Jurisprudence : TA Nîmes, du 19-09-2024, n° 2200092


Références

Tribunal Administratif de Nîmes

N° 2200092

4ème Chambre
lecture du 19 septembre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 janvier et 8 septembre 2022, Mme A B, représentée par la SCP Uhry d'Oria Grenier, demande au tribunal :

1°) d'ordonner avant dire-droit une expertise médicale et de désigner un expert cardiologue afin de déterminer si l'accident du 12 octobre 2020 est imputable au service ;

2°) d'annuler la décision du 6 juillet 2021 par laquelle le directeur de l'hôpital Lozère a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 12 octobre 2020, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 9 septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au directeur de l'hôpital Lozère de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident, de lui accorder à titre rétroactif un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 12 octobre 2020, de lui verser le plein traitement qu'elle aurait dû percevoir dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'hôpital Lozère la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que :

- la désignation d'un expert cardiologue est utile dès lors que le rapport d'expertise médicale n'apporte pas de réponse tranchée quant à l'imputabilité au service de l'accident survenu le 12 octobre 2020 ;

- la décision du 6 juillet 2021 est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que l'accident survenu le 12 octobre 2020, qui n'est pas en lien avec un état antérieur, est imputable au stress important qu'elle a subi dans son environnement de travail.

Par des mémoires en défense enregistrés les 17 mai et 29 septembre 2022, l'hôpital Lozère, représenté par l'AARPI Trema Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens invoqués dans la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mazars,

- les conclusions de Mme Bala, rapporteure publique,

- les observations de Me Uhry d'Oria Grenier, représentant Mme B, et celles de Me Gely, représentant l'hôpital Lozère.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B est cadre de santé infirmer et formatrice des professionnels de santé affectée à l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de l'hôpital Lozère à Mende. Le 12 octobre 2020, elle a été victime d'un infarctus du myocarde. Par une décision du 6 juillet 2021, le directeur de l'hôpital Lozère a rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de cet accident présentée par Mme B. Par la présente requête, Mme B demande l'annulation de cette décision, ainsi que la décision rejetant implicitement le recours gracieux qu'elle a formé le 9 septembre 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.

A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / () 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; () ".

3. En l'espèce, la décision attaquée comporte la mention des textes législatifs et réglementaires dont le directeur de l'hôpital Lozère a fait application ainsi que les considérations de fait au soutien de cette mesure, la décision précisant que la demande de Mme B est refusée au regard de l'absence de lien de causalité entre son activité professionnelle et la pathologie qui relève d'éléments intrinsèques à l'intéressée et au regard de l'absence de caractère soudain sur le lieu de travail de l'accident déclaré. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation.

4. En second lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983🏛 : " I.-Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / II.-Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. () ".

5. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Toutefois, s'agissant des malaises, accidents cardiaques ou vasculaires cérébraux qui sont au nombre de ces circonstances particulières, il y a lieu, par exception, de rechercher s'il existe un lien direct entre cet accident et les conditions d'exécution du service. Il appartient au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce.

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment des déclarations d'accident de Mme B et des attestations de témoins, que l'intéressée a, le 12 octobre 2020, pris ses fonctions à 8 heures à l'IFSI de l'hôpital Lozère en accueillant un intervenant dans l'amphithéâtre en présence des étudiants puis en retournant à son bureau, avant d'être prise en charge à 10h10 au service des urgences du même hôpital puis au CHU de Montpellier où a été diagnostiqué un infarctus du myocarde. Il ressort également de ces mêmes pièces que Mme B avait commencé à ressentir une intense fatigue quelques jours avant la date de l'évènement, des difficultés à s'endormir la veille, des symptômes nauséeux au réveil et que les douleurs thoraciques se sont intensifiées au cours de la matinée avant qu'elle ne se présente aux urgences. Dans ces conditions, Mme B a été victime d'un malaise évolutif sans lien avec un évènement à caractère soudain et violent, de sorte que l'accident survenu le 12 octobre 2020 ne peut être qualifié d'accident de service.

7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise avant dire-droit, que Mme B n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions qu'elle conteste.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. L'exécution du présent jugement n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions de la requête aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'hôpital Lozère, qui n'est pas la partie perdante.

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B la somme de 1 500 euros réclamée par l'hôpital Lozère au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'hôpital Lozère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme A B et à l'hôpital Lozère.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Chamot, présidente,

Mme Sarac-Deleigne, première conseillère,

Mme Mazars, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2024.

La rapporteure,

M. MAZARS

La présidente,

C. CHAMOT

La greffière,

B. MAS-JAY

La République mande et ordonne au préfet de Lozère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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