Jurisprudence : TA Nice, du 16-01-2024, n° 2102646


Références

Tribunal Administratif de Nice

N° 2102646

6ème chambre
lecture du 16 janvier 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 10 mai, 25 juin 2021 et 4 septembre 2023, M. B A demande au tribunal :

1°) d'annuler l'arrêté n°21/85 du 24 février 2021 par lequel la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins l'a placé en absence injustifiée du 6 au 13 janvier 2021 et a prescrit la retenue de son traitement sur cette période ;

2°) d'enjoindre à la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins de notifier le jugement à intervenir à son comptable et au centre de gestion.

Il soutient que :

- son maintien en télétravail avait été confirmé le 6 mai 2020 et qu'il était matériellement en capacité de télétravailler depuis le 18 juin 2020, de sorte qu'il était logique qu'il se place en situation de télétravail au cours de sa période d'isolement ; la circonstance qu'il dispose d'un VPN confirmait son droit au télétravail ;

- il ignorait l'existence de la charte du temps de travail ;

- le médecin du travail avait estimé le 17 septembre 2020, qu'il pouvait bénéficier d'un ou deux jours de télétravail ;

- certains de ses collègues ''cas contact'' se sont placés en position de télétravail sans avoir à justifier d'un arrêt de travail, ni qu'on ne les place en position d'absence injustifiée ;

- il n'a jamais reçu de réponse à ses problèmes de CET et congés ;

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 août et 15 septembre 2023, la Communauté d'agglomération des pays de Lérins conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A une somme de 1 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative🏛.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;

- la loi n°2012-347 du 12 mars 2012🏛 ;

- le décret n°2016-151 du 11 février 2016🏛 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guilbert,

- les conclusions de Mme Belguèche, rapporteure publique,

- et les observations de M. A.

Considérant ce qui suit :

1. M. A a été recruté par la Ville de Cannes, en qualité d'ingénieur contractuel, pour une durée déterminée allant du 4 février 2004 au 31 mars 2006. Par arrêté du 1er avril 2006, son contrat a été transféré au syndicat intercommunal d'assainissement unifié du bassin cannois, puis renouvelé jusqu'au 3 février 2010. L'intéressé a, par la suite, été recruté en contrat à durée indéterminée en qualité de directeur du suivi patrimonial et contractuel. Par arrêté du 30 décembre 2016, M. A a été transféré à la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins en qualité d'ingénieur au sein de la direction exploitation et réclamations usagers à compter du 1er janvier 2017. Le 5 janvier 2021, M. A, alors en congés annuels, a informé les ressources humaines de la collectivité de ce qu'il avait été reconnu ''cas contact au Covid 19'' et devait s'isoler jusqu'au 12 janvier 2021. Le 11 janvier 2021, la collectivité lui a demandé de transmettre un arrêt de travail correspondant à cette période. Le 13 janvier 2021, l'intéressé s'y est refusé, au motif qu'il s'était placé en position de télétravail et demandait à poser deux jours de congés supplémentaires pour rejoindre son domicile. Par un arrêté du 24 février 2021, dont le requérant demande l'annulation, la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins l'a placé en situation d'absence injustifiée pour la période du 6 au 13 janvier 2021 et a effectué une retenue sur traitement pour cette période.

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable à la date du litige : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. Les indemnités peuvent tenir compte des fonctions et des résultats professionnels des agents ainsi que des résultats collectifs des services. S'y ajoutent les prestations familiales obligatoires".

3. Aux termes de l'article 133 la loi n°2012-347 du 12 mars 2012🏛 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emplois des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " Les fonctionnaires relevant de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail tel qu'il est défini au premier alinéa de l'article L.1222-9 du code du travail🏛. L'exercice des fonctions en télétravail est accordé à la demande du fonctionnaire et après accord du chef de service. Il peut y être mis fin à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance. Les fonctionnaires télétravailleurs bénéficient des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public./ Le présent article est applicable aux agents publics non fonctionnaires et aux magistrats. ". Par ailleurs, aux termes de l'article 5 du décret n°2016-151 du 11 février 2016🏛 : " L'exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l'agent. Celle-ci précise les modalités d'organisation souhaitées. () Le chef de service, l'autorité territoriale ou l'autorité investie du pouvoir de nomination apprécie la compatibilité de la demande avec la nature des activités exercées et l'intérêt du service () Une réponse écrite est donnée à la demande de télétravail dans un délai d'un mois maximum à compter de la date de sa réception ou de la date limite de dépôt lorsqu'une campagne de recensement des demandes est organisée".

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A, identifié comme personnel fragile dans le cadre de la pandémie de Covid 19, a été informé le 6 mai 2020 de ce qu'il bénéficiait d'une préconisation de maintien en télétravail du médecin de prévention, que la collectivité s'est employée à organiser la mise en place dudit télétravail, que néanmoins, M. A a poursuivi de sa propre initiative son activité en présentiel, que le 11 mai 2020, la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins a mis fin à la possibilité, pour l'ensemble du personnel, d'effectuer un temps complet en télétravail. Le 15 septembre 2020, M. A, qui devait exercer ses fonctions dans les locaux de Cannes La Bocca, a d'ailleurs été invité à restituer l'ordinateur qui lui avait été confié pour lui permettre de télétravailler. Dans ces conditions, M. A, qui n'allègue pas avoir formalisé une demande de télétravail en bonne et due forme, ne saurait se prévaloir de ce qu'il était en possession d'un ordinateur équipé d'un VPN pour justifier d'un droit au télétravail, la circonstance qu'il ignorait l'existence d'une charte du temps de travail étant sans effet à cet égard. Il n'établit d'ailleurs pas, en dépit de l'avis du médecin du travail qu'il invoque, avoir bénéficié d'une autorisation de sa hiérarchie en ce sens. Par ailleurs, après avoir informé la direction des ressources humaines de ce qu'il ne rejoindrait pas son poste de travail en raison de son placement à l'isolement, M. A a été invité à justifier de son absence par la production d'un arrêt de travail, ce à quoi il s'est refusé, se déclarant unilatéralement en télétravail. A cet égard, il ne justifie pas, ni même n'allègue, avoir accompli quelque mission que ce soit au cours de la période litigieuse.

5. En outre, s'il se prévaut, au demeurant sans l'établir, de ce que certains de ses collègues placés en isolement en leur qualité de " cas contact " n'auraient pas été contraints de justifier leur absence, ni ne se seraient vu retenir la rémunération correspondante, il ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité pour obtenir le bénéfice d'un avantage auquel il ne peut légalement prétendre.

6. Enfin, en soutenant qu'il n'a jamais obtenu de réponse à ses difficultés en matière de congés et de compte épargne temps et que sa hiérarchie a été particulièrement malveillante en refusant de lui octroyer des jours de congé de régularisation, il ne démontre pas l'illégalité de ce refus.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. A doivent être rejetées, ensemble celles formulées à fin d'injonction.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Communauté d'agglomération Cannes Pays de Lérins en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et à la communauté d'agglomération des pays de Lérins.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Taormina président,

Mme Gazeau, première conseillère,

Mme Guilbert, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2024.

La rapporteure,

signé

L. Guilbert

Le président,

signé

G. Taormina La greffière,

signé

L. Bianchi

La République mande et ordonne au préfet des Alpes-Maritimes en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Ou par délégation, la greffière

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