Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 4 Avril 1995
Rejet.
N° de pourvoi 93-18.016
Président M. Bézard .
Demandeur Société Somedec et autres
Défendeur Direction nationale d'enquêtes fiscales
Rapporteur Mme ....
Avocat général M. Mourier.
Avocat la SCP Matteï-Dawance, M. ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 juin 1993), que, par ordonnance du 12 juillet 1990, le président du tribunal de grande instance de Nice a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L 16 B du Livre des procédure fiscales, à effectuer une visite et une saisie de documents au domicile de M et Mme ... ... en vue de rechercher la preuve de la fraude à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée de la société Somedec ; que lui demandant de déclarer nulles la visite effectuée audit domicile et les vérifications en cours, M et Mme ... et la société Somedec ont assigné le Directeur national des enquêtes fiscales devant le juge des référés ;
Attendu que M et Mme ... et la société Somedec font grief à l'arrêt d'avoir écarté leur demande en déclarant incompétente la juridiction des référés, alors, selon le pourvoi, d'une part, que toute personne intéressée est recevable à contester la régularité des opérations de visite et de saisie autorisées par le président du tribunal au moyen d'une requête contradictoire mettant en cause l'Administration concernée présentée à cette fin à ce magistrat dont les pouvoirs de contrôle s'étendent à la constatation de l'irrégularité des opérations lorsqu'elles sont achevées et, en ce cas, à leur annulation ; que, dès lors, en se déterminant par la seule circonstance qu'après l'exécution des perquisitions et saisies litigieuses, le président du tribunal de grande instance était manifestement déchargé de sa mission de contrôle pour en déduire que la demande du 22 mai 1991, contestant la régularité des opérations litigieuses et sollicitant l'annulation de la perquisition, serait nécessairement tardive et, en conséquence, irrecevable, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors que toute voie de fait, constitutive d'un trouble manifestement illicite, justifie la compétence du juge des référés, conformément aux dispositions de l'article 809 du nouveau Code de procédure civile ; que toute saisie irrégulièrement opérée par l'Administration constitue une voie de fait ; qu'en l'espèce, il résulte de deux conclusions régulièrement déposées les 20 novembre 1991 et 24 février 1993, que ces derniers demandaient au juge des référés d'annuler la perquisition au cours de laquelle l'Administration a procédé à des opérations de saisie excédant les limites strictement fixées par l'ordonnance du 12 juillet 1990 ; que, dès lors, en se bornant à énoncer que le juge des référés ne serait pas compétent pour statuer sur une demande d'annulation d'une perquisition et d'opérations de contrôle fiscal subséquentes, pour en déduire que ladite demande serait irrecevable, sans rechercher, comme il le lui avait pourtant demandé, si la saisine du juge des référés n'était pas justifiée par l'existence d'un trouble manifestement illicite caractérisé par la voie de fait commise par l'Administration, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 809 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que, pour expliciter les demandes contenues dans leur assignation en référé, la société Somedec et M et Mme ... avaient précisé devant la cour d'appel qu'ils critiquaient le déroulement des opérations de visite et de saisies effectuées à la suite des ordonnances d'autorisation rendues par le président du tribunal de grande instance en application de l'article L 16 B du Livre des procédures fiscales, l'arrêt retient, à bon droit, que cette prétention échappait à la compétence du juge des référés ; qu'ayant relevé qu'il résultait du texte susvisé que l'appréciation de la régularité des opérations de visite et de saisie autorisées par le président du tribunal de grande instance était de la compétence de ce magistrat dont les pouvoirs de contrôle s'étendent à la contestation de la régularité desdites opérations, par ces seuls motifs, et sans avoir à rechercher, eu égard à la nature des irrégularités invoquées, qui ne se détachaient pas des mesures autorisées, si la saisine du juge des référés n'aurait pas été justifiée par l'existence d'un trouble manifestement illicite caractérisé par une voie de fait, la cour d'appel a décidé, à bon droit, que la demande en référé était irrecevable ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.