Jurisprudence : Cass. crim., 27-10-1997, n° 96-83.698, Rejet

Cass. crim., 27-10-1997, n° 96-83.698, Rejet

A4624AGD

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Criminelle
27 Octobre 1997
Pourvoi N° 96-83.698
... Alain et autres
I REJET des pourvois formés par ... Alain, DutaretJean-Louis, ... Frédéric, ... Louis, ... Jean-Jacques,prévenus, II CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par l'Union fédéraledes consommateurs (UFC) " Que Choisir ", partie civile, contrel'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du9 juillet 1996, qui a condamné Alain ..., pour complicité d'abusde biens sociaux, recels d'abus de biens sociaux, corruption passiveet subornation de témoin, à 5 ans d'emprisonnement, dont 1 an avecsursis, avec mandat d'arrêt, 400 000 francs d'amende, 5 ansd'interdiction du droit de vote et d'éligibilité, Jean-Louis ...,pour abus de biens sociaux, recels d'abus de biens sociaux,complicité de corruption et subornation de témoins, à 4 ansd'emprisonnement, dont 1 an avec sursis, 400 000 francs d'amende et5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille,Frédéric ..., pour recel d'abus de biens sociaux, à 18 moisd'emprisonnement avec sursis et 60 000 francs d'amende, Louis ...,pour abus de biens sociaux, à 1 an d'emprisonnement avec sursis et60 000 francs d'amende, Jean-Jacques ..., pour complicité d'abusde biens sociaux et corruption active, à 3 ans d'emprisonnement, dont2 ans avec sursis, et 400 000 francs d'amende, et a prononcé sur lesintérêts civils. LA COUR, Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires ampliatifs, complémentaires et en défenseproduits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la fin de l'année1985 Alain ..., maire de la ville de Grenoble depuis 1983, quiprojetait de concéder le service des eaux de cette ville, a indiqué àMarc-Michel Merlin que, s'il voulait que le groupe qu'il dirigeaitfût retenu dans la compétition qui allait s'ouvrir, il devraitacheter et mettre à sa disposition un appartement à Paris ; que, le14 janvier 1986, le groupe Merlin a acquis pour la somme de5 000 000 francs, outre 1 000 000 francs de travaux et de mobilier,un appartement de 280 m2, sis à Paris,qui, sous le couvert d'un bail consenti à l'association " ModernitéRégionale ", a été occupé de 1986 à 1988 par Alain ..., devenuministre de l'Environnement, et par son chargé de mission et homme deconfiance, Jean-Louis ..., en laissant des loyers impayés d'un Qu'en septembre 1987, Alain ..., qui venait de bénéficier, du8 au 23 août 1987, d'une croisière en Méditerranée avec sa famille, àbord d'une goélette louée pour la circonstance par le groupe Merlin,au prix de 170 784 francs, a fait connaître à Marc-Michel ...'en contrepartie de la concession du service des eaux de Grenobleau groupe Merlin et à la société Lyonnaise des Eaux, il désirait quela propriété de l'appartement du boulevard Saint-Germain lui fûttransférée ;
Que le projet de concession a été arrêté dans son principe entreles partenaires, au cours d'un déjeuner pris le 3 octobre 1987 auConseil général de l'Isère, en présence notamment de Jean-LouisDutaret et de Jean-Jacques ..., directeur commercial et directeurde l'eau pour la France de la Lyonnaise des Eaux, puis reporté aprèsles élections municipales de mars 1989, la décision de délégationpour une durée de 25 ans à la société Cogese, filiale commune dugroupe Merlin et de la Lyonnaise des Eaux, du service des eaux de laville de Grenoble ayant été finalement signée par le maire de laville le 3 novembre 1989 ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, le 23 juin 1988, la sociétéanonyme Whip a été constituée entre Jean-Louis ..., des membresde sa famille et des proches d'Alain ... ; que cette " sociétéécran ", dirigée en fait par Jean-Louis ..., a acheté le19 décembre 1988, pour la somme de 7 000 000 francs, l'appartement du à Paris ; que, pour financer cetteacquisition et prendre en charge les salaires des collaborateurs del'équipe parisienne d'Alain ..., la société Whip a facturé, de1988 à 1993, des honoraires fictifs de 9 373 060 francs à dessociétés du groupe Merlin et de 2 220 000 francs à la Lyonnaise desEaux ; qu'en outre, le groupe Merlin a, en 1987 et 1988, supporté250 000 francs d'honoraires non causés du cabinet d'avocat deJean-Louis Dutaret, ainsi que les frais d'un voyage en Australie d'uncoût de 137 690 francs, effectué par ce dernier, avec un ami, du23 décembre 1988 au 8 janvier 1989 ;
Que le groupe Merlin, pour s'attirer les faveurs d'Alain ...,a pris en charge, dès 1984 et jusqu'au mois d'avril 1993, date àlaquelle il est devenu ministre de la Communication, le coût de122 voyages en avions-taxis de la compagnie Sinair, d'un montant de2 200 000 francs ;
Attendu qu'il ressort encore des énonciations de l'arrêt attaquéque, dans la perspective des élections municipales de mars 1989 et à l'initiative d'Alain ..., ont été constituées, à partir du4 juillet 1988, trois sociétés anonymes Holding Dauphiné News,Dauphiné News et News Gratuit, afin de diffuser des publicationsquotidiennes ou périodiques favorables à la réélection du maire deGrenoble et de promouvoir son image ; que, devant les déficits de cegroupe de presse, dirigé en fait par Alain ..., et pour éviterun dépôt de bilan, Jean-Jacques ... a accepté de faire racheterpour 0 franc la holding Dauphiné News par la société Serecom, filialede la société Serepi, elle-même filiale de la société Lyonnaise desEaux, associée de la société Cogese et de faire régler par elle-même,entre janvier et septembre 1990, son passif s'élevant à5 260 000 francs ; qu'au total, les prélèvements opérés au profit dela holding Dauphiné News, sur instructions de Jean-Jacques ...,par Louis ..., directeur de la société Lyonnaise des Eaux pour larégion Rhône Alpes et président des sociétés Serepi et Serecom, se En cet état, I Sur le pourvoi de Frédéric ...
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II. Sur les pourvois des autres demandeurs
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Jean-Louis ...,pris de la violation des articles 162, 166, 174, 175, 179, 591 et 593du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs,manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité tiréede l'irrégularité des deux rapports d'expertise déposés les 15 et29 décembre 1994 établis avec la participation d'intervenantsextérieurs sans désignation préalable du magistrat instructeur ;
" aux motifs que les prévenus avaient connaissance, dès le dépôtdes rapports d'expertise, que l'expert missionné avait fait appel àun correspondant bruxellois de son cabinet selon une mention figuranten page 56 du rapport coté D 693 ; qu'ils n'ont pas sollicité quesoit prononcée la nullité de cette expertise in limine litis bienqu'ils aient eu connaissance des vices allégués lors de l'audience dutribunal et n'ont pas déposé de conclusions à cette audience et sontdonc irrecevables à présenter une telle demande devant la Cour ; que,si l'expert doit accomplir personnellement la mission qui lui estconfiée, cette exigence ne l'empêche pas d'utiliser le concours depersonnes non désignées comme expert pour des interventions qui necomportent aucune appréciation à formuler ; qu'il ne peut êtrereproché à l'expert d'avoir eu recours à son collaborateur, dès lorsoù celui-ci n'a pas accompli des tâches relevant de la compétence del'expert ; qu'en tout état de cause, en vertu de l'article 179 duCode de procédure pénale, l'ordonnance de renvoi lorsqu'elle estdevenue définitive, couvre, s'il en existe, les vices de laprocédure ; que l'article 174 du Code précité ne déroge pas à cettedisposition ;
" alors, qu'après avoir déclaré irrecevable comme tardive,l'exception de nullité dirigée contre le rapport d'expertise établiavec la participation d'un intervenant extérieur, non désigné par lemagistrat instructeur, les juges d'appel ne pouvaient, sans secontredire, déclarer régulières les opérations d'expertise ; que lecollaborateur de l'expert n'avait accompli aucune des tâches relevantde la compétence de l'expert, celui-ci ayant attesté avoirpersonnellement conduit sa mission ; que la décision est ainsi privéede toute base légale ;
Attendu que, l'affaire ayant été renvoyée devant les juges par lajuridiction d'instruction, l'exception tirée par Jean-Louis ...,en cause d'appel, d'une prétendue nullité des expertises comptablesordonnées dans la procédure antérieure, était irrecevable enapplication des articles 179, alinéa 5, et 385, alinéa 1er, du Codede procédure pénale ;
Que, si la cour d'appel, après avoir énoncé que l'exception étaitirrecevable, a cru devoir y répondre pour la rejeter, le moyen quireprend cette exception est lui-même irrecevable ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Alain ...,pris de la violation des articles 63 d de la Convention européennede sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,509, 513 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation desdroits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'audition deJérôme Monod, présentée par Alain ... ;
" aux motifs que Jérôme ... a été entendu, en qualité de témoin,au cours de l'information et devant le tribunal correctionnel à larequête, non d'Alain ..., mais de Jean-Jacques ... et deLouis Béra ; qu'à la lecture des notes d'audience, il n'apparaît pasqu'Alain ... ou ses conseils lui aient posé des questions ;
qu'une nouvelle audition de ce témoin n'apparaît pas utile à lamanifestation de la vérité ;
" alors qu'aux termes de l'article 63 d de la Conventioneuropéenne des droits de l'homme, tout accusé a droit à obtenir laconvocation et l'interrogation des témoins à charge et à décharge ;
qu'en outre, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, la courd'appel se trouve saisie de toute l'affaire jugée en premièreinstance qu'elle doit examiner à nouveau complètement, notamment, enordonnant l'audition de témoins pour établir la vérité ; que, parconséquent, en l'espèce, la cour d'appel, appelée à juger à nouveaul'entier litige, ne pouvait refuser d'ordonner l'audition du témoin,Jérôme ..., nonobstant son audition devant les premier juges, dèslors qu'il résultait de l'information que s'il y avait eu pacte decorruption le 3 octobre 1987, celui-ci aurait été nécessairementconclu, notamment, par Jérôme ... en sa qualité deprésident-directeur général de la société Lyonnaise des Eaux, etqu'il en aurait été nécessairement l'auteur ou le coauteur ; quel'audition de Jérôme ... était donc incontestablement indispensableà la manifestation de la vérité ; qu'en décidant, néanmoins, lecontraire, par des motifs totalement inopérants, l'arrêt attaqué aradicalement méconnu le sens et la portée des textes et principessusvisés " ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'Alain ... tendant à l'audition, en qualité de témoin, de Jérôme ..., président de la société Lyonnaise des Eaux, l'arrêt attaqué relève que le susnommé adéjà été entendu en cette qualité au cours de l'information et devantle tribunal correctionnel à la requête de Jean-Jacques ... et deLouis Béra ; qu'il n'apparaît pas qu'Alain ... ou ses avocatslui aient posé de questions et qu'en conséquence, une nouvelleaudition de ce témoin n'est pas utile à la manifestation de lavérité ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de sonappréciation souveraine, la cour d'appel a justifié sa décision auregard des dispositions de l'article 63 d, de la Conventioneuropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Alain ...,pris de la violation des articles 460 et 177 du Code pénal abrogé, envigueur au moment des faits, 321-1 et 432-11 du nouveau Code pénal,437-3° de la loi du 24 juillet 1966, 7, 8 et 593 du Code de procédurepénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception tirée de laprescription de certains faits qualifiés de recels d'abus de bienssociaux et des faits de corruption ;
" aux motifs que, si la loi du 22 mai 1915 a érigé le recel eninfraction distincte, celui-ci demeure attaché au délit d'origine parun lien très étroit, s'agissant d'une infraction de conséquence quisuppose à titre préalable, un délit fondamental ; qu'en conséquence,le délai de prescription triennale en mati re de recel d'abus debiens sociaux ne commence à courir, si les biens ne sont plus enpossession du prévenu, qu'à compter de la date où ces abus de bienssociaux sont apparus et ont pu être constatés, c'est-à-dire enl'espèce dans le courant de l'année 1994 ; que les abus de bienssociaux ayant donné lieu à un réquisitoire supplétif, en date du9 septembre 1994, leur prescription et celle des recels, ne peut plusêtre invoquée ;
" et que l'article 177 du Code pénal ancien, devenul'article 432-11 du nouveau Code pénal, attache équivalemment laqualification de corruption consommée à la sollicitation,l'acceptation et la réception de dons ; que ces moments, qui peuventêtre séparés dans le temps, caractérisent tous l'accomplissement dela corruption ; qu'ainsi, à chaque manifestation de la volontécoupable, le délit se manifeste complètement ; que la prévention visedes faits qui ont été commis de 1984 à mars 1993 par Alain ... ;
qu'à chaque versement effectué en vertu du pacte de corruption, undélit a été commis et a fait courir un nouveau délai deprescription ; que le dernier versement ayant eu lieu en mars 1993,la prescription n'était pas acquise lors de l'engagement despoursuites intervenues moins de trois ans après cette date ;
" alors, d'une part, que le recel constituant un délit distinct del'infraction originelle, la prescription qui le concerne et quicommence à courir au jour où il a pris fin, est indépendante de cellequi s'applique à l'infraction originelle, celle-ci fût-elle un abusde biens sociaux, qu'en l'espèce, la prescription triennale desdélits de recels d'abus de biens sociaux reprochés à Alain ... été interrompue par le réquisitoire supplétif du9 septembre 1994, les faits consommés plus de trois ans avant cettedate se trouvent inévitablement prescrits ; que tel est le cas de lamise à disposition gratuite de l'appartement sis 286, boulevardSaint-Germain qui a cessé par sa vente à la société Whip le19 décembre 1988, de la croisi re de l'été 1987, des vols en avionsSinair et des honoraires versés à la société Whip antérieurement au9 septembre 1991 ;
" alors, d'autre part, que le délit de corruption, qui est uneinfraction instantanée, est consommé par la conclusion du pactefrauduleux entre le corrupteur et le corrompu ; que, dès lors, c'estdu jour où cette convention est intervenue que le délai deprescription commence à courir, sans qu'il y ait lieu de tenir comptede la date de perception des dons ou avantages qui en ont constitué l'exécution, en contrepartie d'un acte fautif unique ; que la courd'appel, qui fixait à la date du 3 octobre 1987 la conclusion dupacte de corruption, ne pouvait, sans violer les textes et principessusvisés, refuser de constater la prescription du délit poursuivi ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Jean-LouisDutaret, pris de la violation des articles 321-1 du Code pénal,437-3° de la loi du 24 juillet 1966, 7 et 8 du Code de procédurepénale, défaut de motifs, violation de la loi
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescriptionde l'action publique concernant les faits de recel d'abus de bienssociaux reprochés à Jean-Louis ... ;
" aux motifs que, si la loi du 22 mai 1915 a érigé le recel eninfraction distincte, celui-ci demeure rattaché au délit d'originepar un lien très étroit, s'agissant d'une infraction de conséquencece qui suppose, à titre préalable, un délit fondamental ; que lerecel ne peut être découvert et poursuivi qu'à partir du moment où ledélit d'abus de biens sociaux, infraction d'origine, est apparu et aété constaté ; qu'antérieurement le recel ne pouvait pas être connuen raison de la clandestinité de l'infraction d'origine ; qu'enconséquence, le délai de prescription triennale en matière de receld'abus de biens sociaux ne commence à courir, si les biens ne sontplus en possession des prévenus, qu'à compter de la date où ces abusde biens sociaux sont apparus et ont pu être constatés ;
" alors que le principe selon lequel la prescription de l'actionpublique du délit de recel de choses commence à courir le jour où ladétention a pris fin, ne peut être écarté lorsque l'infractionprimaire est demeurée clandestine ; qu'en effet, si le délit supposel'existence d'une infraction primaire caractéristique de la conditionpréalable, il demeure une infraction autonome qui se consommeuniquement par la commission de faits postérieurs, distincts del'infraction d'origine ; que le caractère continu du recel, présentpendant toute la durée de la détention, ne peut fictivement pas durerjusqu'au jour de la découverte de l'infraction primaire pourpermettre de reporter, à cette date, le point de départ de laprescription de l'action publique ; qu'en l'espèce, Jean-LouisDutaret a cessé, le 19 décembre 1988, de bénéficier de l'appartementmis à sa disposition par une société du groupe Merlin ; que le8 janvier 1989, il a achevé un voyage en Australie réglé par la société SDEI ; qu'en 1988, il a consommé le montant des honorairesfacturés par le groupe Merlin de juillet 1987 à juillet 1988, desorte que la prescription de l'action publique du délit de receld'abus de biens sociaux était acquise trois années après la fin desdétentions litigieuses ; qu'en décidant le contraire, l'arrêt attaquéa violé les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour rejeter les exceptions de prescription del'action publique présentées par les demandeurs, tant en ce quiconcerne les délits de recels d'abus de biens sociaux que decorruption, l'arrêt attaqué se prononce par les motifs repris auxmoyens ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucundes textes invoqués ;
Qu'en effet, d'une part, les dispositions des articles 203 du Codede procédure pénale et 321-3 à 321-5 du Code pénal impliquent que lerecel du produit d'un abus de biens sociaux ne saurait commencer à seprescrire avant que l'infraction dont il procède soit apparue et aitpu être constatée dans des conditions permettant l'exercice del'action publique ;
Que, d'autre part, si le délit de corruption est une infractioninstantanée, consommée dès la conclusion du pacte entre le corrupteuret le corrompu, il se renouvelle à chaque acte d'exécution duditpacte ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Jean-JacquesPrompsy, pris de la violation des articles 5, 177 et 460 de l'ancienCode pénal, 321-1 et 432-11 du nouveau Code pénal, 437-3° de la loidu 24 juillet 1966 et 593 du Code de procédure pénale, défaut demotifs et manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Jacques ... de corruption active et de complicité d'abus de bienssociaux ;
" alors qu'en vertu de la règle non bis in idem, un même faitautrement qualifié ne saurait servir de base à une double déclarationde culpabilité, de telle sorte qu'en l'espèce, les faits retenus parl'arrêt attaqué comme constitutifs du délit de corruption au titredes contreparties de l'acte fautif ne pouvaient être égalementqualifiés de corruption active et de complicité d'abus de bienssociaux qu'au prix d'une violation des textes et des principessusvisés " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Alain ... etpris de la violation des articles 5, 177 et 460 du Code pénal abrogé,en vigueur au moment des faits, 321-1 et 432-11 du nouveau Codepénal, 437 de la loi du 24 juillet 1966 et 593 du Code de procédurepénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde desdroits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs,manque de base légale ;
" en ce que Alain ... a été déclaré coupable de délits derecel d'abus de biens sociaux et corruption passive ;
" aux motifs que les éléments constitutifs des délits de receld'abus de biens sociaux et de corruption sont différents et que lespréventions retenues à l'égard des prévenus ne constituent pas uncumul idéal d'infractions ;
" alors qu'en vertu de la règle non bis in idem, un même faitautrement qualifié ne saurait servir de base à une double déclarationde culpabilité de sorte qu'en l'espèce, les faits retenus par l'arrêtattaqué comme constitutifs du délit de corruption au titre descontreparties de l'acte fautif ne pouvaient être également qualifiésde recels d'abus de biens sociaux sans violer les textes et principessusvisés ;
" alors que, cette double qualification ayant nécessairement jouéun rôle dans la détermination de la peine, la constatation de cecumul idéal d'infractions interdit à la chambre criminelle, en casd'erreur sur la détermination de l'une ou l'autre de ces infractions,de recourir à la théorie dite " de la peine justifiée " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les demandeurs sont sans intérêt à reprocher à la courd'appel de les avoir déclarés coupables des mêmes faits sousplusieurs qualifications pénales comportant au demeurant des élémentsconstitutifs différents dès lors que, conformément aux articles 5ancien et 132-3 nouveau du Code pénal, une seule peine a étéprononcée ;
Qu'ainsi, les moyens ne peuvent être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Jean-LouisDutaret et pris de la violation des articles 19 de la loi d'amnistiedu 15 janvier 1990, 593 du Code de procédure pénale, contradiction etdéfaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré n'y avoir lieu à applicationde la loi du 15 janvier 1990 portant amnistie ;
" aux motifs qu'aucun élément ne permet de dire que l'utilisationd'un appartement boulevard Saint-Germain et le versement d'honorairesà Whip par le groupe Merlin et la société Lyonnaise des Eaux sont enrelation avec le financement direct ou indirect de campagnesélectorales ou de partis ou de groupements politiques ; quel'appartement du boulevard Saint-Germain a été utilisé par lui àtitre de logement lorsqu'il se déplaçait à Paris ; que les dépensesengagées n'ont servi qu'aux ambitions personnelles d'Alain Carignonet ... ... ... et non au financement direct ou indirect decampagnes électorales ou de partis et groupements politiques ;
" alors que l'arrêt ne pouvait, sans se contredire, énoncer que lamise à la disposition gratuite de l'appartement du boulevardSaint-Germain à Alain ... et le versement d'honoraires au profitde la société Whip par le groupe Merlin et la société Lyonnaise desEaux, n'étaient pas en relation avec le financement direct ouindirect de campagnes électorales, ou de partis ou de groupementspolitiques et n'avaient servi qu'aux ambitions personnelles desprévenus et, néanmoins, constater que, d'après l'ensemble desdéclarations des personnes ayant travaillé dans l'appartementsusvisé, ledit appartement était le siège de l'activité politique deAlain Carignon lorsqu'il séjournait dans la capitale à savoircourrier, prises de rendez-vous, relations avec la presse et cellulede travail et que l'ensemble de la facturation de Whip sur troissociétés du groupe Merlin est purement fictive et n'a eu pour but quede procurer à Whip une trésorerie suffisante pour assurer leremboursement de l'emprunt destiné à financer l'achat del'appartement, sachant que la loi d'amnistie n'exige pas quel'ensemble du produit des infractions ait servi au financement descampagnes électorales ou des partis politiques ; que la décision estainsi privée de toute base légale " ;
Attendu que, pour écarter les conclusions de Jean-Louis ... le bénéfice de l'amnistie prévue par l'article 19 de laloi du 15 janvier 1990, la cour d'appel énonce qu'aucun élément nepermet de dire que les avantages en cause concédés par le groupeMerlin et la société Lyonnaise des Eaux étaient en relation avec lefinancement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partisou de groupements politiques ; qu'elle retient que les dépensesengagées n'ont servi qu'aux ambitions personnelles d'Alain Carignonet ... ... ..., de sorte qu'elles ne relèvent pas de la loid'amnistie ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciationsouveraine des éléments de fait soumis au débat contradictoire, lajuridiction du second degré a justifié sa décision sans encourir lesgriefs allégués ;
Que, dès lors, le moyen ne peut être admis ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Alain ... etpris de la violation des articles 460 et 177 du Code pénal abrogé envigueur au moment des faits, 321-1 et 432-11 du nouveau Code pénal,437-3° de la loi du 24 juillet 1966 et 593 du Code de procédurepénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que Alain ... a été déclaré coupable de plusieursrecels d'abus de biens sociaux ;
" alors que le recel suppose une infraction d'origine,caractérisée et punissable ; que l'infraction principale n'est pascaractérisée par l'arrêt attaqué ;
" qu'en effet, d'une part, l'abus de biens sociaux n'estpunissable que lorsque l'acte incriminé est contraire à l'intérêtsocial, c'est-à-dire de nature à compromettre l'intégrité de l'actifsocial ; que la simple constatation qu'une opération serait étrangèreà l'objet social ne suffit pas à caractériser l'abus de biens sociauxsi cette opération correspond à l'intérêt de la société ; que n'estpas nécessairement contraire à leur intérêt social l'opérationd'achat par les sociétés du groupe Merlin d'un appartement à Paris,investissement sur lequel elles ont réalisé une plus-value ; quefaute d'avoir caractérisé la contrariété avec l'intérêt socialdesdites sociétés, la cour d'appel a privé sa décision de baselégale ;
" d'autre part, l'emploi des ressources sociales à des finsprétendument illicites ne suffit pas à caractériser la lésion del'intérêt social, dès lors qu'il est constaté l'existence decompensations ou contreparties reçues dans les opérationslitigieuses ; qu'en l'espèce, la cour d'appel constate expressémentque les dépenses incriminées engagées par les sociétés du groupeMerlin (vols en avions-taxis Sinair, acquisition de l'appartement286, boulevard Saint-Germain et mise à la disposition gratuite deAlain Carignon, honoraires versés à la société Whip, croisière) etpar la société Lyonnaise des Eaux (rachat du groupe Dauphiné News ethonoraires versés à la société Whip) ont eu pour conséquencel'obtention d'un marché par ces sociétés et ont effectivement permisd'obtenir l'attribution de la concession du service des eaux de laville de Grenoble à la société Cogese, constituée entre la SDEI(filiale du groupe Merlin) et la Serepi (filiale de la Lyonnaise desEaux), c'est-à-dire dans l'intérêt exclusif des sociétés ; que, dèslors, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" de troisième part, en déclarant Alain ... coupable de receld'abus de biens sociaux au préjudice de la société Whip (utilisation,entre 1988 et 1993 des structures de la SA Whip), bénéfice entre 1991et 1993 de cours d'anglais dispensés par la société Berlitz etsupportés par la société Whip), la cour d'appel, qui a expressémentconstaté que cette société aurait constitué une " structure écran "financée par le groupe Merlin et la société Lyonnaise des Eaux, a, enréalité, caractérisé un recel d'abus de biens sociaux au préjudicedesdites sociétés ; que, dès lors, la déclaration de culpabilité dece chef n'est pas légalement justifiée ;
" enfin, en l'absence d'affectation des dépenses litigieuses à unobjet étranger à l'intérêt des sociétés concernées soit intérêtpersonnel des mandataires sociaux, soit intérêt d'une société tierceaucun abus de biens sociaux ne peut être reproché aux prévenus " ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Jean-LouisDutaret et pris de la violation des articles 437-3° de la loi du24 juillet 1966, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut deréponse à conclusions, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Louis ... coupabled'abus de biens sociaux pour avoir mis à la disposition d'AlainCarignon, de 1988 à 1993, les locaux du boulevard Saint-Germain et lepersonnel pris en charge par la société SA Whip ; " alors que, dans ses conclusions régulièrement déposées,Jean-Louis ... avait indiqué avoir de 1988 à 1994, date de lavente de l'appartement, payé un loyer mensuel de 5 000 francs pouroccuper privativement une partie du local acquis par la SA Whip pourlaquelle avaient été prévus un branchement EDF particulier et uneligne téléphonique personnelle ; que la cour d'appel, en s'abstenantde répondre à ce chef péremptoire des conclusions, n'a pas légalementjustifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour Jean-LouisDutaret et pris de la violation de l'ancien article 460 du Codepénal, des articles 321-1 du Code pénal, 437-3° de la loi du24 juillet 1966, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut deréponse à conclusions et défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Louis ... coupablede recel d'abus de biens sociaux concernant les honoraires facturéspar la SA Whip aux sociétés du groupe Merlin et à la sociétéLyonnaise des Eaux et l'a condamné de ce chef ;
" aux motifs que l'ensemble de la facturation de Whip adressée auxsociétés du groupe Merlin et à la Société Lyonnaise des Eaux necorrespondait à aucune activité réelle et n'a eu pour but que deprocurer à la société Whip une trésorerie suffisante pour assurer leremboursement de l'emprunt destiné à financer l'achat del'appartement du boulevard Saint-Germain destiné à Alain ...,cet appartement étant la contrepartie du pacte de corruption du mairede Grenoble ayant permis l'attribution de la concession du service des eaux de cette ville aux sociétés du groupe Merlin et à la sociétéLyonnaise des Eaux ; que Jean-Louis ... est à l'origine de la société Whip qu'il a dirigée en fait et qui lui a permis debénéficier des avantages financiers procurés par le groupe Merlin etla société Lyonnaise des Eaux et qu'en agissant ainsi, il s'est renducoupable de recels d'abus de biens sociaux
" 1o alors que le recel de choses suppose l'existence d'uneinfraction préalable punissable qualifiée de crime ou délit ; quel'abus de biens sociaux n'est punissable que si les fonds sociauxversés par un dirigeant social n'ont pas été utilisés dans le seulintérêt de la société qu'il dirige ; qu'il s'ensuit que leprélèvement de fonds sociaux passé en comptabilité au titre depaiement d'honoraires, mais effectué en contrepartie de l'attributionà la société de la concession du service des eaux décidée par l'élubénéficiaire des fonds, ne peut être qualifié d'abus de bienssociaux, l'obtention du marché étant faite dans le seul intérêt de la société ; que, dès lors, faute d'avoir caractérisé le délit principald'abus de biens sociaux, la cour d'appel ne pouvait déclarerJean-Louis Dutaret coupable du recel d'abus de biens sociaux ;
" 2o alors que, dans ses conclusions régulièrement déposées, leprévenu invoquait les dispositions plus douces de l'article 321-12 dunouveau Code pénal, applicables aux faits, permettant de retenir laseule responsabilité pénale de la personne morale receleuse dessommes prétendument frauduleuses en relevant qu'il n'avait jamaisencaissé ou détenu les fonds provenant des abus de biens sociauxreprochés aux dirigeants des sociétés du groupe Merlin et de la société Lyonnaise des Eaux, ce qui excluait alors la responsabilitépénale du dirigeant et mettait à néant la thèse de l'accusation ;
qu'aucune réponse n'a été donnée à ce chef péremptoire desconclusions de sorte que la décision est privée de motifs " ;
Sur le neuvième moyen de cassation proposé pour Jean-Louis ... pris de la violation des articles 437-3° de la loi du24 juillet 1966, 460 ancien du Code pénal, 591 et 593 du Code deprocédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que Jean-Louis ... a été déclaré coupable de plusieursrecels d'abus de biens sociaux commis au préjudice des sociétés duGroupe Merlin et de la société Lyonnaise des Eaux et l'a condamné deces chefs ;
" alors que le délit de recel de choses suppose l'existence d'uneinfraction préalable punissable qualifiée crime ou délit ; que ledélit d'abus de biens sociaux n'est pas caractérisé lorsque ledirigeant, eût-il commis un acte illicite, n'a pas agi dans sonintérêt propre ou dans l'intérêt d'une entreprise le concernant, maisa utilisé les fonds sociaux dans l'intérêt de la société qu'ilreprésente ; que, dès lors, le versement d'honoraires, la mise à ladisposition gratuite d'un appartement ou la prise en charge d'unvoyage à l'étranger, censés être la contrepartie de l'attribution dela concession des eaux de la ville de Grenoble reprochée à AlainCarignon, ne pouvaient être déclarés constitutifs d'abus de bienssociaux, faits pour lesquels Jean-Louis ... a été déclarécoupable de recel ; que faute d'avoir caractérisé la contrariété avecl'intérêt social des sociétés concernées, la cour d'appel a privé sadécision de base légale " ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour Jean-Jacques ... pris de la violation des articles 437-3° de la loi n° 66-537 du24 juillet 1966, 4, 59 et 60 de l'ancien Code pénal, 121-1, 121-3,121-4, 121-6 et 121-7 du nouveau Code pénal, 1842 du Code civil, 485,591 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale, défautet contradiction de motifs
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Jacques ... de complicité d'abus de biens sociaux au préjudice dessociétés Serepi et Serecom par prélèvement d'une somme de" aux motifs que le groupe Dauphiné News était composé de troissociétés dirigées par Frédéric ... la société HoldingDauphiné News, la société Dauphiné News ayant pour objet lafondation, la publication et l'exploitation de tous journauxquotidiens ou périodiques et ayant édité du mois d'octobre 1988 aumois de juin 1989, le magazine Dauphiné News, vendu en kiosque 15puis 18 francs, et la société News Gratuit, ayant pour objet lapublication de journaux et ayant édité les bi-hebdomadaires gratuitsNews Mardi et News Vendredi qui ont été distribués dans les boîtesaux lettres de l'agglomération grenobloise à 150 000 exemplaires defévrier à fin avril 1989 (cf arrêt, p 50) ; qu'il est reproché àJean-Jacques Prompsy d'avoir donné des instructions à Louis ...,président-directeur général des sociétés Serepi et Serecom afin quela société Holding Dauphiné News et Frédéric ... bénéficient deversements à hauteur de 6 129 400 francs qui constituaient unecontrepartie à l'attribution de la concession du service des eaux dela ville de Grenoble à la société Lyonnaise des Eaux (cf arrêt,p 52) ; que le groupe Dauphiné News a, dès le début de son activité,rencontré des difficultés de trésorerie qui ne feront que s'aggraverpour aboutir à des pertes importantes malgré les appuis financiersconséquents des groupes Merlin, Ciments-Vicat, Bouygues et de SergeKampf ; qu'à la fin de l'été 1989, Frédéric ... a, parl'intermédiaire de Jean-Louis ..., rencontré Jean-JacquesPrompsy, directeur commercial à la société Lyonnaise des Eaux, à quiil a exposé ses projets de création d'une nouvelle société MCM ayantpour objet l'élaboration de journaux de ville ; que Jean-JacquesPrompsy a été séduit par cette idée qui allait permettre à sa sociétéde se faire connaître des collectivités territoriales ; que, pouréviter un dépôt de bilan et afin que le concept MCM puisse débuterdans les meilleurs délais, Jean-Jacques ... a accepté de réglerle passif de Dauphiné News ; que, dans un premier temps, Louis ...,président-directeur général de la société Serepi, a prêté à laremboursés le 29 décembre 1989 ; que, dans un deuxième temps, a étéconstituée une société Serecom, détenue à 99 % par la société Serepi,présidée par Louis ... et ayant pour objet social l'exercice detoutes activités de communication et d'expression ; que la sociétéSerecom a racheté le capital de la société Holding Dauphiné News pour0 franc et a effectué, entre les 9 janvier et 17 septembre 1990, unapport en compte courant de 5 260 000 francs à son profit ; que cetapport d'argent a permis à cette société de régler ses créanciers etd'éviter un dépôt de bilan ; que la société Serepi a alors constatéla perte des titres de la société Serecom en provisionnant leurvaleur dans les bilans de 1989 et de 1990 ; que, pour justifier cetteopération, Jean-Jacques ... a expliqué qu'il avait agit dans lecadre de la diversification des activités du groupe qui souhaitaitêtre présent dans le domaine de la communication comme le prouvait leprojet de rachat de la société Civis ; qu'il a affirmé avoir étéséduit par Frédéric ... et par la finalité du concept MCM quiallait permettre à la société Lyonnaise des Eaux de se rapprocher descollectivités territoriales, et avoir ignoré l'implication du mairede Grenoble dans ces publications ;
mais que le projet de rachat de Civis ne présentait pas de paramètrecommun avec celui de Dauphiné News ; qu'en effet, cette entrepriseétait une agence de communication qui réalisait un chiffre d'affairesde 20 millions de francs et avait obtenu un oscar de la croissance ;
que malgré cette situation, le projet avait été abandonné en raisonde la taille de la société ; que dans ces conditions, il convient des'interroger sur l'intérêt que la reprise de Dauphiné News pouvaitconstituer pour la société Lyonnaise des Eaux, sachant que le groupevenait de licencier son personnel, n'avait plus d'activité et que saseule spécificité avait été de générer des pertes de 16 millions defrancs en neuf mois d'activité ; qu'il sera relevé que la procédurehabituelle suivie par la société Lyonnaise des Eaux en matière deprises de participation n'a pas été appliquée, cette opérationn'ayant pas été soumise à l'autorisation du comité d'investissement,Jean-Jacques ... en prenant seul, selon ses déclarations, laresponsabilité sans même en informer son supérieur hiérarchiquedirect, Bernard ..., directeur général de l'eau, qui a déclaréque la reprise de Dauphiné News n'avait rien à voir avec lacommunication auprès des élus et que le secteur média-presse n'avaitjamais présenté un intérêt particulier pour le groupe ; queJean-Jacques Prompsy ne peut soutenir avoir ignoré l'implicationd'Alain ... dans ce groupe de presse, alors qu'en 1987 et en1989, il était en négociation avec celui-ci et avec Jean-LouisDutaret sur le contrat de concession de l'eau ; qu'il ne pouvait pasne pas avoir eu connaissance, directement ou indirectement, de deuxarticles parus dans Le Canard Enchaîné, les 1er et 8 février 1989, etrepris par d'autres organes de presse, qui faisaient état dufinancement du groupe Dauphiné News et des liens existant entre cegroupe et Alain ... ; que la connaissance que Jean-JacquesPrompsy avait de cette situation ressort des déclarations deMarc-Michel Merlin qui a affirmé que l'intéressé lui avait fait partde son intention d'acheter un journal qui était favorable au maire deGrenoble et avait sollicité son aide ; que ces éléments démontrentque la prise de participation de la société Lyonnaise des Eaux dansla société MCM, qui s'est concrétisée par la souscription de 5 % ducapital de cette société, n'était destinée qu'à justifier le paiementdes créanciers, en majorité grenoblois, de la société HoldingDauphiné News ; que le désintéressement de ces créanciers évitait undépôt de bilan qui n'aurait pas manqué de rejaillir sur la réputationdu maire de Grenoble compte tenu de son implication connue dans cegroupe de presse (cf arrêt, p 54 et 55) ;
" alors, de première part, que le caractère abusif de l'usage desbiens sociaux ne saurait se déduire de la seule illicéité du but danslequel cet usage est fait ; qu'en l'espèce, en considérant, pourdéclarer Louis ... coupable d'abus de biens sociaux et Jean-JacquesPrompsy complice, que les opérations litigieuses étaient lacontrepartie convenue en faveur de Alain ... dans le pacte decorruption qui avait permis à la société Lyonnaise des Eaux d'obtenirune concession pour la société Cogese, filiale de sa propre filialela société Serepi, laquelle concession était conforme aux intérêtssociaux de cette dernière et donc de son autre filiale la sociétéSerecom, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de sespropres constatations au regard des textes susvisés ;
" alors, de deuxième part, que, en toute hypothèse, l'illicéité dubut poursuivi par le présumé complice d'un abus de biens sociaux nepeut caractériser l'usage abusif reproché au présumé auteurprincipal, au seul regard duquel doivent être appréciés les élémentsconstitutifs de l'infraction ; qu'en l'espèce, en déduisant lafinalité illicite des opérations réalisées par les sociétés Serepi etSerecom avec le groupe de presse Dauphiné News d'un ensemble deconsidérations établissant tout au plus que ces opérations auraientété orchestrées par Jean-Jacques ..., poursuivi en qualité desimple complice d'abus de biens sociaux, en vue de procéder, encontrepartie de l'attribution de la concession, au renflouement duditgroupe de presse, sans autrement constater que telle avait égalementété la finalité poursuivie par Louis ..., recherché en qualitéd'auteur principal, ni même fait apparaître que celui-ci, à tout lemoins, avait connaissance de ce but frauduleux, la cour d'appel n'apas légalement caractérisé l'élément matériel de l'infraction,privant ainsi de tout fondement légal, au regard des textes susvisés,tant la déclaration de culpabilité de Louis ... comme auteurprincipal que celle de Jean-Jacques ... comme complice ;
" alors, de troisième part, que, dans ses conclusions d'appel,Jean-Jacques ... avait qualifié la constitution de la sociétéSerecom par la société Serepi puis l'apport en compte couranteffectué par celle-ci à la société Holding Dauphiné News, de " projetéconomique cohérent ", et avait soutenu que cet investissement neconstituait pas une diversification des activités du groupe de laLyonnaise des Eaux ; qu'en déclarant, au contraire, que, pourjustifier cette opération, Jean-Jacques ... expliquait avoir agidans le cadre de la diversification des activités du groupe quisouhaitait être présent dans le domaine de la communication, la courd'appel a dénaturé ces conclusions et entaché sa décision d'unecontradiction de motifs ;
" alors, de quatrième part, que l'usage fait par un dirigeantsocial des biens du crédit de la société n'est contraire aux intérêtsde celle-ci au sens de l'article 437-3° de la loi du 24 juillet 1966que s'il expose, sans contrepartie, l'actif de la société à un risquede perte ; qu'en l'espèce, selon les propres énonciations de l'arrêt,la société Serecom, qui avait racheté la société Holding DauphinéNews et lui avait fait un apport en compte courant, n'avait étéconstituée par la société Serepi, laquelle était égalementactionnaire de la société à qui avait été concédé le service de l'eaude la ville de Grenoble, qu'après la signature du contrat deconcession avec le maire de cette ville ; que, dès lors, enconsidérant, pour déclarer Louis ... coupable d'abus de bienssociaux et Jean-Jacques ... complice, que la prise en charge dupassif de la société Holding Dauphiné News par les sociétés Serepi etSerecom était dépourvue de contrepartie, après avoir relevé que,selon elle, le paiement du passif du groupe de presse était intervenuen remerciement de la concession attribuée à une société du mêmegroupe, ce qui suffisait à établir la poursuite d'un intérêt social,la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de sespropres constatations, en violation des textes susvisés ;
" alors, de cinquième part, que, après avoir constaté que la société Cogese à qui avait été attribuée la concession et la sociétéSerecom qui avait pris le contrôle de la société Holding DauphinéNews, puis lui avait apporté une somme en compte courant, étaient desfiliales de la société Serepi que dirigeait Louis ..., la courd'appel devait rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si leconcours financier apporté par la société Serepi à la société depresse était dicté par un intérêt économique, social ou financiercommun, qu'elle devait apprécier au regard d'une politique élaboréeau sein du groupe, et si cet intérêt du groupe se trouvait ou non encontradiction avec les intérêts particuliers des sociétés liées ;
qu'en déclarant, sans procéder à cette recherche, Louis ... coupabled'abus de bien social et Jean-Jacques ... complice, la courd'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textessusvisés " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour Louis ... et prisde la violation des articles 437-3° de la loi n° 66-537 du24 juillet 1966, 4 de l'ancien Code pénal, 121-1, 121-3, 121-4, 121-6et 121-7 du nouveau Code pénal, 1842 du Code civil, 485, 591 et 593du Code de procédure pénale, manque de base légale, défaut etcontradiction de motifs
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Louis ... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice des sociétés Serepi et Serecom parsociété Holding Dauphiné News ;
" aux motifs que le groupe Dauphiné News était composé de troissociétés dirigées par Frédéric ... la société HoldingDauphiné News, la société Dauphiné News ayant pour objet lafondation, la publication et l'exploitation de tous journauxquotidiens ou périodiques et ayant édité du mois d'octobre 1988 aumois de juin 1989, le magazine Dauphiné News, vendu en kiosque 15puis 18 francs, et la société News gratuit, ayant pour objet lapublication de journaux et ayant édité les bi-hebdomadaires gratuitsNews mardi et News vendredi qui ont été distribués dans les boîtesaux lettres de l'agglomération grenobloise à 150 000 exemplaires defévrier à fin avril 1989 (cf arrêt, p 50) ; qu'il est reproché àJean-Jacques Prompsy d'avoir donné des instructions à Louis ...,président-directeur général des sociétés Serepi et Serecom afin quela société Holding Dauphiné News et Frédéric ... bénéficient deversements à hauteur de 6 129 400 francs qui constituaient unecontrepartie à l'attribution de la concession du service des eaux dela ville de Grenoble à la Société Lyonnaise des Eaux (cf arrêt,p 52) ; que le groupe Dauphiné News a, dès le début de son activité,rencontré des difficultés de trésorerie qui ne feront que s'aggraverpour aboutir à des pertes importantes malgré les appuis financiersconséquents des groupes Merlin, Ciments-Vicat, Bouygues et de SergeKampf ; qu'à la fin de l'été 1989, Frédéric ... a, parl'intermédiaire de Jean-Louis ..., rencontré Jean-JacquesPrompsy, directeur commercial à la Société Lyonnaise des Eaux, à quiil a exposé ses projets de création d'une nouvelle société MCM ayantpour objet l'élaboration de journaux de ville ; que Jean-JacquesPrompsy a été séduit par cette idée qui allait permettre à sa sociétéde se faire connaître des collectivités territoriales ; que, pouréviter un dépôt de bilan et afin que le concept MCM puisse débuterdans les meilleurs délais, Jean-Jacques ... a accepté de réglerle passif de Dauphiné News ; que, dans un premier temps, Louis ...,président-directeur général de la société Serepi a prêté à la société29 décembre 1989 ; que dans un deuxième temps, a été constituée unesociété Serecom, détenue à 99 % par la société Serepi, présidée parLouis Béra et ayant pour objet social l'exercice de toutes activitésde communication et d'expression ; que la société Serecom a rachetéle capital de la société Holding Dauphiné News pour 0 franc et aeffectué, entre les 9 janvier et 17 septembre 1990, un apport encompte courant de 5 260 000 francs à son profit ; que cet apportd'argent a permis à cette société de régler ses créanciers etd'éviter un dépôt de bilan ; que la société Serepi a alors constatéla perte des titres de la société Serecom en provisionnant leurvaleur dans les bilans de 1989 et de 1990 ; que, pour justifier cetteopération, Jean-Jacques ... a expliqué qu'il avait agi dans lecadre de la diversification des activités du groupe qui souhaitaitêtre présent dans le domaine de la communication comme le prouvait leprojet de rachat de la société Civis ;
qu'il a affirmé avoir été séduit par Frédéric ... et par lafinalité du concept MCM qui allait permettre à la société Lyonnaisedes Eaux de se rapprocher des collectivités territoriales, et avoirignoré l'implication du maire de Grenoble dans ces publications ;
mais que le projet de rachat de Civis ne présentait pas de paramètrecommun avec celui de Dauphiné News ; qu'en effet, cette entrepriseétait une agence de communication qui réalisait un chiffre d'affairesde 20 millions de francs et avait obtenu un oscar de la croissance ;
que malgré cette situation, le projet avait été abandonné en raisonde la taille de la société ; que dans ces conditions, il convient des'interroger sur l'intérêt que la reprise de Dauphiné News pouvaitconstituer pour la société Lyonnaise des Eaux, sachant que le groupevenait de licencier son personnel, n'avait plus d'activité et que saseule spécificité avait été de générer des pertes de 16 millions defrancs en neuf mois d'activité ; qu'il sera relevé que la procédurehabituelle suivie par la société Lyonnaise des Eaux en matière deprises de participation n'a pas été appliquée, cette opérationn'ayant pas été soumise à l'autorisation du comité d'investissement,Jean-Jacques ... en prenant seul, selon ses déclarations, laresponsabilité sans même en informer son supérieur hiérarchiquedirect, Bernard ..., directeur général de l'eau, qui a déclaréque la reprise de Dauphiné News n'avait rien à voir avec lacommunication auprès des élus et que le secteur média-presse n'avaitjamais présenté un intérêt particulier pour le groupe ; queJean-Jacques Prompsy ne peut soutenir avoir ignoré l'implicationd'Alain ... dans ce groupe de presse, alors qu'en 1987 et en1989, il était en négociation avec celui-ci et avec Jean-LouisDutaret sur le contrat de concession de l'eau ; qu'il ne pouvait pasne pas avoir eu connaissance, directement ou indirectement, de deuxarticles parus dans le Canard Enchaîné, les 1er et 8 février 1989, etrepris par d'autres organes de presse, qui faisaient état dufinancement du groupe Dauphiné News et des liens existant entre cegroupe et Alain ... ; que la connaissance que Jean-JacquesPrompsy avait de cette situation ressort des déclarations deMarc-Michel Merlin qui a affirmé que l'intéressé lui avait fait partde son intention d'acheter un journal qui était favorable au maire deGrenoble et avait sollicité son aide ; que ces éléments démontrentque la prise de participation de la société Lyonnaise des Eaux dansla société MCM, qui s'est concrétisée par la souscription de 5 % ducapital de cette société, n'était destinée qu'à justifier le paiementdes créanciers, en majorité grenoblois, de la société HoldingDauphiné News ; que le désintéressement de ces créanciers évitait undépôt de bilan qui n'aurait pas manqué de rejaillir sur la réputationdu maire de Grenoble compte tenu de son implication connue dans cegroupe de presse (cf arrêt, p 54 et 55) ;
" alors, de première part, que le caractère abusif de l'usage desbiens sociaux ne saurait se déduire de la seule illicéité du but danslequel cet usage est fait ; qu'en l'espèce, en considérant, pourdéclarer Louis ... coupable d'abus de biens sociaux, que lesopérations litigieuses étaient la contrepartie convenue en faveurd'Alain ... dans le pacte de corruption qui avait permis à la société Lyonnaise des Eaux d'obtenir une concession pour la sociétéCogese, filiale de sa propre filiale, la société Serepi, laquelleconcession était conforme aux intérêts sociaux de cette dernière etdonc de son autre filiale, la société Serecom, la cour d'appel n'apas tiré les conséquences légales de ses propres constatations auregard des textes susvisés ;
" alors, de deuxième part, que, en toute hypothèse, l'illicéité dubut poursuivi par le présumé complice d'un abus de biens sociaux nepeut caractériser l'usage abusif reproché au présumé auteurprincipal, au seul regard duquel doivent être appréciés les élémentsconstitutifs de l'infraction ; qu'en, l'espèce, en déduisant lafinalité illicite des opérations réalisée par les sociétés Serepi etSerecom avec le groupe de presse Dauphiné News d'un ensemble deconsidérations établissant tout au plus que ces opérations auraientété orchestrées par Jean-Jacques ..., poursuivi en qualité desimple complice d'abus de biens sociaux, en vue de procéder, encontrepartie de l'attribution de la concession, au renflouement duditgroupe de presse, sans autrement constater que telle avait égalementété la finalité poursuivie par Louis ..., recherché en qualitéd'auteur principal, ni même fait apparaître que celui-ci, à tout lemoins, avait connaissance de ce but frauduleux, la cour d'appel n'apas légalement caractérisé l'élément matériel de l'infraction,privant ainsi de tout fondement légal au regard des textes susvisésla déclaration de culpabilité de Louis ... ;
" alors, de troisième part, que dans ses conclusions d'appel,Jean-Jacques ... avait qualifié la constitution de la sociétéSerecom par la société Serepi puis l'apport en compte couranteffectué par celle-ci à la société Holding Dauphiné News, de " projetéconomique cohérent ", et avait soutenu que cet investissement neconstituait pas une diversification des activités du groupe de laLyonnaise des Eaux ; qu'en déclarant, au contraire, que, pourjustifier cette opération, Jean-Jacques ... expliquait avoir agidans le cadre de la diversification des activités du groupe quisouhaitait être présent dans le domaine de la communication, la courd'appel a dénaturé ces conclusions et entaché sa décision d'unecontradiction de motifs ;
" alors, de quatrième part, que l'usage fait par un dirigeantsocial des biens du crédit de la société n'est contraire aux intérêtsde celle-ci au sens de l'article 437-3° de la loi du 24 juillet 1966que s'il expose, sans contrepartie, l'actif de la société à un risquede perte ; qu'en l'espèce, selon les propres énonciations de l'arrêt,la société Serecom, qui avait racheté la société Holding DauphinéNews et lui avait fait un apport en compte courant, n'avait étéconstituée par la société Serepi, laquelle était égalementactionnaire de la société à qui avait été concédé le service de l'eaude la ville de Grenoble, qu'après la signature du contrat deconcession avec le maire de cette ville ; que, dès lors, enconsidérant, pour déclarer Louis ... coupable d'abus de bienssociaux, que la prise en charge du passif de la société HoldingDauphiné News par les sociétés Serepi et Serecom était dépourvue decontrepartie, après avoir relevé que, selon elle, le paiement dupassif du groupe de presse était intervenu en remerciement de laconcession attribuée à une société du même groupe ce qui suffisait àétablir la poursuite d'un intérêt social, la cour d'appel n'a pasdéduit les conséquences légales de ses propres constatations, enviolation des textes susvisés ;
" alors, de cinquième part, que, après avoir constaté que la société Cogese à qui avait été attribuée la concession et la sociétéSerecom qui avait pris le contrôle de la société Holding DauphinéNews, puis lui avait apporté une somme en compte courant, étaient desfiliales de la société Serepi que dirigeait Louis ..., la courd'appel devait rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si leconcours financier apporté par la société Serepi à la société depresse était dicté par un intérêt économique, social ou financiercommun, qu'elle devait apprécier au regard d'une politique élaboréeau sein du groupe, et si cet intérêt du groupe se trouvait ou non encontradiction avec les intérêts particuliers des sociétés liées ;
qu'en déclarant Louis ... coupable d'abus de biens sociaux, sansprocéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas légalementjustifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Alain ...,pris en ses troisième et quatrième branches et le quatrième moyenproposé pour Jean-Louis ...
Attendu que, pour déclarer Jean-Louis ... coupable d'abus debiens sociaux et Alain ... de recel d'abus de biens sociaux aupréjudice de la société Whip, l'arrêt attaqué retient que cettesociété, gérée par Jean-Louis ..., conseiller puis chargé demission auprès d'Alain ..., a pris en charge les cours d'anglaisde ce dernier et a mis gratuitement à sa disposition l'appartementqu'elle avait acquis à Paris ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que lacirconstance que la société Whip était alimentée par les versementsd'autres sociétés est sans incidence sur l'atteinte aux intérêtspropres de cette personne morale, résultant des agissements desprévenus, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre aux conclusionsinopérantes de Jean-Louis ..., a justifié sa décision ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Alain ...,pris en ses deux premières branches, les cinquième et neuvième moyensproposés pour Jean-Louis ... et les moyens des autresdemandeurs
Attendu que les demandeurs contestent que les dépenses engagéespar le groupe Merlin, pour l'appartement du boulevard Saint-Germain àParis et les voyages d'Alain ..., et par le groupe Lyonnaise desEaux pour des honoraires fictifs et la reprise de la société DauphinéNews, aient été contraires à l'intérêt des sociétés et à l'intérêt dugroupe, dès lors qu'elles ont eu pour contrepartie l'attribution dela concession du service des eaux de la ville de Grenoble à la société Cogese ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, les jugessoulignent que le coût des avantages consentis par les sociétésMerlin d'un montant total de près de 19 millions de francs s'inscritdans une " spirale folle de l'argent " et que leur montant" considérable " a permis d'obtenir " au prix fort " l'attribution dela concession ; qu'ils relèvent que Marc-Michel ... qui ne s'estpas pourvu contre sa condamnation des chefs d'abus de biens sociauxet de corruption active a reconnu avoir agi dans son intérêtpersonnel, en vue de conserver de bonnes relations avec le maire deGrenoble et a admis que les diverses libéralités consenties par lessociétés de son groupe à Alain ... et Jean-Louis ..., dontles sollicitations ont, selon lui, " frisé l'extorsion de fonds ",étaient contraires à l'intérêt social ;
Qu'après avoir rappelé l'importance des dépenses engagées par legroupe de la Lyonnaise des Eaux d'un montant de près de 12 millionsde francs les juges retiennent encore, pour établir l'abus de bienssociaux, que le rachat de la société Dauphiné News a été opéré sousla seule responsabilité de Jean-Jacques ..., qui n'a pas soumiscette décision à l'autorisation du comité d'investissement de laLyonnaise des Eaux, ni informé son supérieur hiérarchique direct ;
que ce dernier a désavoué Jean-Jacques ..., en précisant que lesecteur média-presse n'avait jamais présenté d'intérêt particulierpour le groupe et que l'intervention de la filiale Serecom pour unetelle prise de participation n'était pas conforme à la logiqueéconomique du groupe ; qu'ils ajoutent que Louis ..., président decette dernière société, en suivant les instructions de Jean-JacquesPrompsy, a agi de mauvaise foi, contrairement à l'intérêt dessociétés du groupe et à des fins personnelles, pour consolider sasituation au sein de la Lyonnaise des Eaux et donner satisfaction àdes personnes influentes ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel acaractérisé le délit d'abus de biens sociaux en tous ses éléments,notamment l'atteinte à l'intérêt social ;
Qu'en effet, quel que soit l'avantage à court terme qu'elle peutprocurer, l'utilisation des fonds sociaux ayant pour seul objet decommettre un délit tel que la corruption est contraire à l'intérêtsocial en ce qu'elle expose la personne morale au risque anormal desanctions pénales ou fiscales contre elle-même et ses dirigeants etporte atteinte à son crédit et à sa réputation ;
Que, dès lors, les moyens doivent être écartés ;
Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour Alain ... etpris de la violation des articles 460 du Code pénal abrogé en vigueur au moment des faits, 321-1 du nouveau Code pénal, 437-3° de la loi du24 juillet 1966 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs,manque de base légale
" en ce que Alain ... a été déclaré coupable de recel d'abusde biens sociaux pour avoir, en tant que dirigeant de fait dessociétés Holding Dauphiné News et Dauphiné News et en tant queprincipal bénéficiaire des versements, sciemment recelé la somme de5 360 000 francs provenant d'usage abusif des biens et du crédit dessociétés Serecom et Serepi ;
" alors, d'une part, qu'est receleur celui qui a personnellementet directement profité de l'infraction principale achevée ; qu'enl'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que les versementsconstitutifs d'abus de biens sociaux en date des 9 janvier et17 septembre 1990 ont bénéficié aux sociétés anonymes HoldingDauphiné News et Dauphiné News, de sorte qu'elle ne pouvait, sansvioler les textes susvisés, déclarer Alain ... coupable de receld'abus de biens sociaux dès lors que n'étant ni dirigeant de droit,ni actionnaire des sociétés bénéficiaires, il n'a pas personnellementet directement profité des versements incriminés ;
" alors, d'autre part, et à titre subsidiaire, que la direction defait s'entend exclusivement de l'exercice, direct ou indirect, de ladirection, l'administration ou la gestion de la société aux lieu etplace de ses représentants légaux ; qu'en se bornant à releverl'implication d'Alain ... dans le fonctionnement du groupeDauphiné News par le biais de conseils ou suggestions, sans constateraucun acte positif de direction ou de gestion, la cour d'appel n'apas caractérisé la qualité de dirigeant de fait du prévenu ;
" alors, enfin, que le recel constitue une infraction deconséquence qui suppose, à titre préalable, un crime ou un délitfondamental ; qu'en l'espèce, la cour d'appel constate que lesversements litigieux ont été réalisés postérieurement à la cessiondes sociétés du groupe Dauphiné News à la société Lyonnaise des Eaux,d'où il résulte qu'à cette date, Alain ... ne pouvait plus enêtre le bénéficiaire, puisque par le fait de cette cession, iln'était plus dirigeant de fait des sociétés bénéficiaires ; qu'enretenant, néanmoins, la culpabilité du prévenu du chef de receld'abus de biens sociaux, l'arrêt attaqué a violé les textes susviséset doit être annulé " ;
Attendu que, pour déclarer Alain ... coupable de recel desabus de biens sociaux commis par Louis ... au préjudice des sociétésSerecom et Serepi, la cour d'appel retient que les apports en comptecourant réalisés par ces deux sociétés, à hauteur de5 000 000 francs, afin de combler le passif du groupe Dauphiné News,ont bénéficié à Alain ..., qui en a assuré en fait, de façonconstante, la direction ainsi que le financement et a organisé lecomblement reproché ; qu'elle ajoute que le désintéressement descréanciers évitait une déclaration de cessation des paiements quin'eût pas manqué de rejaillir sur la réputation du maire de Grenoble,compte tenu de son implication notoire dans ce groupe de presse ;
Attendu qu'en se déterminant de la sorte, l'arrêt attaqué n'aviolé aucun des textes visés au moyen ;
Qu'en effet, d'une part, les articles 460 ancien et 321-1 nouveaudu Code pénal, conçus en termes généraux, atteignent tous ceux qui,en connaissance de cause, ont, par un moyen quelconque, bénéficié duproduit d'un crime ou d'un délit ; que, d'autre part, ces textesn'exigent pas que le prévenu ait tiré un profit personnel des chosesrecelées ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;
Sur le sixième moyen de cassation proposé pour Alain ... etpris de la violation des articles 177 du Code pénal abrogé, envigueur au moment des faits, 432-11 du nouveau Code pénal et 593 duCode de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain ... coupable dudélit de corruption passive pour avoir, entre les années 1984 et1993, bénéficié des dons, présents et avantages consentis par lessociétés du groupe Merlin, représentées par Marc-Michel ... et la société Lyonnaise des Eaux, représentée par Jean-Jacques ...,pour l'accomplissement d'un acte de sa fonction, en l'espèce, ladélégation du service des eaux et assainissement de la ville deGrenoble à la société Cogese dont les actionnaires majoritaires sontles sociétés SDEI (groupe Merlin) et Serepi (Lyonnaise des Eaux) ;
" alors, d'une part, que l'agrément d'avantages, par une personnedépositaire de l'autorité publique, n'est punissable qu'autant qu'ilintervient à titre de contrepartie d'un acte de sa fonction enexécution d'un accord de volontés entre le corrupteur et lecorrompu ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué, qui se borne à constaterl'intérêt très vif de Marc-Michel ... pour le projet de concessiondu service des eaux de Grenoble et les avantages dont il aurait faitbénéficier Alain ... pendant plusieurs années pour être" présent dans la compétition " et obtenir le contrat de concession,n'a pas caractérisé un pacte de corruption, mais une forme desurenchère qui n'entre pas dans les prévisions de l'article 432-11 duCode pénal ;
" alors, d'autre part, que la cour d'appel énonce que le3 octobre 1987, le choix du groupe Merlin et de la société Lyonnaisedes Eaux a été officialisé entre les différents partenaires (p 28) ;
que, toujours selon la cour d'appel, le rôle de Jean-Jacques ... les négociations du contrat de concession qui ont suivi, lesrelations qu'il a eues avec Alain ... à ce sujet, la nature etl'importance des avantages dont celui-ci a bénéficié à compter dudébut de l'année 1989 démontrent qu'il aurait été convenu entreJean-Jacques Prompsy et Alain ... antérieurement au contrat deconcession que les versements seraient effectués au bénéfice du mairede Grenoble par la société Lyonnaise des Eaux en contrepartie del'attribution de cette concession (p 64) ;
" qu'il résulte de ces constatations, qu'au 3 octobre 1987, date àlaquelle la décision sur la concession du service de l'eau a étéprise, aucun pacte de corruption n'a été conclu entre Alain Carignonet Jean-Jacques ... ; que l'existence d'un accord de volontésentre le corrupteur et le corrompu, qui est un élément essentiel dudélit de corruption, ne peut être déduite de prétendus avantagespostérieurs à l'acte litigieux, en l'occurrence l'attribution de laconcession du service des eaux, les avantages consentis enremerciement de l'acte de sa fonction n'étant pas constitutif dudélit de corruption ; que la cour d'appel, qui caractérise laparticipation de Jean-Jacques ... à la négociation de laconcession du service de l'eau, ne caractérise pas sa participation àune négociation sur les avantages qu'en aurait tirés Alain ...,c'est-à-dire sa participation au pacte corruptif ; que, dès lors, lacour d'appel, qui n'a pas caractérisé les éléments constitutifs dudélit de corruption, a privé sa décision de tout motif ;
" alors, enfin, que, pour caractériser la corruption, les juges dufond doivent constater l'antériorité des avantages sollicités oureçus par rapport à l'action fautive sollicitée ; qu'en l'espèce, lacour d'appel a constaté que la majeure partie des avantages perçusétait postérieure à l'attribution de la concession du service deseaux, de sorte que le délit de corruption, qui exige que lesavantages aient déterminé le corrompu, n'est pas caractérisé " ;
Sur le sixième moyen de cassation " complémentaire " proposé pourAlain Carignon et pris de la violation des articles 177 du Code pénalabrogé en vigueur au moment des faits, 432-11 du nouveau Code pénalet 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de baselégale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain ... coupable dudélit de corruption passive pour avoir, entre les années 1984 et1993, bénéficié des dons, présents et avantages consentis par lessociétés du groupe Merlin, représentées par Marc-Michel ..., et la société Lyonnaise des Eaux, représentée par Jean-Jacques ...,pour l'accomplissement d'un acte de sa fonction, en l'espèce, ladélégation du service des eaux et assainissement de la ville deGrenoble à la société Cogese dont les actionnaires majoritaires sontles sociétés Sedi (groupe Merlin) et Serepi (Lyonnaise des eaux) ;
