Jurisprudence : CE Contentieux, 19-02-2025, n° 499823

CE Contentieux, 19-02-2025, n° 499823

A69236WC

Référence

CE Contentieux, 19-02-2025, n° 499823. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/115897263-ce-contentieux-19022025-n-499823
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Abstract

Le Conseil d'État a jugé le 19 février que l'Arcom n'a pas commis d'illégalité dans son analyse qui l'a amenée à écarter C8 et NRJ12, aussi bien dans l'appréciation qu'elle a portée sur chacun des dossiers que dans la comparaison de leurs mérites.


CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
ML
Nos 499823, 500009
__________
SOCIETES NRJ 12 et NRJ GROUP
SOCIETE C8
__________
M. Cyrille Beaufils
Rapporteur
__________
M. Florian Roussel
Rapporteur public
__________
Séance du 14 février 2025
Décision du 19 février 2025
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 5ème chambre
de la section du contentieux
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 499823, par une requête, un mémoire en réplique et deux
nouveaux mémoires, ainsi qu'un mémoire distinct présenté en application de l'article R. 611-30
du code de justice administrative, enregistrés le 17 décembre 2024 et les 21 janvier et
5 et 7 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les sociétés NRJ 12 et NRJ
Group demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision de l'Autorité de régulation de
la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) rejetant la candidature de NRJ 12 à
l'attribution d'une autorisation d'utilisation d'une ressource radioélectrique pour la diffusion par
voie hertzienne terrestre en mode numérique, en clair et en haute définition d'un service de
télévision à vocation nationale, révélé par un communiqué de presse du 12 décembre 2024 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1160 du 11 décembre
2024 de l'Arcom autorisant la société Ouest-France TV à utiliser une ressource radioélectrique
pour la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition
du service de télévision à vocation nationale dénommé OFTV ;
3°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1155 du 11 décembre
2024 de l'Arcom autorisant la société CMI France à utiliser une ressource radioélectrique pour la
diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition du
service de télévision à vocation nationale dénommé CMI TV ;
N
os 499823, 500009 - 2 -
4°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision de l'Arcom, révélée par le
même communiqué de presse du 12 décembre 2024, de ne pas attribuer la totalité de la ressource
radioélectrique prévue par l'appel à candidatures ;
5°) d'enjoindre à l'Arcom de réexaminer la candidature de la société NRJ 12
dans un délai de sept jours et de lui délivrer, à titre provisoire, une autorisation ;
6°) à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de
questions préjudicielles relatives à la compatibilité de la procédure organisée par l'article 30-1 de
la loi du 30 septembre 1986 avec les objectifs de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement
européen et du Conseil du 11 décembre 2018, notamment s'agissant de la précision des critères
de sélection ainsi que de la possibilité et, le cas échéant, des modalités selon lesquelles le
régulateur décide de limiter, en cours de procédure d'attribution, le nombre de droits d'utilisation
du spectre radioélectrique à octroyer et de « présélectionner » un nombre de candidats en vue de
la négociation de la convention prévue à l'article 28 de cette loi ;
7°) de mettre à la charge de l'Arcom la somme de 6 000 euros au titre de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la procédure de sélection est irrégulière du fait de son manque de
transparence et du choix de l'Arcom de procéder à une présélection des candidats ;
- le rejet de la candidature de NRJ 12 n'est pas motivé ;
- l'étude d'impact préalable publiée le 21 décembre 2023 est insuffisante et
trompeuse dans ses développements relatifs à la TNT payante et à l'évolution du marché
publicitaire ;
- la décision de l'Arcom de n'attribuer que onze autorisations méconnaît
l'obligation de l'attribution de toutes les fréquences disponibles et constitue une modification
substantielle en cours de procédure des conditions d'attribution des fréquences, fondée sur une
étude d'impact non publiée ;
- l'Arcom a méconnu les critères d'attribution fixés par la loi du 30 septembre
1986 et entaché ses décisions d'erreur d'appréciation en écartant la candidature de NRJ 12 et en
retenant celles de OFTV et CMI TV.
Par trois mémoires en défense, enregistrés les 6 et 30 janvier et le 6 février
2025, l'Arcom conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la
charge des sociétés NRJ 12 et NRJ Group. Elle soutient que les moyens soulevés par les
requérantes ne sont pas fondés.
Par trois mémoires en défense et un mémoire distinct présenté en application
de l'article R. 611-30 du code de justice administrative, enregistrés les 6 janvier et 3 et 7 février
2025, la société Ouest-France TV conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000
euros soit mise à la charge des sociétés NRJ 12 et NRJ Group. Elle soutient que les moyens
soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.
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La requête a été communiquée à la société CMI France, qui n'a pas produit de
mémoire.
