ARRÊT DU CONSEIL D'ETAT
Conseil d'Etat
Ordonnance du Juge des Référés du 10 février 2003
N° 253937
253939
LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°), sous le n° 253937, la requête, enregistrée le 6 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, représentée par son directeur, et tendant, d'une part, à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat suspende l'exécution de l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 4 février 2003 relatif à la chasse des grives en février 2003, et d'autre part, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
la requérante soutient qu'il y a urgence ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué ne peut légalement trouver son fondement dans l'article 9 de la directive n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 fait naître un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté dont la suspension est demandée ;
Vu l'arrêté du 4 février 2003 relatif à la chasse des grives en février 2003 ;
Vu 2°), sous le n° 253939, la requête, enregistrée le 6 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS, représentée par son directeur, et tendant, d'une part, à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat suspende l'exécution de l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 4 février 2003 relatif à la chasse de l'oie cendrée en février 2003, et d'autre part, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
la requérante invoque les mêmes moyens que sous le n° 253937 ;
Vu l'arrêté du 4 février 2003 relatif à la chasse de l'oie cendrée en février 2003 ;
Vu, enregistrés le 7 février 2003, les mémoires en défense, présentés par le ministre de l'écologie et du développement durable, et tendant au rejet des requêtes ; le ministre soutient que la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie ; que les arrêtés attaqués sont légalement fondés sur le 3ème alinéa de l'article L. 424-2 du code de l'environnement et l'article 9 § 1 c de la directive n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 ;
Vu, enregistrés le 7 février 2003, les mémoires en intervention, présentés pour la Fédération nationale des chasseurs, qui conclut au rejet des requêtes et soutient, d'une part, que la condition d'urgence n'est pas remplie et, d'autre part, qu'il n'y a pas de doute sérieux quant à la légalité des arrêtés contestés au regard de l'article 9 § 1 c de la directive du 2 avril 1979 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ;
Vu le code de l'environnement, et notamment l'article L. 424-2 ;
Vu le code rural, et notamment l'article R. 224-6 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON?CHASSEURS, d'autre part, le ministre de l'écologie et du développement durable ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 8 février 2003 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- les représentants de la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS,
- les représentants du ministre de l'écologie et du développement durable ;
- Me Farge, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la Fédération nationale des chasseurs, intervenant en défense ;
Considérant que les requêtes n°s 253937 et 253939 présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur l'intervention en défense de la Fédération nationale des chasseurs :
Considérant que la Fédération nationale des chasseurs a intérêt au maintien des arrêtés dont la suspension est demandée ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;
Sur les conclusions à fins de suspension :
Considérant que le premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative dispose : "Quand une décision administrative, (...), fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision." ;
Considérant, d'une part, qu'eu égard à l'objet des arrêtés dont la suspension est demandée et aux dates qu'il fixe, la condition de l'article L. 521-1 du code de justice administrative relative à l'urgence est remplie ;
Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 424-2 du code de l'environnement et de l'article R. 224-6 du code rural, sur le fondement desquelles les arrêtés dont la suspension est demandée sont intervenus, ont entendu faire application de l'article 9 § 1 de la directive susvisée du 2 avril 1979 ; que toutefois le moyen tiré de ce que cet article 9 § 1 ne permet pas de déroger aux dates d'ouverture et de fermeture de la chasse fixées compte tenu des objectifs mentionnés à l'article 7 § 4 de la même directive est, en l'état, propre à créer un doute sérieux sur la légalité des arrêtés du 4 février 2003 ;
Considérant, dès lors, qu'il y a lieu d'ordonner la suspension de l'exécution des arrêtés du 4 février 2003 relatifs à la chasse des grives et de l'oie cendrée en février 2003 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit, dans la limite d'un montant total de 1 000 euros, aux conclusions de la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS tendant à ce que l'Etat lui verse, en application des dispositions précitées, une somme correspondant aux frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
ORDONNE :
Article 1er : Les interventions présentées pour la Fédération nationale des chasseurs sont admises.
Article 2 : L'exécution des arrêtés du ministre de l'écologie et du développement durable du 4 février 2003 relatifs, respectivement, à la chasse des grives et de l'oie cendrée est suspendue.
Article 3 : L'Etat paiera à la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à la LIGUE POUR LA PRESERVATION DE LA FAUNE SAUVAGE ET LA DEFENSE DES NON-CHASSEURS et au ministre de l'écologie et du développement durable.