COUR DE CASSATION
Deuxième chambre civile
Audience publique du 5 juillet 2001
Pourvoi n° 99-15.244
Mme Elisabeth Z, épouse Z ¢
M. Jean-Marie Z
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par Mme Elisabeth Z, épouse Z, demeurant Metz,
en cassation d'un arrêt rendu le 9 mars 1999 par la cour d'appel de Metz (chambre de la Famille), au profit de M. Jean-Marie Z, demeurant Metz,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience du 6 juin 2001, où étaient présents M. Buffet, président, M. Guerder, conseiller doyen, Mme Solange Gautier, conseiller rapporteur, MM. Pierre, Mazars, conseillers, MM. Trassoudaine, Grignon Dumoulin, conseillers référendaires, M. Joinet, avocat général, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Solange Gautier, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme Z, de la SCP Parmentier et Didier, avocat de M. Z, les conclusions de M. Joinet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu que Mme Z fait grief à l'arrêt attaqué (Metz, 9 mars 1999) d'avoir rejeté sa demande en divorce alors, selon le moyen
1°/ que l'article 259 du Code civil pose le principe de la liberté de la preuve en matière de divorce ; que l'article 205 du nouveau Code de procédure civile pose une exception en prohibant l'audition, aux enquêtes de divorce, des descendants des époux, mais n'interdit nullement la production de lettres dont ces descendants ont été les destinataires ; qu'en l'espèce, en écartant des débats les lettres pourtant injurieuses que, spontanément, le fils des époux avait remis à sa mère, au seul motif qu'il s'agissait de lettres destinées à un des enfants du couple, la cour d'appel a violé les articles 259 du Code civil et 205 du nouveau Code de procédure civile ;
2°/ que l'article 259-1 du Code civil interdit la production des lettres obtenues par fraude ou par violence ; qu'après avoir elle-même relevé que le fils a remis "spontanément" à sa mère les lettres que son père lui a envoyées, la cour d'appel ne pouvait les écarter des débats sans violer également le texte susvisé ;
3°/ que la réconciliation suppose que le comportement prétendument pardonné soit connu de l'autre époux ; qu'en l'espèce, ce n'est qu'après le jugement de première instance, par les lettres que son fils lui a remises, que Mme ... a eu connaissance de la relation adultère que son mari a entretenue lors de leur vie commune ; qu'en se bornant à relever que Mme ... a pardonné l'infidélité de son mari au seul motif qu'elle ne l'a pas invoquée en première instance, sans rechercher à quel moment elle avait eu connaissance de cet adultère, la cour d'Appel a violé, par manque de base légale, l'article 244 du Code civil ;
Mais attendu que la remise par un descendant d'une lettre d'un parent relative aux torts du divorce équivaut au témoignage prohibé par l'article 205 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'après avoir relevé que Mme Z, déboutée de sa demande en divorce par le tribunal, avait reçu de son fils les lettres écrites à celui-ci par son père quatre ans auparavant et qu'elle les avait produites en appel au soutien d'un nouveau grief d'infidélité, la cour d'appel a retenu à bon droit que ces lettres, dont la remise en toute connaissance de cause par Rémy Z à sa mère portait atteinte au principe d'irrecevabilité du témoignage d'un enfant contre l'un de ses parents, devaient être écartées des débats ;
Et attendu que c'est par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve que la cour d'appel a retenu qu'il y avait eu réconciliation des époux depuis les faits litigieux survenus en 1980 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne Mme Z à payer à M. Z la somme de 12 000 francs ou 1 829,39 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille un.