Jurisprudence : Cass. soc., 23-10-2013, n° 12-23.457, FS-P+B, Rejet

Cass. soc., 23-10-2013, n° 12-23.457, FS-P+B, Rejet

A4764KNR

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Cass. soc., 23-10-2013, n° 12-23.457, FS-P+B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/10932259-cass-soc-23102013-n-1223457-fsp-b-rejet
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Abstract

Un plan de sauvegarde de l'emploi ne peut réserver le bénéfice d'une indemnité spécifique aux salariés concernés par la fermeture d'un site, dès lors que l'employeur n'avance aucune explication objective et pertinente qui justifie l'exclusion de salariés, dont le poste a été supprimé, qui ont été exposés au même titre à un licenciement économique.



SOC. JL
COUR DE CASSATION
Audience publique du 23 octobre 2013
Rejet
M. LACABARATS, président
Arrêt no 1764 FS-P+B
Pourvoi no V 12-23.457
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la société Rexel France, dont
le siège est Paris,
contre l'arrêt rendu le 12 juin 2012 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. Daniel Y, domicilié Le Grand-Quevilly,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 25 septembre 2013, où étaient présents M. Lacabarats, président,
Mme Depelley, conseiller référendaire rapporteur, M. Bailly, conseiller doyen, MM. Blatman, Béraud, Linden, Ballouhey, Mme Geerssen, MM. Frouin, Huglo, conseillers, Mmes Pécaut-Rivolier, Mariette, Sommé, M. Flores, conseillers référendaires, M. Weissmann, avocat général référendaire, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Depelley, conseiller référendaire, les observations de la SCP Blanc et Rousseau, avocat de la société Rexel France, l'avis de M. Weissmann, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 juin 2012), que M. Y a été engagé le 1er août 1972 en qualité de technico-commercial par la société Comptoir électrique du Nord, aux droits de laquelle se trouve la société Rexel France ; qu'en dernier lieu, le salarié occupait les fonctions de gestionnaire stocks agence (GSA) ; qu'à la suite d'une réorganisation des fonctions GSA, son poste a été supprimé et l'employeur lui a notifié son licenciement pour motif économique par lettre du 5 novembre 2009 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale, en invoquant notamment le principe d'égalité de traitement par rapport aux salariés licenciés à la suite de la fermeture de leur site, dans le cadre de la même procédure de licenciement économique collectif et pour lesquels le plan de sauvegarde de l'emploi prévoyait une indemnité spécifique de 10 000 euros ;

Attendu que la société Rexel France fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande du salarié et de la condamner à lui verser l'indemnité spécifique, alors, selon le moyen
1o/ qu'un plan de sauvegarde de l'emploi peut prévoir des avantages pour certains salariés lorsque leur attribution repose sur un critère objectif et contrôlable ; que la cour d'appel a constaté que le PSE du 7 octobre 2009 prévoyait une indemnité spécifique de 10 000 euros pour les salariés concernés par la fermeture du site où ils travaillaient ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations d'où il résultait que l'octroi de cet avantage reposait sur un critère objectif préalablement défini et contrôlable (fermeture ou non du site dont dépendait le salarié), la cour d'appel a violé les articles L. 1233-62 et L. 1132-1 du code du travail ;
2o/ que le salarié qui se prétend victime d'une discrimination doit présenter des éléments faisant supposer son existence ; que les salariés travaillant dans des établissements qui ferment ne sont pas présumés être dans une situation identique à ceux travaillant dans un site maintenu et qu'il incombe au salarié prétendant que l'indemnité prévue par le PSE " pour les salariés concernés par la fermeture de leur site " est discriminatoire, d'établir
qu'il est placé dans une situation identique ; qu'en l'espèce, en retenant que la société Rexel France n'établissait pas que la différence de traitement dont bénéficiaient les salariés concernés par la fermeture d'un site était justifiée par des raisons objectives et étrangères à toute discrimination prohibée, cependant qu'il incombait à M. Y, revendiquant cette prime, d'établir qu'il se trouvait placé dans une situation identique, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1132-1 du code du travail ;
3o/ que la fermeture du site où travaillent des salariés constitue une raison objective, étrangère à toute discrimination prohibée, justifiant à leur profit l'allocation d'une indemnité spécifique par un PSE ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 1132-1 du code du travail et le principe de l'égalité de traitement ;
4o/ que le juge ne peut réparer le préjudice résultant d'une discrimination que par l'octroi de dommages-intérêts ; qu'en condamnant la société Rexel France à payer à M. Y la prime prévue par le PSE du 7 octobre 2009 pour les seuls salariés concernés par la fermeture de leur site, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
5o/ qu' aucun salarié ne peut être faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison de son origine, son sexe, ses moeurs, son orientation sexuelle, son âge, sa situation de famille ou sa grossesse, ses caractéristiques génétiques, son appartenance ou sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, ses opinions politiques, ses activités syndicales ou mutualistes, ses convictions religieuses, son apparence physique, son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en retenant une discrimination au préjudice de M. Y, sans avoir indiqué quel élément aurait été illicitement pris en considération par l'employeur pour le discriminer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
6o/ qu'en retenant que M. Y était dans la même situation que les salariés concernés par la fermeture de leur site, la cour d'appel a statué par voie d'affirmation, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, qu'ayant relevé que M. Y dont le poste avait été supprimé, avait été exposé au même titre que les salariés dont le site avait été fermé, à un licenciement économique, la cour d'appel qui a constaté que l'employeur n'avançait aucune explication objective et pertinente propre à justifier l'attribution aux seuls salariés concernés par la fermeture d'un site de l'indemnité spécifique prévue par le plan de sauvegarde de l'emploi, a par ces seuls motifs légalement justifié sa décision ;


PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Rexel France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Rexel France ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour la société Rexel France
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Rexel France à payer à M. Y la somme de 10.000 euros à titre de l'indemnité spécifique prévue par le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) du 7 octobre 2009 ;
Aux motifs que M. Y réclame une somme de 10.000 euros au titre de l'indemnité spécifique pour les salariés concernés par la fermeture d'un site prévue par le PSE en faisant valoir qu'elle concerne l'ensemble des salariés affectés par le plan et non pas exclusivement les salariés dont le site est fermé, le plan ne respectant pas l'égalité de traitement entre des salariés exposés aux mêmes conséquences leur licenciement ; que la société réplique qu'elle n'est versée qu'aux collaborateurs concernés par la fermeture d'un site alors que le licenciement de M. Y est lié à la réorganisation de la fonction GSA et non à la fermeture d'une agence et qu'il était rattaché à l'agence de Saint-Etienne du Rouvray non concernée par une fermeture ; que M. Y fait une confusion avec le versement d'une autre prime, la prime exceptionnelle résultant d'une décision prise lors de la réunion de la commission de suivi du PSE du 7 octobre 2009 distincte de l'indemnité spécifique de fermeture du site ; que M. Y n'était pas placé dans une situation identique à celle des salariés du site de Nîmes puisqu'il travaillait au sein de l'activité gestionnaire de stocks à l'agence de Saint-Etienne du Rouvray ; qu'il ne pouvait donc prétendre percevoir l'indemnité spécifique de fermeture du site ni la prime exceptionnelle ; que le plan social prévoit une indemnité spécifique de 10.000 euros pour les salariés concernés par la fermeture d'un site ; que cependant la société n'établit pas que les règles déterminant l'octroi de cet avantage aux salariés concernés par la fermeture d'un site aient été préalablement définies et contrôlables, et que la différence de traitement dont ils ont bénéficié soit justifiée par des raisons objectives et étrangères à toute discrimination prohibée ; que M. Y dont le poste a été supprimé et qui a donc été exposé aux mêmes conséquences que les salariés dont le site a été fermé, à savoir un licenciement, peut prétendre à l'indemnité spécifique qui leur a été accordée ;
Alors que 1o) un plan de sauvegarde de l'emploi peut prévoir des avantages pour certains salariés lorsque leur attribution repose sur un critère objectif et contrôlable ; que la cour d'appel a constaté que le PSE du 7 octobre 2009 prévoyait une indemnité spécifique de 10.000 euros pour les salariés concernés par la fermeture du site où ils travaillaient ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations d'où il résultait que l'octroi de cet avantage reposait sur un critère objectif préalablement défini et contrôlable (fermeture ou non du site dont dépendait le salarié), la cour d'appel a violé les articles L. 1233-62 et L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 2o) le salarié qui se prétend victime d'une discrimination doit présenter des éléments faisant supposer son existence ; que les salariés travaillant dans des établissements qui ferment ne sont pas présumés être dans une situation identique à ceux travaillant dans un site maintenu et qu'il incombe au salarié prétendant que l'indemnité prévue par le PSE " pour les salariés concernés par la fermeture de leur site " est discriminatoire, d'établir qu'il est placé dans une situation identique ; qu'en l'espèce, en retenant que la société Rexel France n'établissait pas que la différence de traitement dont bénéficiaient les salariés concernés par la fermeture d'un site était justifiée par des raisons objectives et étrangères à toute discrimination prohibée, cependant qu'il incombait à M. Y, revendiquant cette prime, d'établir qu'il se trouvait placé dans une situation identique, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 3o) la fermeture du site où travaillent des salariés constitue une raison objective, étrangère à toute discrimination prohibée, justifiant à leur profit l'allocation d'une indemnité spécifique par un PSE ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 1132-1 du code du travail et le principe de l'égalité de traitement ;
Alors que 4o) le juge ne peut réparer le préjudice résultant d'une discrimination que par l'octroi de dommages-intérêts ; qu'en condamnant la société Rexel France à payer à M. Y la prime prévue par le PSE du 7 octobre 2009 pour les seuls salariés concernés par la fermeture de leur site, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 5o) aucun salarié ne peut être faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison de son origine, son sexe, ses moeurs, son orientation sexuelle, son âge, sa situation de famille ou sa grossesse, ses caractéristiques génétiques, son appartenance ou sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, ses opinions politiques, ses activités syndicales ou mutualistes, ses convictions religieuses, son apparence physique, son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en retenant une discrimination au préjudice de M. Y, sans avoir indiqué quel élément aurait été illicitement pris en considération par l'employeur pour le discriminer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 6o) en retenant que M. Y était dans la même situation que les salariés concernés par la fermeture de leur site, la cour d'appel a statué par voie d'affirmation, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.

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