RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 5
ARRÊT DU 31 Octobre 2013
(n° 11, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général S 11/12430
Décision déférée à la Cour jugement rendu le 04 Août 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - Section encadrement - RG n° 10/09106
APPELANTE
Madame Magali Z
HANCHES
comparante en personne, assistée de Me Claudine BOUYER-FROMENTIN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque PN471
INTIMÉE
SOCIÉTÉ ALLIANZ VIE
PARIS
représentée par Me Alain MENARD, avocat au barreau de PARIS, toque L0301
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er octobre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Monsieur Renaud BLANQUART, Président
Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère
Madame Anne MÉNARD, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier M. Franck TASSET, lors des débats
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, Président et par M. Franck TASSET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Mme Magali Z, qui avait été engagée le 1er septembre 2000 par la Banque AGF en qualité de web master, puis mutée la 3 mars 2003 au sein de la société AGF Vie, devenue Allianz Vie, en qualité de chargée d'organisation classe 5, a bénéficié le 1er octobre 2008 d'une promotion en classe 6 au poste de responsable de projet organisation. Elle a été licenciée le 11 juin 2010 pour manquements contractuels.
Elle a saisi la juridiction prud'homale, le 9 juillet 2010, d'une demande de paiement de diverses sommes au titre tant de l'exécution que de la rupture de son contrat de travail.
Par jugement du 4 août 2011, notifié le 8 décembre 2011, le Conseil de prud'hommes de Paris a condamné la société Allianz Vie à payer à Mme Z les sommes de
- 27000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- et 300 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Mme Z a interjeté appel de cette décision le 12 décembre 2011.
Assistée de son avocat à l'audience du 1er octobre 2013, Mme Z demande à la Cour l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société Allianz Vie à lui payer
- 109185,38 euros de rappel de salaire
- et 50000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination salariale et de carrière
- 83741 euros de dommages-intérêts pour la perte des avantages du plan de départ volontaire dont elle a été exclue,
- 100000 euros de dommages-intérêts pour harcèlement moral
- 100000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 5248 euros à titre de complément de préavis
- 524 euros de congés payés incidents
- 4717 euros de complément d'indemnité conventionnelle de rupture
- outre 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle allègue que, après lui avoir refusé une rémunération normale, une progression de carrière équivalente à ses collègues et le bénéfice d'un départ volontaire grâce au plan mis en place dans l'entreprise, ses responsables ont cherché à la pousser à la démission en la mettant en difficulté psychologiquement et professionnellement, ce qui l'a amenée à être en arrêt de janvier à août 2010, pendant lequel elle a été licenciée. Elle expose ainsi qu'elle n'a bénéficié que d'une seule augmentation en dix ans, alors qu'en application de l'article 13 des accords d'entreprise relatifs au 'système de reconnaissance individuelle et structure de rémunération' en vigueur depuis le 1er juin 2001, son salaire aurait dû être augmenté entre un minimum de 3,5 % et un maximum de 7 %. Elle soutient que Allianz Vie a toujours eu une politique sexiste, comme en témoigne la place des femmes dans l'entreprise, qu'elle percevait 1695,85euros de moins que le salaire médian des femmes et 2697,85 euros de moins que le salaire médian des hommes pour les classes concernées, et que sa situation et son évolution de carrière se situent dans la même ligne, étant restée classe 5 pendant des années malgré ses responsabilités croissantes. Elle se compare ainsi à son responsable hiérarchique, M. ..., qui exerçait des fonctions similaires de responsable pour la partie finance alors qu'elle-même était responsable du plan de transformation des fonctions centrales, qui avait un salaire 74 % plus élevé que le sien, soit 7083 euros contre 4504 euros interne. Elle invoque également le fondement 'à travail égal, salaire égal' pour se comparer, pour la période postérieure à avril 2009, à deux de ses collègues femmes qui occupaient le même poste de responsable de projet de la Direction financière au même niveau 6, d'un niveau de formation équivalent à elle, compte tenu des formations internes
qualifiantes qu'elle a suivies, que l'employeur ne veut pas prendre en compte pour la rémunération, alors qu'il en a tenu compte pour son affectation de poste. Elle considère, par ailleurs, que, étant affectée au jour d'ouverture du plan de départ volontaire mis en place en 2009 à une mission qui devait se terminer fin 2010, son poste n'avait pas vocation à être pérenne et elle aurait dû pouvoir bénéficier du plan de départ volontaire comme elle le souhaitait. Enfin, elle estime avoir été victime de harcèlement par isolement, retrait de fonctions, reproches injustifiés, sans que la prétendue enquête interne menée ne permette d'y mettre fin. Le licenciement intervenu par la suite étant fondé, selon l'appelante, sur des faits prescrits et, en tout état de cause, non établis, justifierait l'allocation des dommages-intérêts sollicités compte tenu de son ancienneté, du contexte de la rupture et de son préjudice moral.
