Jurisprudence : Cass. soc., 13-11-2002, n° 00-44.027, F-D, Cassation partielle



SOC.
PRUD'HOMMESS.L
COUR DE CASSATION
Audience publique du 13 novembre 2002
Cassation partielle
M. FINANCE, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président
Pourvois n° F 00-44.027 V 00-44.224JONCTION
Arrêt n° 3235 F D
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

I - Sur le pourvoi n° F 00-44.027 formé par la Mutuelle du Mans assurances vie, dont le siège est Le Mans,
en cassation d'un arrêt rendu le 2 mai 2000 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section D), au profit

1°/ de M. Olivier Z, demeurant Paris,

2°/ de l'ASSEDIC de Maine-Touraine, dont le siège est Le Mans Cedex,
defendeurs à la cassation ;
II - Sur le pourvoi n° V 00-44.224 formé par M. Olivier Z, demeurant Paris,
en cassation du même arrêt en ce qu'il est rendu au profit la Mutuelle du Mans assurances vie, dont le siège est Le Mans,
defendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 2 octobre 2002, où étaient présents M. Finance, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, Mme Quenson, conseiller, M. Besson, Mme Maunand, conseillers référendaires, M. Fréchède, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Finance, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la Mutuelle du Mans assurances vie, de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de M. Z, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la connexité, joint les pourvois n° F 00-44.027 et n° V 00-44.224 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z a été engagé le 1er mai 1989, en qualité d'inspecteur, par la société Mutuelle du Mans assurances vie ; que sa rémunération se composait d'un fixe et d'une partie variable constituée de commissions calculées en pourcentage des cotisations des contrats conclus ; que le 1er septembre 1996, M. Z a été muté du secteur "Bretagne" à celui "Ile-de-France", avec une garantie de rémunération pendant deux ans ; que faisant valoir qu'à l'issue de la première année suivant sa mutation il n'avait pas perçu une rémunération équivalente à celle de l'année précédente, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaires ; qu'entretemps a été conclu entre l'employeur et les organisations syndicales un protocole d'accord modifiant le mode de rémunération des inspecteurs ; que soutenant que l'application de cet accord entraînait une réduction notable de sa rémunération, M. Z a formé une demande additionnelle en résiliation de son contrat de travail aux torts de l'employeur et en paiement d'indemnités de rupture ; que par voie reconventionnelle, la Mutuelle du Mans a sollicité la résiliation du contrat aux torts du salarié ;
Sur le pourvoi formé par la Mutuelle du Mans
Sur le premier moyen
Attendu que la société Mutuelle du Mans fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts et de l'avoir condamnée au paiement de diverses indemnités alors, selon le moyen
1°/ que l'obligation incombant à l'employeur d'indiquer dans le contrat de travail les conditions de rémunération n'a pas pour effet de contractualiser celles-ci, lorsqu'elles sont exclusivement issues d'un accord collectif, d'un usage ou d'un engagement de l'employeur de caractère collectif ; qu'en déduisant l'incorporation dans le contrat de travail de M. Z des dispositions relatives à la rémunération résultant d'accords collectifs ou d'engagements unilatéraux de l'employeur à caractère collectif, de l'obligation faite à ce dernier par la convention collective de branche de mentionner dans la lettre de nomination les conditions de la rémunération ou leurs éléments constitutifs, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, 21 de la Convention collective nationale du 5 juin 1967 et 48 de la convention collective du 27 juillet 1992 ;
2°/ qu'en estimant qu'une modification du contrat de travail pouvait résulter d'une réduction de rémunération consécutive à la modification, par accords collectifs de travail, du mode de rémunération antérieur résultant d'un accord collectif ou d'un engagement unilatéral de l'employeur de caractère collectif, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé par motifs propres et adoptés que le contrat de travail, s'il faisait référence à la Convention collective du travail des inspecteurs du cadre des sociétés d'assurances pour régler les rapports professionnels des parties, déterminait dans ses conditions générales et particulières les modalités de la rémunération du salarié, la cour d'appel a décidé à bon droit que celle-ci avait un caractère contractuel ;
Et attendu que le rejet de la première branche du moyen rend inopérante la seconde branche du moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen
Attendu que la Mutuelle du Mans fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait alors, selon le moyen, qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'une et l'autre des parties avaient demandé la résiliation du contrat de travail aux torts de l'autre, ce dont il résultait que l'une et l'autre se trouvaient d'accord sur le principe même de la rupture, seuls restant à déterminer les effets de celle-ci, qui résultaient de l'imputabilité de la résiliation à l'employeur ou au salarié ; qu'en considérant que la lettre du 13 juillet 1999 par laquelle la société Mutuelle du Mans assurances vie disait accepter d'exécuter à titre provisoire le jugement déféré au titre de la résiliation judiciaire et demandait à M. Z de cesser toute activité, constituait une lettre de licenciement, et que la cause invoquée était dépourvue de caractère réel et sérieux, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige tel qu'il résultait des prétentions des parties, et a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif justement critiqué par le moyen mais surabondant, la cour d'appel qui a retenu que la modification par l'employeur de la rémunération justifiait la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de ce dernier, laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen
Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la Mutuelle du Mans à payer au salarié une somme à raison du défaut de mention de la priorité de réembauchage, la cour d'appel énonce que la lettre de l'employeur du 13 juillet 1999, bien que faisant expressément état de l'exécution provisoire du jugement, ne peut être considérée que comme une lettre de licenciement ; que cette lettre ne mentionne pas la priorité de réembauchage ; qu'il n'est pas établi que M. Z ait été effectivement empêché d'en bénéficier de sorte qu'il ne peut prétendre à l'indemnité minimale prévue par l'article L 122-14-4 in fine du Code du travail ; qu'il lui sera alloué en réparation de son préjudice une somme de 5 000 francs ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle était saisie par l'une et l'autre des parties d'une demande en résiliation du contrat de travail aux torts de l'autre, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé le texte susvisé ;
Sur le pourvoi formé par M. Z
Sur le second moyen
Attendu que M. Z fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'une indemnité pour non respect de la priorité de réembauchage alors, selon le moyen
1°/ que l'employeur ne se prévalait pas de la possibilité qu'aurait eue le salarié de bénéficier de la priorité de réembauchage, mais uniquement de son absence de droit à cet égard ; qu'ainsi, la cour d'appel a modifié les termes du litige, violant l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
2°/ qu'il appartient à l'employeur, tenu d'informer le salarié dans la lettre de licenciement de ce qu'il peut bénéficier d'une priorité de réembauchage s'il en manifeste le désir dans le délai de quatre mois, d'apporter la preuve de ce que l'absence de la mention requise n'a pas privé le salarié d'une proposition de réembauchage ; qu'en déboutant M. Z de sa demande au seul motif qu'il n'était pas établi qu'il ait été empêché de bénéficier d'une priorité de réembauchage, la cour d'appel a fait peser sur le salarié le risque de la preuve, en violation de l'article L. 321-14 du Code du travail ;
Mais attendu que la cassation intervenue sur le troisième moyen du pourvoi formé par la Mutuelle du Mans rend inopérant le moyen ;
Mais sur le premier moyen
Vu l'article 86 ter de la Convention collective nationale de l'inspection d'assurance du 27 juillet 1992 et le paragraphe III du protocole d'accord du 1er janvier 1995 ;
Attendu, selon le second de ces textes, qu'à l'occasion d'une mutation, les inspecteurs bénéficient d'une garantie de rémunération pendant deux ans, portant sur les douze derniers mois précédant la mutation ; que, selon le premier, cette garantie est basée sur la rémunération moyenne réelle et nette de frais professionnels des douze mois précédant la modification considérée ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre de la garantie de rémunération, la cour d'appel énonce que le salarié estime qu'il convient de prendre en considération l'ensemble des sommes perçues au cours des 12 mois précédant la mutation soit du 1er septembre 1995 au 31 août 1996 notamment une prime qualitative de 110 000 francs perçue en mars 1996 mais que la Mutuelle du Mans fait observer à juste titre que cette prime afférente à l'année 1995 ne peut être prise en compte qu'à concurrence de la période du 1er septembre au 31 décembre 1995 soit un tiers, ce qui a été fait ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la garantie de rémunération instituée par les textes susvisés englobe l'ensemble des éléments de rémunération perçus par le salarié au cours des douze mois précédant la mutation, sans exclusion, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives à la garantie de rémunération et au non-respect de la priorité de réembauchage, l'arrêt rendu le 2 mai 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Z ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille deux.

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