacques GAUTIER, remis spontanément, ne fait pas mention de ce qu'il ait occupé les fonctions de Directeur général de la société GSD GESTION à partir de juin 1998 ; qu'il fait apparaître, au contraire, que, pendant les années 1999 et 2000, celui-ci poursuivait ses études ; qu'il apparaît ainsi que, pendant cette période, la société de gestion n'était pas dotée de deux dirigeants effectifs et expérimentés ;

Considérant que cette situation caractérise en elle-même le manquement par la société GSD GESTION à l'article L. 532-9-4° et 5° du Code monétaire et financier et à l'article 8 du règlement COB n° 96-02 ;

Sur le manquement à l'article 5 du décret n° 96-880 du 8 octobre 1996 et à l'article 16 du règlement COB n° 96-02 sur l'obligation d'information de la COB des modifications affectant la société de gestion Considérant que, par application de l'article 16 du règlement COB précité, la société de gestion " informe aussitôt la COB des modifications portant sur les éléments caractéristiques qui figuraient dans le dossier d'agrément initial " et, à ce titre, déclare les changements de gérants de portefeuille ;

Considérant que l'embauche par M. Jacques GAUTIER en juin 2001 d'un gérant junior devait ainsi être signalée à la COB ;

Considérant que, dans sa lettre de compte rendu de visite d'audit au sein de la société, la COB a relevé qu'elle n'avait pas été informée du départ d'un autre gérant de portefeuille, en juin 2000 ;

Considérant qu'il résulte du dossier que la société GSD GESTION a omis à deux reprises d'informer la COB d'un changement de gérant de portefeuille et a, de ce fait, contrevenu à la règle posée par l'article 5 du décret n° 96-880 du 8 octobre 1996 et l'article 16 du règlement COB n° 96-02 ;

B - Sur la mise en place par la société GSD GESTION d'une organisation et d'un contrôle interne non conformes aux exigences posées par les textes en vigueur en recourant à des gérants indépendants

Considérant qu'il résulte des débats et des pièces du dossier que M. Jacques GAUTIER a permis à des personnes extérieures à la société GSD GESTION, ayant la qualité apparente de " gérant salarié ", d'exercer, sous le couvert de la société GSD GESTION, une activité de gestion des portefeuilles qu'ils apportaient ;

Considérant que les gérants n'étaient employés qu'à temps partiel, la durée de travail imposée par leur contrat n'étant comprise qu'entre 21 et 30 heures hebdomadaires, et ne percevaient de GSD qu'un salaire en relation avec la durée de cette activité, l'autorité de l'employeur ne s'exerçant que dans ce cadre ; que, parallèlement, des contrats d'apport de clientèle étaient conclus, comportant une clause selon laquelle les sociétés créées à cet effet par les gérants s'engageaient à prendre en charge sous forme d'honoraires versés par elles à GSD Gestion le montant du salaire et des charges sociales desdits gérants, tandis qu'elles tiraient leur propre rémunération d'un partage des commissions de mouvement - qui ont représenté, en 1999, 50 % et, en 2000, 64 % du chiffre d'affaires de GSD par suite d'une rotation spécialement élevée des portefeuilles-, ainsi que du paiement par GSD à certaines de ces sociétés de prestations prétendument fournies par elles ; que, de la sorte, M. Jacques Gautier mettait GSD Gestion, seule à bénéficier de l'agrément de la COB en qualité de société de gestion de portefeuille, à disposition de ces sociétés, permettant à des gérants de portefeuille employés de GSD d'exercer, de manière autonome et en dehors de tout contrôle, une activité propre de gestion de portefeuille pour laquelle ils ne possédaient pas l'agrément requis ;