Réprésentée par son Conseil, La société Allianz Vie a, à l'audience du 1er octobre 2013 développé oralement ses écritures, visées le jour même par le Greffier, aux termes desquelles, elle demande, pour sa part, à la Cour de réformer partiellement le jugement et de débouter Mme Z de ses demandes en la condamnant à lui payer la somme de 5000 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle expose que, malgré l'évolution de carrière et de rémunération dont avait bénéficié Mme Z, son comportement s'est dégradé à compter de 2009 en raison du rejet, en février, de sa candidature au plan de départ volontaire mis en place dans l'entreprise et de la nomination, suite à un recrutement externe, de son nouveau responsable hiérarchique M. ..., le 1er juillet 2009. Cette dégradation se serait ainsi traduite par une contestation de l'autorité de ce dernier, un manque de professionnalisme, et des manquements contractuels répétés qui ont justifié son licenciement, de nature non disciplinaire. Elle soutient que Mme Z n'est fondée à se comparer ni à son supérieur hiérarchique, ni à ses deux collègues femmes, dont la formation, l'ancienneté, l'expérience et l'évolution de carrière démontrent qu'ils n'avaient absolument pas le même profil qu'elle. Elle rappelle, par ailleurs, que pour bénéficier du plan de départ volontaire, le candidat devait voir son poste supprimé dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi et que tel n'était pas le cas de celui de l'intéressée, seule sa mission ayant une durée de trois ans mais son poste étant pérenne. Enfin, elle considère que le prétendu harcèlement n'est aucunement justifié et ne peut être caractérisé par les reproches qui lui ont été formulés sur la qualité de son travail.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.
MOTIFS
I. Sur les demandes relatives à une discrimination et/ou inégalité de traitement
Considérant qu'aux termes de l'article L.1132-1 du Code du travail, aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de classification ou de promotion professionnelle, en raison de son sexe ;
que l'article L.1134-1 du Code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Qu'il résulte, par ailleurs, du principe 'à travail égal, salaire égal', dont s'inspirent les articles L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22.9, L.2271-1.8° et L.3221-2 du Code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; que sont considérés comme ayant une valeur égale, par l'article L.3221-4 du même Code, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ;
Qu'en application de l'article 1315 du Code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal' de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence ;
Considérant que le rapport 2008 relatif aux situations comparées hommes-femmes au sein du groupe Allianz produit par Mme Z, qui fait apparaître des écarts de rémunération et une pyramide des classes professionnelles différentes entre hommes et femmes, ne peut cependant suffire, en tant que document général, à faire présumer la discrimination salariale particulière dont l'intéressée aurait fait l'objet par rapport à ses collègues ; qu'il convient d'ailleurs de remarquer qu'alors que le groupe Allianz prête une vigilance particulière à ce problème d'égalité hommes-femmes, suffisamment pour qu'un accord AGF relatif à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ait été conclu le 6 décembre 2006 en application de la loi du 23 mars 2006 relative à l'égalité salariale, il est regrettable que Mme Z n'ait jamais cru devoir formuler de revendication sur ce plan pendant l'exécution de son contrat de travail, soit auprès des institutions représentatives du personnel alertées sur ce problème, soit auprès de la 'direction responsabilité sociétale de l'entreprise' créée à cet effet, soit simplement auprès de la DRH, alors qu'elle n'hésitait pas à faire valoir ses prétentions salariales ou de carrière auprès de celle-ci ;
