SOC.
PRUD'HOMMESC.B.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 26 février 2002
Cassation partielle
M. MERLIN, conseiller doyen faisant fonctions de président
Pourvoi n° E 00-41.381
Arrêt n° 771 F D
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Roy Z, demeurant Saint-Marcel-lès-Valence,
en cassation d'un arrêt rendu le 10 janvier 2000 par la cour d'appel de Grenoble (Chambre sociale), au profit de la société Euroloisirs, sous l'enseigne Castorama, société anonyme dont le siège est Valence,
défenderesse à la cassation ;
La société Euroloisirs a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 15 janvier 2002, où étaient présents M. Merlin, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Finance, conseiller rapporteur, M. Soury, Mme Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Finance, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Euroloisirs, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z a été embauché le 9 août 1987 par la société Euroloisirs, exploitant sous l'enseigne Castorama, en qualité de conseiller de vente, pour devenir chef de rayon ; qu'il a été licencié le 22 octobre 1996 ; que, contestant le bien-fondé de cette mesure, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le pourvoi principal de M. Z
Attendu que ni la déclaration de pourvoi, ni aucun autre écrit remis au greffe de la Cour de Cassation ne comporte l'énoncé d'un moyen de cassation de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Déclare non admis le pourvoi principal ;
Sur le pourvoi incident de la société Euroloisirs
Sur le premier moyen
Attendu que la société Euroloisirs fait grief à l'arrêt d'avoir donné mission à l'expert, à défaut d'indication concernant le nombre d'heures de travail correspondant au forfait, de quantifier le nombre hebdomadaire et mensuel d'heures de travail de M. Z et de calculer les sommes dues en fonction des majorations légales et des repos compensateurs, alors, selon le moyen
1°/ qu'en énonçant qu'il "ne ressort pas de la lecture des documents contractuels qu'une convention de forfait respectant les critères précités ait été convenue", la cour d'appel qui fait de surcroît entièrement abstraction des dispositions de la convention collective expressément invoquées, selon lesquelles "étant donné le rôle dévolu aux agents de maîtrise, il est fréquent que leurs heures de présence ne puissent" être fixées d'une façon rigide ; elles correspondent aux nécessités de l'organisation du travail et de la surveillance de son exécution" et les appointements des agents de maîtrise ont un caractère forfaitaire et tiennent compte des dépassements d'horaires liés à la fonction" et ne met pas ainsi la Cour de Cassation en mesure de savoir si le contrat de travail intégrait ou non un tel forfait, prive sa décision de base légale au regard des articles 11 et suivants de ladite convention collective ;
2°/ que la rémunération forfaitaire est licite pour autant qu'elle permette au salarié de percevoir, au moins, la rémunération à laquelle il peut légalement prétendre, y compris les majorations prévues pour les heures supplémentaires et que sa licéité suppose donc nécessairement une comparaison entre le forfait et le salaire minimum conventionnel augmenté des heures supplémentaires ; que méconnaît ce principe en violation des articles L. 212-5 et suivant du Code du travail l'arrêt qui énonce, au contraire, que "la rémunération forfaitaire retenue est au minimum égale à la rémunération que le salarié percevrait si toutes les heures de travail étaient rémunérées selon les modalités habituelles avec application d'une majoration pour les heures supplémentaires" et qui décide en conséquence d'allouer la majoration légale calculée sur la base du salaire contractuel pour toute heure effectuée en sus de l'horaire normal, sans qu'il y ait lieu de se référer au salaire minimum conventionnel ;
Mais attendu que la décision qui ordonne une mesure d'instruction ne peut être frappée de pourvoi en cassation indépendamment du jugement sur le fond que dans les cas spécifiés par la loi ;
Et attendu que la cour d'appel, statuant sur la demande en paiement d'heures supplémentaires et repos compensateur, s'est bornée, en son dispositif, à ordonner une mesure d'expertise ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le second moyen
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour accueillir la demande du salarié en paiement d'une somme au titre des primes PIR et PIP, la cour d'appel énonce que la société Euroloisirs n'a opposé aucune contradiction à la réclamation de primes par M. Z ; qu'il faut donc considérer cette réclamation comme légitime ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur avait conclu au débouté du salarié de l'ensemble de ses demandes, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Euroloisirs à payer au salarié une somme à titre de primes, l'arrêt rendu le 10 janvier 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille deux.