Jurisprudence : TA Montreuil, du 04-10-2024, n° 2210285


Références

Tribunal Administratif de Montreuil

N° 2210285

3ème chambre
lecture du 04 octobre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 juin 2022 et 27 janvier 2023, Mme A B, demande au tribunal :

1°) d'annuler la décision du 29 avril 2022, notifiée le 2 mai suivant, par laquelle le directeur interrégional des douanes et droits indirects de Paris-Aéroports l'a informée que son recours formé devant la commission administrative paritaire nationale le 16 novembre 2021 contre la décision de refus de jours de télétravail " flottants " avait été rejeté, lors de la séance du 6 avril 2022 ;

2°) de faire droit à sa demande de télétravail de huit jours flottants par mois ;

3°) de mettre à la charge de la direction interrégionale des douanes et droits indirects de Paris-Aéroports les entiers dépens, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'instruction cadre sur la mise en œuvre du télétravail en douane du 13 juillet 2021 ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que sa demande de télétravail ne nuit pas au fonctionnement du service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est formée contre l'avis de la commission administrative paritaire qui ne présente pas le caractère d'une décision faisant grief et n'est dès lors pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

- les moyens soulevés par la requérante sont infondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 8 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012🏛 ;

- le décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caro,

- et les conclusions de M. Silvy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B exerce ses fonctions, en qualité de contrôleuse principale des douanes, au sein du service " pôle gestion des procédures " à la direction interrégionale des douanes et droits indirects de Paris-Aéroports. Le 14 septembre 2021, Mme B a déposé, via l'application informatique " Sirhius ", une demande d'autorisation de télétravail de huit jours flottants mensuels, soit deux jours flottants par semaine. Mme B a été informée le 5 octobre 2021 que sa demande n'avait pas été validée par sa cheffe de bureau. L'intéressée a formé un recours gracieux contre cette décision, qui a été rejeté le 21 octobre 2021, puis un recours hiérarchique, également rejeté le même jour. Le 16 novembre 2021, Mme B a saisi la commission administrative paritaire compétente qui s'est réunie le 6 avril 2022 et a émis un avis défavorable à sa demande. Par un courrier du 29 avril 2022 l'administration lui a notifié l'avis défavorable de la commission administrative paritaire. Par la présente requête, Mme B doit être regardée comme contestant la décision par laquelle l'administration lui a opposé un refus à sa demande de télétravail de huit jours flottants mensuels.

2. Aux termes de l'article 133 de la loi du 12 mars 2012🏛 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique alors applicable : " Les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail tel qu'il est défini au premier alinéa de l'article L. 1222-9 du code du travail🏛. L'exercice des fonctions en télétravail est accordé à la demande du fonctionnaire et après accord du chef de service. Il peut y être mis fin à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance. Les fonctionnaires télétravailleurs bénéficient des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public. Le présent article est applicable aux agents publics non fonctionnaires et aux magistrats. () " Aux termes de l'article 2 du décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 dans sa rédaction applicable au litige : " Le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle les fonctions qui auraient pu être exercées par un agent dans les locaux de son employeur sont réalisées hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication. Le télétravail est organisé au domicile de l'agent ou, éventuellement, dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public et de son lieu d'affectation () ". Aux termes de l'article 3 de ce décret, dans sa rédaction applicable au litige : " La quotité des fonctions pouvant être exercées sous la forme du télétravail ne peut être supérieure à trois jours par semaine. Le temps de présence sur le lieu d'affectation ne peut être inférieur à deux jours par semaine () ". Aux termes de l'article 5 de ce décret, dans sa rédaction applicable au litige : " L'exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l'agent. Celle-ci précise les modalités d'organisation souhaitées, notamment les jours de la semaine travaillés sous cette forme ainsi que le ou les lieux d'exercice. Le chef de service, l'autorité territoriale ou l'autorité investie du pouvoir de nomination apprécie la compatibilité de la demande avec la nature des activités exercées, l'intérêt du service et, lorsque le télétravail est organisé au domicile de l'agent, la conformité des installations aux spécifications techniques précisées par l'employeur. () La durée de l'autorisation est d'un an maximum. L'autorisation peut être renouvelée par décision expresse, après entretien avec le supérieur hiérarchique direct et sur avis de ce dernier (). () il peut être mis fin à cette forme d'organisation du travail, à tout moment et par écrit, à l'initiative de l'administration ou de l'agent, moyennant un délai de prévenance de deux mois. Dans le cas où il est mis fin à l'autorisation de télétravail à l'initiative de l'administration, le délai de prévenance peut être réduit en cas de nécessité du service dûment motivée () Le refus opposé à une demande initiale ou de renouvellement de télétravail formulée par un agent exerçant des activités éligibles fixées par l'un des actes mentionnés à l'article 7 ainsi que l'interruption du télétravail à l'initiative de l'administration doivent être précédés d'un entretien et motivés ".

3. Les dispositions précitées instituent, pour les agents publics, la possibilité d'exercer leurs fonctions pour partie en télétravail, sous réserve de la compatibilité de cet exercice avec la nature des activités exercées et l'intérêt du service. Le choix par l'administration de ne pas accorder à un agent le maximum des jours de télétravail offert par les dispositions susvisées sous la forme de jours mensualisés, donc flottants, de télétravail, constitue une mesure d'organisation du service qui ne porte pas atteinte aux droits que tient cet agent de son statut ou aux prérogatives attachées à ses fonctions.

4. Mme B conteste la décision du 29 avril 2022 en tant qu'elle lui refuse l'autorisation de télétravailler deux jours par semaine non fixés à l'avance. Cette décision ne constitue pas un refus de télétravail ni une acceptation telle qu'elle équivaudrait à un refus, alors qu'elle n'implique aucune perte de rémunération ou de compétence. Une telle décision, qui constitue ainsi qu'il a été dit au point précédent, une mesure d'organisation du service est, en l'espèce, au regard de sa faible incidence sur la situation de Mme B, constitutive d'une mesure d'ordre intérieur, insusceptible de recours.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme B n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision du 29 avril 2022 par laquelle le directeur interrégional des douanes et droits indirects de Paris-Aéroports a refusé de faire droit à sa demande de jours de télétravail " flottants ".

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Le présent jugement, qui rejette les conclusions de la requête à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions présentées en ce sens par Mme B ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse à Mme B la somme que celle-ci réclame au titre des frais qu'elle aurait exposés.

8. La présente instance n'a entraîné aucun dépens au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative🏛. Par suite, les conclusions de Mme B relatives à la condamnation aux dépens doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme A B et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Jimenez, présidente,

Mme Van Maele, première conseillère,

Mme Caro, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2024.

La rapporteure,

N. Caro

La présidente,

J. Jimenez

La greffière,

P. Demol

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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