Considérant que Mme Z, qui a exercé successivement au sein du groupe les fonctions, en classe 5, de chargée d'organisation à compter du 1er mars 2003 avec une période probatoire non concluante, de chargée d'études générales à compter du 1er janvier 2005, puis à nouveau de chargée d'organisation à partir du 1er novembre 2007 avec une période d'intégration non concluante, et finalement à compter du 1er octobre 2008 de responsable de projet organisation avec passage en classe 6, soutient, en premier lieu, qu'elle n'a pas eu l'évolution de carrière qu'elle méritait compte tenu des responsabilités qui lui étaient confiées et des notations dont elle faisait l'objet; qu'elle allègue également qu'elle n'a pas, non plus, été rémunérée comme ses collègues masculins en classe 5, encore moins comme ceux en classe 6 dans laquelle elle aurait dû se trouver dès l'origine compte tenu de ses compétences et des postes occupés, et chiffre le différentiel à son détriment qui en résulte à 82449,17 euros ;
Considérant toutefois que l'appelante, qui ne produit que ses entretiens d'évaluation de 2004, 2008 et 2009, ne peut se comparer dans l'abstrait à des collègues hommes de même niveau hiérarchique qu'elle, sans indication sur leurs fonctions, ni revendiquer un niveau de classe défini par la convention collective nationale des sociétés d'assurance, sans fournir d'élément sur les critères conventionnels auquel il répond ; que sa demande de rappel de salaire à ce premier titre n'est, donc, pas fondée;
Considérant que Mme Z, qui exerçait depuis avril 2008 les fonctions de responsable de projet, dit 'Programme Manager Office' (PMO) Fonctions centrales, au sein de la Direction Projets Finance dirigée par M. ..., et qui était à l'époque directement rattachée à celui-ci, se compare ensuite à M. ..., qui avait un salaire de 7083 euros, contre 4460 euros pour elle, à la fin de l'année 2009, pour des fonctions équivalentes ou similaires ; qu'elle chiffre à 26736,21 euros le différentiel de salaire à son détriment sur dix mois ;
Que toutefois, l'intéressée ne tient pas compte du fait que son 'homologue', qui exerçait les fonctions de 'PMO' Finance depuis janvier 2009, était également le directeur adjoint de la direction, à la tête du service 'Transformation Unité Finance' qui avait été créé le 1er juillet 2009, dont elle faisait partie avec ses collègues Mmes ... et ... ; que, certes, cette responsabilité, qui en faisait le supérieur hiérarchique de Mme Z par création d'un échelon hiérarchique intermédiaire, est précisément contestée par cette dernière qui estime qu'elle aurait dû lui être attribuée compte tenu de sa grande ancienneté dans le groupe et de son expérience ; que cependant, ce choix relève du pouvoir de direction de l'employeur sous réserve de discrimination, et compte tenu de l'expérience professionnelle de M. ..., il n'apparaît pas qu'une telle discrimination puisse être reprochée à l'employeur, l'intéressé, âgé de 37 ans, avec une formation initiale d'ingénieur et un diplôme d'études comptables et financières, ayant, depuis 2002, eu plusieurs emplois au sein d'établissements financiers en tant que responsable avec plusieurs personnes sous ses ordres (30 dans le dernier poste), ce qui n'était pas le cas de Mme Z, âgée de 39 ans, titulaire d'un BTS de commerce international et ayant suivi plusieurs formations en informatique, ayant une expérience professionnelle de chargée de projet et de responsable depuis six mois mais non de manager, et dont le principal avantage était sa parfaite connaissance de l'entreprise ; que sa demande de rappel de salaire à ce titre sera,en conséquence, rejetée et le jugement confirmé sur ce point ;
Considérant que Mme Z se compare enfin à ses deux collègues femmes Mmes ... et ..., toutes deux responsables de projet comme elle au sein de la Direction Projet et en classe 6, la première ayant en 2009 un salaire de 5244 euros et la seconde, en temps plein, de 5705 euros ; qu'elle chiffre à 12956,21 euros la différence de salaire en résultant à son détriment ;
Que toutefois, si cette première comparaison fait apparaître des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il reste que l'employeur justifie d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence en ce qui concerne Mme ..., dont le CV montre qu'âgée de 45 ans, bénéficiant d'une ancienneté de 17 ans au sein du groupe (étant précisé que cette ancienneté n'est pas rémunérée distinctement par une prime spécifique), elle a une formation de DESS de fiscalité de l'entreprise et d'expert-comptable qui lui a permis d'occuper, dès son entrée en 1992, des postes de responsable comptable et fiscal puis consolidation puis de contrôleur de gestion ; que l'ancienneté dans la fonction et la classe justifie donc la différence de rémunération critiquée ;
Qu'en ce qui concerne Mme ..., l'employeur justifie qu'âgée de 41 ans, ayant une ancienneté de 12 ans dans le groupe et titulaire d'un DESS des systèmes d'information et contrôle de gestion, elle a occupé au sein de l'entreprise des postes de chargée d'études avant d'être promue responsable en 2001, ce qui justifie la différence de salaire de 5244 euros contre 4460 euros pour Mme Z en 2009, étant ajouté au surplus que celle-ci s'est vu allouer pendant la même année 3 primes de 2000 euros pour la fidéliser et compte tenu de ses responsabilités, qu'elle ne prend pas en compte dans son salaire de comparaison ;
Qu'il résulte de ces éléments justificatifs que les demandes de rappel de salaire et de dommages-intérêts au titre d'une atteinte au principe d'égalité ne sont pas fondées et le jugement sera confirmé sur ces points ;
II. Sur la demande relative à l'exclusion du plan de départ volontaire à l'emploi
Considérant que Mme ... allègue qu'elle se trouvait, au jour d'ouverture du plan de départ, 'en mission d'une durée de trois ans devant se terminer fin 2010, et donc sans poste fixe' ; que toutefois, outre le fait que la salariée se trouvait à l'époque depuis 6 ans en poste chez Allianz, avec une reprise d'ancienneté supérieure de trois ans, ce qui permet de relativiser son assertion d'absence de poste fixe, il doit être souligné que, dans le prolongement du plan de sauvegarde de l'emploi du 11 juillet 2008 et de sa révision du 14 janvier 2009, il avait été prévu un dispositif de départ volontaire qui n'était ouvert qu'aux collaborateurs des sites non maintenus dont l'activité était supprimée, ou de sites maintenus si le départ volontaire était de nature à éviter une mobilité fonctionnelle, dès lors que le collaborateur concerné relevait 'd'un métier repère en décroissance' ; que l'employeur a officiellement notifié, le 15 février 2010, à l'intéressée, après sa saisine du juge des référés, qu'elle n'était pas exigible à ce dispositif, comme il lui avait été indiqué le 16 février 2009 lors d'une entrevue avec la DRH et le 6 avril 2009 après sa saisine de la commission paritaire ad hoc, son poste n'étant pas supprimé et son départ devant générer, directement ou indirectement, un recrutement, ce qui n'était pas le but affiché du plan, alors au surplus que l'intéressée était appréciée et indispensable à son poste dans lequel elle avait été promue six mois auparavant ; que Mme Z ne peut, donc, faire l'amalgame entre sa fonction de responsable de projets organisation et la mission de transformation des fonctions centrales qui lui avait été confiée dans ce cadre en soutenant qu'elle constituait un emploi non pérenne appelé à disparaître ; que le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts au titre de la perte des avantages attachés au plan ;
III. Sur la demande au titre d'un harcèlement moral
Considérant que, aux termes de l'article L.1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Que l'article L.1154-1 du même Code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et qu'il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Considérant qu'à l'appui de sa prétention, Mme Z invoque les faits suivants
- son isolement par ses supérieurs hiérarchiques
- son absence de convocation aux réunions avec ses collègues
- une rétention d'informations à son égard
- le retrait de certaines fonctions
- des reproches incessants injustifiés ;
Considérant que pour fonder ses allégations, l'appelante produit en tout et pour tout six échanges de courriels entre janvier 2009 et janvier 2010, principalement avec ses supérieurs hiérarchiques Régis ... et Marc ... ;
Que s'agissant du fait qu'elle aurait été écartée de réunions, il ne ressort pas du courriel du 4 décembre 2009 adressé par M. ... à l'ensemble de son équipe, y compris Mme Z, pour proposer un échange par téléphone la semaine suivante, et de la réponse de cette dernière, indiquant qu'elle n'a pas reçu le mode opératoire de cette 'conf call', qu'elle ait été tenue à l'écart de celle-ci, alors qu'elle avait été prévenue de son éventualité ;