" alors que le "pacte de corruption" ne se présume pas, les jugesdu fond devant établir que le corrompu allégué a sollicité ou agréé,sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses,dons, présents ou avantages quelconques pour accomplir un acte de safonction ou de son mandat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'estbornée à énoncer que le choix du groupe Merlin et de la sociétéLyonnaise des Eaux avait été officialisé entre les différentspartenaires le 3 octobre 1987, que les contrats de lobbying concluspar la société la Lyonnaise des Eaux et le groupe Merlin auprès de la société Whip apparaissaient lésionnaires, et que les opérationsréalisées par la société Lyonnaise des Eaux au sein du groupe depresse Dauphiné News étaient inopportunes, pour conclure qu'ayantindirectement profité à Alain ..., les versements effectués dansle cadre de ces deux séries d'opérations critiquables constituaientnécessairement, dans leur contexte, une contrepartie convenue pourl'obtention de la concession ; qu'il en était de même pourl'acquisition de l'appartement du boulevard Saint-Germain par legroupe Merlin ; qu'en tenant ainsi pour acquise, hors toute preuvedirecte d'un accord, d'une promesse ou d'une offre quelconque,l'existence d'un pacte de corruption à raison du caractère selon elle" anormal " des séries d'opérations en cause, caractère anormalqu'elle n'a précisément déduit que de la supposition d'un pactecorruptif préalable, la cour d'appel n'a rien fait d'autre queprésumer l'élément matériel de l'infraction, qu'elle n'a ainsi paslégalement caractérisée au regard des textes susvisés " ;
Sur le sixième moyen de cassation proposé pour Jean-Louis ... pris de la violation des articles 121-6, 121-7, 432-11 du Codepénal, 388 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droitsde la défense, du principe du contradictoire, de l'interprétationstricte de la loi pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegardedes droits de l'homme et des libertés fondamentales, manque de baselégale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Louis ... coupablede complicité de corruption passive et l'a condamné de ce chef ;
" aux motifs que le prévenu, un des plus proches conseillersd'Alain ..., a participé de manière très active au contrat deconcession de service public de la ville de Grenoble ; qu'il étaitprésent au déjeuner du 3 octobre 1987 et qu'il a pris part auxnégociations qui ont suivi ; qu'il a représenté Alain ... auxnouvelles négociations de 1989 ; qu'il a bénéficié de l'appartementdu boulevard Saint-Germain entre 1986 et 1988 et qu'il est à l'origine de la création de Whip qu'il a dirigée de 1988 à 1993 ;
qu'il savait que les avantages dont bénéficiait cette société étaientune contrepartie à l'attribution de la concession du service des eauxde la ville de Grenoble à leur profit ; qu'il est ainsi établi queJean-Louis Dutaret a aidé et assisté, en connaissance de cause, AlainCarignon dans l'accomplissement d'un acte relevant de sa fonction demaire, en l'espèce, la concession du service public des eaux de laville de Grenoble à la société Cogese en contrepartie du versement dedons, présents et avantages consentis par Marc-Michel ... etJean-Jacques Prompsy ; qu'il s'est ainsi rendu complice du délit decorruption reproché à Alain ... ;
" 1o alors que les juridictions correctionnelles ne peuventstatuer légalement que sur les faits relevés par l'ordonnance qui lesa saisies ; que l'ordonnance qui a renvoyé Jean-Louis ... devantla juridiction correctionnelle du chef de complicité de corruption,visait uniquement le fait, pour ce dernier, d'avoir apporté son aideet assistance dans l'accomplissement d'un acte relevant de lafonction du maire de Grenoble, en l'occurrence la concession duservice public des eaux et assainissement de la ville de Grenoble encontrepartie de dons consentis par Marc-Michel ... et Jean-JacquesPrompsy ; que les premiers juges ont admis que seules l'aide etl'assistance à l'accomplissement d'un acte de l'élu étaientreprochées à Jean-Louis ... ; qu'il ne résulte pas de l'arrêt quele prévenu ait accepté d'être jugé sur la perception descontreparties à l'acte de corruption matérialisées par l'utilisationde l'appartement parisien et les avantages consentis à la sociétéWhip, perception représentant un nouvel acte de complicité distincten ses éléments constitutifs de celui visé à la prévention ; que lacour d'appel a ajouté aux faits de la poursuite et a ainsi excédé sespouvoirs et méconnu le principe du contradictoire ;
" 2o alors que le délit de corruption est une infraction formellequi se consomme indépendamment du résultat ; que, dès lors,l'accomplissement d'un acte de la fonction par l'élu en contrepartiedes offres prévues par le pacte de corruption n'est pas un élémentconstitutif de l'infraction ; qu'en conséquence, le seul fait d'avoirparticipé à la signature du contrat de concession du service publicdes eaux n'est pas un acte de complicité punissable selon les termesde l'article 121-7 du Code pénal ; qu'en décidant le contraire, lesjuges d'appel ont faussement appliqué la loi pénale et violé lestextes susvisés " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Jean-JacquesPrompsy et pris de la violation de la présomption d'innocence poséepar l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droitsde l'homme et des libertés fondamentales et par l'article 9 de laDéclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789reprise dans le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, desarticles 433-1 et suivants du nouveau Code pénal et 177 et suivantsde l'ancien code pénal, 1134 du Code civil, 388 et 593 du Code deprocédure pénale, excès de pouvoir, manque de base légale, défaut etcontradiction de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Jacques ... de corruption active et l'a condamné à la peine de 3 annéesd'emprisonnement dont 2 années avec sursis et de 400 000 francsd'amende à raison, d'une part, de versements effectués au titre d'uncontrat de lobbying conclu entre la société Lyonnaise des Eaux et la société Whip et, d'autre part, du comblement du passif du groupe depresse Dauphiné News ;
" aux motifs qu'Alain ... a pris la décision de concéder leservice des eaux de la ville de Grenoble à la fin de l'année 1985 ;
que le 3 octobre 1987, le choix du groupe Merlin et de la sociétéLyonnaise des Eaux a été officialisé entre les différentspartenaires ; que des négociations approfondies ont alors eu lieuentre les parties, mais n'ont pas eu de suite immédiate en raison dela volonté d'Alain ... de ne pas engager un tel processus avantune échéance électorale ; que les discussions ont repris en 1989 avec les mêmes partenaires et sur des bases identiques à cellesenvisagées antérieurement et ont abouti à la concession du servicedes eaux à la Cogese intervenue par un contrat du 3 novembre 1989
(cf arrêt, p 26 à 28) ; que le rôle de Jean-Jacques ... dansles négociations du contrat de concession, les relations qu'il a euesavec Alain ... à ce sujet, la nature et l'importance desavantages dont a bénéficié celui-ci à compter du début de l'année1989, alors même que les dépenses engagées n'étaient d'aucune utilitépour la société Lyonnaise des Eaux, démontrent qu'il avait étéconvenu entre Jean-Jacques ... et Alain ..., antérieurementau contrat de concession, que des versements seraient effectués aumaire de Grenoble, par la société Lyonnaise des Eaux, en contrepartiede l'attribution de cette concession ; que c'est en exécution de cetaccord que Jean-Jacques ... a signé le contrat de prestation deservices avec la société Whip, le 4 janvier l989, et qu'il a ensuiteaccepté, à la fin de l'été 1989, de combler le passif de la sociétéDauphiné News qu' Alain ... dirigerait en fait ; que, certes,des versements sont intervenus après la signature du contrat deconcession, mais qu'ils ont été effectués en exécution d'un accordantérieur dont la finalité était l'attribution de la concession(cf arrêt, p 64) ;
" qu'il est reproché à Jean-Jacques ..., au titre du délit decorruption, d'avoir en contrepartie de l'attribution du service deseaux de la ville de Grenoble, fait supporter par la trésorerie de la société Lyonnaise des Eaux des versements d'honoraires à la sociétéWhip pour un montant de 2 200 000 francs (cf arrêt, p 43) ; que parcontrat du 4 janvier 1989, la société Lyonnaise des Eaux, sous lasignature de Jean-Jacques ..., directeur commercial de la sociétéLyonnaise des Eaux et de l'eau pour la France, s'est engagée à verserà la société Whip des honoraires d'un montant de 120 000 francs encontrepartie d'un forfait de 150 heures de prestations semestrielles,pour assurer sa représentation auprès de toutes personnes et entitésfrançaises ou internationales, dans le but de favoriser ledéveloppement de ses activités ; que ce contrat a été conclu pour unedurée de six mois, renouvelable à l'expiration de la période, pour unan, par tacite reconduction ; que des avenants de 1989, 1991 et 1992ont étendu la mission de la société Whip et augmenté le montant de larémunération ; qu'en exécution de ce contrat, la société Whip a,entre 1988 (sic) et 1993, facturé les honoraires suivants à la société Lyonnaise des Eaux exercice 1989 420 000 francs,exercice 1990 150 000 francs, exercice 1991 550 000 francs,exercice 1992 600 000 francs, exercice 1993 500 000 francs, soitau total 2 220 000 francs ; qu'il est constant que la société Whip aadressé à la société Lyonnaise des Eaux un certain nombre dedocuments se rapportant à la réglementation européenne ; que s'iln'est pas possible de dire que l'ensemble de cette documentation estsans valeur, il n'est toutefois pas établi qu'elle ait présenté unintérêt direct pour cette société malgré les déclarations unanimes deses responsables qui n'ont, cependant, pas pu préciser en quoi cetapport d'informations présentait un intérêt pour eux, ni quelbénéfice ils avaient pu en tirer pour leur entreprise ; que, de plus,la cour ne peut que s'étonner qu'une société de l'importance de la société Lyonnaise des Eaux ait attendu cette date pour s'aviser del'importance de la réglementation européenne dans la vie desaffaires ; qu'il sera également relevé que l'objet principal ducontrat consistait en actions de lobbying et non en la fournitured'une documentation sur la réglementation européenne qui ne seraprévue que dans un avenant du 5 mai 1989 ; que, s'agissant desactions de lobbying, cette activité n'a été que très réduite, qu'ellea consisté en quelques démarches auprès de fonctionnaires européens,démarches qui n'ont abouti à aucun résultat concret ; que de plusaucune trace matérielle de cette activité de lobbying n'a pu êtreproduite par la société Lyonnaise des Eaux et que les rapportsmensuels contractuellement prévus n'ont pas été retrouvés ; que surl'activité réelle de la société Whip, il a déjà été conclu (à proposdu groupe Merlin) à une absence de production de l'antenneparisienne, à un travail à Bruxelles dont a principalement bénéficiéle cabinet d'avocats de Jean-Louis ... et à un arrêt des servicesrendus par la responsable de ce bureau à compter de juin 1991 ; qu'ennovembre 1990, la société Lyonnaise des Eaux a confié au cabinetd'expertise comptable Mazars une mission d'étude sur les sociétés dugroupe Merlin ;
que, dans son rapport, ce cabinet a relevé que, parmi les frais dedeux filiales, figuraient des versements d'honoraires à la sociétéWhip qui lui sont apparus élevés au regard des services procurés ;
que cette mention ne pouvait qu'attirer l'attention de la sociétéLyonnaise des Eaux qui depuis 2 ans versait aussi des honoraires à la société Whip que, malgré cette situation, après le rachat de ces deuxfiliales par la société Lyonnaise des Eaux, celle-ci a continué àhonorer les factures de la société Whip, n'ignorant pas que deuxautres sociétés du groupe étaient facturées pour des prestationsidentiques ; que s'il s'était agi d'une facturation normale, la société Lyonnaise des Eaux n'aurait pu que s'inquiéter de la valeurdes prestations fournies et n'aurait certainement pas continué àpayer trois fois la charge d'un même service ; qu'il résulte de ceséléments que les honoraires réglés par la société Lyonnaise des Eauxne correspondaient à aucune activité réelle et étaient destinés,comme ceux supportés par le groupe Merlin, à lui assurer de latrésorerie afin de régler les échéances de l'emprunt contracté pourl'achat de l'appartement du boulevard Saint-Germain destiné à l'usaged'Alain Carignon (cf arrêt, p 47 et 48) ; qu'il a été démontré queles honoraires versés par la société Lyonnaise des Eaux à la sociétéWhip étaient fictifs ; que ces dépenses n'avaient aucune utilité ;que même si Jean-Jacques ... a quitté la direction de l'eau à lafin de l'année 1989, il est resté dans l'entreprise et n'a pu quecontinuer à s'occuper de l'exécution des engagements pris, comptetenu de leur nature (cf arrêt, p 64) ;
