Jurisprudence : CA Paris, 1ère ch., C, 10-10-2002, n° 2002/00773

CA Paris, 1ère ch., C, 10-10-2002, n° 2002/00773

A3280A3U

Référence

CA Paris, 1ère ch., C, 10-10-2002, n° 2002/00773. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1106867-ca-paris-1ere-ch-c-10102002-n-200200773
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Abstract

La cour d'appel de Paris a rendu, le 10 octobre dernier, un arrêt selon lequel une inscription sur les listes de recensement de 1995 et une pièce indiquant la délivrance d'un passeport en 1966 ne permettent pas de justifier la possession d'état constante de la qualité de français (cour d'appel de Paris, 10 octobre 2002).




**COUR D'APPEL DE PARIS

1ère chambre, section C

ARRET DU 10 OCTOBRE 2002
**

**Numéro d'inscription au répertoire général : 2002/00773
**

Pas de jonction


Décision dont appel : Jugement rendu le 15 juin 2001
par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS
(1ère chambre, 2ème section) - RG n ° : 2000/13363


Date ordonnance de clôture : 5 septembre 2002


Nature de la décision: CONTRADICTOIRE


Décision: AU FOND


**APPELANT
**

**Monsieur Samuel ESPIEDRA
**né le … … … à … (…)
… … … …

… … …

Représenté par Maître RIBAUT, avoué
Assisté de Maître Joël WERBA, avocat à la Cour (E 419)


**INTIME
**

**Le MINISTERE PUBLIC
**pris en la personne de
Monsieur A B GENERAL
près la Cour d'Appel de PARIS

élisant domicile en son parquet au Palais de Justice
4, Boulevard du Palais
75001 PARIS

Représenté par Monsieur PEROL, avocat général


**COMPOSITION DE LA COUR
**
lors du délibéré


Président : Madame PASCAL

Conseiller: Monsieur MATET

Conseiller: Monsieur C


**GREFFIER
**
lors des débats et du prononcé de l'arrêt :

Mlle X


**MINISTERE PUBLIC
**

Monsieur PEROL, Avocat Général,

qui a développé oralement ses conclusions écrites


**DEBATS
**
à l'audience publique du 13 septembre 2002,

Monsieur MATET, Magistrat chargé du rapport,
a entendu la plaidoirie de l'avocat de l'appelant
et Monsieur l'Avocat Général en ses explications,
ceux-ci ne s'y étant pas opposés. Il en a rendu compte à la Cour dans son
délibéré.


**ARRET** - CONTRADICTOIRE


prononcé publiquement par Madame PASCAL, Président, qui a signé la minute avec
Mlle FERRIE, Greffier.


Samuel Espiedra est né le … … … à … (…) de Aa Ab
né le … … … aux Dardanelles (Turquie) et de Ac Ad, son
épouse, née le … … … à ….


S'étant vu refuser la délivrance d'un certificat de nationalité française par
le tribunal d'instance du XIXème arrondissement de Paris, Samuel Espiedra a
saisi le tribunal de grande instance de Paris d'une action déclaratoire de
nationalité, prétendant qu'il est français par filiation maternelle, Ac
Ad étant originaire d'Algérie et ayant conservé la nationalité française
lors de son mariage, célébré le 17 novembre 1935 à Alexandrie, avec Aa
Ab apatride au jour de la célébration.


Le tribunal a, suivant jugement du 15 juin 2001, constaté l'extranéité de
Samuel Espiedra et l'a débouté de ses demandes au motif qu'il n'apportait pas
la preuve de l'apatridie de son père au moment de son mariage, seule
susceptible de faire échec à l'application des dispositions de la loi turque
en vigueur à l'époque selon lesquelles la femme étrangère épousant un
ressortissant turc acquérait la nationalité du mari.



Appelant de ce jugement dont il poursuit l'infirmation, Samuel Espiedra
demande à être déclaré français et fait valoir que les premiers juges ont omis
de statuer sur le fait que sa mère justifiait être de nationalité française et
ont apprécié de façon inexacte les documents produits, lesquels établissent
que son père était apatride au jour de mariage et que de ce fait il n'avait pu
transmettre une nationalité à son épouse. Il affirme avoir joui, comme sa
mère, d'une façon constante de la possession d'état de français et prétend
pouvoir invoquer le bénéfice des dispositions de l'article 30-2 du code civil.


Le ministère public conclut à la confirmation de la décision déférée. Il
rappelle que la loi de nationalité turque en vigueur lors du mariage des
parents de l'appelant prévoyait une acquisition automatique de cette
nationalité par la femme étrangère épousant un Turc et soutient qu'à cette
date, Samuel Espiedra ne rapporte pas la preuve que son père d'origine
ottomane ait été apatride. Il conteste que Samuel Espiedra ait joui de façon
constante de la possession d'état de français.



Sur ce, la Cour


Considérant que, par application de l'article 30 du code civil, la charge de
la preuve en matière de nationalité incombe à celui dont la nationalité est en
cause ; qu'il appartient donc à l'appelant - non titulaire d'un certificat de
nationalité française- d'établir que sa mère dont la nationalité française
d'origine n'est pas contestée, l'a conservée lors de son mariage en Egypte
avec un étranger ;


Considérant qu'aux termes de l'article 8 alinéa 3 de la loi du 10 août 1927,
applicable au jour du mariage le 17 novembre 1935 à Alexandrie, la femme
française qui épouse un étranger "perd la qualité de française si les époux
fixent leur premier domicile hors de France après la célébration de leur
mariage, et si la femme acquiert nécessairement la nationalité du mari en
verni de la loi nationale de ce dernier" ; qu'il est constant que Samuel
Espiedra et Renée Yayon, son épouse, ont fixé leur premier domicile en Egypte
;


Considérant que selon l'article 13 de la loi de nationalité turque du 28 mai
1928, entrée en application le''" janvier 1929, en vigueur le 17 novembre
1935, "les femmes étrangères qui épousent des Turcs deviennent citoyennes
turques" ;


Considérant que Samuel Espiedra produit une déclaration faite le 7 juillet
1969 devant notaire par son père Aa Ab affirmant être apatride, une
attestation délivrée le 15 février 2001 par l'ambassade de Turquie selon
laquelle ce dernier ne figurait pas sur les registres de l'état civil du
département de Canakkale (Dardanelles), un certificat établi le 4 juin 1992
par le Rabbinat de la communauté israélite d'Alexandrie suivant lequel il
résulte de la déclaration de témoins enregistrée le 10 octobre 1935 que Aa
Ab est sujet local apatride, ainsi qu'une fiche d'immatriculation
dressée le 6 janvier 1949 au nom de Mme Ac Ad indiquant à propos de son
conjoint "nationalité actuelle : apatride, nationalité d'origine : ottomane" ;


Mais considérant que les déclarations du père de l'appelant sont insuffisantes
pour constituer une preuve de son apatridie ; qu'elle n'est établie ni par le
certificat rédigé en 1992 par le Rabbinat d'Alexandrie sur la base de
témoignages qui auraient été recueillis le 10 octobre 1935, soit
antérieurement au mariage, dont la teneur et l'objet demeurent inconnus, ni
par l'attestation consulaire turque qui n'indique pas la date à laquelle Aa
Ab a perdu sa nationalité et est devenu apatride, ni par la fiche
d'immatriculation consulaire française ne mentionnant pas la date à laquelle
l'intéressé a perdu sa nationalité d'origine ; qu'au contraire une lettre du
ministère des affaires étrangères de France au consul de France à Tel Aviv en
1966 - relative à la situation de la soeur aînée de l'appelant- fait référence
à une fiche d'immatriculation de Ae Ad, grand père de l'intéressée,
portant l'indication que Ac Ad était mariée à un Turc ;


Considérant au demeurant que cette soeur et la mère de l'appelant s'étant vu
refuser la délivrance de certificats de nationalité française ont
respectivement souscrit en 1977 des déclarations acquisitives de nationalité
française, à une époque où l'appelant était déjà majeur ; qu'il n'établit donc
pas que sa mère dont les passeports français ne constituent pas des preuves de
la nationalité, ait conservé sa nationalité d'origine lors de son mariage en
1935 avec un étranger et qu'elle ait pu lui conférer la nationalité française
par filiation ;


Considérant qu'aux termes de l'article 30-2 du code civil, la nationalité
française est tenue pour établie, sauf la preuve contraire, si l'intéressé et
celui de ses père et mère qui a été susceptible de lui transmettre la
nationalité française ont joui de façon constante de la possession d'état de
français ; que Samuel Espiedra qui verse aux débats une inscription sur les
listes de recensement en 1995, alors qu'il a 45 ans, et une pièce indiquant
qu'un passeport lui a été délivré en 1966, ne justifie pas d'une possession
d'état constante de la qualité de français ;


Considérant qu'il convient donc de confirmer le jugement qui a constaté son
extranéité et d'ordonner la mention prévue à l'article 28 du code civil ; Par
ces motifs


Confirme le jugement entrepris,


Ordonne la mention prévue à l'article 28 du code civil,


Condamne Samuel Espiedra aux dépens.


LE GREFFIER


LE PRESIDENT


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