Sur le manquement aux règles visées par l'article L. 533-4 du code monétaire et financier et le paragraphe 1.12 de l'instruction COB du 17 décembre 1996 relatif au principe de la permanence de la gestion Considérant qu'il résulte du dossier que l'emploi à temps partiel des quelques gérants salariés de GSD ne pouvait suffire à faire face à l'ampleur des portefeuilles individuels et des OPCVM dont GSD avait déclaré à la COB avoir la responsabilité de la gestion et que la permanence de la gestion effectuée sous le nom de GSD pouvait difficilement être assurée dans des conditions normales, notamment lors de l'absence d'un gérant de portefeuille ;

Considérant en conséquence que l'absence d'effectivité de la permanence de la gestion financière au sein de la société GSD GESTION révèle un fonctionnement contraire à l'article L. 533-4 du Code monétaire et financier et au paragraphe 1.12 de l'instruction du 17 décembre 1996 prise en application du règlement COB n° 96-02 ;

Sur le manquement à l'article 3 du règlement COB n° 96-03 relatif à l'obligation pour les sociétés de gestion de " prendre toutes les dispositions nécessaires, notamment en matière de séparation des métiers et des fonctions, pour garantir l'autonomie de la gestion "

Sur la prescription invoquée en ce qui concerne le contrat FDS Conseil Considérant que la prescription des poursuites instituée par la loi n° 2003-706 de sécurité financière du 1er août 2003, à la supposer applicable en l'espèce, suppose que les faits reprochés se soient produits antérieurement à la période d'enquête ;

Considérant qu'en ce qui concerne la prescription invoquée portant sur le contrat conclu en 1995 entre la société FDS CONSEIL et la société GSD GESTION, celui-ci continuait de produire ses effets à la date à laquelle l'enquête a été engagée, ainsi que le reconnaissent les personnes mises en cause dans leurs dernières observations ; qu'il s'ensuit que la prescription des faits objets de la poursuite ne peut être invoquée ;

sur le fond :

Considérant qu'il résulte du mécanisme décrit ci-dessus que, ainsi que le souligne la notification de griefs, la société GSD Gestion s'est révélée dépendante de ce mode de fonctionnement et dans l'incapacité d'avoir dès lors une gestion autonome, se plaçant en contradiction avec les dispositions de l'article L. 533-4 du Code monétaire et financier et de l'article 3 du règlement de la COB n° 96-03 imposant que toutes dispositions nécessaires soient prises pour assurer l'autonomie de la gestion.

Sur le manquement à l'article L. 533-4-3° du Code monétaire et financier imposant aux sociétés de gestion d'être dotées " des ressources et des procédures nécessaires pour mener à bien leurs activités et mettre en œuvre ces ressources et procédures avec un souci d'efficacité " et de l'article 11 du règlement de la COB n° 96-03 selon lesquelles " le prestataire de services doit mettre en place les moyens et procédures permettant de contrôler ses activités… ", le contrôle interne consistant " notamment à s'assurer du respect des règles de bonne conduite dans tous les aspects de relation avec la clientèle " Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le contrôle réel de GSD Gestion sur les gérants était insuffisant, devant être relevé de plus le fait que ce n'est qu'en août 2001 que le manuel de procédures internes a été établi par GSD Gestion et envoyé à la COB ;

Considérant que la grande disparité de performances entre gérants de portefeuille de la même société, qui étaient en charge de mandats de gestion type " dynamique ", n'a jamais suscité de la part de M. Jacques GAUTIER (qui était officiellement en charge du contrôle interne), d'autre réaction que celle d'interroger le gérant de portefeuille en cause sur l'existence de plaintes émanant de ses clients, la méconnaissance, révélée par le dossier, de la part d'un gérant de portefeuille, de l'identité de la personne en charge du contrôle interne de la société étant notamment révélatrice au regard en particulier du faible nombre de personnes employées par GSD GESTION, de la carence dans la mise en œuvre de cette fonction ;

