Directive (UE) 2024/2853 du Parlement européen et du Conseil
du 23 octobre 2024
relative à la responsabilité du fait des produits défectueux et abrogeant la directive 85/374/CEE du Conseil
LE PARLEMENT EUROPéEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPéENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 114,
vu la proposition de la Commission européenne,
après transmission du projet d'acte législatif aux parlements nationaux,
vu l'avis du Comité économique et social européen (1),
statuant conformément à la procédure législative ordinaire (2),
considérant ce qui suit:
(1) Afin d'améliorer le bon fonctionnement du marché intérieur, il est nécessaire de veiller à ce que la concurrence ne soit pas faussée et à ce que la circulation des marchandises ne soit pas entravée. La directive 85/374/CEE du Conseil (3) établit des règles communes en matière de responsabilité du fait des produits défectueux dans le but d'éliminer les disparités entre les ordres juridiques des états membres qui sont susceptibles de fausser la concurrence et d'affecter la libre circulation des marchandises au sein du marché intérieur. Une plus grande harmonisation des règles communes en matière de responsabilité du fait des produits défectueux établies dans ladite directive contribuerait davantage à la réalisation de ces objectifs, tout en renforçant le niveau de protection de la santé et des biens des consommateurs et des autres personnes physiques.
(2) La responsabilité sans faute des opérateurs économiques reste le seul moyen de résoudre de façon adéquate le problème d'une juste répartition des risques inhérents à la production technique moderne.
(3) La directive 85/374/CEE constitue un instrument efficace et important, mais il serait nécessaire de la réviser à la lumière des évolutions liées aux nouvelles technologies, y compris l'intelligence artificielle (IA), aux nouveaux modèles d'entreprise dans le domaine de l'économie circulaire et aux nouvelles chaînes d'approvisionnement mondiales, qui ont engendré des incohérences et une insécurité juridique, en particulier en ce qui concerne la signification du terme «produit». L'expérience tirée de l'application de ladite directive a également montré que les personnes lésées peinent à obtenir réparation en raison des restrictions à l'introduction des demandes de réparation et de la difficulté à rassembler des preuves de la responsabilité, compte tenu notamment de la complexité technique et scientifique croissante. Cela inclut les demandes de réparation pour les dommages en rapport avec les nouvelles technologies. La révision de ladite directive encouragerait donc le déploiement et l'adoption de ces nouvelles technologies, y compris l'IA, tout en garantissant que les demandeurs bénéficient du même niveau de protection, quelle que soit la technologie concernée, et que toutes les entreprises bénéficient d'une sécurité juridique accrue et de conditions de concurrence équitables.
(4) Il serait nécessaire de réviser la directive 85/374/CEE pour garantir la cohérence et la compatibilité avec la législation en matière de sécurité des produits et de surveillance du marché au niveau de l'Union et au niveau national. En outre, il y a lieu de clarifier les notions et concepts fondamentaux afin de garantir la cohérence et la sécurité juridique, ainsi que des conditions de concurrence équitables sur le marché intérieur, et de tenir compte de la jurisprudence récente de la Cour de justice de l'Union européenne.
(5) Eu égard à l'ampleur des modifications qui seraient nécessaires pour que la directive 85/374/CEE reste efficace et par souci de clarté et de sécurité juridique, il convient d'abroger cette directive et de la remplacer par la présente directive.
(6) Afin de garantir l'exhaustivité du régime de l'Union en matière de responsabilité du fait des produits, la responsabilité sans faute pour les produits défectueux devrait s'appliquer à tous les meubles, dont les logiciels, y compris incorporés dans d'autres meubles ou dans des immeubles.
(7) Il convient que la responsabilité du fait des produits défectueux ne s'applique pas aux dommages résultant d'accidents nucléaires, dans la mesure où la responsabilité pour ces dommages est régie par des conventions internationales ratifiées par les états membres.
(8) Afin de créer un véritable marché intérieur offrant un niveau élevé et uniforme de protection des consommateurs et des autres personnes physiques et de tenir compte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, les états membres ne devraient pas, en ce qui concerne les aspects relevant du champ d'application de la présente directive, maintenir ou introduire des dispositions plus strictes ou plus souples que celles prévues par la présente directive.
(9) En vertu du droit national des états membres, une personne lésée pourrait avoir un droit à réparation sur la base de la responsabilité contractuelle ou pour des motifs de responsabilité extracontractuelle autres que la responsabilité du fabricant pour la défectuosité d'un produit telle qu'établie dans la présente directive. Cela concerne, par exemple, la responsabilité fondée sur la garantie des vices cachés ou sur la faute, ou la responsabilité stricte des opérateurs pour les dommages causés par les propriétés d'un organisme résultant de l'ingénierie génétique. Il convient que ces dispositions de droit national qui tendent à atteindre, entre autres, l'objectif d'une protection efficace des consommateurs et des autres personnes physiques ne soient pas affectées par la présente directive.
(10) Dans certains états membres, les personnes lésées sont habilitées à intenter des actions en réparation des dommages causés par des produits pharmaceutiques dans le cadre d'un régime national spécial de responsabilité, de sorte qu'il existe déjà une protection efficace des personnes physiques dans le secteur pharmaceutique. Il convient que la présente directive ne porte pas atteinte au droit d'intenter de telles actions. En outre, il convient de ne pas exclure les modifications de ces régimes spéciaux de responsabilité, pour autant qu'elles ne compromettent pas l'efficacité du régime de responsabilité prévu par la présente directive ou ses objectifs.
(11) Les systèmes d'indemnisation en dehors du cadre des régimes de responsabilité, tels que les systèmes de santé nationaux, les systèmes de sécurité sociale ou les systèmes d'assurance, ne relèvent pas du champ d'application de la présente directive et ne devraient donc pas être empêchés d'exister. Par exemple, certains états membres ont mis en place des systèmes d'indemnisation pour les produits pharmaceutiques qui causent un dommage sans être défectueux.
(12) La décision no 768/2008/CE du Parlement européen et du Conseil (4) énonce des principes communs et des dispositions de référence conçus pour être appliqués à l'ensemble de la législation sectorielle sur les produits. Par souci de cohérence avec cette décision, il convient d'aligner certaines dispositions de la présente directive, en particulier les définitions, sur ladite décision.
(13) À l'ère numérique, les produits peuvent être corporels ou incorporels. Les logiciels, tels que les systèmes d'exploitation, les micrologiciels, les programmes informatiques, les applications ou les systèmes d'IA, sont de plus en plus répandus sur le marché et jouent un rôle de plus en plus important pour la sécurité des produits. Les logiciels peuvent être mis sur le marché en tant que produits autonomes ou être intégrés par la suite dans d'autres produits en tant que composants, et ils sont susceptibles de causer des dommages lors de leur exécution. Dans l'intérêt de la sécurité juridique, il convient de préciser dans la présente directive que le logiciel est un produit aux fins de l'application de la responsabilité sans faute, quel que soit son mode de fourniture ou d'utilisation, et donc indépendamment du fait qu'il soit installé sur un appareil, accessible via un réseau de communication ou des technologies en nuage, ou fourni dans le cadre d'un modèle de logiciel en tant que service. Toutefois, les informations ne doivent pas être considérées comme un produit, et les règles en matière de responsabilité du fait des produits ne devraient donc pas s'appliquer au contenu des fichiers numériques, tels que les fichiers médias, les livres électroniques ou le simple code source des logiciels. Un développeur ou un producteur de logiciels, y compris les fournisseurs de systèmes d'IA au sens du règlement (UE) 2024/1689 du Parlement européen et du Conseil (5), devraient être considérés comme des fabricants.
(14) Les logiciels libres et ouverts, dont le code source est ouvertement partagé et qui permettent aux utilisateurs d'avoir librement accès au logiciel ou à ses versions modifiées et de les utiliser, modifier et redistribuer librement, peuvent contribuer à la recherche et à l'innovation sur le marché. Ce type de logiciel est soumis à des licences qui donnent à tous la liberté d'exécuter, de copier, de distribuer, d'étudier, de modifier et d'améliorer le logiciel. Afin de ne pas entraver l'innovation ou la recherche, il convient que la présente directive ne s'applique pas aux logiciels libres et ouverts développés ou fournis en dehors du cadre d'une activité commerciale, étant donné que les produits ainsi développés ou fournis ne sont, par définition, pas mis sur le marché. Le développement de ces logiciels ou la contribution à ces logiciels ne devraient pas s'entendre comme leur mise à disposition sur le marché. La fourniture de tels logiciels dans des référentiels ouverts ne devrait pas être considérée comme une mise à disposition sur le marché, à moins que cela ne se produise dans le cadre d'une activité commerciale. En principe, la fourniture de logiciels libres et ouverts par des organisations à but non lucratif ne devrait pas être considérée comme étant effectuée dans un contexte commercial, à moins que cette fourniture n'ait lieu dans le cadre d'une activité commerciale. En revanche, il convient que la présente directive s'applique lorsque le logiciel est fourni en échange d'un prix, ou en échange de données à caractère personnel utilisées non exclusivement pour améliorer la sécurité, la compatibilité ou l'interopérabilité du logiciel, et lorsqu'il est donc fourni dans le cadre d'une activité commerciale.
(15) Lorsque des logiciels libres et ouverts fournis en dehors du cadre d'une activité commerciale sont ensuite intégrés par un fabricant en tant que composants dans un produit dans le cadre d'une activité commerciale et sont ainsi mis sur le marché, il convient que ce fabricant puisse être tenu pour responsable des dommages causés par la défectuosité du logiciel concerné, mais pas le fabricant du logiciel puisque celui-ci ne remplirait pas la condition relative à la mise sur le marché d'un produit ou d'un composant.
(16) Si les fichiers numériques en tant que tels ne sont pas des produits relevant du champ d'application de la présente directive, il convient que les fichiers de fabrication numérique, qui contiennent les informations fonctionnelles nécessaires pour produire un élément corporel en permettant le contrôle automatisé de machines ou d'outils tels que les perceuses, tours, fraiseuses et imprimantes 3D, soient considérés comme des produits afin de garantir la protection des personnes physiques dans l'hypothèse où ces fichiers seraient défectueux. Par exemple, un fichier de conception assistée par ordinateur défectueux utilisé pour créer un bien imprimé en 3D causant un dommage devrait engager la responsabilité au titre de la présente directive, lorsqu'un tel fichier est développé ou fourni dans le cadre d'une activité commerciale. Pour lever toute ambiguïté, il y a lieu de préciser que les matières premières, telles que le gaz et l'eau, et l'électricité sont des produits.
(17) Il est de plus en plus fréquent que des services numériques soient intégrés à un produit ou interconnectés avec celui-ci de telle sorte que l'absence du service empêcherait le produit d'exécuter une de ses fonctions. Bien que la présente directive n'ait pas vocation à s'appliquer aux services en tant que tels, il est nécessaire d'étendre la responsabilité sans faute auxdits services numériques intégrés ou interconnectés, étant donné que ceux-ci déterminent la sécurité du produit au même titre que les composants physiques ou numériques. Il convient que ces services connexes soient considérés comme des composants du produit auquel ils sont intégrés ou avec lequel ils sont interconnectés, lorsqu'ils sont sous le contrôle du fabricant de ce produit. Parmi les exemples de services connexes figurent la fourniture continue de données relatives au trafic au sein d'un système de navigation, un service de surveillance de la santé qui s'appuie sur des capteurs d'un produit physique pour suivre l'activité physique ou les mesures de santé de l'utilisateur, un service de contrôle de la température qui surveille et régule la température d'un réfrigérateur intelligent, ou un service d'assistant vocal qui permet de contrôler un ou plusieurs produits au moyen de commandes vocales. Les services d'accès à l'internet ne devraient pas être traités comme des services connexes, étant donné qu'ils ne peuvent pas être considérés comme faisant partie d'un produit sous le contrôle d'un fabricant et qu'il serait déraisonnable d'engager la responsabilité des fabricants pour les dommages causés par des lacunes dans les services d'accès à l'internet. Néanmoins, un produit qui repose sur des services d'accès à l'internet et qui ne garantit pas la sécurité en cas de perte de connectivité pourrait être considéré comme défectueux en vertu de la présente directive.
(18) Les services connexes et les autres composants, y compris les mises à jour et mises à niveau logicielles, devraient être considérés comme étant sous le contrôle du fabricant lorsqu'ils sont intégrés dans un produit ou interconnectés avec celui-ci, ou fournis par le fabricant, ou lorsque le fabricant autorise ou accepte leur intégration, interconnexion ou fourniture par un tiers, par exemple lorsque le fabricant d'un appareil électroménager intelligent accepte la fourniture par un tiers de mises à jour logicielles pour l'appareil du fabricant ou lorsqu'un fabricant présente un service connexe ou un composant comme faisant partie du produit, même s'il est fourni par un tiers. Un fabricant ne devrait pas être considéré comme ayant consenti à l'intégration ou à l'interconnexion simplement du fait qu'il a prévu la possibilité technique d'une intégration ou d'une interconnexion ou recommandé certaines marques ou qu'il n'a pas interdit d'éventuels services connexes ou composants.
(19) Dès lors qu'un produit a été mis sur le marché, il doit être considéré comme restant sous le contrôle du fabricant lorsque celui-ci conserve sa capacité à fournir des mises à jour ou des mises à niveau logicielles lui-même ou par l'intermédiaire d'un tiers.
(20) Compte tenu de l'importance et de la valeur croissantes des actifs incorporels, il convient également de prévoir une réparation en cas de destruction ou de corruption de données, comme la suppression de fichiers numériques d'un disque dur, qui couvre notamment le coût de la récupération ou de la restauration de ces données. Pour protéger les personnes physiques, il faut qu'une réparation soit prévue pour les pertes matérielles résultant non seulement de la mort ou de lésions corporelles, telles que les frais funéraires ou médicaux ou la perte de revenus, et des dommages aux biens, mais aussi de la destruction ou de la corruption de données. La destruction ou la corruption de données n'entraîne pas automatiquement une perte matérielle si la personne lésée est en mesure d'extraire les données sans frais, comme lorsqu'une sauvegarde des données existe ou que les données peuvent être téléchargées à nouveau, ou lorsqu'un opérateur économique restaure ou recrée des données temporairement indisponibles, par exemple dans un environnement virtuel. La destruction ou la corruption de données étant distincte des fuites de données ou des violations des règles de protection des données, la présente directive ne porte donc pas atteinte au droit à réparation en cas de violation du règlement (UE) 2016/679 (6) ou (UE) 2018/1725 (7) du Parlement européen et du Conseil ou de la directive 2002/58/CE (8) ou (UE) 2016/680 (9) du Parlement européen et du Conseil.
(21) Dans un souci de sécurité juridique, la présente directive devrait préciser que les lésions corporelles comprennent l'atteinte à la santé psychologique, médicalement reconnue et médicalement certifiée, qui affecte l'état de santé général de la personne lésée et qui pourrait nécessiter une thérapie ou un traitement médical, compte tenu, entre autres, de la classification internationale des maladies établie par l'Organisation mondiale de la santé.
(22) Conformément à l'objectif de la présente directive consistant à n'offrir la possibilité d'obtenir réparation qu'aux personnes physiques, il convient de ne pas réparer, au titre de la présente directive, les dommages causés aux biens utilisés exclusivement à des fins professionnelles. Afin de parer à un risque potentiel de contentieux dans un nombre excessif d'affaires, il convient de ne pas réparer, au titre de la présente directive, la destruction ou la corruption de données qui sont utilisées, même de manière non-exclusive, à des fins professionnelles.
(23) Tout en prévoyant une réparation intégrale et adéquate pour toutes les pertes matérielles résultant de la mort, des lésions corporelles, des dommages causés à des biens ou de la destruction de biens et de la destruction ou de la corruption de données, les états membres devraient établir des règles relatives au calcul de la réparation. En outre, il convient de prévoir une réparation pour les pertes immatérielles résultant de dommages couverts par la présente directive, tels que les douleurs et souffrances, dans la mesure où il est possible d'obtenir réparation de ces pertes en vertu du droit national.
(24) Les types de dommages autres que ceux prévus par la présente directive, tels que les pertes purement économiques, les atteintes à la vie privée ou la discrimination, ne devraient pas, par eux-mêmes, déclencher une responsabilité au titre de la présente directive. Toutefois, la présente directive ne devrait pas affecter le droit à réparation de tout dommage, y compris moral, dans le cadre d'autres régimes de responsabilité.
(25) Afin de protéger les personnes physiques, il convient de réparer les dommages causés à des biens appartenant à une personne physique. étant donné que les biens sont de plus en plus utilisés à des fins tant privées que professionnelles, il y a lieu de prévoir la réparation des dommages causés à ces biens à usage mixte. étant donné que la présente directive vise à protéger les personnes physiques, il convient d'exclure de son champ d'application les biens utilisés exclusivement à des fins professionnelles.
(26) Il convient que la présente directive s'applique aux produits mis sur le marché ou, le cas échéant, mis en service dans le cadre d'une activité commerciale, à titre onéreux ou gratuit, par exemple les produits fournis dans le cadre d'une campagne de parrainage ou les produits fabriqués pour la fourniture d'un service financé par des fonds publics, étant donné que ce mode de fourniture conserve néanmoins un caractère économique ou commercial. La notion de «mise en service» est pertinente pour les produits qui ne sont pas mis sur le marché avant leur première utilisation, comme cela peut être le cas pour les ascenseurs, les machines ou les dispositifs médicaux.
(27) Dans la mesure où le droit national le prévoit, le droit à réparation des personnes lésées devrait s'appliquer tant à celles qui subissent des dommages directement causés par un produit défectueux, qu'à celles qui subissent un dommage du fait du dommage subi par la personne directement lésée.
(28) Compte tenu de la complexité accrue des produits, des modèles économiques et des chaînes d'approvisionnement, et considérant que l'objectif de la présente directive est de faire en sorte que les consommateurs et les autres personnes physiques puissent facilement exercer leur droit à obtenir réparation en cas de dommages causés par des produits défectueux, il importe que les états membres veillent à ce que les autorités ou organismes compétents en matière de protection des consommateurs fournissent toutes les informations pertinentes aux consommateurs concernés pour leur permettre d'exercer effectivement leur droit à réparation conformément à la présente directive. Ce faisant, il convient que les états membres tiennent compte des obligations existantes pour ce qui est de la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l'application de la législation en matière de protection des consommateurs, en particulier des obligations découlant du règlement (UE) 2017/2394 du Parlement européen et du Conseil (10). Il importe que les autorités ou organismes nationaux de protection des consommateurs échangent régulièrement toutes informations pertinentes dont ils ont connaissance et coopèrent étroitement avec les autorités de surveillance du marché. Les états membres peuvent également encourager les autorités ou organismes compétents en matière de protection des consommateurs à fournir des informations aux consommateurs afin qu'ils puissent exercer plus efficacement leur droit à réparation conformément à la présente directive.
(29) La présente directive ne porte pas atteinte aux différents moyens de recours au niveau national, que ce soit au moyen de procédures judiciaires, de solutions non juridictionnelles, de procédures de règlement extrajudiciaire des litiges ou d'actions représentatives au sens de la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil (11) ou dans le cadre de mécanismes de recours collectifs nationaux.
(30) Afin de protéger la santé et les biens des personnes physiques, la détermination de la défectuosité d'un produit doit se faire en fonction non pas de l'inaptitude du produit à l'usage, mais du défaut dans la sécurité à laquelle une personne peut légitimement s'attendre ou qui est exigée par le droit de l'Union ou le droit national. Il convient que la détermination de la défectuosité comporte une analyse objective de la sécurité à laquelle le grand public peut légitimement s'attendre et ne fasse pas référence à la sécurité à laquelle une personne donnée peut légitimement s'attendre. Il y a lieu d'évaluer la sécurité à laquelle le grand public peut légitimement s'attendre en tenant compte, entre autres, de la destination, de l'utilisation raisonnablement prévisible, de la présentation, des caractéristiques objectives et des propriétés du produit en question, y compris sa durée de vie attendue, ainsi que des exigences spécifiques du groupe d'utilisateurs auquel le produit est destiné. Certains produits, tels que les dispositifs médicaux destinés au maintien des fonctions vitales, présentent un risque particulièrement élevé de dommages pour les personnes et suscitent donc des attentes très élevées en matière de sécurité. Afin de répondre à ces attentes, il devrait être possible pour un tribunal de conclure qu'un produit est défectueux sans établir qu'il l'est effectivement, lorsque celui-ci est issu de la même série de production qu'un produit dont la défectuosité a déjà été prouvée.
(31) L'évaluation de la défectuosité devrait tenir compte de la présentation du produit. Toutefois, les avertissements ou autres informations fournis avec un produit ne peuvent être considérés comme suffisants pour garantir la sécurité d'un produit défectueux, étant donné que la défectuosité devrait être déterminée en fonction de la sécurité à laquelle le grand public peut légitimement s'attendre. Par conséquent, la responsabilité découlant de la présente directive ne peut être évitée par la simple énumération de tous les effets secondaires imaginables d'un produit. Lors de la détermination de la défectuosité d'un produit, l'utilisation raisonnablement prévisible englobe également la mauvaise utilisation qui n'est pas déraisonnable dans les circonstances, comme le comportement prévisible d'un utilisateur d'une machine résultant d'un manque de concentration ou le comportement prévisible de certains groupes d'utilisateurs tels que les enfants.
(32) Afin de tenir compte de la prévalence croissante des produits interconnectés, l'évaluation de la sécurité d'un produit devrait prendre en considération les effets raisonnablement prévisibles d'autres produits sur celui-ci, par exemple au sein d'un système domotique intelligent. Il convient également de prendre en considération l'effet que la capacité d'apprentissage ou d'acquisition de nouvelles caractéristiques d'un produit après sa mise sur le marché ou sa mise en service a sur la sécurité de ce même produit, afin de tenir compte de la confiance légitime dans le fait que les logiciels et algorithmes sous-jacents d'un produit sont conçus de manière à prévenir tout comportement dangereux du produit. Par conséquent, un fabricant qui conçoit un produit capable de développer un comportement inattendu devrait rester responsable d'un comportement causant un dommage. Afin de refléter le fait qu'à l'ère numérique, de nombreux produits restent sous le contrôle du fabricant après leur mise sur le marché, il convient que l'évaluation de la sécurité d'un produit tienne également compte du moment où les produits quittent le contrôle du fabricant. Un produit peut également être considéré comme défectueux en raison de sa vulnérabilité en matière de cybersécurité, par exemple s'il ne satisfait pas aux exigences de cybersécurité pertinentes pour la sécurité.
(33) Afin de refléter la nature des produits dont la finalité même est d'éviter des dommages, comme un mécanisme d'alerte tel qu'un détecteur de fumée, il convient que l'évaluation de la défectuosité d'un tel produit tienne compte du non-respect de cet objectif.
(34) Afin de refléter la pertinence de la législation relative à la sécurité des produits et à la surveillance du marché pour déterminer le niveau de sécurité auquel une personne peut légitimement s'attendre, il convient de préciser que les exigences pertinentes en matière de sécurité, y compris les exigences de cybersécurité applicables à la sécurité, ainsi que les interventions des autorités compétentes, telles que l'émission de rappels de produits, ou des opérateurs économiques eux-mêmes devraient également être prises en considération dans cette évaluation de la défectuosité. Ces interventions ne devraient toutefois pas, à elles seules, créer une présomption de défectuosité.
(35) Dans l'intérêt du choix du consommateur et afin d'encourager l'innovation, la recherche et l'accès facile aux nouvelles technologies, l'existence ou la mise sur le marché ultérieure d'un produit plus perfectionné ne devrait pas, en soi, amener à conclure qu'un produit est défectueux. De même, la fourniture de mises à jour ou de mises à niveau pour un produit ne devrait pas, en soi, amener à conclure qu'une version antérieure du produit est défectueuse.
(36) La protection des personnes physiques exige que la responsabilité de tous les fabricants participant au processus de production puisse être engagée si un produit ou un composant fournis par ces fabricants présente un défaut. Cela inclut toute personne qui se présente comme le fabricant en apposant ou en autorisant un tiers à apposer son nom, sa marque ou d'autres caractéristiques distinctives sur un produit, car, ce faisant, elle donne l'impression de participer au processus de production ou d'en assumer la responsabilité. Lorsqu'un fabricant intègre dans un produit un composant défectueux provenant d'un autre fabricant, la personne lésée devrait pouvoir demander réparation du même dommage à la fois auprès du fabricant du produit et auprès du fabricant du composant. Lorsqu'un composant est intégré dans un produit en dehors du contrôle du fabricant de ce produit, la personne lésée devrait pouvoir demander réparation auprès du fabricant du composant lorsque le composant lui-même est un produit au sens de la présente directive.
(37) Afin de garantir aux personnes lésées un droit à réparation exécutoire lorsqu'un fabricant d'un produit est établi en dehors de l'Union, il devrait être possible d'engager la responsabilité de l'importateur dudit produit et du mandataire du fabricant, nommé aux fins de l'accomplissement de tâches déterminées conformément à la législation de l'Union, par exemple la législation relative à la sécurité des produits et à la surveillance du marché. La surveillance du marché a montré que les chaînes d'approvisionnement comprennent parfois des opérateurs économiques qui, du fait de leur forme innovante, ne s'insèrent pas facilement dans les chaînes d'approvisionnement traditionnelles telles qu'elles sont définies dans le cadre juridique en vigueur. Tel est notamment le cas des prestataires de services d'exécution des commandes, qui assument en grande partie les mêmes fonctions que les importateurs, mais qui ne répondent peut-être pas toujours à la définition traditionnelle de l'importateur dans le droit de l'Union. Les prestataires de services d'exécution des commandes jouent un rôle de plus en plus important en tant qu'opérateurs économiques, en permettant et en facilitant l'accès au marché de l'Union pour les produits provenant de pays tiers. Ce changement d'importance transparaît déjà dans le cadre de la sécurité des produits et de la surveillance du marché, en particulier dans les règlements (UE) 2019/1020 (12) et (UE) 2023/988 (13) du Parlement européen et du Conseil. Par conséquent, il convient que les prestataires de services d'exécution des commandes puissent être tenus pour responsables; cela dit, étant donné leur rôle subsidiaire, leur responsabilité ne devrait être engagée qu'en l'absence d'importateur ou de mandataire établi dans l'Union. Afin d'imputer efficacement la responsabilité aux fabricants, importateurs, mandataires et prestataires de services d'exécution des commandes, il convient que les distributeurs ne puissent être tenus pour responsables que s'ils n'identifient pas rapidement un opérateur économique concerné établi dans l'Union.
(38) La vente en ligne a connu un essor constant et régulier et a fait apparaître de nouveaux modèles commerciaux et de nouveaux acteurs sur le marché, tels que les plateformes en ligne. Le règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil (14) et le règlement (UE) 2023/988 réglementent, entre autres, la responsabilité des plateformes en ligne et leur obligation de rendre des comptes en ce qui concerne les contenus illicites, y compris pour ce qui est de la vente des produits. Lorsque les plateformes en ligne agissent comme fabricants, importateurs, mandataires, prestataires de services d'exécution des commandes ou distributeurs à l'égard d'un produit défectueux, il convient que leur responsabilité soit engagée au même titre que celle de ces opérateurs économiques. Lorsque les plateformes en ligne ne sont que des intermédiaires dans la vente de produits entre professionnels et consommateurs, elles bénéficient d'une exonération conditionnelle de responsabilité au titre du règlement (UE) 2022/2065. Toutefois, le règlement (UE) 2022/2065 dispose que les plateformes en ligne permettant aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels ne sont pas exonérées de responsabilité au titre de la législation sur la protection des consommateurs lorsqu'elles présentent le produit ou permettent autrement la transaction spécifique en question de telle sorte qu'un consommateur moyen peut être amené à croire que le produit est fourni soit directement par la plateforme en ligne, soit par un professionnel agissant sous l'autorité ou le contrôle de celle-ci. Conformément à ce principe, lorsque les plateformes en ligne présentent le produit ou permettent autrement la transaction spécifique de sorte à produire cette conséquence, il convient qu'elles puissent être tenues pour responsables, au même titre que les distributeurs en vertu de la présente directive. Par conséquent, les dispositions de la présente directive relatives aux distributeurs devraient s'appliquer de manière analogue à ces plateformes en ligne. Ces plateformes en ligne ne devraient donc être responsables que lorsqu'elles présentent le produit ou permettent autrement la transaction spécifique de telle sorte qu'un consommateur moyen peut être amené à croire que le produit est fourni soit directement par la plateforme en ligne, soit par un professionnel agissant sous l'autorité ou le contrôle de celle-ci, et uniquement lorsque la plateforme en ligne ne désigne pas rapidement un opérateur économique concerné établi dans l'Union.
(39) Dans la transition d'une économie linéaire vers une économie circulaire, les produits sont conçus pour être plus durables, réutilisables, réparables et évolutifs. L'Union promeut également des modes de production et de consommation innovants et durables qui prolongent la fonctionnalité des produits et des composants, tels que la refabrication, la remise à neuf et la réparation, comme indiqué dans la communication de la Commission du 11 mars 2020 intitulée «Un nouveau plan d'action pour une économie circulaire Pour une Europe plus propre et plus compétitive». Tout produit substantiellement modifié et, par la suite, mis à disposition sur le marché ou mis en service est considéré comme un produit nouveau. Lorsque la modification est effectuée en dehors du contrôle du fabricant d'origine, il convient que la personne ayant effectué la modification substantielle puisse être tenue pour responsable en tant que fabricant du produit modifié, étant donné qu'en vertu des dispositions pertinentes du droit de l'Union, elle est responsable de la conformité du produit avec les exigences de sécurité. Le caractère substantiel d'une modification devrait être déterminé sur la base de critères énoncés dans le droit de l'Union et le droit national applicables en matière de sécurité des produits, notamment le règlement (UE) 2023/988. Lorsque aucun critère de ce type n'est établi en ce qui concerne le produit en question, les modifications apportées aux fonctions prévues à l'origine, celles qui affectent la conformité du produit avec les exigences de sécurité applicables ou celles qui modifient son profil de risque devraient être considérées comme des modifications substantielles. Lorsqu'une modification substantielle est effectuée par le fabricant d'origine, ou sous son contrôle, et qu'une telle modification substantielle rend le produit défectueux, ce fabricant ne devrait pas pouvoir échapper à sa responsabilité en faisant valoir que la défectuosité est apparue après la mise sur le marché ou la mise en service du produit. Dans l'intérêt d'une juste répartition des risques dans l'économie circulaire, il convient qu'un opérateur économique apportant une modification substantielle, autre que le fabricant d'origine, soit exonéré de responsabilité si ledit opérateur économique peut prouver que le dommage est lié à une partie du produit non affectée par la modification. Les opérateurs économiques effectuant des réparations ou d'autres opérations n'impliquant pas de modifications substantielles ne devraient pas être tenus pour responsables en vertu de la présente directive.
(40) étant donné que les produits peuvent être conçus d'une manière qui permette des modifications sous la forme de changements apportés aux logiciels, y compris des mises à niveau, les mêmes principes devraient s'appliquer aux modifications effectuées au moyen d'une mise à jour ou d'une mise à niveau logicielle que pour les modifications effectuées d'autres manières. Lorsqu'une modification substantielle est apportée au moyen d'une mise à jour ou d'une mise à niveau logicielle, ou en raison de l'apprentissage continu d'un système d'IA, le produit substantiellement modifié devrait être considéré comme étant mis à disposition sur le marché ou mis en service au moment où la modification est effectivement effectuée.
(41) Lorsque la personne lésée n'obtient pas réparation parce qu'aucune personne n'est tenue pour responsable en vertu de la présente directive, ou parce que les personnes responsables sont insolvables ou ont cessé d'exister, les états membres peuvent utiliser les systèmes nationaux d'indemnisation sectoriels existants ou en établir de nouveaux en vertu du droit national pour indemniser de manière appropriée les personnes lésées qui ont subi des dommages causés par des produits défectueux. Il appartient aux états membres de décider si ces systèmes de réparation sont financés en tout ou en partie par des recettes publiques ou privées.
(42) étant donné que les opérateurs économiques sont responsables indépendamment de la faute, et afin de permettre une juste répartition des risques, il devrait incomber à une personne qui demande réparation du dommage causé par un produit défectueux de prouver le dommage, la défectuosité d'un produit et le lien de causalité entre les deux, conformément au niveau de preuve applicable en vertu du droit national. Or, pour ce qui est de pouvoir consulter et comprendre les informations sur le mode de fabrication et de fonctionnement d'un produit, les personnes qui demandent réparation du dommage sont souvent très désavantagées par rapport aux fabricants. Cette asymétrie des informations peut nuire à la juste répartition des risques, en particulier dans les cas présentant une complexité technique ou scientifique. Il faut donc faciliter l'accès des demandeurs aux preuves à utiliser en justice. Ces preuves comprennent les documents que le défendeur doit créer ex novo en collectant ou en classant les preuves disponibles. Lors de l'évaluation de la demande de divulgation d'éléments de preuves, les juridictions nationales devraient veiller à ce que cet accès soit limité à ce qui est nécessaire et proportionné, notamment pour éviter les recherches non spécifiques d'informations qui ne sont pas pertinentes pour la procédure et pour protéger les informations confidentielles, telles que les informations relevant du champ d'application du secret professionnel et des secrets d'affaires conformément au droit de l'Union et au droit national, en particulier la directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil (15). Compte tenu de la complexité de certains types de preuves, par exemple celles relatives à des produits numériques, les juridictions nationales devraient avoir la possibilité d'exiger que ces preuves soient présentées d'une manière facilement accessible et compréhensible, sous certaines conditions.
(43) La présente directive harmonise les règles relatives à la divulgation des éléments de preuve uniquement dans la mesure où elle réglemente ces questions. Les questions qui ne sont pas réglementées par la présente directive comprennent les règles relatives à la divulgation des éléments de preuve en ce qui concerne: les procédures préalables à un procès; le degré de précision que doit avoir la demande de preuves; les tiers; les cas d'actions déclaratoires; et les sanctions en cas de non-respect de l'obligation de divulguer des éléments de preuve.
(44) étant donné que les défendeurs pourraient avoir besoin d'accéder à des éléments de preuve dont dispose le demandeur pour s'opposer à une demande en réparation au titre de la présente directive, les défendeurs devraient également avoir la possibilité d'accéder à des éléments de preuve. À l'instar d'une demande de divulgation formulée par le demandeur, lors de l'examen de la demande de divulgation d'éléments de preuve présentée par le défendeur, les juridictions nationales devraient veiller à ce que cet accès soit limité à ce qui est nécessaire et proportionné, notamment pour éviter les recherches non spécifiques d'informations qui ne sont pas pertinentes pour la procédure et pour protéger les informations confidentielles.
(45) En ce qui concerne les secrets d'affaires tels que définis dans la directive (UE) 2016/943, les juridictions nationales devraient être habilitées à prendre des mesures spécifiques pour garantir la confidentialité des secrets d'affaires pendant et après la procédure, tout en assurant un équilibre juste et proportionné entre les intérêts du détenteur du secret d'affaires en ce qui concerne le secret et les intérêts de la personne lésée. Ces mesures devraient au moins viser à restreindre l'accès aux documents contenant des secrets d'affaires ou des secrets d'affaires allégués, ainsi qu'à restreindre l'accès aux audiences à un nombre limité de personnes, ou à permettre l'accès uniquement à des documents expurgés ou à des transcriptions d'audiences. Lorsqu'elles se prononcent sur de telles mesures, il convient que les juridictions nationales prennent en considération la nécessité de garantir le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, les intérêts légitimes des parties et, le cas échéant, des tiers, ainsi que tout préjudice que la décision d'accorder ou de refuser ces mesures pourrait causer à l'une ou l'autre des parties à un litige et, le cas échéant, à des tiers.
(46) Il est nécessaire d'alléger la charge de la preuve incombant au demandeur, pour autant que certaines conditions soient remplies. Les présomptions de fait réfragables constituent un mécanisme courant pour atténuer les difficultés rencontrées par les demandeurs en matière de preuve et pour permettre aux juridictions de fonder l'existence d'une défectuosité ou d'un lien de causalité sur la présence d'un autre fait prouvé, tout en préservant les droits du défendeur. Afin d'inciter au respect de l'obligation de divulguer des informations, les juridictions nationales devraient présumer la défectuosité d'un produit lorsqu'un défendeur manque à cette obligation. De nombreuses exigences obligatoires en matière de sécurité ont été adoptées pour protéger les consommateurs et les personnes physiques contre les risques de préjudice, notamment en vertu du règlement (UE) 2023/988. Afin de resserrer encore le lien étroit qui existe entre les règles en matière de sécurité des produits et celles en matière de responsabilité, le non-respect de ces exigences devrait également donner lieu à une présomption de défectuosité. Tel est notamment le cas lorsque les produits ne sont pas équipés de moyens permettant de consigner des informations sur leur fonctionnement comme l'exige le droit de l'Union ou le droit national. Il devrait en aller de même en cas de dysfonctionnement évident par exemple lorsqu'une bouteille en verre explose en cours d'utilisation raisonnablement prévisible, puisqu'il est inutilement fastidieux d'exiger que le demandeur prouve la défectuosité lorsque les circonstances sont telles que l'existence de cette défectuosité n'est pas contestée. L'utilisation raisonnablement prévisible couvre l'utilisation à laquelle un produit est destiné conformément aux informations fournies par le fabricant ou l'opérateur économique qui le met sur le marché, l'utilisation normale telle que déterminée par la conception et la construction du produit, et l'utilisation pouvant être raisonnablement prévue lorsque cette utilisation pourrait résulter d'un comportement humain licite et aisément prévisible.
(47) Lorsqu'il a été établi qu'un produit est défectueux et que le type de dommage survenu est, sur la base principalement de cas similaires, généralement causé par la défectuosité en question, le demandeur ne devrait pas être tenu de prouver le lien de causalité et son existence devrait être présumée.
(48) Les juridictions nationales devraient présumer qu'un produit est défectueux ou qu'il y a un lien de causalité entre le dommage et la défectuosité, ou les deux, lorsque, bien que le défendeur ait divulgué des informations, il serait excessivement difficile pour le demandeur, en particulier en raison de la complexité technique ou scientifique de l'affaire, de prouver la défectuosité du produit ou le lien de causalité, ou les deux. Elles devraient le faire en tenant compte de toutes les circonstances de l'affaire. Dans de tels cas, le fait d'imposer le niveau de preuve habituel requis par le droit national, qui exige souvent un degré de probabilité élevé, porterait atteinte à l'effectivité du droit à réparation. Par conséquent, étant donné que les fabricants ont des connaissances spécialisées et sont mieux informés que la personne lésée, et afin de préserver une juste répartition des risques tout en évitant un renversement de la charge de la preuve, il convient que ce demandeur soit tenu de démontrer, lorsque les difficultés du demandeur sont liées à la preuve de la défectuosité, uniquement qu'il est probable que le produit ait été défectueux ou, lorsque les difficultés du demandeur concernent la preuve du lien de causalité, uniquement que la défectuosité du produit est une cause probable du dommage. Il convient que les juridictions nationales déterminent la complexité technique ou scientifique au cas par cas, en tenant compte de divers facteurs. Ces facteurs devraient inclure la complexité du produit, par exemple lorsqu'il s'agit d'un dispositif médical innovant, la complexité de la technologie utilisée, par exemple l'apprentissage automatique, la complexité des informations et des données à analyser par le demandeur ainsi que la complexité du lien de causalité, par exemple dans le cas d'un lien entre un produit pharmaceutique ou alimentaire et l'apparition d'un problème de santé, ou bien dans le cas où, pour prouver l'existence d'un lien, le demandeur devrait expliquer le fonctionnement interne d'un système d'IA. L'appréciation des difficultés excessives devrait elle aussi être effectuée au cas par cas par les juridictions nationales. Bien qu'il incombe aux demandeurs de présenter des arguments démontrant l'existence de difficultés excessives, il convient de ne pas en exiger la preuve. Par exemple, dans une demande concernant un système d'IA, le demandeur ne devrait pas être tenu, pour que la juridiction constate l'existence de difficultés excessives, d'expliquer les caractéristiques spécifiques du système d'IA ni en quoi ces caractéristiques compliquent l'établissement du lien de causalité. Il convient que le défendeur ait la possibilité de contester tous les éléments de la demande, y compris l'existence de difficultés excessives.
(49) Dans l'intérêt d'une juste répartition des risques, il convient que les opérateurs économiques soient exonérés de leur responsabilité s'ils peuvent prouver l'existence de circonstances exonératoires spécifiques. Ils ne devraient pas être tenus pour responsables lorsqu'ils peuvent prouver que quelqu'un d'autre qu'eux-mêmes a fait sortir le produit du processus de fabrication contre leur volonté ou que la défectuosité du produit résulte précisément de sa conformité avec des exigences légales.
(50) Du point de vue des fabricants, le moment de la mise sur le marché ou de la mise en service est normalement le moment où un produit quitte leur contrôle, tandis que, du point de vue des distributeurs, c'est le moment où ceux-ci mettent le produit à disposition sur le marché. Les fabricants devraient par conséquent être exonérés de responsabilité lorsqu'ils prouvent qu'il est probable que la défectuosité ayant causé le dommage n'existait pas au moment où ils ont mis le produit sur le marché ou l'ont mis en service, ou que cette défectuosité est apparue après ce moment. Toutefois, étant donné que les technologies numériques permettent aux fabricants d'exercer un contrôle après le moment de la mise sur le marché ou de la mise en service, il convient que les fabricants restent responsables de toute défectuosité apparue après ce moment du fait des logiciels ou des services connexes qu'ils contrôlent, que ce soit sous la forme de mises à jour ou de mises à niveau ou bien d'algorithmes d'apprentissage automatique. Ces logiciels ou services connexes devraient être considérés comme étant sous le contrôle du fabricant lorsque celui-ci les fournit lui-même ou bien autorise ou accepte d'une quelconque autre manière leur fourniture par un tiers. Par exemple, si un téléviseur intelligent est présenté comme incluant une application vidéo, mais que l'utilisateur est tenu de télécharger l'application à partir du site internet d'un tiers après l'achat du téléviseur, il convient que le fabricant du téléviseur demeure responsable, avec le fabricant de l'application vidéo, du dommage causé par une éventuelle défectuosité de l'application vidéo, même si la défectuosité n'est apparue qu'après la mise sur le marché du téléviseur.
(51) La possibilité pour les opérateurs économiques de s'exonérer de leur responsabilité en prouvant que la défectuosité est apparue après la mise sur le marché ou la mise en service du produit devrait être limitée lorsque la défectuosité d'un produit tient à l'absence de mises à jour ou de mises à niveau logicielles nécessaires pour remédier aux vulnérabilités en matière de cybersécurité et préserver la sécurité du produit. Ces vulnérabilités peuvent affecter le produit de telle sorte qu'il cause des dommages au sens de la présente directive. Compte tenu des responsabilités qui incombent aux fabricants en vertu du droit de l'Union en matière de sécurité des produits tout au long de leur cycle de vie, notamment en vertu du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil (16), il convient que les fabricants ne soient pas exonérés de responsabilité en ce qui concerne des dommages causés par leurs produits défectueux lorsque la défectuosité découle de leur incapacité à fournir les mises à jour ou mises à niveau de sécurité logicielles nécessaires pour remédier aux vulnérabilités de ces produits face à l'évolution des risques en matière de cybersécurité. Cette responsabilité ne devrait pas s'appliquer lorsque la fourniture ou l'installation d'un tel logiciel échappe au contrôle du fabricant, par exemple lorsque le propriétaire du produit n'installe pas la mise à jour ou la mise à niveau fournie pour assurer ou maintenir le niveau de sécurité du produit. La présente directive n'impose aucune obligation de fournir des mises à jour ou mises à niveau pour un produit.
(52) Dans l'intérêt d'une juste répartition des risques, les opérateurs économiques devraient être exonérés de responsabilité s'ils prouvent que l'état général des connaissances scientifiques et techniques, déterminé en fonction du niveau le plus avancé de connaissances objectives accessibles et non des connaissances réelles de l'opérateur économique en question, pendant la période au cours de laquelle le produit était sous le contrôle du fabricant, était tel que l'on ne pouvait pas déceler la défectuosité.
(53) Il peut arriver que deux ou plusieurs parties soient responsables du même dommage, notamment lorsqu'un composant défectueux est intégré dans un produit qui cause un dommage. Dans ce cas, la personne lésée devrait pouvoir demander réparation tant auprès du fabricant qui a intégré le composant défectueux dans son produit qu'auprès du fabricant du composant défectueux lui-même. Afin de garantir la protection des personnes physiques, il convient que toutes les parties soient considérées comme solidairement responsables dans de telles situations.
(54) Le secteur des logiciels nécessite un degré d'innovation particulièrement élevé. Afin de soutenir la capacité d'innovation des microentreprises et des petites entreprises qui fabriquent des logiciels, ces entreprises devraient pouvoir convenir par contrat avec les fabricants qui intègrent leur logiciel dans un produit que ces derniers n'exerceront pas un recours auprès du fabricant du logiciel en cas de dommage causé par un composant logiciel défectueux. De tels accords contractuels, déjà utilisés dans certains états membres, devraient être autorisés, étant donné que le fabricant du produit dans son ensemble est en tout état de cause responsable de toute défectuosité du produit, y compris des composants. Toutefois, il convient que la responsabilité à l'égard d'une personne lésée ne soit jamais limitée ou exclue par un tel accord contractuel.
(55) Il peut arriver que, parallèlement à la défectuosité du produit, les actes et omissions d'une personne autre qu'un opérateur économique potentiellement responsable contribuent à causer le préjudice subi, par exemple lorsqu'un tiers exploite la vulnérabilité d'un produit en matière de cybersécurité. Dans l'intérêt de la protection des consommateurs, lorsqu'un produit est défectueux, par exemple en raison d'une vulnérabilité qui le rend moins sûr que ce que le grand public est en droit d'attendre, il convient que la responsabilité de l'opérateur économique ne soit pas réduite ou supprimée du fait de ces actes ou omissions par un tiers. Il devrait cependant être possible de réduire ou supprimer la responsabilité de l'opérateur économique lorsque les personnes lésées ont elles-mêmes contribué, par négligence, à causer le dommage, par exemple lorsque, par négligence, la personne lésée n'installe pas les mises à jour ou les mises à niveau fournies par l'opérateur économique qui auraient permis d'atténuer ou d'éviter le dommage.
(56) L'objectif de protection des personnes physiques serait compromis s'il était possible de limiter ou d'exclure la responsabilité d'un opérateur économique au moyen de dispositions contractuelles. Il convient donc de ne pas autoriser de dérogations contractuelles. Pour la même raison, les dispositions du droit national ne devraient pas pouvoir limiter ou exclure la responsabilité, par exemple en fixant des plafonds financiers à la responsabilité d'un opérateur économique.
(57) étant donné que les produits vieillissent au fil du temps et que des normes de sécurité plus élevées sont élaborées au fur et à mesure que la science et la technologie évoluent, il ne serait pas raisonnable que les fabricants soient responsables pour une durée illimitée de la défectuosité de leurs produits. Il convient donc que la responsabilité soit engagée pendant une durée raisonnable, à savoir dix ans à partir de la mise sur le marché ou de la mise en service d'un produit (ci-après dénommé «délai de forclusion»), sans préjudice des demandes pendantes dans le cadre d'une procédure judiciaire. Afin d'éviter que la possibilité d'obtenir réparation pour un dommage causé par un produit défectueux ne soit indûment restreinte, le délai de forclusion devrait être porté à vingt-cinq ans dans les cas où des preuves médicales montrent que les symptômes d'une lésion corporelle sont d'apparition lente.
(58) étant donné que les produits substantiellement modifiés sont essentiellement des produits nouveaux, il convient qu'un nouveau délai de forclusion commence à courir après toute modification substantielle d'un produit, et de sa mise à disposition sur le marché ou mise en service subséquente, par exemple à la suite d'une refabrication. Les mises à jour ou mises à niveau qui ne constituent pas des modifications substantielles du produit ne devraient pas avoir d'incidence sur le délai de forclusion qui s'applique au produit d'origine.
(59) La possibilité prévue par la présente directive, selon laquelle un opérateur économique qui prouve que l'état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise sur le marché ou de la mise en service d'un produit ou pendant la période au cours de laquelle le produit était sous le contrôle du fabricant ne permettait pas de déceler l'existence d'un défaut, peut éviter toute responsabilité, dite «exonération pour risque de développement», pourrait être considérée dans certains états membres comme une limitation indue de la protection des personnes physiques. Un état membre devrait donc pouvoir déroger à cette possibilité en introduisant de nouvelles mesures ou en modifiant les mesures existantes, pour prolonger la responsabilité dans de telles situations à des types spécifiques de produits si cela est jugé nécessaire, proportionné et justifié par des objectifs d'intérêt général, tels que ceux énoncés dans le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, à savoir l'ordre public, la sécurité publique et la santé publique. Afin de garantir la transparence et la sécurité juridique pour les opérateurs économiques qui exercent leurs activités dans l'Union, le recours à cette dérogation à l'exonération pour risque de développement devrait être notifié à la Commission, qui devrait ensuite en informer les autres états membres. En vue de faciliter une approche rationnelle entre les états membres ainsi que la cohérence avec les objectifs de la présente directive, il convient que la Commission puisse rendre des avis non contraignants sur les mesures ou modifications proposées. Afin d'accorder un délai pour rendre un avis, il convient qu'un état membre qui propose de telles mesures ou modifications laisse en suspens ces mesures ou modifications proposées pendant six mois à compter de leur notification à la Commission, à moins que celle-ci ne rende un avis antérieurement. Il convient que cet avis soit rendu à l'issue d'une coopération étroite entre l'état membre concerné et la Commission, en tenant compte, le cas échéant, de l'avis d'autres états membres. Dans l'intérêt de la sécurité juridique et afin de faciliter la continuité des dispositions établies en vertu de la directive 85/374/CEE, il convient également qu'un état membre puisse maintenir les dérogations existantes à l'exonération pour risque de développement dans son système juridique.
(60) Afin de faciliter l'interprétation harmonisée de la présente directive par les juridictions nationales, il convient d'imposer aux états membres de publier les décisions de justice irrévocables en matière de responsabilité du fait des produits rendues en vertu de la présente directive, à savoir les décisions de justice qui ne peuvent pas ou ne peuvent plus faire l'objet d'un recours. Les états membres devraient être tenus de publier uniquement les décisions des juridictions nationales d'appel ou des instances suprêmes nationales de manière à limiter la charge administrative.
(61) Afin de mieux comprendre la manière dont la présente directive est appliquée au niveau national, dans l'intérêt, entre autres, du public, des praticiens de la justice, des universitaires et des états membres, il convient que la Commission crée et tienne à jour une base de données facilement accessible et publiquement disponible contenant les décisions de justice pertinentes ainsi que les références aux arrêts pertinents rendus par la Cour de justice de l'Union européenne.
(62) La Commission devrait procéder à une évaluation de la présente directive. En application du paragraphe 22 de l'accord interinstitutionnel du 13 avril 2016«Mieux légiférer» (17), cette évaluation devrait se fonder sur cinq critères, à savoir l'efficacité, l'effectivité, la pertinence, la cohérence et la valeur ajoutée, et constituer la base des analyses d'impact d'autres mesures éventuelles. Dans son rapport d'évaluation, il convient que la Commission indique la méthode de calcul utilisée dans son évaluation. Il est important que la Commission rassemble toutes les informations nécessaires de manière à éviter la réglementation excessive et une charge administrative pour les états membres et les opérateurs économiques, en utilisant des informations provenant de toutes les sources pertinentes et fiables, y compris les institutions, organes et organismes de l'Union, les autorités nationales compétentes ou les organismes et organisations reconnus au niveau international.
(63) Pour des raisons de sécurité juridique, la présente directive ne s'applique pas aux produits mis sur le marché ou mis en service avant le 9 décembre 2026. Il est donc nécessaire de prévoir des dispositions transitoires afin d'assurer le maintien de la responsabilité au titre de la directive 85/374/CEE pour les dommages causés par des produits défectueux qui ont été mis sur le marché ou mis en service avant cette date.
(64) étant donné que les objectifs de la présente directive qui consistent à assurer le fonctionnement du marché intérieur, une concurrence non faussée et un niveau élevé de protection des personnes physiques ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les états membres parce que le marché des biens concerne l'ensemble de l'Union, mais peuvent, grâce à l'effet d'harmonisation des règles communes en matière de responsabilité, l'être mieux au niveau de l'Union, celle-ci peut adopter des mesures conformément au principe de subsidiarité consacré à l'article 5 du traité sur l'Union européenne. Conformément au principe de proportionnalité énoncé audit article, la présente directive n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs,
ONT ADOPTé LA PRéSENTE DIRECTIVE:
CHAPITRE I
DISPOSITIONS GéNéRALES
Article 1er
Objet et objectifs
La présente directive établit des règles communes relatives à la responsabilité des opérateurs économiques pour les dommages causés à des personnes physiques par des produits défectueux et à la réparation de ces dommages.
L'objectif de la présente directive est de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur tout en assurant un niveau élevé de protection des consommateurs et des autres personnes physiques.
Article 2
Champ d'application
1. La présente directive s'applique aux produits mis sur le marché ou mis en service après le 9 décembre 2026.
2. La présente directive ne s'applique pas aux logiciels libres et ouverts qui sont développés ou fournis en dehors du cadre d'une activité commerciale.
3. La présente directive ne s'applique pas aux dommages résultant d'accidents nucléaires dans la mesure où la responsabilité pour ces dommages est régie par des conventions internationales ratifiées par les états membres.
4. La présente directive n'affecte pas:
a) l'applicabilité du droit de l'Union relatif à la protection des données à caractère personnel, en particulier le règlement (UE) 2016/679 et les directives 2002/58/CE et (UE) 2016/680;
b) tout droit qu'une personne lésée a en vertu des règles nationales en matière de responsabilité contractuelle ou de responsabilité extracontractuelle pour des motifs autres que la défectuosité d'un produit, comme le prévoit la présente directive, y compris les règles nationales mettant en uvre le droit de l'Union;
c) tout droit qu'une personne lésée a dans le cadre d'un régime spécial de responsabilité qui existait en droit national au 30 juillet 1985.
Article 3
Niveau d'harmonisation
Les états membres s'abstiennent de maintenir ou d'introduire, dans leur droit national, des dispositions s'écartant de celles fixées par la présente directive, y compris des dispositions plus strictes ou plus souples visant à assurer un niveau de protection différent pour les consommateurs et autres personnes physiques, sauf si la présente directive en dispose autrement.
Article 4
Définitions
Aux fins de la présente directive, on entend par:
1) «produit»: tout meuble, même s'il est incorporé dans un autre meuble ou dans un immeuble ou interconnecté avec celui-ci; le terme comprend l'électricité, les fichiers de fabrication numériques, les matières premières et les logiciels;
2) «fichier de fabrication numérique»: une version numérique, ou un modèle numérique, d'un meuble, qui contient les informations fonctionnelles nécessaires pour produire un élément corporel en permettant le contrôle automatisé de machines ou d'outils;
3) «service connexe»: un service numérique qui est intégré à un produit ou interconnecté avec celui-ci de telle sorte que son absence empêcherait le produit d'exécuter une ou plusieurs de ses fonctions;
4) «composant»: tout élément, corporel ou incorporel, matière première ou service connexe, intégré dans un produit ou interconnecté avec celui-ci;
5) «contrôle du fabricant»: le fait que:
a) le fabricant d'un produit effectue ou, en ce qui concerne les actions d'un tiers, autorise ou permet:
i) l'intégration, l'interconnexion ou la fourniture d'un composant, y compris les mises à jour ou mises à niveau logicielles; ou
ii) la modification du produit, y compris les modifications substantielles;
b) le fabricant d'un produit a la capacité de fournir lui-même ou par l'intermédiaire d'un tiers des mises à jour ou des mises à niveau logicielles;
6) «données»: les données au sens de l'article 2, point 1), du règlement (UE) 2022/868 du Parlement européen et du Conseil (18);
7) «mise à disposition sur le marché»: toute fourniture d'un produit destiné à être distribué, consommé ou utilisé sur le marché de l'Union dans le cadre d'une activité commerciale, à titre onéreux ou gratuit;
8) «mise sur le marché»: la première mise à disposition d'un produit sur le marché de l'Union;
9) «mise en service»: la première utilisation d'un produit dans l'Union dans le cadre d'une activité commerciale, à titre onéreux ou gratuit, lorsque ce produit n'a pas été mis sur le marché avant sa première utilisation;
10) «fabricant»: toute personne physique ou morale qui:
a) met au point, fabrique ou produit un produit;
b) fait concevoir ou fabriquer un produit ou qui, en apposant sur ce produit son nom, sa marque ou d'autres caractéristiques distinctives, se présente comme son fabricant; ou
c) met au point, fabrique ou produit un produit pour son propre usage;
11) «mandataire»: toute personne physique ou morale établie dans l'Union ayant reçu un mandat écrit d'un fabricant pour agir en son nom aux fins de l'accomplissement de tâches déterminées;
12) «importateur»: toute personne physique ou morale qui met sur le marché de l'Union un produit provenant d'un pays tiers;
13) «prestataire de services d'exécution des commandes»: toute personne physique ou morale qui offre, dans le cadre d'une activité commerciale, au moins deux des services suivants: entreposage, conditionnement, étiquetage et expédition d'un produit, sans être propriétaire du produit concerné, à l'exclusion des services postaux au sens de l'article 2, point 1), de la directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil (19), des services de livraison de colis au sens de l'article 2, point 2), du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil (20), et de tout autre service postal ou service de transport de marchandises;
14) «distributeur»: toute personne physique ou morale faisant partie de la chaîne d'approvisionnement qui met un produit à disposition sur le marché, autre que le fabricant ou l'importateur de ce produit;
15) «opérateur économique»: un fabricant d'un produit ou d'un composant, un fournisseur d'un service connexe, un mandataire, un importateur, un prestataire de services d'exécution des commandes ou un distributeur;
16) «plateforme en ligne»: une plateforme en ligne au sens de l'article 3, point i), du règlement (UE) 2022/2065;
17) «secret d'affaires»: un secret d'affaires au sens de l'article 2, point 1), de la directive (UE) 2016/943;
18) «modification substantielle»: une modification apportée à un produit après sa mise sur le marché ou sa mise en service:
a) qui est considérée comme substantielle au regard des règles de l'Union ou des règles nationales applicables en matière de sécurité des produits; ou
b) lorsque les règles de l'Union ou les règles nationales pertinentes en matière de sécurité des produits ne définissent pas de seuil permettant de déterminer ce qui doit être considéré comme une modification substantielle, qui:
i) modifie la performance d'origine, la destination d'origine ou le type d'origine du produit, sans que cette modification ait été prévue dans l'évaluation initiale des risques effectuée par le fabricant; et
ii) modifie la nature du danger, crée un nouveau danger ou augmente le niveau de risque.
CHAPITRE II
DISPOSITIONS SPéCIFIQUES RELATIVES À LA RESPONSABILITé DU FAIT DES PRODUITS DéFECTUEUX
Article 5
Droit à réparation
1. Les états membres veillent à ce que toute personne physique qui subit un dommage causé par un produit défectueux (ci-après dénommée «personne lésée») ait droit à réparation conformément à la présente directive.
2. Les états membres veillent à ce que les demandes en réparation au titre du paragraphe 1 puissent également être introduites par:
a) une personne qui a succédé ou a été subrogée dans les droits de la personne lésée en vertu du droit de l'Union ou du droit national ou de dispositions contractuelles; ou
b) une personne agissant pour le compte d'une ou de plusieurs personnes lésées, en vertu du droit de l'Union ou du droit national.
Article 6
Dommage
1. Le droit à réparation en vertu de l'article 5 s'applique uniquement aux types de dommages suivants:
a) la mort ou les lésions corporelles, y compris l'atteinte médicalement reconnue à la santé psychologique;
b) le dommage causé à des biens ou la destruction de biens, à l'exception:
i) du produit défectueux lui-même;
ii) d'un produit endommagé par un composant défectueux qui est intégré dans un produit ou interconnecté avec celui-ci par le fabricant dudit produit ou placé sous le contrôle de ce fabricant;
iii) des biens utilisés exclusivement à des fins professionnelles;
c) de la destruction ou de la corruption de données qui ne sont pas utilisées à des fins professionnelles.
2. Le droit à réparation en vertu de l'article 5 couvre toutes les pertes matérielles résultant des dommages visés au paragraphe 1 du présent article. Le droit à réparation couvre également les pertes immatérielles résultant des dommages visés au paragraphe 1 du présent article, dans la mesure où ils peuvent être indemnisés en vertu du droit national.
3. Le présent article n'affecte pas le droit national relatif à la réparation des dommages au titre d'autres régimes de responsabilité.
Article 7
Défectuosité
1. Un produit est considéré comme défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle une personne peut légitimement s'attendre ou qui est requise par le droit de l'Union ou le droit national.
2. Pour évaluer la défectuosité d'un produit, toutes les circonstances doivent être prises en compte, y compris:
a) la présentation et les caractéristiques du produit, y compris son étiquetage, sa conception, ses caractéristiques techniques, sa composition, son emballage et les instructions d'assemblage, d'installation, d'utilisation et d'entretien;
b) l'utilisation raisonnablement prévisible du produit;
c) l'effet sur le produit de toute capacité à poursuivre son apprentissage ou à acquérir de nouvelles caractéristiques après sa mise sur le marché ou sa mise en service;
d) l'effet raisonnablement prévisible sur le produit d'autres produits dont on peut s'attendre à ce qu'ils soient utilisés conjointement avec le produit, notamment au moyen d'interconnexion;
e) le moment où le produit a été mis sur le marché ou mis en service ou, lorsque le fabricant conserve le contrôle du produit après ce moment, le moment où le produit a quitté le contrôle du fabricant;
f) les exigences pertinentes en matière de sécurité des produits, y compris les exigences de cybersécurité pertinentes pour la sécurité;
g) tout rappel du produit ou toute autre intervention pertinente en ce qui concerne la sécurité des produits de la part d'une autorité compétente ou d'un opérateur économique visé à l'article 8;
h) les besoins spécifiques du groupe d'utilisateurs auquel le produit est destiné;
i) dans le cas d'un produit dont la finalité est la prévention des dommages, tout manquement du produit à cette fin.
3. Un produit n'est pas considéré comme étant défectueux au seul motif qu'un produit plus perfectionné, y compris les mises à jour ou mises à niveau pour un produit, a déjà été ou est ultérieurement mis sur le marché ou mis en service.
Article 8
Responsabilité des opérateurs économiques du fait des produits défectueux
1. Les états membres veillent à ce que les opérateurs économiques suivants soient responsables des dommages conformément à la présente directive:
a) le fabricant d'un produit défectueux;
b) le fabricant d'un composant défectueux, lorsque ce composant a été intégré dans un produit ou interconnecté avec celui-ci sous le contrôle du fabricant et a causé le défaut du produit, et sans préjudice de la responsabilité du fabricant visée au point a); et
c) dans le cas d'un fabricant d'un produit ou d'un composant établi en dehors de l'Union, et sans préjudice de la responsabilité de ce fabricant:
i) l'importateur du produit ou du composant défectueux;
ii) le mandataire du fabricant; et
iii) en l'absence d'importateur établi dans l'Union ou de mandataire, le prestataire de services d'exécution des commandes.
La responsabilité du fabricant visée au premier alinéa, point a), couvre également tout dommage causé par un composant défectueux lorsqu'il a été intégré dans un produit ou interconnecté avec celui-ci sous le contrôle de ce fabricant.
2. Toute personne physique ou morale qui modifie de manière substantielle un produit en dehors du contrôle du fabricant et le met ensuite à disposition sur le marché ou en service est considérée comme un fabricant de ce produit aux fins du paragraphe 1.
3. Les états membres veillent à ce que, lorsqu'un opérateur économique parmi ceux visés au paragraphe 1 et établis dans l'Union ne peut être identifié, chaque distributeur du produit défectueux soit responsable quand:
a) la personne lésée demande au distributeur d'identifier un opérateur économique parmi ceux visés au paragraphe 1 et établis dans l'Union, ou le distributeur qui lui a fourni ce produit; et
b) ce distributeur n'identifie pas un opérateur économique ou son distributeur, tel que visé au point a), dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande visée au point a).
4. Le paragraphe 3 du présent article s'applique également à tout fournisseur d'une plateforme en ligne qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels et qui n'est pas un opérateur économique, pour autant que les conditions énoncées à l'article 6, paragraphe 3, du règlement (UE) 2022/2065 soient remplies.
5. Lorsque la personne lésée n'obtient pas réparation parce qu'aucune des personnes visées aux paragraphes 1 à 4 ne peuvent être tenues pour responsables en vertu de la présente directive, ou parce que les personnes responsables sont insolvables ou ont cessé d'exister, les états membres peuvent utiliser les systèmes nationaux d'indemnisation sectoriels existants ou en établir de nouveaux en vertu du droit national, de préférence non financés par des recettes publiques, pour indemniser de manière appropriée les personnes lésées qui ont subi des dommages causés par des produits défectueux.
Article 9
Divulgation des éléments de preuves
1. Les états membres veillent à ce que, sur sollicitation d'une personne, qui demande réparation lors d'une procédure devant une juridiction nationale du dommage causé par un produit défectueux (ci-après dénommé «demandeur») et qui a présenté des faits et des éléments de preuve suffisants pour étayer la plausibilité de sa demande en réparation, le défendeur soit tenu de divulguer les éléments de preuve pertinents dont le défendeur dispose, sous réserve des conditions prévues dans le présent article.
2. Les états membres veillent à ce que, à la demande d'un défendeur qui a présenté des faits et des éléments de preuve suffisants pour démontrer qu'il a besoin de preuves aux fins de s'opposer à une demande en réparation, le demandeur soit tenu, conformément au droit national, de divulguer les éléments de preuve pertinents dont il dispose.
3. Les états membres veillent à ce que la divulgation des éléments de preuve en vertu des paragraphes 1 et 2, et conformément au droit national, soit limitée à ce qui est nécessaire et proportionné.
4. Les états membres veillent à ce que, lorsqu'elles déterminent si la divulgation d'éléments de preuve demandée par une partie est nécessaire et proportionnée, les juridictions nationales tiennent compte des intérêts légitimes de toutes les parties concernées, y compris des tiers, notamment pour ce qui est de la protection des informations confidentielles et des secrets d'affaires.
5. Les états membres veillent à ce que, lorsqu'un défendeur est tenu de divulguer des informations qui sont un secret d'affaires ou un secret d'affaires allégué, les juridictions nationales soient habilitées, à la demande dûment motivée d'une partie ou sur leur propre initiative, à prendre les mesures spécifiques nécessaires pour préserver la confidentialité de ces informations lorsqu'elles sont utilisées ou mentionnées au cours ou à la suite de la procédure judiciaire.
6. Les états membres veillent à ce que, lorsqu'une partie est tenue de divulguer des éléments de preuve, les juridictions nationales soient habilitées, à la demande dûment motivée de la partie adverse ou lorsque la juridiction nationale concernée l'estime approprié et en conformité avec le droit national, à exiger que ces preuves soient présentées d'une manière facilement accessible et compréhensible, si cette présentation est jugée proportionnée par la juridiction nationale en termes de coûts et d'efforts pour la partie concernée.
7. Le présent article n'affecte pas les règles nationales relatives à la divulgation des preuves préalable au procès, lorsque de telles règles existent.
Article 10
Charge de la preuve
1. Les états membres veillent à ce que le demandeur soit tenu de prouver la défectuosité du produit, le dommage subi et le lien de causalité entre cette défectuosité et ce dommage.
2. La défectuosité du produit est présumée lorsque l'une des conditions suivantes est remplie:
a) le défendeur ne divulgue pas les éléments de preuve pertinents conformément à l'article 9, paragraphe 1;
b) le demandeur démontre que le produit n'est pas conforme aux exigences obligatoires en matière de sécurité des produits prévues par le droit de l'Union ou le droit national qui sont destinées à protéger contre le risque de survenance du dommage subi par la personne lésée; ou
c) le demandeur démontre que le dommage a été causé par un dysfonctionnement manifeste du produit lors d'une utilisation raisonnablement prévisible ou dans des circonstances ordinaires.
3. Le lien de causalité entre la défectuosité du produit et le dommage est présumé lorsqu'il a été établi que le produit est défectueux et que le dommage causé est d'une nature généralement compatible avec le défaut en question.
4. Une juridiction nationale présume la défectuosité du produit ou le lien de causalité entre la défectuosité du produit et le dommage, ou les deux, lorsque, malgré la production d'éléments de preuve conformément à l'article 9 et compte tenu de toutes les circonstances pertinentes du cas d'espèce:
a) le demandeur fait face à des difficultés excessives, notamment en raison de la complexité technique ou scientifique, pour prouver la défectuosité du produit ou le lien de causalité entre cette défectuosité et le dommage, ou les deux; et
b) le demandeur démontre qu'il est probable que le produit est défectueux ou qu'il existe un lien de causalité entre la défectuosité du produit et le dommage, ou les deux.
5. Le défendeur a le droit de renverser toute présomption visée aux paragraphes 2, 3 et 4.
Article 11
Exonération de responsabilité
1. Un opérateur économique visé à l'article 8 n'est pas responsable du dommage causé par un produit défectueux s'il prouve l'une des situations suivantes:
a) s'il s'agit d'un fabricant ou d'un importateur, qu'il n'a pas mis le produit sur le marché ni ne l'a mis en service;
b) s'il s'agit d'un distributeur, qu'il n'a pas mis le produit à disposition sur le marché;
c) qu'il est probable que la défectuosité ayant causé le dommage n'existait pas au moment de la mise sur le marché, de la mise en service ou, dans le cas d'un distributeur, de la mise à disposition sur le marché du produit, ou que cette défectuosité est apparue après ce moment;
d) que la défectuosité qui a causé le dommage est due à la conformité du produit avec des exigences légales;
e) que l'état objectif des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise sur le marché ou de la mise en service du produit ou au cours de la période pendant laquelle le produit était sous le contrôle du fabricant n'a pas permis de déceler la défectuosité;
f) s'il s'agit d'un fabricant d'un composant défectueux visé à l'article 8, paragraphe 1, premier alinéa, point b), que la défectuosité du produit dans lequel le composant a été intégré est due à la conception de ce produit ou aux instructions données par le fabricant de ce produit au fabricant de ce composant;
g) dans le cas d'une personne qui modifie un produit visé à l'article 8, paragraphe 2, que la défectuosité ayant causé le dommage est liée à une partie du produit non affectée par la modification.
2. Par dérogation au paragraphe 1, point c), un opérateur économique n'est pas exonéré de responsabilité lorsque la défectuosité d'un produit est due à l'un des éléments suivants, à condition qu'il soit sous le contrôle du fabricant:
a) un service connexe;
b) des logiciels, y compris des mises à jour ou mises à niveau logicielles;
c) une absence de mises à jour ou de mises à niveau logicielles nécessaires au maintien de la sécurité;
d) une modification substantielle du produit.
CHAPITRE III
DISPOSITIONS GéNéRALES EN MATIÈRE DE RESPONSABILITé
Article 12
Responsabilité de plusieurs opérateurs économiques
1. Sans préjudice du droit national relatif aux droits relatifs à la responsabilité solidaire et à l'action récursoire, les états membres veillent à ce que, lorsque deux ou plusieurs opérateurs économiques sont responsables du même dommage en vertu de la présente directive, ils puissent être tenus pour solidairement responsables.
2. Le fabricant qui intègre un composant logiciel dans un produit n'a pas de droit de recours contre le fabricant d'un composant logiciel défectueux qui cause un dommage lorsque:
a) le fabricant du composant logiciel défectueux était, au moment de la mise sur le marché de ce composant logiciel, une microentreprise ou une petite entreprise, c'est-à-dire une entreprise qui, lorsqu'elle est évaluée avec l'ensemble de ses entreprises partenaires au sens de l'article 3, paragraphe 2, de l'annexe de la recommandation 2003/361/CE de la Commission (21) et des entreprises liées au sens de l'article 3, paragraphe 3, de ladite annexe, le cas échéant, est une microentreprise au sens de l'article 2, paragraphe 3, de ladite annexe ou une petite entreprise au sens de l'article 2, paragraphe 2, de ladite annexe; et
b) le fabricant qui a intégré le composant logiciel défectueux dans le produit a contractuellement convenu avec le fabricant du composant logiciel défectueux de renoncer à ce droit.
Article 13
Réduction de la responsabilité
1. Sans préjudice du droit national relatif à la responsabilité solidaire et à l'action récursoire, les états membres veillent à ce que la responsabilité d'un opérateur économique ne soit pas réduite ou supprimée lorsque le dommage est causé à la fois par la défectuosité d'un produit et par un acte ou une omission d'un tiers.
2. La responsabilité d'un opérateur économique peut être réduite ou supprimée lorsque le dommage est causé conjointement par la défectuosité du produit et par la faute de la personne lésée ou de toute personne dont la personne lésée est responsable.
Article 14
Action récursoire
Lorsque plus d'un opérateur économique est responsable du même dommage, un opérateur économique qui a accordé une réparation à la personne lésée a le droit d'intenter une action en justice contre tout autre opérateur économique responsable en vertu de l'article 8 conformément au droit national.
Article 15
Exclusion ou limitation de la responsabilité
Les états membres veillent à ce que la responsabilité d'un opérateur économique en vertu de la présente directive ne soit pas limitée ou exclue à l'égard de la personne lésée par une disposition contractuelle ou par le droit national.
Article 16
Délai de prescription
1. Les états membres veillent à ce qu'un délai de prescription de trois ans s'applique à l'introduction d'une demande en réparation d'un dommage relevant du champ d'application de la présente directive. Le délai de prescription court à compter de la date à laquelle la personne lésée a eu connaissance ou aurait dû avoir raisonnablement connaissance de l'ensemble des éléments suivants:
a) le dommage;
b) la défectuosité;
c) l'identité de l'opérateur économique concerné qui peut être tenu pour responsable de ce dommage au titre de l'article 8.
2. Le droit national réglementant la suspension ou l'interruption de la prescription visée au paragraphe 1 n'est pas affecté par la présente directive.
Article 17
Délai de forclusion
1. Les états membres veillent à ce qu'une personne lésée n'ait plus droit à réparation en vertu de la présente directive à l'expiration d'un délai de 10 ans, à moins que cette personne lésée n'ait, entre-temps, engagé une procédure contre un opérateur économique qui peut être tenu pour responsable en vertu de l'article 8. Ce délai court:
a) à compter de la date à laquelle le produit défectueux qui a causé le dommage a été mis sur le marché ou mis en service; ou
b) dans le cas d'un produit substantiellement modifié, à compter de la date à laquelle ce produit a été mis à disposition sur le marché ou mis en service à la suite de sa modification substantielle.
2. Par dérogation au paragraphe 1, lorsqu'une personne lésée n'a pas été en mesure d'engager une procédure dans un délai de dix ans à compter des dates visées au paragraphe 1, en raison de la période de latence de lésions corporelles, la personne lésée n'a plus droit à réparation en vertu de la présente directive à l'expiration d'un délai de vingt-cinq ans, à moins que cette personne lésée n'ait, entre-temps, engagé une procédure contre un opérateur économique qui peut être tenu responsable en vertu de l'article 8.
CHAPITRE IV
DISPOSITIONS FINALES
Article 18
Dérogation à l'exonération pour risque de développement
1. Par dérogation à l'article 11, paragraphe 1, point e), les états membres peuvent conserver les mesures existantes dans leurs systèmes juridiques en vertu desquelles les opérateurs économiques sont responsables même s'ils prouvent que l'état objectif des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise sur le marché ou de la mise en service du produit ou au cours de la période pendant laquelle le produit était sous le contrôle du fabricant n'a pas permis de déceler la défectuosité.
Tout état membre souhaitant maintenir des mesures conformément au présent paragraphe notifie le texte de ces mesures à la Commission au plus tard le 9 décembre 2026. La Commission en informe les autres états membres.
2. Par dérogation à l'article 11, paragraphe 1, point e), les états membres peuvent introduire ou modifier des mesures dans leurs systèmes juridiques en vertu desquelles les opérateurs économiques sont responsables même s'ils prouvent que l'état objectif des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise sur le marché ou de la mise en service du produit ou au cours de la période pendant laquelle le produit était sous le contrôle du fabricant n'a pas permis de déceler la défectuosité.
3. Les mesures visées au paragraphe 2 sont:
a) limitées à des catégories spécifiques de produits;
b) justifiées par des objectifs d'intérêt public; et
c) proportionnées pour être propres à garantir la réalisation des objectifs poursuivis et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre.
4. Tout état membre souhaitant introduire ou modifier une mesure visée au paragraphe 2 notifie le texte de la mesure proposée à la Commission et justifie en quoi cette mesure est conforme au paragraphe 3. La Commission en informe les autres états membres.
5. La Commission peut, dans un délai de six mois à compter de la réception de la notification au titre du paragraphe 4, émettre un avis sur le texte de la mesure proposée et la justification de cette mesure, en tenant compte des éventuelles observations émanant d'autres états membres. L'état membre qui souhaite introduire ou modifier cette mesure la laisse en suspens pendant six mois à compter de sa notification à la Commission, à moins que celle-ci ne rende son avis plus tôt.
Article 19
Transparence
1. Les états membres publient, dans un format électronique facilement accessible, toute décision irrévocable rendue par leurs juridictions nationales d'appel ou par les instances suprêmes nationales dans les procédures engagées en vertu de la présente directive. La publication d'une telle décision est effectuée en conformité avec le droit national.
2. La Commission crée et tient à jour une base de données facilement accessible et publiquement disponible contenant les décisions visées au paragraphe 1.
Article 20
évaluation
Au plus tard le 9 décembre 2030, puis tous les cinq ans, la Commission évalue l'application de la présente directive et présente un rapport au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen. Ces rapports contiennent des informations portant sur le coût et les avantages de la transposition de la présente directive, une comparaison avec les pays de l'OCDE ainsi que la disponibilité d'une assurance de responsabilité du fait des produits.
Article 21
Abrogation et disposition transitoire
La directive 85/374/CEE est abrogée avec effet au 9 décembre 2026. Toutefois, elle continue de s'appliquer aux produits mis sur le marché ou mis en service avant cette date.
Les références à la directive abrogée s'entendent comme faites à la présente directive et sont à lire selon le tableau de correspondance figurant à l'annexe.
Article 22
Transposition
1. Les états membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 9 décembre 2026. Ils en informent immédiatement la Commission.
Lorsque les états membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les états membres.
2. Les états membres communiquent à la Commission le texte des mesures essentielles de droit interne qu'ils adoptent dans le domaine couvert par la présente directive.
Article 23
Entrée en vigueur
La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.
Article 24
Destinataires
Les états membres sont destinataires de la présente directive.
Fait à Strasbourg, le 23 octobre 2024.
Par le Parlement européen :
La présidente, R. METSOLA
Par le Conseil :
Le président, ZSIGMOND B. P.
(1) JO C 140 du 21.4.2023, p. 34.
(2) Position du Parlement européen du 12 mars 2024 (non encore parue au Journal officiel) et décision du Conseil du 10 octobre 2024.
(3) Directive 85/374/CEE du Conseil du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des états membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux (JO L 210 du 7.8.1985, p. 29).
(4) Décision no 768/2008/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008 relative à un cadre commun pour la commercialisation des produits et abrogeant la décision 93/465/CEE du Conseil (JO L 218 du 13.8.2008, p. 82).
(5) Règlement (UE) 2024/1689 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 établissant des règles harmonisées concernant l'intelligence artificielle et modifiant les règlements (CE) no 300/2008, (UE) no 167/2013, (UE) no 168/2013, (UE) 2018/858, (UE) 2018/1139 et (UE) 2019/2144 et les directives 2014/90/UE, (UE) 2016/797 et (UE) 2020/1828 (règlement sur l'intelligence artificielle) (JO L, 2024/1689, 12.7.2024, ELI: http://data.europa.eu/eli/reg/2024/1689/oj).
(6) Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) (JO L 119 du 4.5.2016, p. 1).
(7) Règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l'Union et à la libre circulation de ces données, et abrogeant le règlement (CE) no 45/2001 et la décision no 1247/2002/CE (JO L 295 du 21.11.2018, p. 39).
(8) Directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO L 201 du 31.7.2002, p. 37).
(9) Directive (UE) 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d'enquêtes et de poursuites en la matière ou d'exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil (JO L 119 du 4.5.2016, p. 89).
(10) Règlement (UE) 2017/2394 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2017 sur la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l'application de la législation en matière de protection des consommateurs et abrogeant le règlement (CE) no 2006/2004 (JO L 345 du 27.12.2017, p. 1).
(11) Directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs et abrogeant la directive 2009/22/CE (JO L 409 du 4.12.2020, p. 1).
(12) Règlement (UE) 2019/1020 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 sur la surveillance du marché et la conformité des produits, et modifiant la directive 2004/42/CE et les règlements (CE) no 765/2008 et (UE) no 305/2011 (JO L 169 du 25.6.2019, p. 1).
(13) Règlement (UE) 2023/988 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits, modifiant le règlement (UE) no 1025/2012 du Parlement européen et du Conseil et la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil, et abrogeant la directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 87/357/CEE du Conseil (JO L 135 du 23.5.2023, p. 1).
(14) Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE (règlement sur les services numériques) (JO L 277 du 27.10.2022, p. 1).
(15) Directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d'affaires) contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites (JO L 157 du 15.6.2016, p. 1).
(16) Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux, modifiant la directive 2001/83/CE, le règlement (CE) no 178/2002 et le règlement (CE) no 1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil 90/385/CEE et 93/42/CEE (JO L 117 du 5.5.2017, p. 1).
(17) JO L 123 du 12.5.2016, p. 1.
(18) Règlement (UE) 2022/868 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 portant sur la gouvernance européenne des données et modifiant le règlement (UE) 2018/1724 (règlement sur la gouvernance des données) (JO L 152 du 3.6.2022, p. 1).
(19) Directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service (JO L 15 du 21.1.1998, p. 14).
(20) Règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis (JO L 112 du 2.5.2018, p. 19).
(21) Recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003 concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises (JO L 124 du 20.5.2003, p. 36).