2° Sous le n° 500009, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau
mémoire, enregistrés le 24 décembre 2024 et les 29 janvier et 6 février 2025 au secrétariat du
contentieux du Conseil d'Etat, la société C8 demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 décembre 2024 de
l'Arcom rejetant sa candidature à l'attribution d'une autorisation d'utilisation d'une ressource
radioélectrique pour la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique, en clair et en
haute définition d'un service de télévision à vocation nationale ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1155 du 11 décembre
2024 de l'Arcom autorisant la société CMI France à utiliser une ressource radioélectrique pour la
diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition du
service de télévision à vocation nationale dénommé CMI TV ainsi que la convention du
10 décembre 2024 annexée ;
3°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1160 du 11 décembre
2024 de l'Arcom autorisant la société Ouest-France TV à utiliser une ressource radioélectrique
pour la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition
du service de télévision à vocation nationale dénommé OFTV ainsi que la convention du
10 décembre 2024 annexée ;
4°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1156 du 11 décembre
2024 de l'Arcom autorisant la société TFX à utiliser une ressource radioélectrique pour la
diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition du
service de télévision à vocation nationale dénommé TFX ainsi que la convention du 10 décembre
2024 annexée ;
5°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1157 du 11 décembre
2024 autorisant la société Télé Monte-Carlo à utiliser une ressource radioélectrique pour la
diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition du
service de télévision à vocation nationale dénommé TMC ainsi que la convention du
10 décembre 2024 annexée ;
6°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2024-1159 du 11 décembre
2024 autorisant la société EDI-TV à utiliser une ressource radioélectrique pour la diffusion par
voie hertzienne terrestre en mode numérique en clair et en haute définition du service de
télévision à vocation nationale dénommé W9 ainsi que la convention du 10 décembre 2024
annexée ;
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7°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision de l'Arcom, révélée par le
communiqué de presse du 12 décembre 2024, de ne pas attribuer la totalité de la ressource
radioélectrique prévue par l'appel à candidatures ;
8°) d'enjoindre à l'Arcom de réexaminer la candidature de C8 et de l'admettre
à négocier une convention ou, subsidiairement, de relancer un appel à candidatures pour
l'attribution des fréquences correspondant aux autorisations annulées ;
9°) de mettre à la charge de l'Arcom la somme de 10 000 euros au titre de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les délais de convocation du collège de l'Arcom n'ont pas été respectés ;
- la procédure de sélection a méconnu le principe de transparence et d'égalité
entre les candidats, ainsi que le droit au procès équitable et le droit au recours, garantis par les
articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et le
principe de confiance légitime ;
- le rejet de la candidature de C8 et les autorisations contestées sont
insuffisamment motivées ;
- la décision de l'Arcom de n'attribuer que onze autorisations méconnaît les
dispositions de l'article 55 de la directive (UE) 2018/1972 du 11 décembre 2018, l'obligation de
gestion optimale des ressources et les engagements pris par l'Autorité ;
- l'Arcom a accordé une importance illicite aux manquements reprochés à C8 ;
- l'Arcom a méconnu les critères d'attribution fixés par la loi du 30 septembre
1986 et entaché ses décisions d'erreur d'appréciation, notamment au regard de l'intérêt du public
et de l'équilibre concurrentiel, en écartant la candidature de C8 et en retenant celles de OFTV,
CMI TV, TFX, TMC et W9.
Par deux mémoires en défense et un mémoire distinct présenté en application
de l'article R. 611-30 du code de justice administrative, enregistrés les 10 janvier et 3 février
2025, la société Ouest-France TV conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 10 000
euros soit mise à la charge de la société C8. Elle soutient que les moyens soulevés par la
requérante ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 13 et 30 janvier 2025, l'Arcom
conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la
société C8. Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2025, la société EDI-TV
conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge de la
société C8. Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
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Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2025, les sociétés TFX et
Télé Monte Carlo concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise
à la charge de la société C8 pour chacune d'elles. Elles soutiennent que les moyens soulevés par
la requérante ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée aux sociétés CMI France et La Chaîne Info, qui
n'ont pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du
11 décembre 2018 ;
- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyrille Beaufils, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica & Molinié,
avocat de la société NRJ 12, de la société NRJ Group et de la société C8 ; à la SARL Gury &
Maître, avocat de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique , à la
société Dreuzy Avocats, avocat de la société Ouest France TV ; à la SCP Célice, Texidor, Perier,
avocat de la société LCI, de la société TFX et de la société TMC et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez,
avocat de la société EDI-TV ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 février 2025, présentée par les sociétés
NRJ 12 et NRJ Group ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté
de communication : « La communication au public par voie électronique est libre. / L'exercice
de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d'une part, par le respect de la
dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d'autrui, du caractère pluraliste
de l'expression des courants de pensée et d'opinion et, d'autre part, par la protection de
l'enfance et de l'adolescence, par la sauvegarde de l'ordre public, par les besoins de la défense
nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux
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moyens de communication, ainsi que par la nécessité, pour les services audiovisuels, de
développer la production audiovisuelle. »
2. S'agissant des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode
numérique (TNT), utilisant des fréquences qui constituent une ressource limitée, le législateur a
confié à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom)
compétence pour accorder les autorisations de diffusion de ces services. Lorsque de telles
autorisations arrivent à échéance, il appartient à l'Arcom, en vertu de l'article 31 de la même loi,
de procéder, tout d'abord, à une consultation publique et à une étude d'impact afin de déterminer
si la situation économique du marché de la TNT est favorable au lancement d'un appel à
candidatures ou s'il y a lieu de le différer pour une durée maximale de deux ans, renouvelable
une fois dans les mêmes conditions. L'Arcom procède ensuite à l'appel à candidatures et dispose
aux termes de la loi d'un délai de huit mois à compter de la clôture de la période de réception des
candidatures pour se prononcer sur celles-ci. Il lui incombe, enfin, d'attribuer les autorisations au
vu des mérites comparés des candidatures reçues en sélectionnant les projets qui contribuent le
mieux à la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels et sont les plus à
même de répondre à l'intérêt du public au regard des critères fixés par la loi et rappelés aux
points 28 et 29 ci-dessous.
3. Saisi, le cas échéant, d'un recours pour excès de pouvoir contre les
autorisations ainsi délivrées et le rejet d'autres candidatures, il appartient au Conseil d'Etat,
statuant au contentieux, de juger de la légalité des décisions de l'Arcom en contrôlant
notamment, compte tenu des moyens soulevés devant lui, la régularité de la procédure mise en
œuvre par l'Arcom ainsi que la correcte application, par l'Autorité, des critères légaux dans
l'appréciation des candidatures en cause.
4. Il ressort des pièces des dossiers que, par une décision du 28 février 2024,
l'Arcom a, sur le fondement de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986, lancé un appel à
candidatures pour l'attribution de quinze autorisations pour la diffusion de services de TNT à
l'échéance, les 28 février, 5 juin et 31 août 2025, des autorisations détenues depuis vingt ans par
dix chaînes gratuites (BFM TV, CNews, CStar, C8, Gulli, LCI, NRJ 12, TFX, TMC et W9) et
cinq chaînes payantes (Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport, Paris Première et Planète+).
Après avoir déclaré recevables vingt-cinq candidatures, dont une a fait l'objet d'un désistement,
l'Arcom a, par un communiqué de presse du 24 juillet 2024, annoncé avoir « présélectionné, à
titre de mesure préparatoire », quinze projets pour lesquels elle a indiqué qu'elle allait négocier
avec les éditeurs concernés les conventions prévues par l'article 28 de la loi du 30 septembre
1986. Le 5 décembre 2024, le groupe Canal Plus a annoncé retirer ses chaînes payantes de la
TNT et renoncer ainsi aux candidatures de ses quatre chaînes qui figuraient parmi les quinze
présélectionnées. Enfin, par des décisions du 11 décembre 2024, l'Arcom a délivré onze
autorisations, notamment pour les services CMI TV, OFTV, TFX, TMC et W9, et a rejeté les
autres candidatures, dont celles des sociétés C8 et NRJ 12.
5. Les requêtes des sociétés NRJ 12 et NRJ Group, d'une part, et de la société
C8, d'autre part, qui tendent à l'annulation des rejets de leurs candidatures et des autorisations
attribuées aux cinq services mentionnés ci-dessus et contestent le choix de l'Arcom de ne pas
attribuer immédiatement, dans le cadre de cette procédure, quatre des fréquences à pourvoir,
présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule
décision.
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Sur la régularité de la procédure :
6. Aux termes de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 : « La délivrance
des autorisations d'usage de la ressource radioélectrique pour chaque nouveau service diffusé
par voie hertzienne terrestre autre que ceux exploités par les sociétés nationales de programme,
est subordonnée à la conclusion d'une convention passée entre l'Autorité de régulation de la
communication audiovisuelle et numérique au nom de l'Etat et la personne qui demande
l'autorisation. (…) ». Aux termes de son article 30-1 : « Sous réserve des dispositions de
l'article 26, l'usage de ressources radioélectriques pour la diffusion de tout service de télévision
par voie hertzienne terrestre en mode numérique est autorisé par l'Autorité de régulation de la
communication audiovisuelle et numérique dans les conditions prévues au présent article /
I. - L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique définit des
catégories de services et lance un appel aux candidatures dont la zone géographique équivaut à
l'ensemble du territoire métropolitain pour les services à vocation nationale. (…) Celle-ci fixe le
délai dans lequel les candidatures doivent être déposées (…). / II. - (…) A l'issue du délai prévu
au premier alinéa du I, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique
arrête la liste des candidats dont le dossier est recevable. / III. - L'Autorité de régulation de la
communication audiovisuelle et numérique procède à une audition publique des candidats. / Elle
accorde les autorisations d'usage de la ressource radioélectrique en appréciant l'intérêt de
chaque projet pour le public (…) ». Son article 31 dispose que : « Les autorisations relatives à
l'usage de la ressource radioélectrique que l'Autorité de régulation de la communication
audiovisuelle et numérique peut accorder, dans les conditions prévues à la présente section,
tiennent compte de la situation économique du marché des services de communication
audiovisuelle concernés. / Si les décisions d'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique
sont susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause, l'Autorité de régulation
de la communication audiovisuelle et numérique procède, préalablement au lancement des
procédures prévues aux articles 29, 30, 30-1, 30-5 et 30-6, à une consultation publique (…). /
Les modalités de cette consultation sont déterminées par l'autorité. / Lorsqu'elle procède aux
consultations publiques prévues au deuxième alinéa (…), l'Autorité de régulation de la
communication audiovisuelle et numérique procède également à une étude d'impact, notamment
économique, des décisions d'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique. Cette étude
est rendue publique. / Si la consultation publique prévue au deuxième alinéa (…) ou l'étude
d'impact prévue à l'avant-dernier alinéa du présent article font apparaître que la situation
économique du marché des services de communication audiovisuelle concernés n'est pas
favorable au lancement des procédures prévues aux articles 29, 29-1, 30-1, 30-5 et 30-6,
l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut différer ce
lancement pour une durée maximale de deux ans, renouvelable une fois dans les mêmes
conditions ». Enfin, aux termes de l'article 32 de la même loi : « Les autorisations prévues à la
présente section sont publiées au Journal officiel de la République française avec les obligations
dont elles sont assorties. / Les refus d'autorisation sont motivés et sont notifiés aux candidats
dans un délai d'un mois après la publication prévue à l'alinéa précédent. (…) ».
7. Ces dispositions transposent les objectifs de la directive du Parlement
européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant un code des communications
électroniques européens, dont l'article 45 dispose que : « Les Etats membres (…) veillent à ce
que l'attribution des droits d'utilisation individuels du spectre radioélectrique pour les réseaux
et les services de communications électroniques (…) soient fondés sur des critères objectifs,
transparents, favorables à la concurrence, non discriminatoires et proportionnés » et l'article 48
que : « Sans préjudice des procédures et critères particuliers adoptés par les Etats membres
pour octroyer des droits d'utilisation individuel du spectre radioélectrique à des fournisseurs de
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services de contenus de radio ou de télévision en vue de poursuivre des objectifs d'intérêt
général conformément au droit de l'Union, les droits d'utilisation individuels du spectre
radioélectrique sont octroyés au moyen de procédures ouvertes, objectives, transparentes, non
discriminatoires et proportionnées (…) ». Par ailleurs, en adoptant les articles précités de la loi
du 30 septembre 1986, le législateur a fait usage de la faculté prévue à l'article 46 de la même
directive, en vertu duquel : « 1. Les Etats membres (…) limitent l'octroi de droits d'utilisation
individuels du spectre radioélectrique aux situations dans lesquelles de tels droits sont
nécessaires pour maximiser l'efficience de cette utilisation en fonction de la demande et en
tenant compte des critères énoncés au deuxième alinéa », conformément aux dispositions de
l'article 55 de cette directive, qui dispose : « (…) lorsqu'un Etat membre conclut qu'un droit
d'utilisation du spectre radioélectrique ne peut être soumis à une autorisation générale et
lorsqu'il examine s'il convient de limiter le nombre de droits d'utilisation du spectre
radioélectrique à octroyer, il doit entre autres: / a) indiquer clairement les motifs justifiant de
limiter les droits d'utilisation, notamment en prenant dûment en considération la nécessité
d'apporter un maximum d'avantages aux utilisateurs et de stimuler la concurrence et
réexaminer, le cas échéant, la limitation à intervalles réguliers ou à la demande des entreprises
concernées, pour autant que celle-ci soit raisonnable; / donner à toutes les parties intéressées,
dont les utilisateurs et les consommateurs, la possibilité d'exprimer leur point de vue sur une
limitation éventuelle lors d'une consultation publique menée conformément à l'article 23. /
Lorsqu'un Etat membre conclut qu'il y a lieu de limiter le nombre de droits d'utilisation, il
définit clairement les objectifs poursuivis au moyen d'une procédure de sélection concurrentielle
ou comparative conçue au titre du présent article, justifie ces objectifs et, si possible, les
quantifie, en prenant dûment en considération la nécessité de réaliser les objectifs nationaux et
ceux du marché intérieur. Les objectifs dont l'Etat membre peut se prévaloir pour concevoir la
procédure de sélection en question, outre celui consistant à favoriser la concurrence, se limitent
à une ou plusieurs des possibilités suivantes: / a) renforcer la couverture; / b) garantir la qualité
de service requise; / c) favoriser l'utilisation efficiente du spectre radioélectrique, notamment en
tenant compte des conditions dont sont assortis les droits d'utilisation et du niveau des
redevances; / d) favoriser l'innovation et le développement de l'activité économique. / L'autorité
de régulation nationale ou une autre autorité compétente définit clairement la procédure de
sélection et en justifie le choix, y compris en ce qui concerne toute phase préalable pour accéder
à ladite procédure. Par ailleurs, elle indique clairement le résultat de toute évaluation connexe
de la situation concurrentielle, technique et économique du marché et fournit les motifs de
l'utilisation éventuelle et du choix des mesures en application de l'article 35. / 3. Les Etats
membres publient et motivent clairement toute décision sur la procédure de sélection choisie et
les règles y afférentes. Ils publient également les conditions dont sont assortis les droits
d'utilisation. / 4. Après avoir déterminé la procédure de sélection, l'Etat membre lance un appel
à candidatures pour l'octroi de droits d'utilisation. / 5. Lorsqu'un Etat membre conclut que des
droits d'utilisation du spectre radioélectrique supplémentaires ou une combinaison
d'autorisation générale et de droits d'utilisation individuels peuvent être octroyés, il publie cette
conclusion et lance la procédure pour l'octroi de ces droits. / 6. Lorsque l'octroi des droits
d'utilisation du spectre radioélectrique doit être limité, les Etats membres octroient ces droits
sur la base de critères de sélection et d'une procédure de sélection qui sont objectifs,
transparents, non discriminatoires et proportionnés. Ces critères de sélection prennent dûment
en considération la réalisation des objectifs et des exigences prévus aux articles 3, 4, 28 et 45. »
En ce qui concerne l'étude d'impact :
8. Il résulte des dispositions précitées de l'article 31 de la loi du 30 septembre
1986 qu'il appartient à l'Arcom, lorsque les décisions d'autorisation d'usage de la ressource
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radioélectrique sont susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause, de
procéder, avant le lancement de la procédure d'appel à candidatures, à une consultation publique
et une étude d'impact.
9. Il lui appartient également de déterminer le contenu de cette étude d'impact
afin qu'elle lui permette, au même titre que la consultation publique, notamment d'apprécier la
situation économique du marché des services de communication audiovisuelle concernés en vue
de différer le lancement de l'appel à candidatures au cas où elle ne serait pas favorable.
10. En l'espèce, eu égard au contenu du document en cause, les sociétés
NRJ 12 et autre ne sont pas fondées à soutenir que cette étude, qui constate notamment la
tendance à une contraction du marché publicitaire de la TNT gratuite et les incertitudes sur
l'avenir de la TNT payante, serait insuffisante, en particulier en ce qu'elle n'examinerait pas les
conséquences d'un éventuel retrait du marché des chaînes payantes du groupe Canal Plus.
11. Par ailleurs, le document interne à l'Arcom daté de novembre 2024 et
intitulé « TNT – Analyse de l'opportunité de la création de nouvelles chaînes gratuites », qui a
été communiqué à sa demande à la société NRJ 12, ne peut, contrairement à ce que soutiennent
les requérantes, être regardé comme se substituant à l'étude d'impact réalisée et publiée par
l'Arcom avant l'appel à candidatures en application de l'article 31 de la loi du 30 septembre
1986 précitée. Le moyen tiré de ce que la décision de l'Arcom serait irrégulière faute que ce
document ait fait l'objet des mesures de publicité prévues pour l'étude d'impact ne peut donc
qu'être écarté.
En ce qui concerne la procédure d'appel à candidatures :
S'agissant de la phase de présélection :
12. Il résulte des dispositions citées au point 6 qu'il incombe à l'Arcom, après
s'être prononcée sur la recevabilité des candidatures reçues, de poursuivre l'instruction des
dossiers déclarés recevables. Afin d'être en mesure d'apprécier l'intérêt respectif des différents
projets qui lui sont présentés, l'Arcom est tenue de statuer sur l'ensemble de ces candidatures et
de décider à l'issue de cette instruction de leur acceptation ou de leur rejet au cours d'une même
séance.
13. D'une part, si, à l'issue des auditions menées au cours de l'instruction, il est
loisible à l'Arcom, dans un souci de bonne gestion administrative, d'engager la négociation de la
convention prévue par l'article 28 précité avec les seuls candidats auxquels elle envisage, à ce
stade de la procédure, d'attribuer une fréquence, elle ne saurait statuer définitivement, dès ce
stade, sur le rejet de certaines candidatures. D'autre part, aucune disposition législative ou
réglementaire ne fait obstacle à ce que le contenu du dossier de candidature soit modifié lors de
la négociation de cette convention, dès lors que ces modifications n'ont pas pour effet de
remettre en cause les conditions dans lesquelles l'Arcom a porté, au stade de la phase de
présélection, son appréciation sur les mérites comparés des différentes demandes.
14. Enfin, peuvent être utilement soulevés, au soutien d'un éventuel recours
formé contre les décisions prises par le régulateur sur l'ensemble des candidatures au terme de
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cette procédure, des moyens mettant en cause, par la voie de l'exception, la légalité de la mesure
préparatoire par laquelle l'Arcom a choisi de ne pas engager les négociations avec certains
candidats ou contestant l'ampleur des modifications apportées par les candidats retenus à leur
dossier de candidature postérieurement à la décision du régulateur d'engager avec eux de telles
négociations.
15. Les sociétés requérantes ne sont, dès lors, pas fondées à soutenir que la
procédure ainsi organisée, alors même qu'elle permet aux seuls candidats présélectionnés de
modifier leur projet dans le cadre de la négociation de la convention prévue par l'article 28,
méconnaîtrait par elle-même le principe d'égalité entre les candidats résultant des dispositions
citées au point 6, le droit au recours ni, en tout état de cause, le principe de confiance légitime
des éditeurs dont l'autorisation arrive à échéance et qui sont candidats à son renouvellement.
16. En l'espèce, d'une part, si les caractéristiques du projet de CMI TV figurant
dans la convention annexée à son autorisation diffèrent de celles présentées dans son dossier de
candidature, en particulier en ce qui concerne son budget, revu à la hausse, ainsi que le volume
horaire consacré aux documentaires et aux magazines, réduit de quelque 6 600 heures annuelles
à 4 000, il ne ressort pas des pièces des dossiers, compte tenu notamment de l'importance très
significative que conservent ces genres dans la programmation de la chaîne, que ces
modifications auraient eu pour effet de remettre en cause les conditions dans lesquelles l'Arcom
a porté son appréciation au stade de la phase de présélection.
17. Il en va de même, d'autre part, de la réduction du volume d'inédits retenu
dans la convention conclue par l'Arcom avec W9, ce volume demeurant nettement supérieur à
celui proposé, notamment, par NRJ 12.
18. Enfin, la société Ouest-France TV ayant, comme le lui permettait l'appel à
candidatures, indiqué dans son dossier de candidature viser une date de début d'émission au
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er septembre 2025, le choix de cette même date par la décision attaquée pour le début de la
diffusion du service ne saurait être regardé comme une modification du projet qui serait
intervenue lors de la négociation de sa convention avec l'Arcom de nature à remettre en cause
les conditions de l'appréciation de cette dernière au stade de la phase de présélection. Il en va de
même de la légère réduction de ses engagements en matière de diffusion d'inédits.
19. Par suite, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la
procédure aurait, dans les circonstances de l'espèce, méconnu les principes rappelés au point 13.
S'agissant de la convocation du collège de l'Arcom :
20. Contrairement à ce qui est allégué, il ne ressort pas des pièces des dossiers
que les règles de convocation applicables aux délibérations du collège de l'Arcom auraient été
méconnues lors de la séance du 11 décembre 2024 au cours de laquelle ont été adoptées les
décisions attaquées.
En ce qui concerne la motivation des décisions attaquées :
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21. D'une part, il ressort des pièces des dossiers que le moyen tiré de ce que les
motifs du rejet de la candidature de la société NRJ 12 ne lui auraient pas été communiqués
manque en fait.
22. D'autre part, il ressort des pièces des dossiers que la décision de rejet de la
candidature de la société C8 énonce les critères légaux et les éléments de fait sur lesquels
l'Arcom s'est fondée pour ne pas retenir son projet et qu'elle est, dès lors, suffisamment
motivée.
23. Enfin, si la société C8 soutient que les autorisations contestées
méconnaîtraient les dispositions des articles 45 et 48 de la directive du 11 décembre 2018 en ce
qu'elles ne seraient pas motivées, ces dispositions ont été transposées en droit interne par celles
de la loi du 30 septembre 1986 citées au point 6. La requérante, qui n'allègue pas que cette
transposition serait incomplète, ne peut donc directement se prévaloir, à l'encontre des
autorisations attaquées, qui ne sont pas réglementaires, des dispositions de cette directive.
Sur le choix de ne pas attribuer la totalité des autorisations mentionnées dans
l'appel à candidatures :
24. D'une part, s'il résulte de la décision de l'Arcom du 28 février 2024 lançant
l'appel à candidatures que celui-ci portait sur l'autorisation de quinze services de télévision « en
clair (“gratuit”) ou sous condition d'accès (“payant”) », sans que l'Autorité distingue, dès ce
stade, un nombre d'autorisations réservé à l'un ou l'autre de ces modes, il ressort des pièces des
dossiers que cette procédure avait pour objet le renouvellement d'autorisations précédemment
attribuées, pour cinq d'entre elles, à des chaînes payantes. Il ressort en outre de l'étude d'impact
mentionnée ci-dessus que, si l'Arcom y relevait les incertitudes portant sur l'avenir de la TNT
payante, elle concluait néanmoins à l'importance de cette offre pour le paysage audiovisuel
français. Enfin, au terme de la phase d'instruction, l'Arcom a, comme il a été dit ci-dessus,
présélectionné le 24 juillet 2024 cinq chaînes payantes, parmi lesquelles quatre chaînes du
groupe Canal Plus s'étant portées candidates à leur renouvellement. Par suite, le retrait de ces
quatre chaînes, annoncé par le groupe Canal Plus le 5 décembre 2024, constituait pour l'Autorité
une circonstance nouvelle, intervenant six jours avant sa délibération pour attribuer les
fréquences.
25. Il ressort, d'autre part, des pièces des dossiers que le chiffre d'affaires du
marché publicitaire de la TNT gratuite connaît, depuis plusieurs années, une stagnation ou une
diminution, qui risque de s'accentuer avec la baisse tendancielle des audiences résultant,
notamment, d'une évolution des usages des consommateurs de médias et conduisant la TNT à
capter une part décroissante des recettes publicitaires totales. Il ressort également de l'étude
d'impact déjà mentionnée, réalisée dans un contexte où cinq des fréquences étaient occupées par
des chaînes payantes, que la situation économique des acteurs de la TNT gratuite demeure fragile
et, pour une partie d'entre eux, structurellement déficitaire, la majorité des contributeurs à la
consultation publique menée par l'Arcom concluant, pour ce motif, à la nécessité de ne pas
accroître le nombre de chaînes gratuites.
26. Dans ce contexte, et compte tenu du délai de huit mois qui lui était imparti
par le législateur à compter de la fin de la période de réception des candidatures, le 15 mai 2024,
pour statuer sur les demandes et de la date toute proche d'expiration des autorisations
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précédentes, dès le 28 février 2025 pour huit d'entre elles, l'Arcom a pu légalement estimer
qu'elle n'était pas en mesure, après le retrait des quatre chaînes payantes du groupe Canal Plus,
d'apprécier à si brève échéance les conséquences économiques que pourrait emporter la
délivrance immédiate de quatre autorisations supplémentaires à des chaînes de TNT gratuites sur
l'équilibre du secteur. Elle n'a, par suite, pas méconnu les dispositions de la loi du 30 septembre
1986 en n'augmentant pas immédiatement le nombre d'autorisations octroyées à de telles
chaînes et en ne délivrant ainsi que onze des quinze autorisations prévues dans l'appel à
candidatures.
27. Il incombe toutefois à l'Autorité de mener sans délai une nouvelle
consultation publique et une nouvelle étude d'impact dans les conditions prévues à l'article 31
afin de décider si la situation économique du secteur est favorable au lancement d'un appel à
candidatures pour les quatre autorisations n'ayant pas été attribuées ou s'il convient, au contraire,
de le différer de deux ans, renouvelables une fois, à compter de l'échéance des autorisations
actuelles concernées.
Sur l'appréciation portée par l'Arcom sur les candidatures :
28. Aux termes de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986 : « (…) III. –
L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (…) accorde les
autorisations d'usage de la ressource radioélectrique en appréciant l'intérêt de chaque projet
pour le public au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des
courants d'expression socio-culturels, la diversité des opérateurs et la nécessité d'éviter les abus
de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence et des
critères mentionnés aux articles 29 et 30 ainsi que des engagements du candidat en matière de
couverture du territoire, de production et de diffusion d'œuvres audiovisuelles et
cinématographiques françaises et européennes. Elle tient également compte de la cohérence des
propositions formulées par les candidats en matière de regroupement technique et commercial
avec d'autres services et en matière de choix des distributeurs de services, ainsi que de la
nécessité d'offrir des services répondant aux attentes d'un large public et de nature à
encourager un développement rapide de la télévision numérique de terre. (…) » Il appartient
également à l'Arcom de tenir compte, en application des critères mentionnés à l'article 29 de la
même loi : « 1° De l'expérience acquise par le candidat dans les activités de communication ; /
2° Du financement et des perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des
possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les
services de communication audiovisuelle ; / 3° Des participations, directes ou indirectes,
détenues par le candidat dans le capital d'une ou plusieurs régies publicitaires ou dans le
capital d'une ou plusieurs entreprises éditrices de publications de presse ; / 4° Pour les services
dont les programmes comportent des émissions d'information politique et générale, des
dispositions envisagées en vue de garantir le caractère pluraliste de l'expression des courants de
pensée et d'opinion, l'honnêteté de l'information et son indépendance à l'égard des intérêts
économiques des actionnaires, en particulier lorsque ceux-ci sont titulaires de marchés publics
ou de délégations de service public ; / 5° De la contribution à la production de programmes
réalisés localement ; / (…) / 7° S'il s'agit de la délivrance d'une nouvelle autorisation après que
l'autorisation précédente est arrivée à son terme, du respect des principes mentionnés au
troisième alinéa de l'article 3-1. »
29. Il résulte de ces dispositions que, pour délivrer des autorisations d'usage de
ressources radioélectriques pour la diffusion d'un service de TNT, il incombe à l'Arcom, en se
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fondant sur les impératifs prioritaires et les éléments d'appréciation définis par les dispositions
précitées des articles 29 et 30-1 de la loi du 30 septembre 1986, de choisir, à l'issue de la
procédure d'appel à candidatures prévue par le I de l'article 30-1, les projets qui contribuent le
mieux à la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels, lequel participe
de l'objectif de valeur constitutionnelle de pluralisme des courants de pensée et d'opinion, et qui
sont le mieux à même de répondre à l'intérêt du public. L'Autorité doit veiller à ce qu'une
diversification suffisante des opérateurs et le jeu normal de la concurrence permettent, en
préservant notamment un accès équilibré de tous les opérateurs à la ressource publicitaire et aux
marchés des droits, que l'objectif fondamental de pluralisme et l'intérêt du public soient
respectés, notamment en prenant en considération l'intérêt que peut présenter l'arrivée de
nouveaux entrants. Il appartient à l'Arcom de procéder à une appréciation des mérites comparés
des candidatures reçues au regard, notamment, de leur contribution au pluralisme et à la diversité
des opérateurs ainsi qu'à la production et à la diffusion d'œuvres françaises et européennes, de
leur impact sur la concurrence, des perspectives de leur financement et de leur capacité à
respecter les obligations légales leur incombant.
