CIV. 1
C.M.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 15 mai 2002
Rejet
M. LEMONTEY, président
Pourvoi n° D 00-13.527
Arrêt n° 745 FP+B+R+I
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la Banque nationale de Paris, devenue BNP Paribas, dont le siège est Paris,
en cassation d'un arrêt rendu le 11 janvier 2000 par la cour d'appel de Dijon (1ère chambre civile, section 2), au profit
1°/ de M. Bernard Y, demeurant Dracy-le-Fort,
2°/ de Mme Claude YX, épouse YX, demeurant Dracy-le-Fort,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 avril 2002, où étaient présents M. Lemontey, président, Mme Barberot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Renard-Payen, Aubert, Durieux, Bouscharain, Mme Bénas, MM. Guérin, Sempère, Pluyette, Gridel, Corze, Mme Crédeville, conseillers, Mmes Girard, Cassuto-Teytaud, Catry, conseillers référendaires, Mme Petit, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Barberot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la Banque nationale de Paris, devenue BNP Paribas, de Me Foussard, avocat des époux Y, les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que le 8 novembre 1994, la BNP (la banque), créancière des sociétés Tolec et Vimec, dont M. Y, époux commun en biens, était le dirigeant, a obtenu, au profit de ces sociétés de M. Y, un nantissement de diverses valeurs mobilières pour un montant de 982 800 francs, un nantissement d'un PEA d'une valeur de 503 301 francs, et de Mme Y, un nantissement d'un PEA de même valeur ; que les sociétés ayant fait l'objet d'un redressement judiciaire, la banque a assigné les époux Y devant le tribunal de commerce pour obtenir que les titres nantis lui soient attribués ; que les deux époux Y ont invoqué la nullité de leurs engagements ;
Sur le premier moyen qui est de pur droit
Attendu que la BNP Paribas, venant aux droits de la BNP, fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Dijon, 11 janvier 2000) d'avoir dit applicable aux nantissements l'article 1415 du Code civil, alors, selon le moyen, que les dispositions de ce texte ne sont pas applicables au nantissement pur et simple ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé, par fausse application, ce texte ;
Mais attendu que le nantissement constitué par un tiers pour le débiteur est un cautionnement réel ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel, qui a constaté que les époux Y avaient donné en nantissement auprès de la banque des titres en garantie des dettes des deux sociétés, a décidé que ces nantissements étaient soumis à l'article 1415 du Code civil, ce dont il résultait qu'ils leur étaient inopposables en tant qu'ils portaient sur des biens communs ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches
Attendu que la banque fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen
1°/ qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que chacun des époux Y avait le même jour donné en nantissement à la BNP diverses valeurs mobilières et titres en garantie des mêmes engagements des sociétés Tolec et Vimec ; qu'en retenant, néanmoins, que chacun desdits époux n'avait pu engager les biens communs, faute d'avoir recueilli le consentement de l'autre, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1415 du Code civil ;
2°/ qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est limitée à rechercher la présence, dans le texte même des actes de nantissements litigieux, d'une mention écrite comportant le consentement exprès de l'autre conjoint, sans rechercher, ainsi qu'il lui était pourtant expressément demandé, si la preuve du consentement de chacun des époux Y ne ressortait pas des circonstances de la cause et, plus particulièrement, si elle n'était pas rapportée par le seul fait qu'ils aient, au même moment, garanti les mêmes dettes des mêmes sociétés par l'engagement de l'ensemble des valeurs mobilières dont ils étaient chacun titulaires pour le compte de la communauté légale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1415 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté, tant par motifs propres qu'adoptés, que les nantissements avaient été consentis unilatéralement par chaque époux, a justement estimé que ces actes n'établissaient pas à eux seuls, le consentement exprès de chacun des époux à l'engagement de caution de l'autre, de sorte que l'article 1415 du Code civil devait s'y appliquer ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Banque nationale de Paris aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille deux.