Considérant qu'à cet égard, le faible nombre de plaintes de la part de clients ne saurait être un critère de l'effectivité du contrôle interne dans la société, l'existence par ailleurs du contrôle pouvant être exercé par le dépositaire étant indifférente à cet égard et que, à supposer, comme il l'invoque, qu'il ait pu être procédé par M. Jacques GAUTIER à la liquidation des positions insuffisamment couvertes des clients de la société de gestion, cet acte relevait de la mission normale du Président Directeur Général et ne peut suffire à démontrer l'existence d'un contrôle interne conforme aux exigences des textes précités ;

Sur le manquement à l'article 9 du règlement COB n° 96-03 relatif à l'obligation pour les sociétés de gestion de disposer en permanence de moyens adaptés à leurs activités et conformes aux textes législatifs et réglementaires et à l'article 10 du règlement COB n° 96-02

Considérant que le mode de fonctionnement choisi par la société GSD Gestion, seule à disposer d'un agrément, reposant sur le recours systématique à des gérants, principalement rémunérés au surplus par d'autres personnes, apportant un maximum d'encours qu'ils géraient eux-mêmes sans contrôle effectif, permettant ainsi un exercice autonome d'activités de gestion par des personnes dépourvues d'agrément, ne pouvait que se trouver en contravention avec les dispositions de l'article 9 du règlement COB n° 96-03 qui dispose que " Le prestataire doit, en permanence, disposer de moyens adaptés à ses activités et conformes aux textes législatifs et réglementaires. L'obligation de disposer de tels moyens signifie notamment : la présence de collaborateurs compétents ; l'existence de moyens techniques suffisants ;une organisation interne adéquate permettant de justifier en détail l'origine, la transmission et l'exécution des ordres, et notamment l'individualisation des opérations effectuées " et avec celles de l'article 10 du règlement COB n° 96-02, lequel prévoit que : " La société de gestion doit disposer de moyens, d'une organisation et de procédures de contrôle et de suivi en adéquation avec les activités exercées "

III. SUR LA SANCTION

Considérant que les manquements poursuivis, sur le fondement des articles L. 532-9 4° et 5° et L. 533- 4 du Code monétaire et financier, de l'article 5 du décret n° 96-880 du 8 octobre 1996, des articles 8 et 16 du règlement COB n° 96-02, des articles 2 ,3, 9 et 11 du règlement COB n° 96-03 sont établis à l'encontre de la société GSD GESTION qui doit être de ce fait sanctionnée ;

Considérant que M. Jacques GAUTIER doit également être sanctionné, tant par application des dispositions de l'article 1er du règlement n° 96-03 qu'à raison de son rôle personnel déterminant dans l'ensemble des infractions ci dessus relevées, spécialement par la conception et la mise en œuvre d'un système ayant eu pour effet une organisation et un contrôle interne non conformes aux exigences posées par les textes en vigueur, comme rappelés ci-dessus ;

PAR CES MOTIFS

Et après en avoir délibéré, sous la présidence de Monsieur Jacques RIBS, par Messieurs Jean-Pierre HELLEBUYCK, Thierry COSTE, Pierre LASSERRE et Joseph THOUVENEL, membres de la première section de la Commission des sanctions, en présence de la secrétaire de séance.

DÉCIDE DE :

- prononcer à l'encontre de la société GSD GESTION un blâme et une sanction pécuniaire de 50.000 euros ;

- prononcer à l'encontre de M. Jacques GAUTIER, Président de la société GSD GESTION, à titre personnel, un blâme et une sanction pécuniaire de 50 000 euros ;

- publier la présente décision au Bulletin des annonces légales obligatoires ainsi que sur le site Internet et dans la Revue mensuelle de l'Autorité des marchés financiers.

Fait à Paris, le 16 mars 2004.

La Secrétaire, Brigitte LETELLIER

Le Président, Jacques RIBS.

Cette décision peut faire l'objet d'un recours dans les conditions prévues au chapitre 3 du décret n° 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers.

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Textes juridiques liés au document

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus