Jurisprudence : TA Dijon, du 07-05-2024, n° 2201546


Références

Tribunal Administratif de Dijon

N° 2201546

1ère chambre
lecture du 07 mai 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 14 juin 2022, Mme C A demande au tribunal :

1°) d'annuler la décision de la direction générale des douanes du 17 février 2022 rejetant son recours auprès de la commission administrative paritaire nationale (CAPN) suite à sa demande relative à l'octroi d'un jour de télétravail flottant, selon un contingent de 43 jours par an ;

2°) de faire droit à sa demande.

Elle soutient que :

- la décision n'a pas respecté la procédure d'instruction des demandes, faute d'examen individualisé de sa situation ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle ne respecte pas le processus de refus, la décision ayant été prise avant qu'elle soit reçue en entretien et notifiée par mail, sans accusé de réception ;

- sa demande n'est pas incompatible avec le bon fonctionnement du service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête est formée contre une décision qui ne présente pas le caractère d'une décision faisant grief et n'est dès lors pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par courrier du 8 avril 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative🏛, de ce que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la décision attaquée constitue une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours contentieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique.

- le décret n°82-451 du 28 mai 1982🏛 ;

- le décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 ;

- l'arrêté du 22 juillet 2016 porte application, dans les ministères économiques et financiers, de l'article 7 du décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B,

- les conclusions de Mme Ach, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A, agente de constatation de première classe des douanes, affectée au service de viticulture de Mâcon, bénéficie d'une autorisation de télétravail fixe d'un jour hebdomadaire qui lui a été accordée le 27 septembre 2021. Le 28 septembre 2021, elle a déposé une demande complémentaire d'autorisation de télétravail portant sur 43 jours flottants annuels. Cette demande a été refusée par décision de sa cheffe de bureau le 29 septembre 2021. Mme A a formé un recours gracieux contre cette dernière décision, qui a été rejeté le 12 octobre 2021, puis un recours hiérarchique, également rejeté, le 25 octobre 2021. Elle a saisi la commission administrative paritaire compétente, qui a examiné son recours lors de sa séance du 17 février 2022. Par un courrier du 22 avril 2022 l'administration lui a notifié l'avis défavorable de la commission administrative paritaire. Par la présente requête, Mme A doit être regardée comme contestant la décision par laquelle l'administration lui a refusé la possibilité de télétravailler plus d'un jour par semaine.

2. Aux termes de l'article 2 du décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 dans sa rédaction applicable au litige : " Le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle les fonctions qui auraient pu être exercées par un agent dans les locaux de son employeur sont réalisées hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication. Le télétravail est organisé au domicile de l'agent ou, éventuellement, dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public et de son lieu d'affectation () ". Aux termes de l'article 3 de ce décret, dans sa rédaction applicable au litige : " La quotité des fonctions pouvant être exercées sous la forme du télétravail ne peut être supérieure à trois jours par semaine. Le temps de présence sur le lieu d'affectation ne peut être inférieur à deux jours par semaine () ". Aux termes de l'article 5 de ce décret, dans sa rédaction applicable au litige : " L'exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l'agent. Celle-ci précise les modalités d'organisation souhaitées, notamment les jours de la semaine travaillés sous cette forme ainsi que le ou les lieux d'exercice. Le chef de service, l'autorité territoriale ou l'autorité investie du pouvoir de nomination apprécie la compatibilité de la demande avec la nature des activités exercées, l'intérêt du service et, lorsque le télétravail est organisé au domicile de l'agent, la conformité des installations aux spécifications techniques précisées par l'employeur. () La durée de l'autorisation est d'un an maximum. L'autorisation peut être renouvelée par décision expresse, après entretien avec le supérieur hiérarchique direct et sur avis de ce dernier (). () il peut être mis fin à cette forme d'organisation du travail, à tout moment et par écrit, à l'initiative de l'administration ou de l'agent, moyennant un délai de prévenance de deux mois. Dans le cas où il est mis fin à l'autorisation de télétravail à l'initiative de l'administration, le délai de prévenance peut être réduit en cas de nécessité du service dûment motivée () Le refus opposé à une demande initiale ou de renouvellement de télétravail formulée par un agent exerçant des activités éligibles fixées par l'un des actes mentionnés à l'article 7 ainsi que l'interruption du télétravail à l'initiative de l'administration doivent être précédés d'un entretien et motivés ".

3. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, en ce compris les modalités selon lesquelles ils les accomplissent, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable.

4. La décision attaquée, qui accorde à Mme A le renouvellement de l'exercice de ses fonctions en télétravail à hauteur d'un jour par semaine, au lieu d'un jour fixe et 42 jours flottants sollicités, n'entraîne pour la requérante ni diminution de ses responsabilités, ni perte de rémunération. Elle ne porte pas davantage atteinte aux droits statutaires ou aux droits et libertés fondamentaux de l'intéressée, ni ne bouleverse ses conditions de travail. Par suite, cette mesure présente en l'espèce le caractère d'une mesure d'ordre intérieur, qui ne fait pas grief et n'est, en conséquence, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Dès lors, les conclusions tendant à son annulation sont irrecevables.

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision attaquée. Ses conclusions aux fins d'annulation doivent par suite être rejetées.

6. L'exécution du présent jugement n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions en injonction doivent par suite être également rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme C A et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Olivier Rousset, président,

Mme Marie-Eve Laurent, première conseillère,

Mme Valérie Zancanaro, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mai 2024.

La rapporteure,

M-E B

Le président,

O. Rousset

La greffière,

C. Chapiron

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

Pour expédition,

La greffière,

N°2201546

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