MOTIFS DE LA DECISION
Sur la régularité de la procédure d'imposition
À titre infirmatif, les contribuables, au visa des
articles L. 57 et L. 76 B du livre des procédures fiscales🏛🏛, soutiennent que la procédure est irrégulière parce que l'administration fiscale a fondé son redressement sur des éléments qu'elle a recueillis en dehors du dossier des contribuables sans avoir fait la lumière sur les éléments dont elle dispose et sans rendre possible l'exercice des droits élémentaires de la défense.
Ils soutiennent que le rejet de leurs observations est insuffisamment motivé.
Ils se prévalent également des articles 107 et suivant du TFUE et de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, pour invoquer leur droit d'accès au dossier au cours de la procédure administrative, ce qui impose la communication des éléments à charge et à décharge.
Ils indiquent que l'administration fiscale doit ainsi communiquer aux contribuables les éléments qu'elle a recueillis des tiers, s'ils en forment la demande.
Ils reprochent ainsi à l'administration fiscale de ne pas avoir suffisamment précisé l'origine exacte des pièces recueillies auprès des tiers et de ne pas avoir établi une liste des documents qu'elle a utilisés pour fonder sa rectification.
Ils considèrent qu'ils ne pouvaient dans ces conditions pas lister les pièces dont ils demandaient communication.
Ils font grief à l'administration fiscale de ne pas leur avoir transmis l'ensemble des éléments extérieurs dont elle avait connaissance et qui étaient utiles à l'appréciation de leur situation et, notamment, l'entier dossier de vérification de la société holding.
Ils considèrent qu'elle aurait dû lui transmettre particulièrement :
- les documents lui ayant permis d'affirmer que le reste du capital est détenu par l'associé fondateur et deux autres personnes ;
- le rapport de gestion de la société holding au 30 juin 2010 ;
- les documents faisant état de la représentation de la société holding au sein de la société opérationnelle, par le biais d'un gérant de participation et de ce que la société holding ne disposait pas de moyens propres ;
- les documents ayant permis d'affirmer que le GIE n'aurait disposé que d'un nombre limité de salariés ;
- les documents ayant permis d'affirmer que la société holding ne pouvait définir la politique d'ensemble de la société opérationnelle, et en particulier le pacte d'actionnaires ;
- les éléments à décharge qui ont conduit l'administration fiscale à ne pas infliger à la société holding d'amendes pour émission d'attestations erronées ayant permis aux souscripteurs de se prévaloir de la réduction d'ISF, tout en lui reconnaissant un rôle d'animation.
Subsidiairement, les contribuables soutiennent, sur le fondement de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, que l'administration fiscale a manqué à son obligation de motivation dans sa réponse à leurs observations, présentées dans le délai de trente jours.
Ils font valoir particulièrement que l'administration fiscale n'a pas répondu à leur observation selon laquelle le service avait tiré des conséquences différentes de la vérification de comptabilité de la société holding et de leur situation au regard de l'ISF.
A titre confirmatif, l'administration fiscale considère que les contribuables ont pu présenter des observations parfaitement détaillées et circonstanciées et exercer ainsi régulièrement leur droit de défense. Elle fait valoir que la proposition de rectification précisait les constats auxquels elle a procédé lors de la vérification de comptabilité de la société holding et les conséquences de ces constats au regard des dispositions de l'
article 885-0 V bis du code général des impôts🏛.
Elle considère que la proposition de rectification comportait l'ensemble des informations permettant de connaître la position de l'administration fiscale et d'engager un dialogue contradictoire. Elle estime que les courriers adressés par les contribuables témoignent de leur parfaite connaissance du contexte du contrôle et de la situation de la société holding.
Elle soutient qu'il n'y a en conséquence eu aucune asymétrie d'information entre elle et les contribuables.
Elle exclut toute obligation de dresser la liste des documents sur lesquels elle s'est appuyée dans la proposition de rectification, indiquant que ces documents étaient clairement précisés et suivis de leur analyse par le service.
