CIV. 2 LM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 29 avril 2004
Rejet
M. ANCEL, président
Arrêt n° 643 FP D
Pourvoi n° Y 01-17.321
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ la compagnie Zurich assurances, société anonyme, dont le siège est Paris,
2°/ M. Christophe Y, demeurant Fagnières,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 décembre 2000 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), au profit
1°/ de la société Ford France, société anonyme, dont le siège est Rueil-Malmaison,
2°/ de la société Bartholomé, société anonyme, dont le siège est Châlons-en-Champagne,
défenderesses à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 mars 2004, où étaient présents M. Ancel, président, M. Mazars, conseiller rapporteur, M. Guerder, conseiller doyen, MM. Séné, Ollier, Thavaud, Dintilhac, de Givry, Mme Duvernier, M. Duffau, Mme Foulon, MM. Bizot, Loriferne, Mme Aldigé, M. Boval, conseillers, Mme Guilguet-Pauthe, M. Besson, Mme Guihal-Fossier, conseillers référendaires, M. Kessous, avocat général, Mme Genevey, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Mazars, conseiller, les observations de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la compagnie Zurich assurances et de M. Y, de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société Ford France, les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 6 décembre 2000), que M. Y a pris en crédit-bail un véhicule fabriqué par la société Ford France et vendu par la société Bartholomé ; que ce véhicule a été détruit par un incendie ; que M. Y et son assureur, la compagnie Zurich assurances (Zurich), ayant indemnisé le crédit-bailleur de la perte de son véhicule, ont assigné les deux sociétés en réparation de leur préjudice ;
Attendu que M. Y et la compagnie Zurich font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes, alors, selon le moyen
1°/ que, dans le silence des écritures des parties, les juges du fond doivent examiner les faits sous tous leurs aspects juridiques ; qu'en n'examinant pas la responsabilité de la société Ford France et de la société Bartholomé sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, la cour d'appel a violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ;
2°/ que la fabrication d'une chose défectueuse est une faute dont tout tiers au contrat de vente peut se prévaloir sur un fondement délictuel ; qu'en énonçant que M. Y et son assureur qui l'avait indemnisé ne pouvaient pas obtenir de la société Ford France réparation du préjudice causé par l'éventuel vice de conception ou de fabrication, la cour d'appel a méconnu le principe même de la responsabilité délictuelle et a violé l'article 1382 du Code civil ;
3°/ que la vente, en connaissance de cause, d'une chose défectueuse est une faute ; qu'en énonçant que M. Y et son assureur qui l'avait indemnisé ne pouvaient pas obtenir de la société Bartholomé réparation du préjudice causé par l'éventuel vice de conception ou de fabrication du véhicule vendu par elle, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que si M. Y et la compagnie Zurich n'ont pas indiqué de manière explicite les fondements juridiques de leurs demandes, l'analyse de leurs écritures montre qu'ils soutiennent en définitive que, s'ils n'entendent pas exercer l'action rédhibitoire ou estimatoire des articles 1641 et suivants du Code civil, les sociétés Ford France et Bartholomé devaient être déclarées responsable des conséquences du vice affectant le véhicule qu'elles avaient fabriqué ou vendu ; que toute l'argumentation au fond des demandeurs tendait à démontrer que l'origine de l'incendie reposait sur la défectuosité d'une des connexions des durits de gasoil sur la pompe mécanique, de sorte que c'est bien sur l'existence d'un vice caché du véhicule qu'ils s'efforcent de fonder leur action indemnitaire ;
Que par ces constatations et énonciations, dont il résulte que les demandeurs avaient donné un fondement juridique à leurs demandes, la cour d'appel, qui n'avait pas l'obligation de chercher d'autres fondements éventuels, a pu retenir que M. Y et la société Zurich, tiers au contrat de vente du véhicule, ne disposaient pas, contre le fabricant et le vendeur, d'une action indemnitaire reposant sur l'existence d'un vice caché ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la compagnie Zurich assurances et M. Y aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la compagnie Zurich assurances et de M. Y d'une part, de la société Ford France d'autre part ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf avril deux mille quatre.