" que le groupe Dauphiné News était composé de 3 sociétés dirigéespar Frédéric ... la société Holding Dauphiné News, la sociétéDauphiné News ayant pour objet la fondation, la publication etl'exploitation de tous journaux quotidiens ou périodiques et ayantédité du mois d'octobre 1988 au mois de juin 1989, le magazineDauphiné News, vendu en kiosque 15 puis 18 francs, et la société Newsgratuit, ayant pour objet la publication de journaux et ayant éditéles bi-hebdomadaires gratuits News mardi et News vendredi qui ont étédistribués dans les boîtes aux lettres de l'agglomération grenobloiseà 150 000 exemplaires de février à fin avril 1989 (cf arrêt,p 50) ; qu'il est reproché à Jean-Jacques ... d'avoir donné desinstructions à Louis ..., président-directeur général des sociétésSerepi et Serecom, afin que la société Holding Dauphiné News etFrédéric Mougeolle bénéficient de versements à hauteur de6 129 400 francs qui constituaient une contrepartie à l'attributionde la concession du service des eaux de la ville de Grenoble à la société Lyonnaise des Eaux (arrêt, p 52) ; que le groupe DauphinéNews a, dès le début de son activité, rencontré des difficultés detrésorerie qui ne feront que s'aggraver pour aboutir à des pertesimportantes malgré les appuis financiers conséquents des groupesMerlin, Ciments-Vicat, Bouygues et de Serge ... ; qu'à la fin del'été 1989, Frédéric ... a, par l'intermédiaire de Jean-LouisDutaret, rencontré Jean-Jacques ..., directeur commercial à la société Lyonnaise des Eaux, à qui il a exposé ses projets de créationd'une nouvelle société MCM ayant pour objet l'élaboration de journauxde ville ; que Jean-Jacques ... a été séduit par cette idée quiallait permettre à sa société de se faire connaître des collectivitésterritoriales ; que, pour éviter un dépôt de bilan et afin que leconcept MCM puisse débuter dans les meilleurs délais, Jean-JacquesPrompsy a accepté de régler le passif de Dauphiné News ; que, dans unpremier temps, Louis Béra président-directeur général de la sociétéqui ont été remboursés le 29 décembre 1989 ; que, dans un deuxièmetemps, a été constituée une société Serecom, détenue à 99 % par la société Serepi, présidée par Louis ... et ayant pour objet sociall'exercice de toutes activités de communication et d'expression ; quela société Serecom a racheté le capital de la société HoldingDauphiné News pour 0 franc et a effectué, entre les 9 janvier et17 septembre 1990, un apport en compte courant de 5 260 000 francs àson profit ; que cet apport d'argent a permis à cette société derégler ses créanciers et d'éviter un dépôt de bilan ; que la sociétéSerepi a alors constaté la perte des titres de la société Serecom enprovisionnant leur valeur dans les bilans de 1989 et de 1990 ; que,pour justifier cette opération, Jean-Jacques ... a expliqué qu'ilavait agi dans le cadre de la diversification des activités du groupequi souhaitait être présent dans le domaine de la communication commele prouvait le projet de rachat de la société Civis ; qu'il a affirméavoir été séduit par Frédéric ... et par la finalité du conceptMCM qui allait permettre à la société Lyonnaise des Eaux de serapprocher des collectivités territoriales, et avoir ignorél'implication du maire de Grenoble dans ces publications ;
mais que le projet de rachat de Civis ne présentait pas de paramètrecommun avec celui de Dauphiné News ; qu'en effet, cette entrepriseétait une agence de communication qui réalisait un chiffre d'affairesde 20 millions de francs et avait obtenu un oscar de la croissance ;
que malgré cette situation, le projet avait été abandonné en raisonde la taille de la société ; que dans ces conditions, il convient des'interroger sur l'intérêt que la reprise de Dauphiné News pouvaitconstituer pour la société Lyonnaise des Eaux, sachant que le groupevenait de licencier son personnel, n'avait plus d'activité et que saseule spécificité avait été de générer des pertes de 16 millionsde francs en neuf mois d'activité ; qu'il sera relevé que laprocédure habituelle suivie par la société Lyonnaise des Eaux enmatière de prises de participation n'a pas été appliquée, cetteopération n'ayant pas été soumise à l'autorisation du comitéd'investissement, Jean-Jacques ... en prenant seul, selon sesdéclarations, la responsabilité sans même en informer son supérieurhiérarchique direct, Bernard ..., directeur général de l'eau, quia déclaré que la reprise de Dauphiné News n'avait rien à voir avec lacommunication auprès des élus et que le secteur média-presse n'avaitjamais présenté un intérêt particulier pour le groupe ; queJean-Jacques Prompsy ne peut soutenir avoir ignoré l'implicationd'Alain ... dans ce groupe de presse, alors qu'en 1987 et en1989, il était en négociation avec celui-ci et avec Jean-LouisDutaret sur le contrat de concession de l'eau ; qu'il ne pouvait pasne pas avoir eu connaissance, directement ou indirectement, de deuxarticles parus dans le Canard Enchaîné, les 1er et 8 février 1989, etrepris par d'autres organes de presse, qui faisaient état dufinancement du groupe Dauphiné News et des liens existant entre cegroupe et Alain ... ; que la connaissance que Jean-JacquesPrompsy avait de cette situation ressort des déclarations deMarc-Michel Merlin qui a affirmé que l'intéressé lui avait fait partde son intention d'acheter un journal qui était favorable au maire deGrenoble et avait sollicité son aide ; que ces éléments démontrentque la prise de participation de la société Lyonnaise des Eaux dansla société MCM, qui s'est concrétisée par la souscription de 5 % ducapital de cette société, n'était destinée qu'à justifier le paiementdes créanciers, en majorité grenoblois, de la société HoldingDauphiné News ; que le désintéressement de ces créanciers évitait undépôt de bilan qui n'aurait pas manqué de rejaillir sur la réputationdu maire de Grenoble compte tenu de son implication connue dans cegroupe de presse (cf arrêt, p 54 et 55) ;
" alors, de première part, que le "pacte de corruption" ne seprésume pas, les juges du fond devant établir que le corrupteurallégué a proposé, sans droit, des offres, promesses, dons, présentsou avantages quelconques, en vue d'obtenir du corrompu supposé qu'ilaccomplisse un acte de sa fonction ou de son mandat ; qu'en l'espèce,la cour d'appel s'est bornée à énoncer que le choix du groupe Merlinet de la société Lyonnaise des Eaux avait été officialisé entre lesdifférents partenaires le 3 octobre 1987, que les contrats delobbying conclu par la société Lyonnaise des Eaux auprès de la société Whip apparaissaient lésionnaires et que les opérationsréalisées par la société Lyonnaise des Eaux au sein du groupe depresse Dauphiné News étaient inopportunes, pour conclure qu'ayantindirectement profité à Alain ..., les versements effectués dansle cadre de ces deux séries d'opérations critiquables constituaientnécessairement, dans leur contexte, une contrepartie convenue pourl'obtention de la concession ; qu'en tenant ainsi pour acquise, horstoute preuve directe d'un accord, d'une promesse ou d'une offrequelconque, l'existence d'un pacte de corruption à raison ducaractère, selon elle " anormal " des deux séries d'opérations encause, caractère anormal qu'elle n'a précisément déduit que de lasupposition d'un pacte corruptif préalable, la cour d'appel n'a rienfait d'autre que présumer l'élément matériel de l'infraction qu'ellen'a ainsi pas légalement caractérisée au regard des textessusvisés ;
" alors, de deuxième part, que le délit de corruption n'estconstitué que si le pacte passé entre le corrupteur et le corrompu aprécédé l'acte ou l'abstention qu'il avait pour objet de rémunérer ;
qu'il résulte des propres énonciations de l'arrêt que "la décision deconcéder le service des eaux de la ville de Grenoble à la sociétéLyonnaise des Eaux et au groupe Merlin "aurait été" officialisée à l'occasion du déjeuner du 3 octobre 1987, au cours duquel a égalementété décidée la participation de chacun des deux groupes dans cetteopération, puis que ce serait en exécution de cet accord, queJean-Jacques Prompsy avait signé un contrat de prestation de servicesavec la société Whip, le 4 janvier 1989, et avait donné l'ordre decombler le passif des sociétés Holding Dauphiné News et DauphinéNews, à la fin de l'année 1989 ; qu'après avoir constaté que laconcession aussi bien que ses modalités d'exécution étaient acquisesdès 1987, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître la portéelégale de ses constatations, considérer que les versements intervenusà partir de 1989 au profit de sociétés constituées postérieurement auprétendu pacte, avaient pu déterminer des décisions antérieuresofficialisées par celui-ci ; qu'en déclarant Jean-Jacques ... de corruption active, la cour d'appel a violé les textessusvisés ;
" alors, de troisième part, que, subsidiairement, lesjupridictions correctionnelles ne peuvent statuer légalement que surles faits relevés par l'ordonnance qui les a saisies ; qu'aux termesde l'ordonnance de renvoi, il était seulement reproché à Jean-JacquesPrompsy d'avoir été à l'origine de versements opérés " courant 1990 "et " entre 1989 et 1993 " ; que, dans l'hypothèse qui a été celle dela cour d'appel, à savoir que les versements déterminant le contrat de concession du 3 novembre 1989 ont été effectués, à partir du moisde janvier 1989, en exécution du seul pacte de corruption qui auraitété conclu, selon les propres énonciations de l'arrêt, le3 octobre 1987, la condamnation se trouve fondée sur des faits nonrelevés dans l'ordonnance de renvoi ; qu'en déclarant de la sorteJean-Jacques Prompsy coupable de corruption active, la cour d'appel améconnu l'étendue de la saisine, excédé ses pouvoirs et violé lestextes susvisés ;
" alors, de quatrième part, qu'après avoir constaté que,conformément aux stipulations contractuelles par lesquelles la société Lyonnaise des Eaux avait chargé la société Whip, le4 janvier 1989, d'une mission de représentation auprès de touteinstitution française ou internationale et, le 5 mai 1989, aux termesd'un avenant conclu et signé par Bernard ..., directeur généralde la société Lyonnaise des Eaux et supérieur hiérarchique deJean-Jacques Prompsy, d'une mission de collecte d'informations sur laréglementation européenne, ladite société Whip, qui disposait depuisle 1er janvier 1989 d'un bureau à Bruxelles où travaillaient deuxsalariés et une consultante, avait fourni un ensemble de documents serapportant à la réglementation européenne et avait effectué desdémarches auprès de fonctionnaires européens, la cour d'appel nepouvait, pour déclarer Jean-Jacques ... coupable de corruption,affirmer que les honoraires versés ne correspondaient pas à uneactivité réelle, sans méconnaître la portée légale de ses propresconstatations ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violéles textes susvisés ;
" alors, de cinquième part, que la contradiction de motifséquivaut au défaut de motifs ; qu'en déclarant, d'une part, que la société Whip avait fourni à la société Lyonnaise des Eaux un ensemblede documents se rapportant à la réglementation européenne et avaiteffectué des démarches auprès de fonctionnaires européens et, d'autrepart, qu'aucune trace matérielle de l'activité de lobbying n'avait puêtre produite par la société Lyonnaise des Eaux, la cour d'appel aentaché sa décision d'un défaut de motifs ;
" alors, de sixième part, que c'est au ministère public et auxparties civiles, demandeurs au procès pénal, qu'il incombe de prouverla culpabilité du prévenu ; que, pour déclarer Jean-Jacques ... de corruption, la cour d'appel lui a reproché de ne pasavoir établi que la documentation sur la réglementation communautairefournie par la société Whip, avait présenté un intérêt direct pour la société Lyonnaise des Eaux ; qu'en se déterminant de la sorte, lacour d'appel a renversé la charge de la preuve et fait peser uneprésomption de responsabilité que la loi n'édicte pas ;
" alors, de septième part, qu'après avoir constaté que la sociétéWhip avait adressé à la société Lyonnaise des Eaux un certain nombrede documents se rapportant à la réglementation européenne et " qu'iln'est pas possible de dire que l'ensemble de cettedocumentation () est sans valeur " (arrêt, p 47), et alors mêmeque trois témoins cités en première instance (MM ..., ... etd'Ouince) avaient précisé sous serment tout à la fois l'utilité,l'intérêt et l'efficacité des prestations de la société Whip(jugement, p 99), et alors encore que M. ..., expert judiciaire,avait déclaré à l'audience devant le tribunal que " 120 000 francspeut correspondre au prix des prestations fournies à la Lyonnaise desEaux " (cf notes d'audience), somme correspondant aux seulspaiements dont Jean-Jacques ... avait eu la responsabilité dansle cadre de ses fonctions, la cour d'appel a, néanmoins, considéré,pour déclarer ce dernier coupable de corruption, qu'il n'aurait " pasété établi que la documentation fournie ait présenté un intérêtdirect pour la société " (arrêt, p 48) et que ces dépenses" n'étaient d'aucune utilité pour la société Lyonnaise des Eaux "(arrêt p 64) ; qu'en déclarant, dans ces conditions, Jean-JacquesPrompsy coupable de corruption active, sans s'expliquer ni surl'absence d'intérêt direct, ni sur l'absence d'utilité de cettedocumentation, ni davantage sur une disproportion entre le servicerendu et les honoraires facturés, la cour d'appel, qui n'a pascaractérisé la prétendue fictivité des honoraires, a privé sadécision de toute base légale au regard des textes susvisés ;
" alors, de huitième part, que, dans ses conclusions d'appel(p 41), Jean-Jacques ... avait fait valoir que le coût duservice de lobbying n'avait pas été excessif, en offrant en preuve lecoût d'une étude analogue effectuée par un autre prestataire deservice ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la courd'appel a violé derechef les textes susvisés ;