Concernant la communication des pièces, elle estime que le principe de la défense ne lui impose pas de fournir un accès intégral au dossier dont elle dispose. Elle écarte tout fondement à la critique tirée de l'absence de communication des documents sollicités par les contribuables, faisant valoir que l'obligation de communication concerne seulement les documents sur lesquels elle s'est fondée pour établir un redressement. Elle indique en outre qu'aucun grief ne saurait résulter de l'absence de communication de documents et renseignements lorsque ceux-ci sont directement et effectivement accessibles aux contribuables dans les mêmes conditions que l'administration. Elle précise que la demande de communication de pièces formée par les contribuables n'identifiait aucun document particulier mais se bornait à solliciter la communication de tous les documents consultés par le service lors de la vérification de comptabilité de la société Finaréa.
Elle considère avoir en outre valablement respecté son obligation de communication de pièces, au vu des documents qu'elle a adressés aux contribuables à la suite de leur demande.
Concernant sa réponse aux observations des contribuables, elle considère qu'elle n'a procédé à aucune nouvelle analyse de la situation de fait qu'elle avait décrite dans la proposition de rectification. Elle soutient que sa réponse ne contredisait pas les indications de la proposition de rectification quant à l'origine des informations recueillies auprès des tiers.
Elle soutient que l'absence de toute rectification de l'imposition de la société holding à l'issue de la vérification de la comptabilité et de prononcé de l'amende prévue par l'
article 1740 A du code général des impôts🏛 ne constituait ni une prise de position formelle, ni l'interprétation d'un texte fiscal formellement admise, au sens des
articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales🏛🏛. Elle en déduit qu'elle peut remettre en cause la qualité d'animatrice de groupe de la société holding dans le cadre de la rectification concernant un contribuable sans avoir à procéder au redressement de cette même société au terme de sa vérification de comptabilité et qu'elle n'avait pas à transmettre d'éléments à décharge, tout en contestant que la vérification de la société holding ait pu faire émerger de tels éléments. Elle indique que le litige concerne l'application de dispositions de droit interne qui ne constituent pas une aide d'État au sens de la réglementation européenne pour les particuliers qui en obtiennent le bénéfice, lesquels ne peuvent pas utilement invoquer la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
Elle considère que sa réponse reprend, point par point, l'ensemble des thématiques abordées par les contribuables dans leurs observations.
Elle écarte toute irrégularité de la procédure.
Sur ce,
Selon l'article L. 57, alinéa 1er, du livre des procédures fiscales, l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation.
Par renvoi de ce texte à l'article L. 11 du même code, le contribuable dispose d'un délai de trente jours pour présenter des observations.
Selon l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, l'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande.
Il résulte de ces textes que l'administration fiscale ne doit communication, sur demande qui lui est faite, que des pièces sur lesquelles elle se fonde pour opérer un redressement et dont le contribuable, qui n'en est ni l'auteur ni le destinataire, n'a pas eu connaissance (
Cass com., 10 avril 2019, n° 17-15.819⚖️) et il ne lui appartient pas de mettre à disposition du contribuable les documents qu'elle n'a pas retenus pour fonder les rectifications, afin de permettre à ce dernier d'apprécier si, parmi ces documents, figurent des éléments de nature à établir que l'impôt n'est pas dû. (
Cass com., 20 septembre 2023 n° 21-24.879⚖️).
De même, l'obligation de communication de l'administration fiscale ne s'étend pas aux informations détenues par ses différents services lorsque celles-ci sont librement accessibles à toute personne intéressée.
Par ailleurs, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne n'est pas applicable au présent litige, dès lors que l'impôt de solidarité sur la fortune n'entre pas dans le champ d'application du droit de l'Union.
En l'espèce, il y a lieu de constater que la proposition de rectification adressée le 7 décembre 2012 mentionne les dispositions légales et doctrinales applicables au litige, la jurisprudence y afférente et explicite les éléments fondant la décision, qui résultent tant du contrôle de la société Finaréa Omega que des pièces relatives à la situation personnelle des contribuables.
Il n'en résulte aucune équivoque quant à l'information relative à l'origine précise et de la nature des documents sur lesquels l'administration fiscale s'est fondée.
Le commentaire effectué par l'administration fiscale dans sa réponse aux observations des contribuables, rappelant l'origine des pièces qu'elle a utilisées, n'est pas de nature à rendre imprécise ou inexacte la présentation de celles-ci dans la proposition de rectification.
Ainsi, il y a lieu d'approuver la motivation du jugement en ce qu'il a retenu que les contribuables ont été correctement informés de la teneur et de l'origine des renseignements obtenus auprès des tiers et sur lesquels elle a fondé sa proposition.
En outre, il convient de relever à cet égard qu'il ne résulte d'aucun des textes susvisés que l'administration fiscale est tenue d'établir une liste des documents qu'elle a utilisés aux fins d'établir la proposition de rectification.
Cette proposition satisfait en conséquence aux exigences, notamment de motivation, qui résultent de l'article L. 57 susvisé, en ce qu'elle a permis aux contribuables d'exercer son droit de contestation et de défense.
Par ailleurs, c'est en vain que les contribuables reprochent à l'administration fiscale de ne pas leur avoir communiqué l'entier dossier de vérification de la société holding.
En premier lieu, il incombait à l'administration fiscale de communiquer seulement les éléments recueillis lors de la vérification de la société holding et sur lesquels elle s'est appuyée lors de la rectification fiscale de la situation du contribuable.
En effet, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, invoquée par le contribuable (arrêt Glencore du 16 octobre 2019, Aff. C-189-18), que : « le principe du respect des droits de la défense, dans une procédure administrative telle que celle en cause au principal, n'impose donc pas à l'administration fiscale une obligation générale de fournir un accès intégral au dossier dont elle dispose, mais exige que l'assujetti ait la possibilité de se voir communiquer, à sa demande, les informations et les documents se trouvant dans le dossier administratif et pris en considération par cette administration en vue d'adopter sa décision ».
L'administration fiscale n'avait ainsi pas à communiquer aux contribuables les éléments que ceux-ci considèrent comme étant à décharge.
En deuxième lieu, l'administration fiscale ne devait communiquer que les pièces obtenues des tiers ayant fondé la proposition de rectification et qui n'étaient pas accessibles aux contribuables. Elle justifie ainsi avoir transmis à ceux-ci, ensuite de la demande formulée dès leurs premières observations (voir pièce n° 18 de l'administration fiscale) et avant la mise en recouvrement, le tableau 2050 de l'actif de bilan de la société holding au 30 juin 2010, le rapport de gestion de la société holding du 30 juin 2010 ainsi que le règlement intérieur du GIE Finaréa services(sa pièce n° 18 bis).
En outre, et comme l'a relevé le tribunal, dans leurs itératives observations sur réponse de l'administration fiscale, les contribuables ont demandé, sans plus de précision, la communication de l'intégralité des pièces évoquées dans la proposition de rectification ainsi que celle obtenues dans le cadre du contrôle fiscal de la société holding et du GIE Finaréa services.
L'imprécision de cette demande, par sa généralité, et les limites au devoir de communication de l'administration fiscale ne permettent pas de retenir que celle-ci ait fautivement refusé de répondre à une demande de communication si générale.
En raison de leur souscription aux augmentations de capital de la société holding (société par actions simplifiée), les contribuables en sont devenus actionnaires. Ils ne soutiennent pas que la société holding ait été défaillante à leur égard, quant au respect du droit d'information attaché à leur qualité d'associés. Ils ne peuvent ainsi sérieusement soutenir qu'ils ne disposaient pas des documents sociaux de cette société, dont font partie notamment les bilans et rapports de gestion (dont la communication est préalable à la tenue de l'assemblée générale, ce que mentionnent au demeurant les rapports de gestion produits aux débats). Il en résulte qu'ils en avaient nécessairement connaissance lors de la proposition de rectification, ces documents étant en outre accessibles au public (conformément aux dispositions de l'article L 232-32 du code de commerce, en sa rédaction applicable).
En toute hypothèse, les contribuables ne font pas valoir qu'ils n'ont pas été en mesure de se procurer les documents librement accessibles utilisés par l'administration fiscale et, en conséquence et pour cette raison, d'en avoir demandé à celle-ci leur communication.
Les contribuables soutiennent particulièrement l'insuffisance des pièces communiquées, reprochant tout d'abord à l'administration fiscale de n'avoir pas justifié des documents leur ayant permis de déterminer la répartition du capital dans la société opérationnelle. Cependant, dans la proposition de rectification, l'administration fiscale ne tire aucune conséquence de l'identité des personnes possédant le reste du capital de la société opérationnelle. Elle n'était, dès lors, pas tenue de communiquer les documents les ayant informés de cette situation.
A cet égard, dans ce même projet de redressement, l'administration fiscale ne cite pas le pacte d'associé ayant été conclu, selon les observations adressées par les contribuables, au sein de la société opérationnelle. C'est en s'appuyant sur le caractère minoritaire de la participation de la société holding que le service indique que celle-ci ne pouvait prendre les décisions stratégiques concernant le fonctionnement et l'activité de la société opérationnelle. Il ne peut, dès lors, être fait grief à l'administration fiscale de ne pas avoir produit le pacte d'associé.
De même, les appelants soutiennent que les documents décrivant les conditions de représentation de la société holding dans la société opérationnelle n'ont pas été produits. Cependant, le règlement intérieur du GIE, communiqué par l'administration fiscale, décrit ces conditions de représentation, faisant notamment état des gérants de participations au sein de la direction des participations, dont il précise le rôle au sein des filiales des sociétés holding (p. 7 et 12).
Ce même document indique que ce GIE avait pour fonction de mettre à disposition de ses membres, dont la société holding faisait partie, les moyens nécessaires à la gestion fonctionnelle, opérationnelle et administrative des opérations menées par ses membres. Mis en relation avec le rapport de gestion de la société holding, qui ne mentionne aucune charge d'exploitation liée à l'emploi de personnel, ce règlement intérieur permettait à l'administration fiscale de déduire l'absence de moyens humains propres de la société holding.
La situation de la société holding étant seule à considérer à cet égard, la mention dans la proposition de rectification de ce que le GIE employait un nombre limité de salariés était surabondante et elle ne pouvait entraîner l'obligation de communiquer les comptes de résultat détaillés du GIE ou son registre du personnel.
Si l'administration fiscale fait effectivement état de la modification des statuts des sociétés opérationnelles dans la proposition de rectification, elle n'en tire aucune conséquence dans ce document. L'administration fiscale n'avait, dès lors, pas de nécessité de les communiquer, étant en outre relevé que ces documents étaient librement accessibles au public, peu important que leur communication ne soit pas gratuite, en raison des obligations légales de publication auxquels ils sont soumis.
Dès lors, il y a lieu de retenir que l'administration fiscale a communiqué, en fonction des demandes des contribuables et avant la mise en recouvrement, les pièces sur lesquelles elle s'est fondée pour la rectification des droits litigieux.
Le grief tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales n'est pas fondé.
Par ailleurs, si l'administration fiscale est tenue, en application de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, de motiver ses réponses aux observations, il y a lieu de retenir comme le tribunal, par des motifs de droit et de fait que la cour adopte, en considération de la teneur de la proposition de rectification et des observations faites par les contribuables sur la régularité et le fond de la procédure, que dans sa lettre du 3 avril 2013, sur neuf pages, l'administration fiscale a repris systématiquement les éléments soulevés par les contribuables, en fonction des circonstances particulières de l'espèce et y a répondu.
L'examen de la première lettre d'observations adressée par les contribuables à la suite de la proposition de rectification dans le délai qui leur était imparti (prorogé à leur demande de trente jours) conduit à relever en outre que, selon le passage de ces observations auquel se réfèrent les contribuables dans leurs conclusions, ils indiquaient être « d'autant plus surpris » de la rectification qu'ils avaient été informés de ce que la vérification de la société holding n'avait eu aucune conséquence fiscale.
Dans leurs conclusions d'appel, les contribuables ont précisé et développé ultérieurement cette observation, comme constitutive selon eux d'une forme d'incohérence de l'administration fiscale, pour avoir redressé leur situation fiscale et pas celle la société holding. Toutefois, en l'état de l'énonciation de cette critique dans leur lettre d'observations, il y a lieu de considérer qu'elle était sans portée réelle et que le service ne devait pas nécessairement y répondre. En outre, en indiquant dans sa réponse pourquoi elle maintenait que la société holding ne pouvait être qualifiée d'animatrice, l'administration fiscale a répondu à cette observation.
Les contribuables soutiennent que l'administration fiscale n'aurait pas répondu à l'observation qu'ils soulevaient dans sa seconde lettre d'observations, reposant sur le fait que l'administration fiscale aurait fait abstraction des éléments qui lui avaient été opposés dans le cadre du contrôle fiscal de la société holding.
