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ARRÊT N°4 6 ri-
COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 03 AVRIL 2001
Prononcé à l'audience publique du trois Avril deux mille un par Monsieur ..., Conseiller,
00/01059
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE
S.A. ANCONETTI STAR
C/
S.A. ANCONETTI STAR
TOULOUSE
François Y
Rep/assistant Me Y. ... (avocat au barreau de TOULOUSE)
APPELANTE d'une ordonnance de référé rendue par le Conseil de prud'hommes d'AGEN le 21 Juin 2000
d'une part,
ET
Monsieur François Y
né le ..... à ARRAS (62000)
"Pérou
CASSIGNAS Rep/assistant Me H. ... (avocat au barreau d'AGEN)
INTIMÉ
d'autre part, A rendu l'arrêt contradictoire suivant.
La cause a été débattue et plaidée en audience publique le 27 Février 2001 devant Monsieur ..., Président de Chambre, Monsieur ..., Conseiller, Monsieur ..., Conseiller, assistés de N. ..., Greffier et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Monsieur François Y a été embauché le 1er septembre 1994 en qualité de technico-commercial par la société ANCONETTI STAR qui exerce son activité dans les domaines du chauffage, sanitaire, climatisation, carrelage.
Le 1er septembre 1996 un avenant au contrat de travail a été signé stipulant qu'en raison de la nature des fonctions du salarié qui le mettaient en contact avec la clientèle, celui ci serait lié par une obligation de non concurrence lui interdisant en cas de rupture du contrat, pendant une période d'une année renouvelable une fois et sur le territoire des régions administratives de Midi-Pyrénées et Aquitaine, d'entrer au service d'une entreprise fabriquant ou vendant des articles pouvant concurrencer ceux de la société et de s'intéresser directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit à une telle entreprise.
Cet avenant prévoyait qu'il serait versé au salarié en contrepartie de l'exécution de cette clause une indemnité compensatrice égale à 25% de la moyenne mensuelle du salaire des douze derniers mois.
Monsieur Y a démissionné de ses fonctions au sein de la société ANCONETTI STAR par courrier du 10 avril 2000 et, après avoir vainement sollicité de cette dernière qu'elle lève l'interdiction de non concurrence a saisi par acte du 19 juin 2000 la formation de référé du conseil de prud'hommes d'Agen pour obtenir la réduction de la portée de la clause dans l'espace et au regard de la nature des activités.
Par ordonnance de référé en date du 21 juin 2000 dont la société ANCONETTI STAR a relevé appel dans des conditions qui ne donnent pas lieu à discussion, le conseil de prud'hommes, accueillant la demande du salarié, a "dit que qu'il y avait lieu de modifier la clause de non concurrence ainsi qu'il suit
-réduction dans l'espace suppression des départements du Lot et Garonne (47), du Tarn et Garonne (82) et du Gers (32) ;
-réduction quant à la nature des activités exercées suppression de l'interdiction d'entrer au service d'une société exploitant un fonds de commerce de vente d'appareils de chauffage, de réfrigération et de climatisation.
Une ordonnance du Premier président de cette cour en date du 5 octobre 2000 a débouté la société appelante de sa demande de levée de l'exécution provisoire de ladite décision.
La société ANCONETTI STAR reproche au conseil des prud'hommes, statuant en référé, d'avoir outrepassé ses pouvoirs en violant le principe de l'intangibilité des conventions et en dénaturant une clause claire et précise ;
Elle observe que la portée de la clause est limitée dans le temps et dans l'espace et que les activités interdites, interdiction en contrepartie de laquelle il est prévu de verser au salarié une indemnité compensatrice, sont elles même réduites à celles qu'elle exerce et qu'exerçait pour son compte Monsieur Y lorsqu'il était son salarié.
La société appelante qui soutient que l'exécution de la clause était indispensable pour la sauvegarde de ses intérêts dans la mesure où l'intimé avait exercé un emploi commercial le mettant en contact avec la clientèle au sein d'une entreprise ancienne et réputée, dans un secteur fortement concurrentiel, estime que la juridiction des référés n'avait pas compétence, en présence d'une contestation sérieuse sur la proportionnalité d'une interdiction qui ne faisait pas obstacle à ce que le salarié exerce sa profession et en l'absence de tout dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite, pour modifier la portée d'une clause librement négociée.
Elle demande à la cour de débouter Monsieur Y de ses demandes et de le condamner à lui payer une indemnité de 6.000 F en application des dispositions de l'article 700 du NCPC.
Monsieur Y sollicite la confirmation de l'ordonnance ; il soutient que l'interdiction, tant par son étendue géographique que par la définition des activités concernées qui correspondent à l'unique secteur dans lequel il possède une expérience professionnelle et une qualification, le place dans l'impossibilité d'exercer une activité et de subvenir aux besoins de sa famille domiciliée dans la région litigieuse.
L'intimé objecte à l'argumentation de son ancien employeur que le juge a le pouvoir de réviser une clause de non concurrence lorsque les conséquences en sont excessives au regard de l'atteinte portée à la liberté du travail.
Plus précisément le juge des référés est selon lui compétent en application des dispositions de l'article R 516-31 du code du travail dés lors que
- il ne lui était pas demandé d'interpréter la décision litigieuse ;
-il convenait de prévenir un dommage imminent constitué par le fait que, compte tenu de l'insuffisance de l'indemnité compensatrice, la situation familiale du salarié ne lui permettait pas de subir la contrainte d'une telle clause.
- l'existence d'une contestation sérieuse ne fait pas obstacle à ce qu'il soit ordonné en référé une mesure conservatoire.
L'appelant demande à la cour de condamner la société ANCONETTI à lui payer une indemnité de 7.000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
SUR QUOI LA COUR
La clause de non concurrence insérée dans le contrat de travail de Monsieur Y par un avenant du 18 avril 1996 est effectivement limitée dans sa durée, d'une année renouvelable une fois, et dans l'espace puisqu'elle ne concerne que la région du Sud Ouest dans laquelle le salarié a exercé des fonctions de technico commercial le mettant en contact avec la clientèle de son employeur.
Il n'est pas manifeste que les stipulations litigieuses aient placé le salarié dans l'impossibilité d'exercer sa profession de technico commercial et constitué un obstacle à la liberté du travail dans la mesure où ce dernier qui avait démissioriné en connaissance de l'obligation qui lui avait été faite pouvait exercer une activité dans le domaine du chauffage-sanitaire hors de la zone d'application de la clause, c'est à dire hors des régions administratives Aquitaine et Midi Pyrénées, ou bien exercer dans cette zone des fonctions de technico commercial dans un domaine autre que le domaine d'activité de son ancien employeur auquel était également limitée la portée de la clause.
La société intimée qui possède une renommée commerciale non discutée et qui exerce une activité soumise à une forte concurrence avait un intérêt légitime, ainsi que le relève implicitement l'avenant litigieux lorsqu'il évoque la nature de l'activité du salarié qui mettait celui-ci en contact avec sa clientèle, à prévenir le risque que les clients avec lesquels l'appelant avait été en rapport au cours de son activité ne la quittent au profit d'un concurrent.
Enfin les conséquences de la clause étaient modérées par le paiement d'une indemnité compensatrice qui, si elle ne permettait pas à Monsieur Y de . rester sans activité professionnelle pendant la durée de l'interdiction de concurrence représentait, au regard des limitations sus-évoquées, une compensation équitable de la contrainte acceptée par le salarié.
Seul le juge du fond a le pouvoir d'invalider une clause de non concurrence et en l'absence de justification d'un trouble manifestement illicite ou d'un dommage imminent la formation des référés du conseil des prud'hommes, saisie sur le fondement des dispositions de l'article R 516-31 du code du travail, n'avait pas compétence pour modifier les modalités selon lesquelles la portée de ladite clause avait été contractuellement déterminée.
Il convient d'infirmer l'ordonnance déférée et de débouter Monsieur Y de ses demandes.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société appelante les frais occasionnés par la procédure et non compris dans les dépens; la demande formée par cette dernière sur le fondement de l'article 700 du NCPC sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme l'ordonnance déférée et statuant à nouveau,
Déboute Monsieur François Y de ses demandes formées en référé,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du NCPC,
Condamne Monsieur Y aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER,
· . GALLOIS