Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 5 Juin 1996
Annulation sans renvoi et action publique éteinte
N° de pourvoi 95-84.478
Président M. Jean Simon, conseiller doyen faisant fonction.
Demandeur X
Rapporteur M. ....
Avocat général M. Perfetti.
Avocat la SCP Monod.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ANNULATION sans renvoi et ACTION PUBLIQUE ETEINTE sur le pourvoi formé par X, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, du 9 mars 1995, qui, pour exercice illégal de la profession d'agent immobilier, en état de récidive légale, l'a condamné à 5 mois d'emprisonnement avec sursis, à 50 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 16 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, de la loi du 3 août 1995 portant amnistie, 6 et 591 du Code de procédure pénale, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X coupable d'infraction à l'article 16 de la loi du 2 janvier 1970, et ce en état de récidive légale pour avoir été condamné de ce chef par arrêt en date du 4 juin 1992, et l'a condamné aux peines de 5 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende ;
" aux motifs qu'un contrôle, effectué le 7 avril 1993, au sein de la SARL Y, a fait apparaître que cette société poursuivait une activité d'agent immobilier, alors qu'à la suite de la suspension de sa garantie financière intervenue le 28 novembre 1992, elle avait cessé de remplir les conditions exigées pour la délivrance de la carte professionnelle ; qu'il ressort des éléments du dossier que X était, à la date de l'infraction, le dirigeant de fait de cette société ; que X doit être déclaré coupable du délit d'exercice d'une activité d'agent immobilier après avoir cessé de remplir les conditions exigées pour la délivrance de la carte professionnelle, infraction prévue et réprimée par l'article 16 de la loi du 2 janvier 1970 ; que si la peine prononcée le 4 juin 1992, pour infraction à l'article 16 de la même loi, était entachée d'illégalité comme excédant le maximum légal, l'erreur de droit commise dans la détermination d'une peine a pour seule conséquence de faire obstacle à son exécution mais ne prive pas de valeur juridique la déclaration de culpabilité devenue définitive ; que l'état de récidive légale doit être donc retenu à l'encontre de X ;
" alors que les condamnations effacées par une loi d'amnistie ne peuvent être prises en compte pour caractériser l'état de récidive ; que le délit sanctionné par l'arrêt du 4 juin 1992 a été aministié, par application de l'article 2 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie, comme n'étant sanctionné que par une peine d'amende et commis avant le 18 mai 1995 ; qu'en déclarant X en état de récidive légale et en le condamnant à une peine d'emprisonnement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors, en outre, que la précédente condamnation prononcée le 4 juin 1992 étant amnistiée, et X n'étant pas, de ce fait, en état de récidive légale, le délit dont l'arrêt attaqué l'a déclaré coupable n'était puni que d'une peine d'amende ; qu'ayant été commis avant le 18 mai 1995, il est lui-même amnistié par l'effet de l'article 2 de la loi du 3 août 1995 " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les condamnations effacées par une loi d'amnistie ne peuvent être prises en compte pour caractériser l'état de récidive ;
Attendu qu'après avoir déclaré le prévenu coupable d'exercice illégal de la profession d'agent immobilier en état de récidive légale, les juges d'appel, pour retenir cette circonstance aggravante, relèvent qu'il a fait l'objet d'une condamnation antérieure pour des faits de même nature ;
Attendu que cette précédente condamnation, prononcée par la même juridiction le 4 juin 1992, se trouve amnistiée par application de l'article 2, 1er alinéa, de la loi du 3 août 1995 ;
Attendu qu'aux termes de l'article 16, alinéa 1er1°, de la loi du 2 janvier 1970, le délit visé à la prévention est puni d'une seule peine d'amende et que la peine d'emprisonnement incriminée ne peut être ordonnée qu'en cas de récidive ;
Attendu que si l'arrêt n'encourt aucune censure pour avoir statué conformément à la loi en vigueur au jour où il a été rendu, il y a lieu cependant de prononcer son annulation dès lors que la condamnation prononcée par les juges du second degré, le 9 mars 1995, n'étant pas devenue définitive en raison du pourvoi en cassation, l'état de récidive qu'ils ont retenu pour infliger au prévenu la peine de 5 mois d'emprisonnement et 50 000 francs d'amende n'existe plus à ce jour ;
Qu'il s'ensuit que seule une peine d'amende est désormais encourue ;
Attendu que les faits retenus contre X étant antérieurs au 18 mai 1995 entrent dès lors dans les prévisions de l'article 2, 1er alinéa, de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ; qu'ainsi l'action publique se trouve éteinte ;
Par ces motifs
ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 9 mars 1995 ;
DÉCLARE l'action publique ETEINTE ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.