MOTIFS DE LA DÉCISION
1- Sur la régularité du contrôle
La clinique reproche à l'URSSAF d'avoir méconnu les dispositions de l'
article R. 243-59 du code de la sécurité sociale🏛 et le principe du contradictoire en lui notifiant une mise en demeure le 24 août 2015 avant même d'avoir répondu aux observations qu'elle lui avait présentées le 6 juillet 2015.
Elle ajoute que cette irrégularité entraîne la nullité du contrôle et du redressement, sans régularisation possible.
L'URSSAF reconnaît que la mise en demeure du 24 août 2015 a été adressée sans que l'inspecteur du recouvrement ait répondu aux observations adressées par la clinique dans le délai imparti de 30 jours. Elle fait néanmoins valoir que la procédure a été régularisée par l'envoi de la mise en demeure du 18 septembre 2015 annulant et remplaçant celle du 24 août 2015.
Sur ce :
Les formalités de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, destinées à assurer le caractère contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense, sont considérées comme étant substantielles et leur omission entraîne la nullité tant des opérations de contrôle et de redressement que de la procédure subséquente (
Civ. 2ème, 6 avril 2004 pourvoi n° 02-30.863⚖️ ; 3 avril 2014, pourvoi n°
13-11.516⚖️)
Selon l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au contrôle, lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant a répondu avant la fin du délai imparti aux observations des inspecteurs de l'URSSAF, la mise en recouvrement des cotisations, majorations et pénalités ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant qu'il ait été répondu par l'inspecteur du recouvrement aux observations de l'intéressé.
Il en résulte en l'espèce que, délivrée alors que l'inspecteur du recouvrement n'avait pas répondu aux observations de la société présentées le 6 juillet 2015, soit dans le délai de 30 jours à compter de la réception de la lettre d'observations du 15 juin 2015, la mise en demeure du 24 août 2015 est entachée de nullité. (
2e Civ., 28 novembre 2019, pourvoi n° 18-20.386⚖️)
Tirant elle-même les conséquences de la délivrance prématurée de la mise en demeure du 24 août 2015, l'URSSAF a adressé une nouvelle mise en demeure le 18 septembre 2015 précisant qu'elle annulait et remplaçait la précédente.
L'URSSAF ayant ainsi procédé à la notification d'une nouvelle mise en demeure postérieurement à l'envoi à la clinique, le 4 septembre 2015, de la réponse aux observations formulées par celle-ci à la suite de la communication des résultats du contrôle, la mise en recouvrement des sommes objet du redressement répond aux exigences du texte susvisé. (
2e Civ., 6 juillet 2017, pourvoi n° 16-19.384⚖️)
Les premiers juges doivent par conséquent être approuvés en ce qu'ils ont considéré que l'organisme social avait régularisé la procédure.
2- Sur la régularité de la lettre d'observations
La clinique conclut à la nullité du redressement au motif que la lettre d'observations ne la met pas en mesure de connaître l'étendue de ses obligations, de vérifier le redressement et de le contester, faute de préciser la nature des erreurs, de comporter des observations claires et précises pour chaque chef retenu et de communiquer des éléments de calcul ; que reposant sur des constatations qui ne sont pas corroborées par des éléments probants et qui ne sont pas circonstanciées, ladite lettre d'observations ne respecte pas le principe du contradictoire et doit à ce titre être annulée.
L'URSSAF réplique que chaque chef de redressement de la lettre d'observations est parfaitement circonstancié en fait et en droit et respecte les prescriptions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale ; que le jugement entrepris ayant retenu que la clinique avait été en mesure de connaître les omissions ou erreurs reprochées ainsi que les bases du redressement pour lui permettre d'en discuter, doit en conséquence être confirmé.
Sur ce :
Selon l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale :
"A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 envisagés. En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, il précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L. 243-7-6. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l'employeur ou du travailleur indépendant. Le constat d'absence de mise en conformité et le constat d'absence de bonne foi sont contresignés par le directeur de l'organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu'il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix."
La jurisprudence constante de la Cour de cassation n'exige pas pour autant que la lettre d'observations fournisse des indications détaillées sur chacun des chefs de redressement ou sur leur mode de calcul (
2e Civ., 20 juin 2007, pourvoi n°06-16.227⚖️ ;
2e Civ., 12 juillet 2018, pourvoi n° 17-10.327⚖️) ; il n'y a pas lieu davantage d'indiquer le nombre de salariés concernés par chaque chef de redressement (
2e Civ., 15 septembre 2016, pourvoi n°15-22.146⚖️).
A titre liminaire, il sera relevé que les critiques portées par la société à l'encontre des mentions de la lettre d'observations ne visent pas le chef n°6 "Rupture conventionnelle du contrat de travail - condition relative à l'âge du salarié " ; le jugement entrepris ne l'évoque pas davantage lorsqu'il reprend, chef par chef, les énonciations de l'inspecteur pour déterminer si la lettre d'observations respecte les prescriptions de l'article R. 249-53 précité.
C'est au terme d'une motivation pertinente et que la cour adopte, que le jugement entrepris, après une analyse précise et détaillée, pour chaque chef contesté, des mentions de la lettre d'observations du 15 juin 2015 rappelant les textes applicables, les développements sur la méthode d'application des règles en vigueur et les constatations sur place justifiant le redressement, les bases de calcul des régularisations envisagées et la ventilation par années de cotisations, retient que la clinique a été en mesure de connaître les omissions ou erreurs reprochées ainsi que les bases et les modes de calcul du redressement envisagé pour lui permettre de les discuter.
La lettre d'observations précise par ailleurs la possibilité pour la société de faire part de ses observations par lettre recommandée avec accusé de réception dans le délai de trente jours, et pour ce faire, de la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix.
La lettre d'observations répond ainsi aux exigences prescrites.
Les premiers juges seront dès lors approuvés en ce qu'ils ont débouté la société de sa demande d'annulation du redressement fondée sur la nullité de la lettre d'observations. 3- Sur le bien-fondé du redressement Le litige porte sur deux chefs de redressement :
- "prévoyance supplémentaire : non-respect du caractère obligatoire" (chef n°7) ;
- "plafond temps partiel : abattement d'assiette plafonnée" (chef n°8).
3-1 Sur le chef "prévoyance supplémentaire : non-respect du caractère obligatoire" (184 256 euros)
Lors de ses opérations, l'inspecteur du recouvrement a constaté ce qui suit :
"Une décision unilatérale de l'employeur institue un régime complémentaire de remboursement de frais de santé médicaux pour l'ensemble du personnel.
La faculté de refuser d'adhérer au régime est ouverte aux salariés en contrat à durée déterminée.
Cependant la faculté d'adhérer au contrat de mutuelle n'est pas offerte aux contrats à durée déterminée. Aucune demande de dispense n'a pu être présentée.
Le caractère obligatoire est donc remis en cause ainsi que l'exonération de la contribution patronale. Cette dernière est réintégrée dans l'assiette des cotisations."
Les premiers juges ont retenu que la clinique ne justifiant pas des demandes de dispense d'affiliation au régime de prévoyance mis en place par décision unilatérale, le redressement était fondé en son principe.
Relevant néanmoins que la clinique justifiait de l'adhésion de 14 salariés en contrat à durée déterminée, ce dont il se déduisait que l'information leur avait bien été communiquée, le tribunal a limité le redressement à 1,5 fois le montant des sommes faisant défaut, sur la base des calculs à établir par l'autorité de contrôle.
L'URSSAF reproche aux premiers juges d'avoir ainsi minoré le montant du redressement en application de l'article L. 134-2-8 1° du code de la sécurité sociale alors que, selon elle, les dispositions applicables sont celles du 2° de ce texte, de sorte que ce chef de redressement s'établit bien à 184 256 euros. Selon elle, le redressement ne repose pas seulement sur l'absence de production des demandes de dispense des salariés mais également sur le fait que l'adhésion au régime mis en place n'est pas proposée aux salariés embauchés en contrat à durée déterminée, dont le nombre, ne serait-ce qu'en 2012, a largement dépassé celui des 14 salariés mentionnés. Il ne peut donc être retenu une simple méconnaissance des règles, cette méconnaissance étant au contraire d'une particulière gravité, de sorte que la proratisation à hauteur de 1,5 fois le montant des sommes faisant défaut doit être écartée. Enfin, l'absence de redressement sur ce point lors des contrôles menés en 2010 et 2018 ne saurait exonérer la clinique de son obligation.
La société, pour sa part, conclut à la confirmation du jugement entrepris dès lors que l'article L. 134-2-8 prévoit que le montant du redressement doit être limité à 1,5 fois le montant des sommes faisant défaut lorsque l'employeur n'est pas, comme au cas particulier, en mesure de présenter les demandes de dispense d'affiliation.
Selon elle, il résulte des dispositions de l'
article R. 242-1-6 du code de la sécurité sociale🏛 que la seule obligation pesant sur l'employeur pour justifier du caractère collectif et obligatoire du régime de prévoyance est de justifier d'un document de dispense d'adhésion du salarié mentionnant que ce dernier a été informé des conséquences de son choix.
Elle ajoute qu'en l'occurrence, il était remis, lors de l'embauche, à chaque salarié, quelque soit son statut, un kit comprenant notamment l'ensemble des informations relatives au régime de prévoyance ainsi que la possibilité d'y adhérer.
Enfin, elle fait valoir l'absence de tout redressement sur cette question lors d'un précédent contrôle de 2010 et d'un contrôle postérieur de 2018.
Sur ce :
L'
article L. 242-1 alinéa 6 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa version applicable au litige dispose :
"[...] Sont exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit par les organismes régis par les titres III et IV du livre IX du présent code ou le livre II du code de la mutualité, par des entreprises régies par le code des assurances ainsi que par les institutions mentionnées à l'
article L. 370-1 du code des assurances🏛 et proposant des contrats mentionnés à l'article L.143-1 dudit code, à la section 9 du chapitre II du titre III du livre IX du code de la sécurité sociale ou au chapitre II bis du titre II du livre II du code de la mutualité lorsque ces garanties entrent dans le champ des articles L.911-1 et L. 911-2 du présent code, revêtent un caractère obligatoire et bénéficient à titre collectif à l'ensemble des salariés ou à une partie d'entre eux sous réserve qu'ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret en Conseil d'Etat. [...]".
L'exonération des contributions patronales est dès lors subordonnée au caractère collectif et obligatoire du régime de prévoyance.
L'article R. 242-1-6 du code de la sécurité sociale rappelle ce caractère obligatoire, "sous réserve des facultés de dispense d'adhésion au choix du salarié, prévues dans l'acte juridique" et énoncées à la suite ; in fine, il est indiqué que "dans tous les cas, l'employeur doit être en mesure de produire la demande de dispense des salariés concernés ; cette demande comporte la mention selon laquelle le salarié a été préalablement informé par l'employeur des conséquences de son choix".
Au cas particulier, l'inspecteur du recouvrement a bien constaté que le régime de prévoyance mis en place par l'employeur concernait l'ensemble du personnel et que la faculté de refuser d'y adhérer était ouverte aux salariés en contrat à durée déterminée.
Il a cependant remis en cause le caractère obligatoire du dispositif en relevant que la faculté d'adhérer au contrat de mutuelle n'était pas offerte aux salariés en contrat à durée déterminée et que l'employeur ne justifiait pas de demandes de dispense.
Ainsi, comme le fait à juste titre valoir l'URSSAF, le redressement ne repose pas seulement sur l'absence de production des demandes de dispense mais également et surtout sur l'absence de justificatif démontrant que l'adhésion au régime de prévoyance a bien été proposée à l'ensemble des salariés en contrat à durée déterminée.
