Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2010, présentée pour la SAS Imom International, dont le siège est situé 66 route de Sartrouville au Pecq (78230) par Me Norbert Majerhole, avocat au“barreau de Paris et représentant de White & Case LLP ; la SAS Imom International demande au tribunal :
1°) la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie pour la période du 1” février 2008 au 31 décembre 2008 ainsi que des pénalités correspondantes ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat le remboursement des frais engagés au cours de
l'instance, au titre de l’
article L 761-1 du code de justice administrative🏛 ;
Elle soutient que la position de l’administration selon laquelle les dépenses exposées ont un lien direct et immédiat avec une activité patrimoniale de prises de participations qui serait hors champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée n’est pas conforme à sa propre doctrine telle qu’exposée dans son instruction référencée BOI 3 D-4-01 du 15 octobre 2001 ; que l’administration méconnaît également la jurisprudence communautaire relative aux règles applicables au regard de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses exposées par les entreprises au titre d’opérations se rapportant à leur capital social et à leur participation dans le capital d’autres sociétés ; que la taxe sur la valeur ajoutée grevant les frais d’acquisition de la participation au sein de la société Plastiform’s est indissociable de l’activité de services de la société Imom International a développée du fait de cette acquisition, activité qui peut être qualifiée « d’immixtion dans la gestion » ; que la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses liées à cette prise de participations est déductible ;
Vu la décision du 8 février 2010 par laquelle le directeur de contrôle fiscal d’Ile-de- France Ouest a statué sur la réclamation préalable de la SAS Imom International ;
N° 1002387
Vu le mémoire, enregistré le 4 octobre 2010, par lequel le directeur de contrôle fiscal Ile- de-France Ouest conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir qu’un redevable, qui réalise à la fois des opérations n’ouvrant pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée et des opérations ouvrant droit à déduction de cette même taxe, doit, pour opérer la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ses dépenses, préalablement procéder à leur affectation en fonction de leur utilisation, totale ou partielle, pour la réalisation de chacune de ces deux catégories d’opérations ; que le critère du lien direct et immédiat permet de caractériser l’affectation de la dépense à l’opération qui a conduit à son engagement et de déterminer si cette dépense ouvre droit à déduction ; qu’en étendant son activité patrimoniale d’acquisition et de détention de participations, activité qui se situe en dehors du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée, à celle de prestations aux filiales, la SAS Imom International, société holding, prend la qualité d’assujetti partiel ; que celles de ses dépenses qui peuvent être affectées aux opérations patrimoniales de rachat de la SAS Plastiform’s n’ouvrent pas droit à déduction ; que l’ensemble des dépenses litigieuses correspondent à des honoraires directement liés à l’opération de rachat n’ouvrent ainsi pas droit à déduction ; que la doctrine administrative issue de l’instruction du 15 octobre 2001 n’est pas incompatible avec le principe d’affectation tel que retenu au cas d’espèce ; qu’en effet, dans le cas des opérations de « leverage buy out » (LBO) montées par des fonds d’investissement, les dépenses d’acquisition supportées par le holding de rachat ne constituent pas une source de financement qui aurait été engagée pour assurer la croissance ou la pérennisation de l’entreprise par ailleurs assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 décembre 2010, pour la SAS Imom International par Me Majerholc, lequel persiste dans ses premières conclusions par les mêmes moyens ;
Il ajoute que, conformément aux dispositions de l’
article L. 80 A du livre des procédures fiscales🏛, l’instruction du 15 octobre 2001 est opposable à l’administration alors même qu’elle se révèle plus favorable au contribuable que la jurisprudence communautaire ; que la question du lien direct avec une opération ouvrant droit à déduction ne se pose pas dans la mesure où les dépenses en litige ont le caractère de frais généraux ; qu’en tout état de cause, si le critère de l’affectation devait trouver à s’appliquer, la taxe sur la valeur ajoutée sur les dépenses en cause serait bien déductible du fait de l’inclusion de ces dépenses dans le prix des services facturés ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 octobre 2011, présenté par le directeur de contrôle fiscal d’Ile-de-France Ouest qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Il fait valoir, en outre, que si l’instruction 3 D 4 01 du 15 octobre 2001 est effectivement opposable à l’administration, celle-ci est d’application stricte et n’est pas transposable au cas particulier de la SAS Imom International ; que les opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée de la société requérante sont celles qui constituent des services rendus à ses filiales ; qu’en tout état de cause, elle n’apporte pas la preuve que les dépenses litigieuses auraient un lien avec les services rendus à ses filiales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
N° 1002387 3
Vu le code général des impôts et le
livre des procédures fiscales🏛 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2014 :
- le rapport de Mme Thalabard-Guillot, rapporteur,
- les conclusions de M. Cornevaux, rapporteur public,
- et les observations orales de Me Schmidbauer, avocat se substituant à Me Majerholc, représentant la SAS Imom International ;
