COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
Opp. Taxes
ORDONNANCE SUR CONTESTATION
D'HONORAIRES D'AVOCATS
DU 22 OCTOBRE 2013
N°2013/ 683
Rôle N° 13/04790
Julienne Z épouse Z
C/
Marie-Séverine GRUTMAN
Grosse délivrée
le
à
Madame Julienne Z épouse Z
Madame Marie-Séverine Y
Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel
Décision fixant les honoraires de Mme Marie-Séverine Y rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Toulon, en date du 14 février 2013
DEMANDERESSE
Madame Julienne Z épouse Z,
demeurant TOULON
comparante en personne
DÉFENDERESSE
Madame Marie-Séverine Y, avocat
demeurant TOULON
comparant en personne
*-*-*-*-*
DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ
L'affaire a été débattue le 11 Septembre 2013 en audience publique devant
Monsieur Jean Yves MARTORANO, Conseiller,
délégué par Ordonnance du Premier Président.
Greffier lors des débats Madame Jessica FREITAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Octobre 2013.
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 22 Octobre 2013,
Signée par Monsieur Jean Yves MARTORANO, Conseiller et Madame Jessica FREITAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ
Vu le recours formé par Madame Julienne Z née Z par lettre recommandée expédiée le 05 mars 2013 et enregistré au greffe le 06 mars 2013, contre la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Toulon, en date du 14 février 2013, notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postée le 15 février 2013, qui a fixé à la somme de 2.500 euros ( sans TVA) les honoraires dus à Maître Marie-Séverine Y ;
Vu ladite décision de taxe, rendue sur demande de Maître X formée par lettre reçue au secrétariat de l'ordre le 23 octobre 2012, après recueil des observations des parties, par référence aux dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, c'est à dire, selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et de ses diligences dans une affaire de droit des assurances pour laquelle Maître X avait été commise au titre de l'aide juridictionnelle totale ultérieurement retirée partiellement, mais estimant que l'absence de convention d'honoraires n'était pas imputable à l'avocat et que ce dernier avait obtenu un excellent résultat ;
Vu, développées oralement, les conclusions en date du 11 septembre 2013 par lesquelles Madame Z née Z reprenant l'argumentation développée devant le bâtonnier, soutient qu'alors que, pour la procédure intentée contre le GAN, assureur d'un immeuble dont elle était usufruitière, et qui lui refusait la prise en charge de dégâts consécutifs à un événement climatique, elle a bénéficié, de l'aide juridictionnelle totale, dont elle ignorait le retrait partiel, elle a activement collaboré à la rédaction des écritures pour faciliter la tâche de Maître Marie-Séverine XY, désignée au titre de cette aide juridictionnelle, précise avoir refusé de signer la convention d'honoraires proposée par cette dernière après le jugement et qui a, en rétorsion, illégalement retenu les sommes qui lui avait été allouées par le tribunal et a, de surcroît, diligenté une procédure de saisie sur ses comptes bancaires, souligne que ses revenus sont modestes ( 675 euros de retraite mensuelle et une complémentaire de 82 euros ) et sollicite la fixation des honoraires litigieux à la somme de 850 euros diminuée de la contribution de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;
Vu, développées oralement, les conclusions en date du 11 septembre 2013 par lesquelles Maître Marie-Séverine XY reproche à Madame Julienne Z née Z de ne pas l'avoir avisée du retrait partiel de l'aide juridictionnelle en sorte que ce n'est qu'au moment où elle a sollicité le paiement de la contribution de l'Etat qu'elle a su que cette aide juridictionnelle avait été réduite à 15%, soit 47,25 euros, par décision du 08 avril 2011, l'empêchant ainsi de lui proposer une convention d'honoraires, rappelle ses diligences et demande, outre la confirmation de la décision critiquée du bâtonnier, la condamnation de Madame Z née Z au paiement d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de droit d'ester en justice et 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
SUR QUOI
- sur la recevabilité
Attendu que les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité du recours formé dans les délais et selon les formes prescrites par l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 et qui sera en conséquence déclaré recevable ;
- sur le fond
Attendu que le bâtonnier a rendu sa décision dans le délai de quatre mois dont il disposait et après avoir recueilli préalablement les observations de l'avocat et de la partie ; que sa décision est dés lors régulière en la forme ;
Attendu que l'article 35 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dispose qu'en cas d'aide juridictionnelle partielle, l'avocat a droit, de la part du bénéficiaire, à un honoraire complémentaire librement négocié et que dans ce cas une convention écrite préalable fixe, en tenant compte de la complexité du dossier, des diligences et des frais imposés par la nature de l'affaire, le montant et les modalités de paiement de ce complément d'honoraires, dans des conditions compatibles avec les ressources et le patrimoine du bénéficiaire et ajoute que la convention rappelle le montant de la part contributive de l'Etat (...) indique les voies de recours ouvertes en cas de contestation et qu'à peine de nullité, elle est communiquée dans les quinze jours de sa signature au bâtonnier qui contrôle sa régularité ainsi que le montant du complément d'honoraires ;
Que selon l'article 99 du décret n°91-1266 du 19 décembre 1991, à défaut d'accord sur le montant de l'honoraire complémentaire entre le bénéficiaire de l'aide et l'avocat, le bâtonnier se prononce selon les formes prévues pour la contestation des honoraires des avocats ;
Attendu que c'est dans ce cadre légal que le bâtonnier était saisi par Maître Marie-Séverine XY et devait statuer, selon les formes prévues pour la contestation des honoraires des avocats en fixant un honoraire complémentaire à la contribution versée par l'Etat ainsi que les modalités de son paiement, en tenant compte des critères susvisés complexité du dossier, diligences et frais imposés par la nature de l'affaire, ressources et patrimoine du bénéficiaire, et non en application des critères ( certes voisins dans leur formulation mais pas identiques ) de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 ;
Attendu qu'il résulte des pièces versées au débat, ainsi que de l'attestation établie le 23 septembre 2013 par le secrétaire du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Toulon transmise en cours de délibéré dans le respect du principe de la contradiction, que l'aide juridictionnelle totale qui avait été accordée à Madame Julienne Z née Z sous le n° 2010/006116 le 07 janvier 2011 pour l'action devant le tribunal de grande instance de Toulon contre le GAN, et qui avait désigné Maître Marie-Séverine XY pour diligenter cette procédure, a fait l'objet d'une décision de retrait partiel avec diminution à 15 %, le 08 avril 2011 ; que Madame ... a reçu la notification de cette décision de retrait le 10 mai 2011 puisque c'est à cette date qu'elle a signé l'accusé de réception de la lettre de notification ;
Que c'est donc à juste titre que Maître Marie-Séverine XY reproche à Madame ... de ne l'avoir tenue informée de cette situation nouvelle ;
Que cependant dés le 19 avril 2012 Maître Marie-Séverine XY - qui affirme n'avoir eu connaissance qu'en septembre 2012, de la décision de retrait partiel de l'aide juridictionnelle totale dont bénéficiait sa cliente - adressait à cette dernière ( qu'elle croyait donc toujours bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale) une proposition de convention d'honoraires sans avertir cette dernière qu'une décision de retrait de ladite aide juridictionnelle totale était nécessaire avant qu'un quelconque honoraire puisse lui être versé ; qu'agissant ainsi Me X violait l'article 32 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Attendu que lorsqu'elle a appris le retrait de l'aide juridictionnelle totale avec réduction de cette aide à 15 %, Maître Marie-Séverine XY devait, en application de l'article l'article 35 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, proposer une convention d'honoraires à sa cliente, et, en cas de refus de cette dernière, soumettre le différend au bâtonnier en vue de la fixation de l'honoraire complémentaire à la contribution de l'Etat auquel elle avait effectivement droit ;
Attendu que Maître Marie-Séverine XY n'a pas présenté une demande en ce sens à son bâtonnier mais une demande 'classique ' de fixation d'honoraires par application de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 ;
Que, de surcroît, sur le fondement de la décision rendue par ce bâtonnier, [ dont il est légitime de se demander si elle constitue ' une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire ' au sens de l'article L511-2 du code des procédures civiles d'exécution ] Maître Marie-Séverine XY a fait diligenter, sans autorisation du juge de l'exécution, une saisie conservatoire entre les mains de la CARPA ;
Attendu, dans ces conditions, que c'est vainement que Maître Marie-Séverine XY reproche à son ancienne cliente un abus de son droit d'interjeter appel ;
Attendu qu'il convient de fixer l'honoraire complémentaire à la contribution de l'Etat, s'élevant à 47,25 euros pour une aide juridictionnelle partielle à 15%, revenant à Maître Marie-Séverine XY, eu égard à la complexité du dossier, aux diligences et aux frais imposés par la nature de l'affaire, et de déterminer le montant et les modalités de paiement de ce complément d'honoraires, dans des conditions compatibles avec les ressources et le patrimoine de Madame Julienne Z née Z ;
Qu'il s'agissait d'une instance devant le tribunal de grande instance de Toulon relative au refus par le GAN, assureur, de prendre en charge les frais de réparation d'une toiture endommagée aux motifs qu'il y avait eu fausse déclaration au moment de la conclusion du contrat et que la réparation avait été effectuée avant passage de l'expert ;
Que cette procédure, qui ne présentait pas difficulté juridique majeure, n'a pas entraîné de frais particuliers pour l'avocat autre que les copies de pièces à produire et à communiquer ;
Que, dans ces conditions, l'honoraire complémentaire revenant à Maître Marie-Séverine XY qui a rédigé une assignation, des conclusions et un bordereau de pièces communiquées, doit être fixé à la somme de 1.600 euros, sans TVA puisque cette avocate déclare ne pas y être soumise ; que cette somme est compatible avec le patrimoine de Madame Julienne Z née Z qui, selon les conclusions que le GAN a établies dans l'instance ayant donné lieu au jugement du 05 avril 2012, possède plusieurs immeubles assurés auprès de cette compagnie ; qu'un étalement du paiement de cette somme n'est donc pas nécessaire alors, de surcroît, que Madame Julienne Z née Z a pu faire l'avance de la somme de 7.803,41 euros pour la réparation de la toiture de sa résidence secondaire ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser chacune des parties supporter l'intégralité de ses frais non compris dans les dépens;
Attendu que les dépens seront à la charge de la partie succombante.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, sur recours en matière de contestation d'honoraires,
Déclarons recevable le recours formé par Madame Julienne Z née Z,
Infirmant la décision rendue le 14 février 2013 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Toulon et statuant à nouveau
Faisant application de l'article 35 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991
Fixons l'honoraire complémentaire à la contribution de l'Etat s'élevant à 47,25 euros due au titre de l'aide juridictionnelle partielle à 15% accordée à Madame Julienne Z née Z par décision du 08 avril 2011 modificative de la décision n° 2010/006116 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Toulon du 07 janvier 2011, à la somme de 1.600,00 euros ( mille six cents euros) sans taxe ;
Disons n'y avoir lieu à aménagement du paiement de cette somme ;
Rejetons la demande en dommages et intérêts présentée par Maître Marie-Séverine XY ;
Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons Madame Julienne Z née Z aux dépens.
Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence à la date indiquée ci-dessus dont les parties comparantes avaient été avisées à l'issue des débats.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT