Jurisprudence : CAA Marseille, 21-03-2002, n° 98MA01738





MTR


N° 98MA01738


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Commune de NÎMES


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M. ROUSTAN


Président


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M. HERMITTE


Rapporteur


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M. BENOIT


Commissaire du gouvernement


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Arrêt du 21 mars 2002


REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE Marseille


(1ère chambre)


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 25 septembre 1998 sous le n° 98MA01738, présentée pour la commune de NÎMES, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 1er juillet 1995 modifiée le 3 octobre 1995, par Me MAILLOT, avocat ;


La commune de NÎMES demande à la Cour :


- d'annuler le jugement n° 93-347 en date du 2 juin 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé les permis de construire délivrés par le maire de la commune de NÎMES à M. GARCIA les 21 décembre 1990 et 24 septembre 1992 ;


- de condamner M. GALLAIS et M. SALIVET au paiement d'une somme de 10.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;


- de les condamner également aux entiers dépens, frais de timbre et droit de plaidoirie ;


Classement : 68-03-03


C+


La commune fait valoir à l'appui de ses conclusions que le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit ; qu'en ce qui concerne le permis de construire délivré le 21 décembre 1990, la qualification d'habitation principale du bâtiment objet des travaux d'extension autorisés ne devait être appréciée ni à la date de publication du plan d'occupation des sols ni au regard du seul pétitionnaire ; qu'une telle interprétation de l'article I NU2 du règlement du plan d'occupation des sols, outre qu'elle est erronée, rend la légalité de cette disposition discutable en y introduisant une discrimination injustifiée ; qu'en l'espèce, la construction existait bien à la date de publication du plan d'occupation des sols et est à usage d'habitation, seuls éléments à prendre en considération ; qu'en ce qui concerne l'autorisation délivrée le 24 septembre 1992, le jugement attaqué n'est pas motivé en l'absence de précision quant au fondement juridique de l'annulation prononcée ; que ce permis de construire, accordé pour la reconstruction à l'identique de la partie du bâtiment qui s'était effondrée lors de l'exécution des travaux autorisés par le permis de construire du 21 décembre 1990, respecte les dispositions de l'article 5 des dispositions générales du règlement du plan d'occupation des sols ;


Vu le jugement attaqué ;


Vu, enregistré le 4 février 1999, le mémoire en réponse présenté pour M. Jacques GALLAIS et M. Patrick SALIVET, par la SCP d'avocats COULOMBIE-GRAS, qui demandent à la Cour :


1°/ à titre principal, de rejeter la requête pour irrecevabilité ;


2°/ à titre subsidiaire, de confirmer le jugement attaqué ;


3°/ à titre infiniment subsidiaire d'annuler les permis de construire en litige ;


4°/ en toute hypothèse et à titre infiniment subsidiaire, de condamner la ville de NÎMES à verser 10.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;


Ils font valoir que la requête est irrecevable pour méconnaissance de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme ; qu'en ce qui concerne le permis de construire du 21 décembre 1990, le motif d'annulation retenu par les premiers juges est fondé ; que la construction objet du permis de construire était délabrée et n'était pas à usage d'habitation ; que le terrain d'assiette, eu égard à sa superficie, n'est pas constructible ; que l'article I NU2-1 fait obstacle au projet ; qu'en ce qui concerne le permis de construire du 24 septembre 1992, celui-ci n'autorisait pas une simple reconstruction à l'identique mais une extension de l'existant, en méconnaissance de l'article I NU1 du plan d'occupation des sols ; qu'à la date d'approbation de ce document d'urbanisme, la construction n'était pas à usage d'habitation principale ; que cette dernière n'étant pas conforme aux règles d'urbanisme, seule une reconstruction à l'identique était possible sur le fondement de l'article 5 des dispositions générales du règlement du plan d'occupation des sols ; que M. GARCIA s'est livré à des manoeuvres dans le seul but d'induire l'administration en erreur ; que d'autres moyens d'annulation existent ; qu'en ce qui concerne le premier permis, celui-ci méconnaît les dispositions de l'article R.421-1-1 du code de l'urbanisme, le pétitionnaire ne justifiant d'aucun titre l'habilitant à construire ; que le projet empiète d'ailleurs sur la propriété de M. SALIVET ; que le dossier de demande, qui comporte de nombreuses erreurs volontaires visant à tromper l'autorité compétente, est entaché de fraude ; qu'en ce qui concerne le second permis de construire, celui-ci est également entaché de fraude ; que l'article R.421-1-1 du code de l'urbanisme a également été méconnu ; que le dossier, qui ne contient pas de plan de masse, méconnaît l'article R.421-2 du même code ; que le terrain d'assiette a une superficie inférieure à celle exigée à l'article I NU5 du plan d'occupation des sols ; que la reconstruction ne pouvait intervenir qu'à l'identique s'agissant d'un bâtiment non conforme au regard des règles d'implantation par rapport aux limites séparatives, ce qui n'a pas été le cas, les matériaux utilisés pour la reconstruction étant différents ; que le bâtiment ne respectant pas le permis de construire délivré le 21 décembre 1990, le second permis, pour être légal, devait régulariser l'ensemble de la construction, ce qu'il n'a pas fait ;


Vu, enregistré le 19 avril 1999, le mémoire en réplique présenté pour la commune de NÎMES, qui demande à la Cour de lui allouer le bénéfice de ses précédentes écritures, en faisant valoir les mêmes moyens ;


La commune fait valoir, en outre, que les dispositions de l'article L.600-3 ne s'appliquent pas en l'espèce ; qu'en ce qui concerne le premier permis, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article I NU5 du plan d'occupation des sols est inopérant eu égard à ce qu'autorise l'article I NU2 ; que les dispositions de l'article R.421-1-1 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues ; que l'implantation partielle de la construction sur le terrain de M. SALIVET n'est pas établie ; qu'aucune fraude ne ressort en l'espèce, l'administration n'ayant pas été induite en erreur ; que le second permis de construire a régularisé l'ensemble des travaux irrégulièrement effectués ; que le changement de matériaux invoqué par les défendeurs n'est pas établi ; qu'aucune fraude n'entache ce second permis ;


Vu, enregistré le 24 juillet 2000, le mémoire en réponse présenté pour M. GALLAIS et M. SALIVET, qui demandent à la Cour de leur adjuger le bénéfice de leurs écritures, en faisant valoir les mêmes moyens ;


Ils font également valoir que la date de publication du plan d'occupation des sols à prendre en considération est celle du dernier document d'urbanisme ; que l'empiètement de la construction sur la propriété de M. SALIVET est avéré ; que l'effondrement de l'existant en cours de travaux n'est pas établi ;


Vu les autres pièces du dossier ;


Vu le code de l'urbanisme ;


Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;


Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2002 :


- le rapport de M. HERMITTE, premier conseiller ;


- les observations de M. SALIVET et de M. GALLAIS ;


- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;


Sur l'arrêté du 21 décembre 1990 :


Considérant qu'aux termes de l'article I NU2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de NÎMES : "Peuvent être autorisés, nonobstant les dispositions de l'article I NU1 : 1 - L'extension des constructions existantes à la date de la publication du P.O.S., si elles constituent des habitations principales, dans la limite de 30 m² (trente mètres carrés) de surface de plancher hors oeuvre brute ou nette, lorsque les articles I NU5 et I NU 14 ne permettront pas une surface de plancher supérieure à celle existante et sous réserve du respect des autres règles (...) ;


Considérant qu'il est constant que la construction dont l'extension a été autorisée par l'arrêté du 21 décembre 1990 en litige, existait à la date de publication du plan d'occupation des sols ; qu'en réservant la possibilité d'extension qu'il prévoit aux seules constructions existantes constituant des habitations principales, l'article I NU2 n'a pas introduit, entre les constructions existantes, une discrimination reposant sur un critère étranger au droit de l'urbanisme ou entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que cette condition d'affectation, dont la vérification doit être opérée en se plaçant non à la date de publication du document d'urbanisme, ce que n'exigent pas les dispositions précitées, mais à la date de la délivrance du permis de construire, ne peut être tenue pour satisfaite du seul fait de la production de témoignages, imprécis, qui font état d'une occupation plusieurs années auparavant, ni de celle d'avis d'imposition à la taxe d'habitation concernant le bâtiment existant ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction existante était à usage d'habitation principale à la date de la délivrance du permis de construire attaqué ; que par suite, les dispositions de l'article I NU2 n'étaient pas applicables ; qu'il en résulte que l'arrêté du 21 décembre 1990 est entaché d'illégalité et doit être annulé ;


Sur l'arrêté du 24 septembre 1992 :


En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :


Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont fondé leur annulation sur le même motif que celui retenu pour l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 1990, lequel est suffisamment précisé ; que par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement manque en fait ;


En ce qui concerne la légalité de l'arrêté attaqué :


Considérant qu'aux termes de l'article 5 des dispositions générales du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Nîmes : "(...) 4 - La reconstruction à l'identique, sans augmentation du volume des constructions existant à la date de publication du P.O.S. peut être autorisée dans les deux ans qui suivent un sinistre, même si les constructions ne respectent pas le corps des règles de la zone où elles sont implantées (...)" ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que les travaux de mise en oeuvre du projet autorisé par le permis de construire accordé à M. GARCIA le 21 décembre 1990, qui n'ont pas été adaptés à l'état du bâtiment existant, ont déstabilisé une partie de ce bâtiment dont l'état pouvait laisser craindre cette conséquence et que la démolition qui a suivi a été effectuée à la demande du constructeur ; qu'ainsi, ces circonstances ne peuvent être regardées, même si la décision de démolition s'imposait pour des motifs techniques ou de sécurité, comme constituant un sinistre au sens des dispositions précitées de l'article 5 du plan d'occupation des sols ; que par suite le projet de reconstruction n'entrait pas dans le champ d'application de ces dispositions ; qu'en conséquence, l'arrêté du 24 septembre 1992 doit également être annulé ;


Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de NÎMES n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande de M. GALLAIS et de M. SALIVET, les arrêté du maire en dates des 21 décembre 1990 et 24 septembre 1992 ;


Sur les frais non compris dans les dépens :


Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;


Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. GALLAIS et M. SALIVET n'étant pas les parties perdantes dans la présente instance, les dispositions de l'article L.761-1 précitées font obstacle à ce qu'une condamnation soit prononcée à leur encontre sur ce fondement ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande ayant le même objet présentée par les défendeurs, dès lors qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser entièrement à leur charge les frais qu'ils ont exposés dans la présente instance ;


D E C I D E :


Article 1er : La requête de la commune de NÎMES est rejetée.


Article 2 : La demande présentée par M. GALLAIS et M. SALIVET en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative est rejetée.


Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de NÎMES, à M. GALLAIS, à M. SALIVET, à M. GARCIA et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Délibéré à l'issue de l'audience du 5 mars 2002, où siégeaient :


- M. ROUSTAN, président de chambre ;


- M. HERMITTE, Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,


assistés de Mme GUMBAU, greffier.


Prononcé à Marseille en audience publique le 21 mars 2002.


Le président, Le rapporteur,


Signé


Signé


Marc ROUSTAN Gilles HERMITTE


Le greffier,


Signé


Lucie GUMBAU


La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports et du logement en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.


Pour expédition conforme,


Le greffier,


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