Toutefois, si les contribuables peuvent ne pas s'en satisfaire, l'administration fiscale a répondu à cette observation en indiquant que la rectification reposait suffisamment sur les pièces des déclarations d'impôts sur la fortune, sur les éléments recueillis lors du contrôle fiscal de la société holding et sur les informations librement accessibles au public.
Au demeurant, en dehors des garanties prévues aux articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, qui permettent au contribuable, dans les conditions et limites fixées par ces textes, d'opposer à l'administration l'interprétation d'un texte fiscal qu'elle a formellement admise ou une prise de position formelle de sa part sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal, le principe selon lequel une partie ne peut se contredire au détriment d'autrui n'est pas applicable à l'administration fiscale, qui ne peut renoncer à l'application des textes législatifs ou réglementaires définissant les obligations du contribuable, quelle que soit sa position avant la procédure contentieuse.
C'est, dès lors, à tort que les contribuables ont soutenu que l'absence de redressement de la société holding constituait une contradiction avec leur propre redressement.
Ainsi, la réponse de l'administration fiscale comportait les raisons suffisantes conduisant au rejet des observations des contribuables.
Dès lors, il y a lieu de considérer que la réponse de l'administration fiscale était valablement motivée et l'irrégularité invoquée de ce chef par les contribuables sera écartée.
Sur le bien-fondé de la rectification fiscale
À titre infirmatif, les contribuables soutiennent que la réduction d'ISF résulte de la loi et non d'une tolérance administrative. Ils rappellent qu'une holding animatrice, même minoritaire, participe activement à la détermination de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales, ce qui est différent d'une gestion opérationnelle.
Ils font valoir que la société holding s'est dotée d'une équipe chargée de préfiltrer les dossiers, d'un comité d'investissement, dont les membres étaient rémunérés par des jetons de présence, qu'elle a imposé à la société cible un modèle de statuts, un contrat d'animation et un pacte d'actionnaires.
Ils indiquent que le processus de décision était organisé de telle manière qu'aucune décision importante ou stratégique ne pouvant être prise sans l'accord de la société holding, qui détenait 35 % du capital de la société opérationnelle.
Ils considèrent qu'il est suffisamment démontré que la société holding a joué un rôle actif au sein de la société opérationnelle.
À titre confirmatif, l'administration fiscale soutient que ne sont éligibles au dispositif de réduction d'impôt que les sociétés holding animatrices, c'est-à-dire qui participent activement à la conduite de la politique et au contrôle des filiales et qui, le cas échéant et à titre purement interne au groupe, rendent des services administratifs, juridiques, comptables, financiers ou immobiliers. Elle ajoute que l'animation doit être réelle et effective et non seulement potentielle.
Elle soutient que les contribuables ne justifient pas du rôle d'animation de la société holding et qu'ils se prévalent de l'organisation des liens entre la société holding et les sociétés opérationnelles sans mentionner ni produire des éléments concrets.
Elle fait valoir que la participation de la société holding dans la société Crystaline production était minoritaire.
Elle considère que le pouvoir de blocage de la holding - par usage d'un droit de veto qui ne concerne que les décisions à la majorité simple - ne peut être assimilé à un pouvoir de conduite de la politique du groupe et que le droit d'information de la société holding, qui n'est pas extraordinaire pour un investisseur, ne suffit pas à conférer à la holding un rôle d'animation. Elle fait état de ce que la société holding ne dispose d'aucun moyen propre, en termes de salariés et de matériel, que le pacte d'associés conclu au sein de la société opérationnelle distingue les « investisseurs », en l'occurrence la société holding, des « entrepreneurs », correspondant aux associés historiques, et que son contenu établit que les dirigeants de la société opérationnelle demeuraient maîtres de leur affaire et conduisaient la stratégie de développement de celle-ci. Elle ajoute que le pacte d'associés confère de plus larges pouvoirs au président de la société opérationnelle.
Elle estime que la convention d'animation limite le rôle de la société holding à du conseil stratégique ou à la mise en place et la réalisation de contrôle de gestion, ce qui ne caractérise pas une animation effective.
Elle estime que la société holding, qui ne dispose pas de moyens propres, ne poursuit qu'une activité de placements financiers.
Sur ce,
Il résulte de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la
loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008🏛, que les contribuables qui souscrivent au capital d'une société constituant une petite ou moyenne entreprise (PME) exerçant exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et se trouvant en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, au sens des lignes directrices concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les PME (2006/C 194/02), peuvent bénéficier d'une réduction d'ISF, à concurrence de 75 % du montant de leur investissement.
L'instruction administrative 7-S-3-08 du 11 avril 2008 précise que la condition d'exclusivité de l'activité éligible est respectée lorsqu'une activité, a priori non éligible, est exercée à titre accessoire et constitue le complément indissociable d'une activité éligible qui demeure prépondérante.
Est assimilée à une société constituant une PME exerçant à titre prépondérant une activité éligible la société holding qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, a pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales constituant des PME exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale et se trouvant en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers (
Com., 3 mars 2021, pourvoi n° 19-21.161⚖️).
En l'espèce, en ce qui concerne le premier investissement réalisé par les contribuables le 15 juin 2009, il y a lieu de constater que la société holding n'avait à cette date pris aucune participation dans une société opérationnelle.
Or, il ressort des textes qui précèdent qu'une société holding qui ne contrôle aucune filiale opérationnelle ne peut être qualifiée de holding animatrice, ce rôle devant être effectif, et ne peut donc être assimilée aux PME visées par l'article 885-0 V bis du code général des impôts.
Dès lors, la société holding, ne contrôlait aucune filiale opérationnelle au moment du premier versement. Elle était seulement en phase d'étude de dossiers d'investissement et il n'est soutenu ni justifié qu'elle exerçait elle-même une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Ainsi, et comme l'a retenu le tribunal et en dépit des moyens inopérants soutenus par les contribuables, qui conduiraient à admettre l'éligibilité à la réduction d'une société holding dans une telle situation, il ne peut être considéré qu'elle avait alors un rôle d'animation et la proposition de rectification ne peut qu'être considérée comme fondée, en ce qui concerne le premier versement.
Pour la période postérieure, la société holding a pris une participation dans le capital de la société Crystaline production le 29 juillet 2009, à hauteur de 49 % du capital de cette société, antérieurement au second investissement.
Les contribuables se prévalent de ce que la société holding a imposé aux fondateurs de la société opérationnelle un modèle de statuts-types, un contrat d'animation et un pacte d'actionnaires. Ils indiquent particulièrement que le processus de prise de décision au sein des filiales était aménagé de telle sorte qu'aucune décision importante ne puisse être prise sans l'accord de la société holding et qu'un plan stratégique a été établi avant même la présentation du dossier au comité d'investissement.
Toutefois, la mise en place de processus structurels de décisions impliquant la société holding au sein des sociétés opérationnelles ne peut permettre de considérer l'existence d'un pouvoir d'animation de la société holding que lorsque celui-ci s'exerce de manière effective.
Ce pouvoir implique ainsi la démonstration concrète d'une prévalence de la société holding dans la conduite des affaires de la société opérationnelle, à tout le moins de l'influence déterminante de ses choix stratégiques sur l'évolution de la société opérationnelle. Cela se traduit habituellement par l'influence de la société holding sur la structure de la société opérationnelle, et en particulier sur le choix de ses organes de direction, et sur les décisions économiques prises au sein de cette société.
Or, en l'espèce, le niveau de participation minoritaire de la société holding au sein des sociétés opérationnelles ne lui permettait notamment pas de nommer ni de révoquer les dirigeants sociaux, prérogative la plus couramment exercée par une société holding animatrice.
En outre, il ressort des documents produits par les contribuables, et notamment du pacte d'associés conclu au sein de la société Crystaline production, que le fonctionnement de cette société reposait notamment sur un « conseil de direction », comprenant au moins trois membres et statuant à la majorité. Or, la gérante de la société en était membre de droit, la société holding disposait d'un représentant comme « membre investisseur » et le ou les autres membres (au moins un troisième) étaient désignés par la majorité des associés.
Ainsi, en fonction du taux de participation minoritaire qu'elle détenait dans la société opérationnelle, la société holding ne pouvant désigner le troisième membre, ne disposait pas de la majorité au sein du conseil et il ne peut être ainsi utilement soutenu qu'elle n'était pas en capacité d'imposer ses vues au conseil de direction sur toutes les décisions importantes des sociétés opérationnelles.
En outre, si ce même pacte prévoyait que la voix du représentant de la société holding était indispensable au sein du conseil pour prendre certaines décisions, ce qui lui conférait une possibilité de blocage, ce droit ne lui permettait pas, par nature, d'imposer une délibération au conseil. Ainsi le fait que la société holding ait défini en son sein une stratégie ne suffit pas à démontrer qu'elle ait eu un rôle d'animation, dans la mesure où il n'est pas démontré que cette stratégie pouvait s'imposer à la société opérationnelle.
De surcroît, il doit être relevé que le « conseil de direction » mis en place par le pacte d'associés ne correspond à aucun organe des sociétés auquel le code de commerce ou le code civil reconnaît un pouvoir légal de décision en fonction de la forme sociale choisie (gérance, cogérance, directeur général, conseil d'administration...), de sorte que les décisions de ces conseils ne s'imposaient pas dans l'ordre juridique des sociétés opérationnelles.
Il ne résulte, ni du rapport de gestion, ni du bilan des actifs de la société holding que celle-ci ait été dotée de moyens humains propres, étant rappelé que le règlement intérieur du GIE précise que celui-ci avait pour objet « la réunion des moyens techniques et humains entre ses membres à l'effet d'optimiser la gestion fonctionnelle et opérationnelle de ses membres ».
Il sera noté que les contribuables produisent le bilan et le compte de résultat de l'exercice clos le 30 juin 2010, qui ne comportent aucune mention de charges salariales.
Particulièrement, il sera relevé que le pacte d'associés produit par les contribuables désigne la société holding comme un investisseur, tandis que l'associée historique est appelée« l'entrepreneur ».
De plus, à considérer les actes positifs d'animation invoqués par les contribuables, au-delà de l'analyse à laquelle s'est livré le tribunal, que la cour approuve, il y a lieu de relever que, pour une part, il est fait état d'exigences - formalisées par un comité d'investissement réuni en son sein - que la société holding aurait imposé à la société opérationnelle avant d'investir dans celle-ci. Toutefois, il n'est pas justifié que cet investissement soit finalement intervenu en raison du respect par la société opérationnelle des exigences énoncées par le comité d'investissement, ce qui ne saurait résulter du seul fait que la société holding ait finalement procédé à l'investissement.
Pour une autre part, les contribuables font état d'actes d'animation postérieurs aux investissements litigieux. Or, le caractère éligible de l'activité de la société holding bénéficiaire du versement effectué par un contribuable doit s'apprécier à la date de ce versement. Dès lors, les éléments invoqués par les contribuables qui sont postérieurs aux versements sont inopérants pour remettre en cause le bien-fondé de la proposition de rectification concernant cette période.
Les documents invoqués durant la période d'imposition litigieuse concernent, d'un côté, des demandes d'information dans le cadre de la « pré-étude » du dossier d'investissement, de l'autre, deux courriels émanant de la « directrice de participation » (Mme [Ac]), qui transmet à une personne, dont la qualité n'est pas précisée, des courriels qui lui avaient été adressés par une personne signant sous le nom la société opérationnelle, ce qui témoigne seulement d'un report d'information de celle-ci à l'égard d'une représentante de la société holding. Enfin, un courriel est produit qui émane d'une personne (M. [M]) dont la qualité n'est pas précisée et son contenu est tronqué.
Par ailleurs, le fait que l'activité de la société holding ait eu un coût pour elle, comme le soutiennent les appelants, n'est pas révélateur du rôle d'animation qu'ils lui attribuent.
En somme, les contribuables se prévalent essentiellement de l'usage par la société holding de son droit d'information, de contrôle de gestion et de conseil, de sorte que les actes d'animation qu'ils invoquent caractérisent en réalité ceux d'un investisseur dans une PME, qui vise à s'assurer de la pérennité de la valeur de ses participations, et non de l'animation d'un groupe. A cet égard, il convient de relever que la société holding ne détenait qu'une participation minoritaire dans une seule société opérationnelle.
Au vu de ce qui précède, il doit être ainsi retenu que les contribuables ne parviennent pas à justifier que la société holding participait activement à une politique de groupe qu'elle avait défini qu'au contrôle de la société opérationnelle, en tant que filiale.
Dès lors, les contribuables ne justifient pas d'un pouvoir d'animation effectivement exercé par la société holding au sein de la société Crystaline production. Dès lors, les investissements réalisés par les contribuables n'étaient pas éligibles au dispositif fiscal résultant de l'article 885-0-V bis du code général des impôts.
Le jugement sera confirmé.
Sur les questions préjudicielles
Les époux [Ab] estiment que les rehaussements dont ils ont fait l'objet seraient contraires au droit de l'Union européenne.
Ils considèrent que l'avantage fiscal doit justement être ouvert pour des sociétés holding en phase liminaire de développement, ce qui implique un décalage entre la levée des fonds et l'investissement dans les PME.
Ils indiquent que les rescrits concernant les sociétés Truffle et Partech doivent être produits par l'administration fiscale puisque les souscripteurs de ces sociétés se trouvent dans les mêmes conditions que ceux des holding Finaréa. A défaut, l'égalité devant la loi fiscale serait méconnue et il y aurait inégalité de traitement entre les PME dans lesquelles les holding ont investi.
Ils considèrent que pourraient être posées trois questions préjudicielles, rappelées ci-avant.
L'administration fiscale soutient que les dispositions critiquées relèvent du droit interne et non du droit européen et que l'avantage consenti aux contribuables ne constitue pas une aide d'Etat. Elle fait valoir que c'est la société cible et non la société holding animatrice qui doit être en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion.
Elle indique que l'appréciation du rôle d'animation de la société holding relève de chaque espèce et que la situation d'autres sociétés (Truffle et Partech) est sans incidence sur celle de la société holding litigieuse.
Elle considère que le renvoi préjudiciel n'a pas lieu d'intervenir puisque le litige concerne l'application d'un droit interne que le juge national peut tout à fait interpréter.
Sur ce,
Par décision du 11 mars 2008, la Commission européenne a répondu que la loi française TEPA n° 2007-1223 du 21 août 2007, dans sa partie relative à la réduction d'ISF pour les contribuables investissant dans une PME afin de leur permettre d'obtenir des financements nécessaires au démarrage de leur activité ou à leur développement, est constitutive d'une aide compatible avec le traité CE, en application de son article 87 (3).
Toutefois, la question relative à l'éligibilité d'un contribuable à la réduction fiscale reposant sur son investissement dans les holdings animatrices ne détenant pas encore de participation relève de l'application par le juge national de l'article 885-0 V bis du CGI, sans nécessité de saisir la CJUE d'une demande d'interprétation de la décision de la commission européenne précitée, au regard de la situation des sociétés holding animatrices ne détenant pas encore de participations.
En effet, la question posée trouve sa réponse dans un article interne du code général des impôts, commenté par une instruction administrative, et interprété par la Cour de cassation. Elle n'est, dès lors, pas nécessaire à la résolution du litige.
De surcroît, et comme l'a retenu le tribunal, le rescrit individuel prévu par l'article L. 80 B, 1°) du livre des procédures fiscales ne peut être opposable à l'administration fiscale que par la partie qui l'a sollicité, tel n'étant pas le cas de la société holding, et ne constitue pas une norme fiscale lorsqu'il n'est pas publié, ce qui est le cas en l'espèce. Le rescrit ne peut être dans ces conditions assimilé à une aide d'Etat. Les deuxième et troisième questions ne sont ainsi pas nécessaires à la résolution du litige.
Sur les autres demandes
La demande de communication des rescrits Truffle et Partech ne peut prospérer puisque l'animation de la holding s'apprécie concrètement en tenant compte des pièces versées aux débats et la position fiscale prise à l'occasion de ces procédures distinctes n'est pas nécessairement transposable à la situation spécifique de la société Finaréa Oméga.
En outre, la demande de communication sous astreinte n'est assortie d'aucune prétention visant à permettre aux contribuables - dans l'hypothèse même où ces rescrits étaient produits - d'en tirer une quelconque conséquence procédurale ou de fond sur le présent litige. Au demeurant, comme l'indique l'administration fiscale, cette demande serait - en raison de la nature des rescrits - sans effet sur le présent litige.
Cette demande n'a, dès lors, aucun fondement.
Les contribuables, qui perdent en cette instance, en supporteront les dépens d'appel.
Par ailleurs, l'équité commande de les condamner à payer à l'administration fiscale la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.