Jurisprudence : Cass. civ. 1, 22-11-1994, n° 92-16.423, publié , Rejet.

Cass. civ. 1, 22-11-1994, n° 92-16.423, publié , Rejet.

A7096ABG

Référence

Cass. civ. 1, 22-11-1994, n° 92-16.423, publié , Rejet.. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1041249-cass-civ-1-22111994-n-9216423-publie-rejet
Copier


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Civile 1
22 Novembre 1994
Pourvoi N° 92-16.423
Assurance dentaire et autre
contre
époux ....
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'en octobre 1987, M. ..., chirurgien-dentiste, à qui les époux ... avaient confié leur fils, alors âgé de 8 ans, aux fins de correction de la saillie antérieure des incisives centrales supérieures, a prescrit le port intermittent d'un appareil de traction extra-oral de fabrication américaine et constitué de deux arcs métalliques reliés par des élastiques à un dispositif d'appui occipital ; que le traitement a commencé le 8 mars 1988 ; que le 3 juillet suivant, l'enfant a entrepris, après le repas du soir, de retirer l'appareil déjà mis en place sans détacher préalablement les élastiques ; que, projetées vers son visage, les extrémités acérées de l'arc " endobuccal " lui ont perforé l'oeil droit dont la vision est désormais perdue ; que les époux ..., agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'administrateurs de la personne et des biens de leur fils, ont recherché la responsabilité de M. ..., en assignant ce praticien ainsi que son assureur l'Assurance dentaire ; que l'arrêt attaqué (Poitiers, 8 avril 1992) a condamné in solidum M. ... et son assureur à réparer l'intégralité des préjudices subis ;
Sur le premier moyen
Attendu que M. ... et l'Assurance dentaire font grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que l'information délivrée par un médecin ne doit porter que sur les risques normalement prévisibles, à l'exception des risques exceptionnels ; qu'il ne saurait donc être reproché à M. ... de ne pas avoir informé les parents d'un risque qui, aux dires mêmes des experts, repris par la cour d'appel, ne se réalisait qu'exceptionnellement ; que celle-ci a en conséquence violé l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que, loin de qualifier le risque d'exceptionnel, la cour d'appel a, dans son pouvoir souverain d'appréciation, retenu que l'appareil, par sa conception, présentait un danger certain que connaissait le praticien en sa qualité de spécialiste puisqu'il n'ignorait pas l'existence des graves accidents survenus en Allemagne et aux États-Unis ; qu'elle a pu en déduire qu'en ne signalant pas aux parents le danger inhérent à l'appareil, ce qui aurait pu les conduire à refuser le traitement, le praticien avait manqué à son obligation de renseigner ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en ses trois branches
Attendu que M. ... et son assureur reprochent encore à la cour d'appel d'avoir statué ainsi qu'elle l'a fait, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en homologuant le rapport d'expertise qui considérait que le praticien avait établi un diagnostic précis et exact et proposé un mode de traitement justifié, s'appuyant sur les anomalies constatées, et que la technique préconisée " head cap " avec force extraorale couramment employée dans le monde depuis plus de 30 ans était compatible avec l'âge de l'enfant, et en retenant néanmoins que le praticien avait commis une faute en prescrivant un appareil largement utilisé et dont l'indication était conforme aux données actuelles et acquises de la science, la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui s'imposaient, violant ainsi l'article 1147 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'obligation de résultat qui pèse sur le chirurgien-dentiste consiste à fournir des appareils aptes à rendre le service qu'on en attend, en sorte que la cour d'appel, qui n'a pas constaté que l'appareil fourni comportait un défaut, a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ; alors, enfin, que les agissements d'un mineur peuvent constituer une cause totale ou partielle d'exonération de responsabilité ; que la cour d'appel ne pouvait déclarer qu'aucune faute ne pouvait être retenue contre l'enfant, dont il n'est pas contesté qu'il avait commis une grave imprudence en procédant au retrait de son appareil sans suivre les conseils éclairés qui lui avaient été prodigués par M. ..., sans violer l'article 1147 précité ;
Mais attendu, d'abord, qu'appréciant souverainement la portée et la teneur de l'expertise qu'elle n'a pas entérinée, la cour d'appel a retenu que les experts avaient eux-mêmes relaté les accidents semblables publiés en 1985 et en 1986 dans des pays étrangers, et qu'ils partageaient la préoccupation des parents de voir limiter, sinon supprimer l'indication d'un tel procédé thérapeutique à moins que celui-ci ne subisse des modifications dans le sens d'une sécurité d'emploi absolue ; qu'ensuite, sans avoir à constater que l'appareil comportait un défaut dès lors qu'en lui-même il constituait un danger, la cour d'appel a énoncé à bon droit que, procédant à un acte de fourniture d'un appareil, le chirurgien-dentiste orthodontiste est tenu à une obligation de résultat concernant la sécurité tenant tant à la conception de l'appareil qu'à ses conditions d'utilisation ;
qu'enfin, elle a pu décider qu'aucune faute ne pouvait être imputée à l'enfant, dès lors que le praticien n'avait pas donné d'information sur le caractère dangereux de l'appareil ; que la décision ainsi légalement justifiée n'encourt aucune des critiques du moyen ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.