30. Contrairement à ce que soutiennent la société NRJ 12 et autre, les
dispositions citées au point 28 définissent ainsi des critères objectifs, transparents, favorables à la
concurrence, non discriminatoires et proportionnés et ne méconnaissent, dès lors, pas les
objectifs de l'article 45 de la directive du 11 décembre 2018 précité.
31. En l'espèce, l'Arcom a, par ses délibérations du 11 décembre 2024,
autorisé la diffusion des services BFM TV, CMI TV, CNews, CStar, Gulli, LCI, OFTV, Paris
Première, TFX, TMC et W9. Il ressort des pièces des dossiers que l'Autorité a, au regard des
candidatures reçues ainsi que des autres chaînes existantes sur la TNT qui présentent, pour
beaucoup, un caractère généraliste, cherché à sélectionner, dans la procédure en cause, des
chaînes permettant d'accroître la diversité des types de programmes et contenus proposés et
qu'elle a ainsi favorisé, notamment, des candidatures présentant une thématique particulière,
telle que l'information, la musique, les documentaires ou la représentation des territoires, ou
ciblant, grâce à des formats dédiés, une audience spécifique, dont le jeune public.
32. En premier lieu, il ressort des pièces des dossiers, ainsi que le relève
l'Arcom, que le projet de TFX se caractérise par un public cible de moins de quarante ans, avec
des programmes dédiés aux jeunes adultes et aux enfants, en cohérence avec l'audience existante
de cette chaîne et l'engagement de diffusion de 300 heures annuelles de programmes conçus
pour la jeunesse, ainsi que par une programmation mêlant divertissements, magazines et fictions
et proposant 1 000 heures d'inédits. Le projet de TMC présente, quant à lui, un caractère
généraliste incluant information et divertissements ainsi qu'une offre de fiction audiovisuelle à
hauteur de 4 300 heures par an, adossée à une politique de préfinancement d'œuvres
cinématographiques françaises inédites et de diffusion hebdomadaire de fictions
cinématographiques, et un volume annuel de 800 heures de programmes inédits. Le projet de W9
se distingue, pour sa part, notamment par une programmation marquée par la place accordée aux
programmes musicaux, qui représentent un volume annuel de 2 000 heures, ainsi que par
l'importance accordée au spectacle vivant dans l'offre de la chaîne.
33. En deuxième lieu, il ressort des pièces des dossiers que le projet de CMI
TV comporte un volume important de documentaires, genre peu représenté sur la TNT, ainsi que
de magazines et d'émissions de plateaux. Sa programmation met en avant la vulgarisation et
l'information scientifique et culturelle, ainsi que les sujets de société, d'histoire, de géopolitique
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ou en lien avec la protection de l'environnement. En outre, son plan d'affaires, dont les
prévisions d'audience et de recettes apparaissent cohérentes avec l'évolution attendue du
marché, bénéficie de l'expérience en matière de communication du groupe de presse CMI France
auquel elle appartient.
34. En troisième lieu, il ressort des pièces des dossiers que, si la candidature
d'OFTV, dont le contenu figure de façon suffisamment précise dans le dossier soumis à
l'Arcom, repose, comme celles de C8 et NRJ 12, sur une combinaison de programmes
d'information, de magazines, de fiction et de divertissements, ce projet s'adresse aux populations
présentes hors des grands centres urbains, public peu ciblé par les services présents sur la TNT,
et vise à accroître la représentation de ces mêmes populations à la télévision. En outre, si OFTV
ne dispose pas d'une expérience préalable dans le secteur télévisuel, elle appartient à un groupe
ayant une forte assise dans le domaine de la communication, y compris dans l'exploitation de
plateformes numériques, et dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne serait pas à même
de consentir les investissements nécessaires à sa viabilité.
35. En quatrième lieu, s'agissant de NRJ 12, il ressort des pièces des dossiers,
d'une part, que cette chaîne, comme celles dont l'autorisation arrive à expiration en 2025, est
présente depuis vingt ans sur la TNT, appartient à un groupe audiovisuel indépendant et propose
une programmation centrée sur le divertissement avec, aux termes de son dossier de candidature,
« au cœur de son offre, la détente et l'humour ». Toutefois, ainsi que l'a relevé l'Arcom, sa
candidature prévoit, en continuité avec sa programmation actuelle, de consacrer la majeure partie
du temps d'antenne à la diffusion de fictions audiovisuelles et de divertissements, genres déjà
très représentés sur la TNT y compris sur les chaînes que l'Autorité a fait le choix d'autoriser au
terme de la procédure en cause, telles que TFX, TMC et W9, ainsi qu'au téléachat, auquel la
chaîne consacre déjà plus de 1 000 heures par an, soit, avec la publicité et l'autopromotion, près
de 30 % de sa programmation.
36. Il en ressort, d'autre part, que les engagements de diffusion de programmes
inédits sur la télévision gratuite pris par NRJ 12 dans son dossier de candidature sont
substantiellement inférieurs à ceux d'autres services retenus, notamment TFX, TMC et W9, et
que le volume de fictions audiovisuelles proposé repose en grande partie sur la rediffusion de
séries relativement anciennes.
37. Enfin, comme le relève l'Arcom, le projet de NRJ 12 s'inscrivant, ainsi
qu'il a été dit, dans la continuité de sa programmation actuelle, les prévisions de croissance des
recettes publicitaires figurant dans le dossier de candidature présenté par la chaîne, qui n'a
depuis sa création, présenté un résultat net positif que pour un seul exercice, contrastent avec le
déclin constant de ses parts d'audience, y compris auprès du jeune public qu'elle cible, et avec
les perspectives d'évolution du marché publicitaire.
38. En cinquième lieu, s'agissant de C8, il ressort des pièces des dossiers, ainsi
que le relève l'Arcom, que la chaîne se distingue par un volume important de programmes
inédits, notamment d'émissions en direct qui constituent, selon les termes de la chaîne, son
« ADN ». Elle bénéficie d'une part d'audience élevée sur la TNT, hors les chaînes historiques de
la télévision hertzienne. Mais, ainsi que le relève également l'Arcom, les programmes qu'elle
diffuse, notamment les magazines, le divertissement et la fiction, sont peu diversifiés, d'autres
candidatures présentant une offre plus variée et renouvelée.
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39. Par ailleurs, il ressort des pièces des dossiers que la société C8 a fait l'objet
de nombreuses sanctions financières, mises en demeure et mises en garde de la part de l'Arcom
pour des manquements, au cours des dernières années, à ses obligations légales et
conventionnelles, notamment en matière de respect des droits de la personne, de protection des
mineurs et de maîtrise de l'antenne. En outre, si la société requérante se prévaut, dans son dossier
de candidature, d'un nouveau dispositif de maîtrise de l'antenne, mis en place en octobre 2023, il
ressort des pièces des dossiers, ainsi que l'a relevé l'Arcom, que ces procédures n'ont pas
empêché le constat, par l'Autorité, de nouveaux manquements postérieurement à leur mise en
œuvre. Enfin, si les représentants de la chaîne ont annoncé, lors de leur audition, la mise en place
d'un différé dans la diffusion d'une partie de ses programmes pour renforcer son dispositif de
maîtrise de l'antenne dès septembre 2024, il ressort des pièces du dossier que cette mesure, qui
n'a, au demeurant, pas été mise en œuvre, présente un caractère trop imprécis pour être regardée
comme de nature à remédier aux carences relevées. Contrairement à ce que soutient la société
C8, l'Arcom a pu légalement tenir compte de ces considérations pour apprécier, au regard des
critères prévus aux articles 29 et 30-1 de la loi du 30 septembre 1986, l'intérêt du projet de C8,
notamment s'agissant de la capacité de la chaîne à respecter ses obligations légales si son
autorisation venait à être renouvelée.
40. Enfin, il ressort des pièces des dossiers que la société C8 a, depuis sa
création, enregistré un déficit chronique et significatif et que les prévisions du plan d'affaires
figurant au dossier de candidature contrastent avec les perspectives d'évolution du marché
publicitaire.
41. Dans ces conditions, au vu de l'ensemble des caractéristiques des projets
qui lui ont été présentés et compte tenu des différents impératifs et critères énoncés par la loi,
l'Arcom a pu légalement estimer que les candidatures de C8 et NRJ 12 étaient moins à même
que les onze projets qu'elle a retenus, notamment ceux des chaînes CMI TV, OFTV, TFX, TMC
et W9, seuls contestés par les sociétés requérantes, de contribuer au pluralisme des courants
d'expression socio-culturels et de répondre à l'intérêt du public. Il ne ressort pas, en outre, des
pièces des dossiers que l'Arcom, qui n'était pas tenue de motiver son refus au regard de
l'ensemble des critères rappelés aux points 28 et 29 ni de consulter préalablement l'Autorité de
la concurrence, aurait inexactement apprécié les conséquences que le non-renouvellement des
autorisations de NRJ 12 et de C8 serait susceptible d'entraîner sur l'équilibre concurrentiel de la
TNT gratuite ni qu'elle aurait insuffisamment tenu compte de l'expérience des deux sociétés, de
l'amortissement du coût des investissements réalisés par elles ou de leurs engagements en
matière de production et de diffusion d'œuvres françaises et européennes.
42. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de
justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle en l'absence de difficulté sérieuse
d'interprétation du droit de l'Union européenne, que les sociétés NRJ 12 et autre et la société C8
ne sont pas fondées à demander l'annulation des décisions qu'elles attaquent. Leurs requêtes ne
peuvent, par suite, qu'être rejetées, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et celles
présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
43. Il n'y a, par ailleurs, pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire
droit aux conclusions présentées par l'Arcom et les sociétés Ouest-France TV, EDI-TV, TFX et
Télé Monte Carlo au titre des dispositions de ce même article.
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D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes des sociétés NRJ 12 et autre et de la société C8 sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Arcom et les sociétés Ouest-France TV, EDI-TV,
TFX et Télé Monte Carlo au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont
rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société NRJ 12, pour elle-même et la société
NRJ Group, aux sociétés C8, Ouest-France TV et EDI-TV, à la société TFX, pour elle-même et
la société Télé Monte Carlo, ainsi qu'à l'Autorité de régulation de la communication
audiovisuelle et numérique.
Copie en sera adressée à la ministre de la culture et aux sociétés CMI France et La Chaîne Info.

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