Jurisprudence : Cass. civ. 1, 06-10-1998, n° 95-12.519, inédit, Rejet

Cass. civ. 1, 06-10-1998, n° 95-12.519, inédit, Rejet

A8130AHL

Référence

Cass. civ. 1, 06-10-1998, n° 95-12.519, inédit, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1051460-cass-civ-1-06101998-n-9512519-inedit-rejet
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Civile 1
06 Octobre 1998
Pourvoi N° 95-12.519
société J Smets, société à responsabilité limitée et autres
contre
M. Jacques ... et autres
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par
1 / la société J Smets, société à responsabilité limitée, dont Paris, en cassation d'un arrêt rendu le 21 décembre 1994 par la cour d'appel de Paris (16e Chambre, Section B), au profit
Paris, Paris, 3 / de la société Hausmann Boétie, société civile immobilière, défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 23 juin 1998, où étaient présents M. Lemontey, président, Mme Bénas, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Roehrich, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Bénas, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société J Smets et de M. ..., de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de MM ... et ... et de la société Haussmann Boétie, les conclusions de M. Roehrich, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que MM ... et ... et la société civile immobilière Haussmann-Boétie (SCI) ont, par acte du 23 septembre 1987, chargé la société Egimo (devenue la société Smets), représentée par son gérant, M. ..., de procéder aux formalités nécessaires pour obtenir, conformément aux dispositions de l'article L631-7 du Code de la construction et de l'habitation, l'autorisation de transformer des locaux à usage d'habitation en locaux commerciaux, moyennant le versement d'une somme de 995 000 francs, pour ses frais et honoraires ; que l'autorisation du préfet de Paris accordée le 13 novembre 1989, a été retirée le 10 mai 1991, au motif qu'elle avait été obtenue par fraude et qu'une compensation n'avait pas été réalisée ; qu'un jugement correctionnel du 6 février 1992 a condamné M. ... pour avoir corrompu un fonctionnaire de la préfecture, aux fins d'obtenir des autorisations dans des conditions irrégulières ; que, sur requête de la SCI, un jugement du tribunal administratif du 16 décembre 1993, a annulé la décision de retrait d'autorisation, la preuve n'étant pas rapportée d'une collusion entre l'agent de la préfecture et la société requérante ; que MM. ... et ... et celle-ci ont assigné la société Egimo et M. ..., en remboursement de la commission versée ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 21 décembre 1994), d'avoir prononcé la résolution du contrat et condamné in solidum M. ... et la société Smets à payer la somme de 995 000 francs à MM ... et ... et la SCI, alors que, d'une part, les contreparties ont été effectuées, que l'autorisation de transformer les locaux a été effectivement obtenue et que la décision de retrait de l'autorisation prise par le Préfet a en définitive été annulée ; qu'ainsi, nonobstant des péripéties juridiques, la convention a été intégralement exécutée de sorte que sa résolution ne pouvait être prononcée ; qu'en prononçant cette résolution, la cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil ;
alors que, d'autre part, la corruption qui provoque une fraude éventuelle ne peut atteindre que des relations de nature juridique, mais est insusceptible d'influer sur les faits ; qu'en prononçant la résolution du contrat, au motif que l'exécution de celui-ci, dont elle constatait expressément le caractère définitif et irréversiblement acquis au créancier de l'obligation, n'aurait pu être obtenue que par une fraude commise par l'autre cocontractant à l'égard d'un tiers, la cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil ; alors que, enfin, à supposer que la cour d'appel qui constate que "le résultat contractuel a été tardivement atteint" ait voulu sanctionner ce retard, elle ne pouvait prononcer la résolution judiciaire de la convention, que si ce retard présentait un caractère de gravité suffisant pour justifier cette résolution ; que faute de s'être livrée à une recherche sur le caractère de gravité de ce retard, la cour d'appel a, derechef, violé l'article 1184 du Code civil ;
Mais attendu, sur la troisième branche, que la cour d'appel a retenu que MM ... et ... et la SCI n'avaient pu disposer normalement de leurs nouveaux locaux, qu'après avoir dû soutenir une longue procédure administrative ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le retard dans l'exécution du contrat présentait un caractère de gravité suffisant pour entrainer la résolution du contrat, elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que, dès lors, les première et deuxième branches s'attaquent à des motifs surabondants ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches Attendu qu'il est aussi reproché à l'arrêt d'avoir fait droit à la demande en paiement du montant de la commission versée, alors que, d'une part, les articles 1183 et 1184 du Code civil, impliquent une remise en état après la résolution ; qu'en dispensant MM. ... et ... et la SCI de cette obligation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; alors que, d'autre part, lorsque la remise en état en nature est impossible, les juges du fonds doivent procéder par équivalent ; qu'en accordant l'entière restitution de la commission sans évaluer le prix de la prestation reçue par MM. ... et ... et la SCI et dont ils ont profité, la cour d'appel a encore violé les articles 1183 et 1184 du Code civil ;
alors que, enfin, à supposer qu'une exécution tardive du contrat ait entrainé un préjudice particulier pour MM ... et ... et la SCI, il appartenait à la cour d'appel de le fixer de façon précise pour l'intégrer dans le compte des parties ; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a encore violé les articles 1183 et 1184 du Code civil ;
Mais attendu que, d'une part, la cour d'appel a constaté qu'il était impossible de revenir à la situation antérieure ; que, d'autre part, dans leur conclusions d'appel, la société Smets et M. ... se sont bornés à invoquer un enrichissement sans cause au profit de la SCI et de MM ... et ..., et à demander le versement à chacun d'eux d'une somme de 100 000 francs pour procédure abusive, sans demander le paiement de leurs propres prestations ; qu'enfin, la cour d'appel n'a pas indemnisé la SCI et MM ... et ... du préjudice né du retard dans l'exécution du contrat, mais a tiré les conséquences légales de la résolution du contrat aux torts de la société Smets ;
D'où il suit que le moyen, mal fondé en sa première branche, est nouveau en sa deuxième branche et manque en fait en sa troisième branche ;
Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches Attendu qu'il est enfin reproché à l'arrêt d'avoir condamné in solidum M. ... et la société Smets à payer à MM ... et ... et la SCI la somme de 995 000 francs, alors que, d'une part, en déclarant M. ... tenu de restituer une somme qu'il n'avait pas reçue, la cour d'appel a violé l'article 1165 du Code civil ; alors que, d'autre part, la cour d'appel ne pouvait sans contradiction déclarer M. ... "tenu de réparer le préjudice" et le déclarer dans son dispositif tenu à restitution d'une "prestation contractuelle" ; alors que, enfin, à supposer que M. ... ait été tenu à réparer le préjudice résultant de la mauvaise exécution du contrat, la cour d'appel, qui a constaté expressément que le contrat avait été exécuté et avait produit des effets irrévocablement acquis à la SCI, devait nécessairement évaluer le préjudice réel subi par la SCI, lequel était nécessairement différent du montant de la commission versée par celle-ci pour parvenir au résultat obtenu, avant de le mettre éventuellement à la charge de M. ... ; que la cour d'appel a ainsi violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que s'étant référée au jugement ayant condamné M. ... pour corruption, la cour d'appel a retenu que celui-ci avait commis, à titre personnel et détachable de sa fonction de gérant, des fautes au moyen desquelles sa société n'avait pu exécuter qu'artificiellement et frauduleusement ses obligations contractuelles ; que, de ces constatations et énonciations, elle a pu en déduire que les fautes de M. ..., qui engagent sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, avaient causé à la SCI et à MM ... et ... un préjudice, dont elle a constaté l'existence par la seule évaluation qu'elle en a fait ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société J Smets et M. ... aux dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.

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