Les premiers juges doivent être approuvés en ce qu'ils ont considéré que les attestations de Mmes [A] et [X], assistantes ressources humaines, indiquant que chaque salarié, notamment ceux en contrat à durée déterminée, se voyait remettre, lors de son arrivée au sein de l'établissement, un "kit administratif" comprenant notamment un bulletin d'adhésion à [4] et une notice d'information de prévoyance Chorum, ne permettaient pas d'établir le respect des diligences à accomplir. La société ne communique du reste aucun des documents contenus dans ce "kit".
Par ailleurs, si la société produit une liste de 14 salariés en contrat à durée déterminée ayant adhéré et cotisé au régime de prévoyance sur la période contrôlée, comportant le nom et le matricule des salariés concernés et le montant des cotisations versées par chacun d'eux, force est de constater que cette liste est sans commune mesure avec le nombre de salariés en contrat à durée déterminée embauchés au cours de la période contrôlée, la pièce n°12 de l'appelante afférente à l'année 2012 en énonçant à elle seule plusieurs centaines.
Force est donc de constater que la société ne démontre pas avoir proposé à l'ensemble des salariés en contrat à durée déterminée d'adhérer à la mutuelle et ne justifie par ailleurs d'aucune demande de dispense.
Le caractère collectif et obligatoire du régime mis en place par la société n'est donc pas respecté.
La société fait valoir l'absence de redressement sur la prévoyance lors d'un contrôle précédent et d'un contrôle postérieur.
Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à l'espèce, "L'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme."
Comme l'a jugé la
Cour de cassation (2e Civ., 22 septembre 2022, pourvoi n° 21-11.277⚖️), l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en connaissance de cause sur la pratique litigieuse lors de contrôles antérieurs.
L'URSSAF rappelle à bon droit que trois conditions cumulatives doivent être remplies pour pouvoir caractériser un accord implicite :
- une identité de situation,
- une absence d'observations sur le point concerné,
- un silence observé en toute connaissance de cause.
La charge de la preuve de l'existence d'un accord tacite pèse par ailleurs sur celui qui l'invoque.
Force est de constater que l'argument tiré par la société de l'absence de redressement sur le régime de prévoyance lors du précédent contrôle est inopérant dès lors qu'il apparaît à la lecture de la lettre d'observations du 17 septembre 2010 portant sur la période de 2007 à 2009, que l'inspecteur avait relevé que la société ne communiquait aucun contrat nouveau attestant que les contrats de prévoyance étaient conformes à la législation en vigueur au 1er janvier 2009 ; il n'y a donc pas identité de situation avec celle ayant donné lieu au redressement en litige.
L'accord tacite ne vaut bien évidemment pas, par définition, s'agissant du contrôle postérieur effectué en 2018 portant sur les années 2015 à 2017.
L'absence d'observations de l'inspecteur à l'occasion de ce contrôle est en toute hypothèse inopérante dès lors que rien ne permet de penser que la situation n'a pas évolué.
L'inspecteur a procédé à la réintégration de la part patronale dans l'assiette de cotisations, conduisant à un redressement de 184 256 euros.
La société revendique la minoration instituée par l'
article L. 133-4-8 1°du code de la sécurité sociale🏛 et appliquée par les premiers juges.
Selon ce texte, dans sa rédaction issue de la
loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015🏛 applicable aux contrôles engagés à compter du 1er janvier 2016 mais également aux redressements antérieurs n'ayant pas donné lieu à une décision de justice ayant acquis un caractère définitif conformément à la tolérance ministérielle énoncée dans une lettre adressée à l'ACCOS le16 juillet 2018 :
"I.- Les redressements opérés dans le cadre d'un contrôle effectué en application des articles L. 243-7 du présent code et L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime et relatif à l'application des règles liées au caractère obligatoire et collectif des systèmes de garanties de protection sociale complémentaire mentionné au sixième alinéa de l'article L. 242-1 du présent code portent sur le montant global des cotisations dues sur les contributions que les employeurs ont versées pour le financement de ces garanties.
II.-Par dérogation au I du présent article et dans les conditions définies au présent II, l'agent chargé du contrôle réduit le redressement à hauteur d'un montant calculé sur la seule base des sommes faisant défaut ou excédant les contributions nécessaires pour que la couverture du régime revête un caractère obligatoire et collectif, au sens du sixième alinéa de l'article L. 242-1 et des textes pris pour son application, sous réserve que l'employeur reconstitue ces sommes de manière probante.
Le redressement ainsi réduit est fixé à hauteur :
1° D'une fois et demie ces sommes, lorsque le motif du redressement repose sur l'absence de production d'une demande de dispense ou de tout autre document ou justificatif nécessaire à l'appréciation du caractère obligatoire et collectif ;
2° De trois fois ces sommes, dans les cas autres que ceux mentionnés au 1° et lorsque le manquement à l'origine du redressement ne révèle pas une méconnaissance d'une particulière gravité des règles prises en application du sixième alinéa de l'article L. 242-1.
Lorsque le manquement à l'origine du redressement révèle une méconnaissance d'une particulière gravité des règles liées au caractère obligatoire et collectif des systèmes de garanties de protection sociale complémentaire mentionné au même alinéa, l'agent chargé du contrôle en informe l'employeur, en justifiant sa décision dans le cadre de la procédure contradictoire préalable à la fin du contrôle.
Le montant du redressement ainsi établi par l'agent chargé du contrôle ne peut être supérieur à celui résultant de l'assujettissement de l'ensemble des contributions de l'employeur au financement du régime."
C'est toutefois en vain que la société revendique le bénéfice de la minoration énoncée au 1° ci-dessus (1,5 fois le montant des sommes faisant défaut) dès lors qu'il ne s'agit pas de quelques justificatifs de dispense ou d'un autre document qui n'auraient pas été produits par l'employeur, mais bien d'un défaut plus général de justification du respect par la société de son obligation de proposer aux salariés d'adhérer au dispositif de prévoyance mis en place et de production de la moindre dispense qui aurait été établie par ces salariés.
Le jugement entrepris, confirmé en ce qu'il valide (en son principe) ce chef de redressement, sera néanmoins infirmé en ce qu'il fait application de la minoration susvisée.
Le montant du redressement ne pouvant être supérieur à celui résultant de l'assujettissement de l'ensemble des contributions de l'employeur au financement du régime, il y a lieu de fixer ce chef de redressement, opéré après réintégration de l'ensemble de la part patronale, à la somme de 184 256 euros.
3-2 Sur le chef "Plafond temps partiel : abattement d'assiette plafonnée" (102 747 euros)
Au visa des dispositions des
articles L. 3123-14 et L. 3123-1 du code du travail🏛🏛, des
articles L. 242-8 et L. 242-9, R. 242-7-du code de la sécurité sociale🏛🏛🏛, l'inspecteur du recouvrement après avoir rappelé que l'abattement d'assiette s'applique aux salariés dont la rémunération serait supérieure au plafond si l'activité était exercée à temps complet, pour lesquels un contrat de travail écrit prévoit une durée de travail inférieure à la durée légale ou conventionnelle du travail ou aux salariés travaillant pour plusieurs employeurs lorsqu'il n'est pas fait application de la règle du prorata, a constaté qu'un abattement d'assiette plafonnée avait été calculé à tort pour les médecins mentionnés dans l'annexe 2 jointe à la lettre d'observations.
L'inspecteur a retenu que leur durée du travail est fixée en forfait jours, que cette référence entre en contradiction avec le champ d'application des dispositions relatives à l'abattement d'assiette fixée par l'article L. 242-8 du code de la sécurité sociale et en conséquence, que les abattements pratiqués à tort justifiaient un redressement au titre du régime général d'un montant en cotisations de 31 979 euros pour l'année 2012, de 34 058 euros pour l'année 2013 et de 36 710 euros pour l'année 2014.
Constatant ainsi que les médecins étaient embauchés en forfait jour, l'inspecteur en a déduit qu'ils ne pouvaient pas bénéficier de l'abattement d'assiette pour temps partiel.
La société fait tout d'abord valoir que l'URSSAF ne peut sans se contredire reconnaître lors du contrôle opéré en 2018 portant sur les années 2015 à 2017 que les médecins salariés à cette époque pouvaient bénéficier de l'abattement temps partiel et refuser cet abattement pour les années 2012 à 2014 dans le cadre du contrôle en litige alors qu'il s'agit, pour huit d'entre eux, des mêmes praticiens exerçant dans des conditions identiques.
Elle ajoute que contrairement à ce qui est soutenu par l'URSSAF, aucun des médecins concernés n'a conclu une convention de forfait-jours sur l'année et il n'en est du reste aucunement fait mention dans leur contrat de travail.
Elle reproche par ailleurs à l'URSSAF de faire désormais valoir une constatation nouvelle, non contenue dans la lettre d'observations, tirée de ce que les contrats de travail et les avenants produits ne respectent pas les dispositions du code du travail et ne sont donc pas des contrats à temps partiel. Selon elle, ce faisant, l'URSSAF porte atteinte à la formalité substantielle que constitue la communication de ses observations par l'agent de contrôle ayant pour effet de donner un caractère contradictoire à l'enquête, de sauvegarder les droits de la défense et de permettre un apurement souhaitable avant tout recours , de sorte que, pour ce motif, le redressement est sur ce point entaché de nullité.
La société fait valoir, en toute hypothèse, que le caractère irrégulier des mentions des contrats de travail à temps partiel ne permet pas en soi d'écarter le bénéfice de l'abattement temps partiel dès lors qu'il est rapporté la preuve, comme elle le fait, que la durée de travail des salariés concernés est inférieure à la durée légale.
L'URSSAF réplique qu'en faisant valoir que les contrats de travail et leurs avenants ne respectent pas les dispositions du code du travail en ce qu'il n'y est pas mentionné la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine, elle n'a pas changé le fondement juridique du chef de redressement, lequel procède de ce que la société ne justifie pas de ce que les médecins sont à temps partiel et ouvrent droit, partant, au bénéfice de l'abattement.
Sur ce :
La société fait exactement valoir qu'aucun des contrats de travail ou avenants des médecins concernés, versés aux débats (pièces 19 et suivantes), ne mentionne une convention de forfait-jours contrairement à ce qu'a retenu l'inspecteur.
Ce constat erroné de l'inspecteur du recouvrement est cependant sans incidence sur la validité du chef de redressement dès lors que le point en litige reste le droit pour la clinique de pratiquer l'abattement temps partiel au titre des contrats de travail des médecins concernés, étant rappelé que c'est bien à la cotisante de justifier qu'elle remplit les conditions énoncées aux articles L. 3123-1 et L. 3123-14 du code du travail et aux articles L. 242-8 et L. 242-9 du code de la sécurité sociale, du reste visées par l'inspecteur dans la lettre d'observations.
L'article L.242-8 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige dispose que :
'Pour le calcul des cotisations de sécurité sociale dues au titre des salariés employés à temps partiels au sens de l'
article L.212-4-2 (devenu L. 3123-1 et D. 3123-1) du code du travail🏛, et qui sont déterminées compte tenu du plafond prévu à l'article L.241-3, il est opéré un abattement d'assiette destinée à compenser la différence entre le montant des cotisations dues au titre de chacun de ses salariés et le montant des cotisations qui seraient dues pour une durée de travail identique dans le cas ou chacun d'eux travaillerait à temps complet.'
L'article L.3123-1 du code du travail dispose que :
'Est considéré comme salarié à temps partiel le salarié dont la durée de travail est inférieure :
1° à la durée légale du travail ou, lorsque cette durée est inférieure à la durée légale, à la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise. ou à la durée du travail applicable dans l'établissement ;
2° à la durée mensuelle résultant de l'application, sur cette période, de la durée légale du travail, ou, si elle est inférieure, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou de la durée du travail applicable dans l'établissement ;
3° à la durée de travail annuelle résultant de l'application, sur cette période, de la durée légale du travail, soit 1607 heures, ou, si elle est inférieure, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou de la durée du travail applicable dans l'établissement.'
L'article L.3123-14 du même code prévoit que le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne notamment la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application des articles L. 3123-25 et suivants, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
C'est à tort que la société soutient qu'aucune condition en lien avec le formalisme du contrat de travail à temps partiel n'est imposée pour bénéficier de l'abattement visé à l'article L. 242-8 précité.
Dès lors en effet que cet abattement s'applique aux salariés à temps partiel au sens de l'
article L. 3124-1 du code du travail🏛, c'est bien au regard de tout ce qui caractérise le contrat de travail à temps partiel qu'il convient de se prononcer.
Il incombe par conséquent à la clinique de rapporter la preuve non seulement de la durée exacte du travail convenu mais également de sa répartition sur la semaine ou le mois.
Or, force est de constater que l'appelante ne fait pas cette démonstration, les contrats de travail et avenants des médecins concernés versés aux débats ne comportant notamment aucune répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; la clinique n'établit pas non plus que les salariés étaient en mesure de connaître leur rythme de travail.
La seule mention dans certains de ces contrats qu'il s'agit d'un 'temps partiel' (ex : contrats des docteurs [K], [Y], [T], [Z]) ou d'un 'mi-temps' (ex : contrat du docteur. [E]) ou du nombre de vacations au cours de la semaine ou du mois (ex : contrats des docteurs [J], [F], [W], [G], [Y]) est à cet égard insuffisante.
Est également inopérant, pour écarter la présomption d'un travail à temps complet le fait de prouver, grâce aux bulletins de paie, que la durée du travail a été inférieure à la durée légale du travail (
Soc. 9 janvier 2013, pourvoi n°11-16.433⚖️) ; les bulletins de paie sont en effet établis après l'exécution du travail et ne font que refléter a posteriori les conditions d'exécution de la prestation et non la prévisibilité des rythmes de travail.
L'absence d'observations de l'inspecteur quant à l'application de l'abattement temps partiel à l'occasion d'un contrôle opéré en 2018 portant sur les années 2015 à 2017, si ce n'est pour retenir que le plafond n'avait pas été calculé correctement, est tout aussi inopérant dès lors que rien ne permet de penser que la situation des médecins concernés, dont certains sont effectivement les mêmes, n'a pas évolué.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'aucun abattement d'assiette ne pouvait être appliqué et que ce chef de redressement, pour un montant de 102 747 euros, devait être confirmé.
4- Sur les majorations de retard
Le redressement étant confirmé, il n'y a pas lieu à annulation des majorations de retard, étant observé que les majorations initiales ont en tout état de cause fait l'objet d'une remise le 22 mars 2016. Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé.
S'agissant des majorations complémentaires, force est de constater que la clinique ne démontre ni même allègue que les conditions exigées pour leur remise sont réunies (cotisations acquittées dans le délai de trente jours qui suit la date limite d'exigibilité ou à titre exceptionnel, en cas d'événements présentant un caractère irrésistible et extérieur). Le jugement sera donc confirmé.
5- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de l'URSSAF ses frais irrépétibles.
La clinique sera en conséquence condamnée à lui verser à ce titre la somme de 1 000 euros en sus de la somme allouée en première instance.
S'agissant des dépens, l'
article R.144-10 du code de la sécurité sociale🏛 disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.
Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des
articles 695 et 696 du code de procédure civile🏛🏛 relatives à la charge des dépens.
En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la clinique qui succombe pour l'essentiel à l'instance.