Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 30 Octobre 1989
Rejet.
N° de pourvoi 88-13.824
Président M. Defontaine, conseiller doyen faisant fonction
Demandeur Directeur général des Impôts
Défendeur société des Fromageries Lutin Sofrol
Rapporteur M. Y
Avocat général M. Montanier
Avocats M. X, la SCP Delaporte et Briard.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique
Attendu qu'il résulte du jugement attaqué (tribunal de grande instance d'Alençon, 24 février 1988) que M. Jean U, salarié de la société Fromageries Lutin Sofrol (la société), a déposé le 21 janvier 1983 à l'Institut national de la propriété industrielle la marque " Jean U, Maître T "; que ladite marque fut immédiatement exploitée par la société sans qu'aucune redevance soit versée à M. U ; qu'à son départ à la retraite, M. U céda le 6 mars 1985 à la société sa marque ; que l'administration des Impôts estima que l'acte de cession était passible du droit de mutation du Code général des impôts ; qu'elle adressa à la société l'avis de mise en recouvrement correspondant ; que, ses réclamations ayant été rejetées, la société saisit le Tribunal qui prononça la décharge de cette imposition ;
Attendu que le Directeur général des Impôts fait grief au jugement d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, que toute marque exploitée, fût-ce par une personne autre que son propriétaire, comportant, du fait de son exploitation, une clientèle, sa cession donne ouverture au droit de mutation prévu à l'article 719 du Code général des impôts ; qu'ainsi le tribunal a violé le texte précité ;
Mais attendu que le Tribunal a constaté que M. U, jusqu'à la cession de la marque, n'avait fait que prêter à son employeur son nom patronymique auquel était attachée une notoriété certaine ; que la société avait exploité ce nom, même avant le dépôt de la marque et que M. U s'était dépouillé définitivement dès l'origine de toute clientèle qu'il ne pouvait d'ailleurs se créer à titre personnel en raison de sa qualité de salarié ; qu'en l'état de ces constatations le Tribunal en a déduit à bon droit qu'aucune cession de clientèle n'avait eu lieu et que les droits de mutation prévus à l'article 719 du Code général des impôts n'étaient pas applicables ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi