N° J 24-82.444 F-D
N° 00436
SL2
2 AVRIL 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 AVRIL 2025
La direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-14, en date du 25 mars 2024, qui, dans la procédure suivie contre M. [Aa] [Ab] des chefs, notamment, d'importation de marchandises prohibées, importation et détention de marchandise présentée sous une marque contrefaisante, a condamné ce dernier à dix mois d'emprisonnement avec sursis, une amende douanière, une confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Ac de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects et de la direction régionale des douanes et droits indirects de [Localité 1], les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [Aa] [Ab], et les conclusions de M. Micolet, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'
article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. A la suite d'une information, M. [Aa] [Ab] a été cité devant le tribunal correctionnel pour les faits rappelés ci-dessus.
3. Par jugement du 28 février 2022, le tribunal l'a déclaré coupable, l'a condamné à diverses peines, et a prononcé sur les intérêts civils.
4. M. [Ab] et le ministère public ont interjeté appel de ce jugement.
Examen des moyens
Sur le second moyen
5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé le jugement attaqué en ce qui concerne l'amende douanière et, statuant à nouveau, a condamné M. [Ab] à payer une amende douanière de 29 414 euros, alors « qu'en prenant en considération, pour réduire le montant de l'amende douanière prononcée à l'encontre de Monsieur [Ab] à la somme de 29.414 euros, les capacités financières du prévenu, quand le prononcé d'une telle amende douanière, qui ne constituait pas une peine mais une sanction fiscale, n'était soumis qu'aux prescriptions spécifiques de l'
article 369 §1 du code des douanes🏛 et échappait à celles des
articles 132-1 et 132-20 du code pénal🏛🏛, de sorte qu'elle ne pouvait réduire le montant de cette amende douanière qu'en considération de l'ampleur et de la gravité de l'infraction commise par Monsieur [Ab], ainsi que de sa personnalité, et non en contemplation de sa situation financière, la cour d'appel a violé l'article 369 §1 du code des douanes et l'
article 591 du code de procédure pénale🏛. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 369 du code des douanes :
7. Il résulte de ce texte que le juge qui prononce une amende fiscale, s'il peut en moduler le montant, eu égard à l'ampleur et à la gravité de l'infraction commise, ainsi qu'à la personnalité de son auteur, n'a pas à prendre en considération la situation personnelle, familiale et sociale du contrevenant.
8. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a réduit à 29 414 euros le montant de l'amende douanière, l'arrêt attaqué énonce que cette somme est adéquate au regard de la modicité du montant de la fraude mais aussi des faibles capacités financières de l'intéressé.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et les principes ci-dessus rappelés.
10. En effet, elle ne pouvait, pour réduire le montant de l'amende douanière, prendre en considération la situation financière du prévenu.
11. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation sera limitée aux peines et aux sanctions douanières prononcées, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 25 mars 2024, mais en ses seules dispositions relatives aux peines et aux sanctions douanières, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille vingt-cinq.