Jurisprudence : Cass. civ. 3, 14-11-2002, n° 01-10.691, inédit, Rejet

Cass. civ. 3, 14-11-2002, n° 01-10.691, inédit, Rejet

A7193A3S

Référence

Cass. civ. 3, 14-11-2002, n° 01-10.691, inédit, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1110849-cass-civ-3-14112002-n-0110691-inedit-rejet
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CIV.3
N.R
COUR DE CASSATION
Audience publique du 14 novembre 2002
Rejet
M. WEBER, président
Pourvoi n° S 01-10.691
Arrêt n° 1712 FS D
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par la société Entreprise Bonnemaison, société à responsabilité limitée, dont le siège est Paris,
en cassation d'un arrêt rendu le 14 février 2001 par la cour d'appel de Paris (16e chambre, section A), au profit

1°/ de M. Lucien Y,

2°/ de Mme Alyette XY, épouse XY,
demeurant Paris,

3°/ de M. Denis Y, demeurant Le Mans,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur généal ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 22 octobre 2002, où étaient présents M. W, président, Mme V, conseiller rapporteur, MM. Peyrat, Guerrini, Dupertuys, Philippot, Assié, conseillers, MM. Betoulle, Jacques, conseillers référendaires, M. U, avocat général, Mlle T, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme V, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Entreprise Bonnemaison, de la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat des consorts Y, les conclusions de M. U, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 février 2001), que les consorts Y, propriétaires de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Entreprise Bonnemaison (société Bonnemaison), lui ont donné congé le 19 janvier 1990 pour le 1er octobre 1990 avec refus de renouvellement du bail et offre d'une indemnité d'éviction ; qu'ils lui ont, le 6 février 1990, fait délivrer un commandement visant la clause résolutoire ; que, par jugement du 16 novembre 1990, le Tribunal a, sur l'assignation des bailleurs en date du 24 janvier 1990, déclaré non acquise la clause résolutoire, validé le congé et ordonné une expertise sur le montant de l'indemnité d'éviction ; que ce jugement a été confirmé par arrêt du 24 avril 1992, devenu irrévocable ; que, parallèlement, une procédure d'expropriation a été engagée par la Ville de Paris pour l'aménagement du secteur ; que le juge de l'expropriation a fixé à une certaine somme le montant de l'indemnité revenant à la locataire pour perte de son droit au bail ; que la société Bonnemaison a demandé en vain payement de cette indemnité à la Ville de Paris ; qu'elle a alors, par conclusions du 8 décembre 1994, repris l'instance introduite par l'assignation du 24 janvier 1990 ; que par jugement du 9 juin 1995, non frappé d'appel, cette instance a été déclarée périmée ; que, par acte du 11 avril 1996, la société Bonnemaison a assigné les consorts Y pour faire juger, principalement, qu'ils devaient lui payer une indemnité d'éviction du montant fixé par le juge de l'expropriation, subsidiairement sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;
Attendu que la société Bonnemaison fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande principale, alors, selon le moyen

1°/ que le congé comportant offre d'indemnité d'éviction n'encourt aucune prescription ; qu'en considérant l'action de la société Entreprise Bonnemaison prescrite sur le fondement de cette disposition quand cette action tendait à obtenir le paiement de l'indemnité d'éviction offerte par le bailleur lors de la délivrance du congé avec refus de renouvellement du bail comportant offre d'indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé l'article L. 145-60 du Code de commerce ;

2°/ que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; que la société Entreprise Bonnemaison exposait dans ses conclusions que son action ne pouvait être déclarée prescrite dans la mesure où le congé comportant offre d'indemnité d'éviction n'encourt aucune prescription ; que la cour d'appel, en estimant l'action prescrite sans répondre, même succinctement, aux conclusions de la société Entreprise Bonnemaison sur l'imprescriptibilité de son action, a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3°/ que le délai de prescription biennale de l'article L. 145-60 du Code de commerce, interrompu par une citation en justice, ne recommence à courir qu'à compter du jour où le jugement est devenu irrévocable ; qu'en l'espèce, la décision accordant à la société Entreprise Bonnemaison le droit à une indemnité d'éviction est devenue définitive le 31 mai 1994, jour du rejet du pourvoi formé par les consorts Y contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 24 avril 1992 ; qu'en affirmant néanmoins, que la prescription biennale était déjà acquise lorsque le jugement du 9 juin 1995 avait constaté la péremption de l'instance, la cour d'appel a violé l'article 2244 du Code civil ;

4°/ que le juge ne peut se contenter de considérations d'ordre général qui ne se rapportent nullement aux circonstances de l'espèce ; qu'en affirmant qu'aucune prescription trentenaire ne pouvait être invoquée sur le fondement d'une reconnaissance du principe du droit à indemnité d'éviction, sans indiquer en quoi la prescription trentenaire ne pourrait pas trouver à s'appliquer en l'espèce, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs certain, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

5°/ que l'interversion de la prescription peut résulter d'un jugement de condamnation ; qu'en l'espèce, le congé avec refus de renouvellement de bail et offre d'indemnité d'éviction délivré le 19 janvier 1990 par les consorts Y à la société Entreprise Bonnemaison a été validé par un arrêt définitif en date du 24 avril 1992 qui a dit que la société avait droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction, reconnaissant ainsi expressément son droit à une indemnité d'éviction ; qu'en estimant qu'il n'y avait pas eu d'interversion de la prescription et qu'aucune prescription trentenaire ne pouvait être invoquée, la cour d'appel a violé l'article 2274 du Code civil ;
Mais attendu que la péremption emportant extinction de l'instance sans que l'on puisse jamais opposer aucun des actes de la procédure périmée ou s'en prévaloir, que le jugement irrévocable du 9 juin 1995 ayant constaté la péremption de l'instance introduite, à la suite du congé du 19 janvier 1990 sans renouvellement et avec offre d'indemnité d'éviction, par l'assignation du 24 janvier 1990, celle-ci n'a pu interrompre la prescription biennale de l'article 33 du décret du 30 septembre 1953, devenu l'article L. 145-60 du Code de commerce, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions, a, par ce motif de pur droit, substitué au motif critiqué, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen, ci-après annexé

Attendu qu'ayant exactement retenu que l'action fondée sur l'enrichissement sans cause ne pouvait suppléer à une action atteinte par la prescription, comme en l'espèce, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi ;
Condamne la société Entreprise Bonnemaison aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Entreprise Bonnemaison à payer aux consorts Y la somme de 1900 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Entreprise Bonnemaison ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille deux.

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