COMM.
S.L
COUR DE CASSATION
Audience publique du 15 octobre 2002
Cassation
M. TRICOT, conseiller doyen faisant fonctions de président
Pourvoi n° D 99-19.857
Arrêt n° 1600 F D
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Baudoin Z, administrateur judiciaire, demeurant Corbeil-Essonnes,
en cassation d'un arrêt rendu le 28 mai 1999 par la cour d'appel de Paris (3e chambre, section B), au profit de la société Primarco France, société anonyme, dont le siège est Rungis,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 juillet 2002, où étaient présents M. Tricot, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Aubert, conseiller rapporteur, M. Badi, conseiller, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Aubert, conseiller, les observations de Me Vuitton, avocat de M. Z, de Me Choucroy, avocat de la société Primarco France, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches
Vu les articles 1382 et 1383 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Cominter exploitant un fonds de commerce de vente en gros et détail de fruits et légumes a été mise en redressement judiciaire le 22 octobre 1993, M. Z étant désigné comme administrateur avec une mission d'assistance ; que la liquidation judiciaire a été prononcée le 15 février 1994 ; que la société Primarco France qui était en relation d'affaires avec la société Cominter a continué à livrer des marchandises à celle-ci ; que les factures correspondant aux expéditions des 12 et 20 janvier 1994 ont été réglées par des chèques contresignés par l'administrateur tandis que les factures correspondant au reste des livraisons effectuées les 20 janvier et 3 février 1994 n'ont pas été payées pour un montant total de 250 540,26 francs ; que soutenant que l'administrateur avait commis une faute engageant sa responsabilité personnelle, la société Primarco France l'a assigné en paiement de la somme de 331 187,81 francs à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient qu'il appartient à l'administrateur de veiller à empêcher la naissance de créances qui ne pourront pas être payées et qu'en ne faisant pas cesser les livraisons aussitôt qu'il est apparu qu'elles ne pourraient pas être payées, l'administrateur a commis une faute engageant sa responsabilité ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la faute de l'administrateur en raison du défaut de paiement des livraisons faites à la société en redressement judiciaire doit être appréciée à la date à laquelle a pris naissance la créance du fournisseur, c'est à dire à la date de la commande et consiste, soit à avoir su que la situation était irrémédiablement compromise, soit à avoir induit en erreur le fournisseur par des assurances imprudemment données, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Primarco France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile rejette la demande de M. Z à titre personnel ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du quinze octobre deux mille deux.