Que communiquant également le courriel qu'elle a adressé, le vendredi 18 décembre 2009, à trois collègues et à son responsable afin de leur proposer de se rencontrer pour compléter rapidement ensemble un guide d'entretien, auquel l'un d'eux, M. ..., a répondu le lundi 21 qu'il était disponible tous les après-midis de la semaine suivante, elle se plaint de ce que M. ... soit intervenu pour indiquer que la semaine du 28.12, ils étaient en congés mais qu'ils pouvaient se voir le mercredi 23 après-midi, alors qu'elle se trouvait à cette date en congé ; que toutefois, il ressort des échanges de courriels du 1er décembre qu'elle avait déjà dû repousser d'un jour ses congés à la demande de son manager en raison d'une autre réunion programmée le 22, si bien que cela laissait peu de temps aux intéressés pour se réunir 'rapidement' ; qu'elle ne produit aucune observation de sa part à la suite du message de son responsable mais qu'il résulte du courriel de celui-ci du 4 janvier 2010, produit par l'employeur, que la fameuse réunion avec M. ... a finalement été fixée au 6 janvier, et que le 4 janvier, Mme Z a posé une demande de 'validation d'absence' pour le 6 janvier sans autre explication, ce qui a entraîné de la part de M. ... une demande de justification dont elle s'est offusquée, se plaignant de 'méthodes d'intimidations et de harcèlement' ; qu'il convient de noter qu'un autre incident identique était survenu le 5 octobre précédent où, au seul rappel fait par M. ... de ce que la journée d'absence qu'elle sollicitait correspondait à un rendez-vous fixé avec Doilotte, l'intéressée s'était contenté de répondre par un laconique 'oui, tu me débrieferas' ; qu'il convient également d'ajouter que c'est M. ..., à la suite de ses accusations de harcèlement, qui a les a portées à la connaissance de la DRH le 5 janvier 2010, l'intéressée ne s'en étant jamais plainte avant la saisine de la juridiction prud'homale; que l'enquête interne qui a, alors, été diligentée conclut à l'absence de fait tangible de harcèlement mais à un refus de l'autorité hiérarchique par Mme Z ;
Que l'intéressée produit encore un courriel du 14 janvier 2010 dans lesquel elle écrit à M. ... 'J'attends toujours le compte rendu des échanges de votre réunion du 6 janvier dernier (...) Merci par avance de me faire suivre les informations nécessaires au suivi de ce projet. J'en profite également pour réitérer ma demande datant du 5 janvier dernier, à savoir le compte rendu de la réunion du 23 décembre concernant le transfert des 3 postes du GIE pour lequel, sauf erreur de ma part je n'ai aucun retour à ce jour'; que ce courriel est à rapprocher de ceux qu'elle adresse à d'autres collègues ou que son supérieur lui adresse pour obtenir pareillement des informations nécessaires au travail, sans qu'il puisse en être tiré la preuve de rétention d'informations à son égard;
Que le courriel du 12 janvier 2010, par lequel elle adresse à tous les intervenants le compte rendu du comité de pilotage des fonctions centrales et la réponse de M. ... qui lui rappelle qu'il lui avait été demandé expressément de valider les compte rendus avant qu'ils ne soient communiqués, doivent être rapprochés de celui du 4 décembre précédent par lequel celui-ci faisait le point d'une entrevue du 27 novembre de l'intéressée avec ses deux supérieurs hiérarchiques au cours de laquelle ils avaient 'pointé un certain nombre de dysfonctionnements dans son travail et son comportement' et notamment 'une absence de validation des compte rendus avant leur envoi', si bien que les courriels précités n'apparaissent pas comme la manifestation d'un harcèlement à son encontre mais bien d'une insubordination de sa part ;
Que le courriel du 10 décembre 2009 de M. ... par lequel, à la demande de Mme Z de validation d'un document amendé par lui avant transmission, -appliquant en cela correctement les consignes qui viennent d'être rappelées-, il lui déclare 's'en occuper', ne peut être sérieusement la preuve du 'retrait des fonctions' qu'elle invoque;
Qu'enfin, le courriel du 4 décembre 2009 dont il a été fait précédemment état par lequel M. ... lui rappelle le contenu de la réunion de 'recadrage' du 27 novembre 2009, s'il montre que la réunion préparatoire au comité de pilotage des fonctions centrales