" alors, de neuvième part, qu'en justifiant du caractèreprétendument fictif des honoraires versés à la société Whip parréférence à des éléments de preuve issus du rapport de l'expert,.... ..., sans répondre aux conclusions de Jean-Jacques Prompsy(p 37 et 38) critiquant ce rapport, dont les conclusions avaient étéétablies, ainsi que ledit expert en avait témoigné à l'audience enpremière instance, sans examen préalable des scellés effectués auprèsde la société Lyonnaise des Eaux, et après avoir sous-traité unepartie de sa mission, la cour d'appel a entaché sa décision d'undéfaut de motifs ;
" alors, de dixième part, que dans ses conclusions d'appelJean-Jacques Prompsy avait qualifié l'investissement de la sociétéSerepi de projet économique cohérent et soutenu que celui-ci neconstituait pas une diversification des activités du groupe de laLyonnaise des Eaux ; qu'en déclarant, au contraire, que pourjustifier cette opération, Jean-Jacques ... expliquait avoir agidans le cadre de la diversification des activités du groupe quisouhaitait être présent dans le domaine de la communication, la courd'appel a méconnu le sens et la portée de ces conclusions et entachésa décision d'une contradiction de motifs ;
Les moyens étant réunis ; Attendu que, pour déclarer Alain ... coupable de corruptionpassive, Jean-Louis ... coupable de complicité de ce délit etJean-Jacques Prompsy coupable de corruption active, les jugesénoncent qu'entre les années 1984 et 1993, Alain ... abénéficié, directement ou indirectement, en toute connaissance decause, avec l'aide et l'assistance de Jean-Louis ..., pour lapériode de 1986 à 1993, des dons, présents ou avantages susrappelésde la part de Marc-Michel ..., en vue de la concession à songroupe du service des eaux de la ville de Grenoble et en exécutiond'un pacte de corruption conclu à la fin de l'année 1985 ; qu'ilsretiennent encore qu'Alain ... a bénéficié en 1990, pourl'accomplissement du même acte de sa fonction en faveur de la sociétéCogese, d'avantages consentis par des filiales de la Lyonnaise desEaux au groupe Dauphiné News qu'il dirigeait en fait, grâce à lacomplicité de Jean-Louis ... qui a pris une part active tant à l'accord de principe du 3 octobre 1987 qu'à la conclusion du contratde concession du 3 novembre 1989 ;
Attendu que, si la juridiction du second degré admet que certainsversements sont intervenus après la signature du contrat deconcession, elle souligne qu'ils ont été effectués en exécution d'unaccord antérieur dont la finalité était l'attribution de cetteconcession ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, déduites de sonappréciation souveraine des circonstances de la cause et des élémentsde preuve soumis au débat contradictoire, la cour d'appel, qui astatué dans les limites de la prévention et répondu comme elle ledevait aux conclusions des parties, a caractérisé en tous leurséléments constitutifs les délits dont elle a déclaré les demandeurscoupables ;
Qu'en effet, il n'importe que des dons, présents ou avantagesaient été acceptés par une personne investie d'un mandat électifpublic postérieurement à l'accomplissement de l'acte de la fonction,le délit de corruption, consommé dès la conclusion du pacte entre lecorrupteur et le corrompu, se renouvelant à chaque acte d'exécutiondudit pacte ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le septième moyen de cassation proposé pour Alain ... etpris de la violation des articles 434-15 du Code pénal et 593 du Codede procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain ... coupable dudélit de subornation de témoin sur M. ... ;
" aux motifs que quelques jours après le 1er juillet 1994, date deson audition par le magistrat instructeur, M. ... avait reçu unappel téléphonique d'Alain ..., alors ministre de laCommunication, qui lui avait reproché ses déclarations qui risquaientd'entraîner sa mise en examen et l'avait informé que Jean-LouisDutaret, président de la Sofirad, allait prendre contact avec luiafin d'élaborer une nouvelle version des faits ; que Jean-LouisDutaret et Alain ... ont effectué de pressantes démarches auprèsde ce témoin afin qu'il modifie ses déclarations ; que de tellessollicitations, émanant de membres influents de l'Etat, faites à unepersonne hiérarchiquement placée sous l'autorité d'un ministreappartenant au même gouvernement qu'Alain ... a créé unecontrainte dans l'esprit de ce témoin, contrainte qui l'a amené àmodifier ses déclarations dans le sens souhaité ;
" alors, d'une part, qu'en se bornant à relater successivement lesdéclarations contradictoires de M. ... et d'Alain ..., la courd'appel a omis de préciser quelles " pressantes démarches " directesou indirectes étaient imputées au demandeur, s'agissant notamment dela prétendue intervention de M. ... ; qu'ainsi, l'arrêt attaquése trouve privé de base légale ;
" alors, d'autre part, que les "sollicitations" constatées par lacour d'appel ne sauraient constituer les pressions prévues par laloi, lesquelles doivent être suffisamment insistantes etconvaincantes pour déterminer le suborné à procéder aux déclarationsattendues ; qu'en constatant que les interlocuteurs de M. ... luiavaient " demandé de modifier sa déposition ", l'arrêt attaqué n'arelevé que de simples recommandations non punissables " ;
Sur le septième moyen de cassation proposé pour Jean-Louis ... pris de la violation des articles 434-15 du Code pénal, 591 et 593du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défautde motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Louis ... coupabled'avoir, courant 1994, exercé des pressions sur deux témoins et unprévenu pour qu'ils modifient leurs dépositions et déclarations etl'a condamné de ce chef ;
" alors que dans ses conclusions d'appel régulièrement déposées,Jean-Louis ... faisait valoir que les témoins, MM ... etBouffard, soit à la barre du tribunal, soit à l'instruction, ontclairement affirmé n'avoir, selon eux, subi aucune pression de lapart du prévenu ; que les juges d'appel ne pouvaient dès lorsdéclarer la subornation de témoins caractérisée sans avoir répondu àson argumentation ne faisant état d'aucune pression, sachant que cetélément s'apprécie subjectivement, qu'en s'abstenant d'y répondre,les juges ont violé les textes susvisés " ;
Sur le huitième moyen de cassation proposé pour Jean-Louis ... pris de la violation des articles 434-15 du Code pénal, 591 et 593du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défautde motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Louis ... coupabled'avoir courant 1994 exercé des pressions de manière directe etindirecte sur Marc-Michel ... pour qu'il modifie ses déclarationset l'a condamné de ce chef ;
" aux motifs que Marc-Michel ... a fait des déclarationsprécises relatant les pressions directes dont il avait été l'objet dela part de Jean-Louis ..., et indirectes par l'intermédiaire deMe Philippe ... qui l'aurait notamment incité à modifier sesdéclarations initiales en venant le voir tous les dix jours à sondomicile et en lui remettant un courrier destiné à être recopié etenvoyé au juge d'instruction au terme duquel il revenait sur sadéposition, courrier ayant servi de modèle à la lettre adressée, le12 juillet 1994, au magistrat instructeur, à une époque où le témoindéjà mis en examen était fatigué psychologiquement et physiquement dufait de cette enquête ;
" alors que, dans ses conclusions d'appel régulièrement déposées,Jean-Louis ... faisait valoir que Marc-Michel ... ne pouvaitaffirmer avoir subi des pressions de Me ..., prétendument surordre de Jean-Louis ... et notamment d'avoir adressé le12 juillet 1994 une lettre au juge d'instruction au terme de laquelleil revenait sur ses déclarations mettant en cause Alain ...,courrier qui aurait été rédigé sur demande expresse de Me ...,sachant que Marc-Michel ... était à l'époque assisté de deuxconseils pénalistes et que le 19 juillet 1994, Mes ... et ... conjointement une requête auprès du président de lachambre d'accusation dénonçant les conditions de garde à vue etindiquant que leur client reviendrait sur sa déposition faite devantla police eu égard au harcèlement dont il avait été l'objet ; que,dès lors, les juges d'appel ne pouvaient déclarer la subornation detémoins caractérisée sans avoir répondu à son argumentation faisantétat de la volonté expresse de Marc-Michel ... de revenir sur sesdéclarations initiales sachant que cette volonté s'était manifestéepar la requête susvisée rédigée par son autre conseil, Me ..., etce, alors qu'il pouvait toujours envoyer une lettre auprès du juged'instruction pour dessaisir Me ... ; qu'en s'abstenant d'yrépondre, les juges d'appel ont violé les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour deCassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifsexempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefspéremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé entous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, ledélit de subornation de témoins dont elle a déclaré les prévenuscoupables ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre endiscussion l'appréciation souveraine par les juges du fond des faitset circonstances de la cause contradictoirement débattus, nesauraient être accueillis ;
Mais sur le moyen unique de cassation proposé pour l'Unionfédérale des consommateurs et pris de la violation de l'articleL 421-1 du Code de la consommation, des articles 2, 3 et 593 du Codede procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté l'Union fédérale desconsommateurs "Que Choisir", organisation demanderesse, de sa demandeen réparation du préjudice matériel porté à l'intérêt collectif desconsommateurs par les faits constituant les délits de corruptionactive et passive retenus en l'espèce ;
" aux motifs que les délits de corruption active et passive nesont pas de nature à porter atteinte à l'intérêt collectif desconsommateurs ;
" alors qu'aucune infraction ayant porté un préjudice direct ouindirect à l'intérêt collectif des consommateurs n'est exclue desprévisions de l'article 1er de la loi du 5 janvier 1988, devenu l'article L 421-1 du Code de la consommation, qui permet auxassociations agréées de consommateurs d'exercer les droits reconnus àla partie civile relativement aux faits portant préjudice à l'intérêtcollectif des consommateurs ; qu'en procédant à une telle exclusion,la cour d'appel a méconnu les dispositions applicables ;
" alors, en outre, que, par suite de cette affirmation erronée, lacour d'appel n'a pas répondu au chef des conclusions de la partiecivile demanderesse soulignant que c'était le consommateur qui avait" fait les frais " de l'ensemble des opérations incriminées, lescharges financières en résultant étant nécessairement répercutées surles prix des services vendus, de sorte que c'était le consommateurd'eau qui avait dû supporter ces financements occultes ; que celaétait d'autant plus évident que les prix de l'eau sur la ville deGrenoble avaient considérablement augmenté depuis la privatisationainsi opérée ; qu'il résultait encore des délits ainsi commis unpréjudice découlant de l'atteinte aux réglementations économiques etaux textes nécessités par la sécurité, l'infériorité économique et ladésinformation du consommateur ; que faute d'avoir répondu à ceschefs précis des conclusions de la demanderesse dont résultait lepréjudice porté à l'intérêt collectif des consommateurs, la courd'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aucune infraction ayant porté un préjudice direct ouindirect à l'intérêt collectif des consommateurs n'est exclue desprévisions de l'alinéa 1er de l'article L 421-1 du Code de laconsommation ;
Attendu que, pour écarter la demande de l'Union fédérale desconsommateurs "Que Choisir", association agréée, qui s'étaitconstituée partie civile dans les poursuites exercées du chef decorruption contre Alain Carignon, Marc-Michel ... et Jean-JacquesPrompsy, la juridiction du second degré énonce " que les délits decorruption active et passive ne sont pas de nature à porter atteinteà l'intérêt collectif des consommateurs " ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu lesens et la portée du texte susvisé ;

Par ces motifs,I - Sur les pourvois d'Alain Carignon, Jean-Louis Dutaret,Jean-Jacques Prompsy, Louis ... et Frédéric ...
LES REJETTE ;
II - Sur le pourvoi de l'Union fédérale des consommateurs " QueChoisir "
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, endate du 9 juillet 1996, en ses seules dispositions relatives à l'action civile de l'Union fédérale des consommateurs " QueChoisir ", toutes autres dispositions étant expressémentmaintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans leslimites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel deChambéry.

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