1. Considérant que-la SAS Imom International, qui exerce une activité- de société holding, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1” février 2008 au 31 décembre 2008 ; qu’à l’issue des opérations de contrôle, l’administration a remis en cause la déduction de taxe sur la valeur ajoutée concernant les dépenses exposées pour l’acquisition du groupe Etanco, estimant que celles-ci étaient exclusivement liées à l’activité patrimoniale de la société et exclues, en conséquence, du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que la SAS Imom International demande la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés par une proposition de rectification en date du 30 avril 2009, selon la procédure contradictoire prévue par l’
article L. 55 du livre des procédures fiscales🏛 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Considérant qu’aux termes du 1 du I de l’
article 271 du code général des impôts🏛 : « La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la taxe à la valeur ajoutée applicable à cette opération » ; qu’il résulte de ces dispositions, interprétées à la lumière des articles 167, 168, 169 et 173 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, que l’existence d’un lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est, en principe, nécessaire pour qu’un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée en amont soit reconnu à l’assujetti et pour déterminer l’étendue d’un tel droit ; que le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant l’acquisition de biens ou de services en amont suppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction ; qu’en l’absence d’un tel lien, un assujetti est toutefois fondé à déduire l’intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des biens et services en amont, lorsque les dépenses liées à l’acquisition de ces biens et services font partie de ses frais généraux et sont, en tant que telles, des éléments constitutifs du prix des biens produits ou des services fournis par cet assujetti ; que de tels coûts entretiennent, en effet, un lien direct et immédiat avec l’ensemble de son activité économique ; qu’il y a lieu d’examiner, dans ce cas, si les dépenses effectuées pour acquérir des biens ou des services en amont font partie des frais généraux liés à l’ensemble de l’activité économique de l’assujetti ;
3. Considérant que si la prise de participations financières dans d’autres entreprises ne constitue pas, en elle-même, une activité économique au sens de la directive précitée, il en va différemment lorsque cette prise de participations est réalisée dans une perspective de
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développement du chiffre d’affaires qui résulte de la fourniture de services administratifs, juridiques, financiers, commerciaux et techniques par la société holding à ses nouvelles filiales, la fourniture de ces services donnant lieu à des opérations caractérisant une activité économique et soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ; que la société holding est alors fondée à déduire l’intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ces dépenses, qui doivent être regardées comme faisant partie de ses frais généraux et entretiennent un lien direct et immédiat avec l'ensemble de son activité économique ;
4. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la SAS Imom International, qui exerce en tant que société holding une activité patrimoniale d’acquisition et de détention de participations, fournit des prestations de services à ses filiales sous la forme de missions d'assistance administrative, financière, juridique, commerciale ou technique ; qu’en contrepartie de ces missions, les sociétés bénéficiaires versent une rémunération calculée sur la base des frais engagés pour l’exécution desdites prestations, majorés d’une marge de 10 % ; qu’au titre de l’activité économique de prestations à ses filiales, la SAS Imom International est assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu’à la suite de la vérification de la comptabilité dont elle a fait l’objet, l’administration a toutefois estimé que la SAS Imom International ne pouvait déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant six factures d'honoraires liées à l’opération de rachat de la SAS Plastiform’s dès lors que celles-ci seraient directement et exclusivement liées à une activité patrimoniale située en dehors du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée ;
5. Considérant que les dépenses en litige ont été directement exposées en vue du rachat de la SAS Plastiform’s, société holding animatrice d’un groupe industriel de sociétés spécialisées dans la fabrication de systèmes de fixation, de surcouverture et d’ossatures pour façades ; qu’à la suite de cette acquisition le 26 mars 2008, la société requérante a conclu le 1“ avril 2008 une convention de prestations de services avec la société Plastiform’s ainsi qu’avec l’ensemble des sociétés françaises et étrangères contrôlées par cette dernière ; qu’ainsi, les dépenses en litige ont été engagées à des fins d’extension de l’activité économique de la SAS Imom International et doivent être regardées comme faisant partie de ses frais généraux dès lors qu’elles entretenaient un lien direct et immédiat avec l’ensemble de son activité économique de prestation de services ; que, par suite, la SAS Imom International est fondée à soutenir, conformément aux dispositions précitées de l’article 271 du code général des impôts, que c’est à tort que l’administration a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les six factures litigieuses au motif que celles-ci étaient afférentes à une opération patrimoniale hors champ d’application de la taxe ;
6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SAS Imom International est fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les conclusions de la SAS Imom International tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens sont, faute d’être chiffrées, irrecevables ;
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