avec ses deux supérieurs hiérarchiques a très vite 'dérapé', pour reprendre le terme employé par l'intéressé lors de l'enquête, lorsqu'il a été reproché à Mme Z son mode de fonctionnement autonome sans tenir compte de sa hiérarchie, ne correspond néanmoins qu'à l'exercice normal par le représentant de l'employeur de son autorité hiérarchique sur la salariée ;
Qu'enfin, le certificat du médecin généraliste en date du 28 mars 2011 qui fait état de ce que l'état de santé de Mme Z a nécessité un arrêt de travail avec repos à son domicile de janvier à août 2010, outre plusieurs arrêts sporadiques en 2009, ne permet pas de rattacher ces problèmes de santé à ses allégations de harcèlement ;
Qu'il en résulte qu'en l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée ; que les demandes relatives à ce titre doivent par conséquent être rejetées et le jugement confirmé sur ce point ;
IV. Sur la demande au titre du licenciement
Considérant par ailleurs que Mme Z a été licenciée par lettre du 21 juin 2010 aux motifs suivants 'Il vous est reproché une mauvaise exécution de votre contrat de travail caractérisée par
- un défaut de prise en compte des règles en matière de congés prise de congés sans accord préalable de votre hiérarchie (journées des 1er, 29 et 30 septembre 2009), pose de congés en vous affranchissant délibérément d'importantes réunions professionnelles connues antérieurement (réunion du 22 décembre 2009), décision unilatérale de pratiquer le télétravail en mettant votre hiérarchie directe devant le fait accompli (envoi d'un courriel le 6 janvier 2010 informant votre hiérarchie de votre décision de ne pas vous rendre au bureau) ;
- un manque constant de collaboration professionnelle avec votre responsable hiérarchique direct (N+1) omissions volontaires de validation de vos travaux compte-rendus, présentations (échanges de courriels des 12 et 14 janvier 2010) ;
- un manque d'implication professionnelle défaut de réactivité et de rigueur dans l'exécution des tâches qui vous sont dévolues, nécessité de relance sur les dossiers (courriels du 2 octobre 2009).' ;
qu'elle a été dispensée d'exécuter son préavis de trois mois qui lui a été payé ;
Considérant que le licenciement n'est pas motivé par une insuffisance professionnelle mais par des manquements professionnels volontaires c'est-à-dire des fautes contractuelles ; qu'il est donc soumis, même si la faute grave n'a pas été retenue, aux règles relatives aux licenciements disciplinaires et notamment à l'article L.1332-4 du Code du travail qui dispose qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; que si ces dispositions n'interdisent pas de prendre en considération des fautes antérieures à plus de deux mois si elles ont été suivies d'autres faits fautifs, force est de constater qu'ici, la lettre de licenciement ne fait état que de faits largement antérieurs au délai légal de prescription ; que le fait que la salariée ait été en arrêt de travail à compter du 27 janvier 2010 et jusqu'à la date de la décision, s'il peut expliquer le délai mis à réagir aux manquements invoqués, ne retire rien à l'effet que la loi lui confère ; que le licenciement se trouve donc en conséquence privé de toute cause réelle et sérieuse ;
Et Considérant que l'appelante, dont le dernier salaire mensuel brut s'élevait depuis avril 2010 à 4503,97 euros, ne justifie pas de ses recherches d'emploi postérieures à son licenciement ni de sa situation après son admission au bénéfice de l'ARE le 15 novembre 2010, n'invoquant que le préjudice moral résultant de l'acharnement de la société à son encontre, lequel ne résulte pas du licenciement ; que compte tenu de son âge au moment de la rupture (39 ans) et au vu de son ancienneté supérieure à deux ans et de la taille de l'entreprise, le jugement sera confirmé en ce qu'il lui a justement alloué en réparation, en application de l'article L.1233-3 du Code du travail, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale aux six derniers mois de salaire, soit la somme de 27000 euros ;
Considérant que la salariée s'étant vu allouer 300 euros pour ses frais de procédure en première instance, il paraît équitable de lui allouer une somme de 1200euros à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la société Allianz Vie à payer à Mme Magali Z la somme de 1200euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne la société aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT