Jurisprudence : Cass. crim., 19-06-1990, n° 90-81535, publié au bulletin, Cassation partielle et désignation de juridiction

Cass. crim., 19-06-1990, n° 90-81535, publié au bulletin, Cassation partielle et désignation de juridiction

A3034ABY

Référence

Cass. crim., 19-06-1990, n° 90-81535, publié au bulletin, Cassation partielle et désignation de juridiction. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1029424-cass-crim-19061990-n-9081535-publie-au-bulletin-cassation-partielle-et-designation-de-juridiction
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CASSATION PARTIELLE et DESIGNATION DE JURIDICTION sur les pourvois formés par :

- X... Jacques,

- Y... Gérard,

- Z... Gérard,

inculpés, le premier, de complicité de faux et usage de faux en écritures de commerce, complicité d'abus de biens sociaux, recel de biens sociaux, corruption active et passive de citoyens chargés d'un ministère de service public, le deuxième, de recel de biens sociaux, corruption active ou passive de citoyens chargés d'un ministère de service public, destruction, soustraction ou dissimulation de documents de nature à faciliter la recherche des délits, la découverte des preuves ou le châtiment de leurs auteurs, le troisième d'abus de biens sociaux, de faux et usage de faux en écritures de commerce, et trafic d'influence, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nancy en date du 20 février 1990 qui a rejeté la demande d'annulation de pièces de la procédure et a dit que celle-ci était régulière.

LA COUR,

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle du 16 mars 1990 joignant les pourvois en raison de la connexité et en prescrivant l'examen immédiat ;

Vu l'arrêt de la chambre criminelle du 20 décembre 1989 rendu en application de l'article 681 du Code de procédure pénale et portant désignation de juridiction ;

Vu le mémoire personnel régulièrement signé par X... ;

Vu les mémoires ampliatifs produits pour X... et Y... ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que l'entrepreneur André A..., aux fins de financer un parti politique, aurait établi des factures fictives dont le montant aurait été payé par des dirigeants d'entreprise désireux soit d'obtenir l'octroi de marchés conclus avec l'Office public d'habitation à loyer modéré (OPHLM) de Toul, dont Jacques X..., maire de cette ville, était le président, soit d'obtenir, pour l'implantation de grandes surfaces commerciales, l'accord de la commission départementale d'urbanisme (CDUC) dont Jacques X... était membre ; qu'une information a été ouverte le 25 septembre 1987 pour faux et usage de faux en écritures de commerce et abus de biens sociaux ; que, malgré les déclarations des dirigeants précités, dont plusieurs ont été inculpés, A... a d'abord prétendu que les factures correspondaient à l'exécution de travaux ou de prestations de services effectifs ; que le 12 décembre 1989, il a déclaré au juge d'instruction que ces factures avaient été établies sur les directives du maire de Toul afin de dissimuler les versements utilisés pour le financement d'un parti politique ; qu'il faisait état des fonds reçus par lui des entreprises ayant sollicité l'accord de la CDUC pour l'implantation de grandes surfaces et qu'il déclarait que X... avait en outre reçu directement de certaines entreprises des fonds qu'il aurait partagés avec Gérard Y..., secrétaire général de la chambre de commerce et d'industrie de Nancy et avec Bernard B..., membre de la CDUC ; qu'il précisait encore que, s'il n'était pas intervenu dans les marchés passés avec l'OPHLM de Toul, il savait que X... avait fait obtenir au gérant de société Z... des marchés importants en modifiant au besoin de façon irrégulière, les devis, métrés et offres ;

Qu'à la suite de ces révélations, le juge d'instruction a communiqué la procédure au procureur de la République qui, le 13 décembre 1989, a présenté à la chambre criminelle de la Cour de Cassation une requête aux fins prévues par l'article 687 du Code de procédure pénale et relative aux faits concernant l'implantation des grandes surfaces commerciales ;

Que, dès la présentation de la requête, le juge d'instruction, se fondant sur les dispositions de l'article 688 du Code de procédure pénale, a, le 13 décembre 1989, donné commission rogatoire au SRPJ de Nancy pour entendre X... sur les allégations de A... ; qu'après cette audition, X... a été présenté le 15 décembre au juge d'instruction qui, en vertu d'un réquisitoire supplétif du même jour, l'a inculpé de complicité de faux et usage de faux en écritures de commerce, complicité d'abus de biens sociaux, recel de biens sociaux et corruption active et passive de citoyens chargés d'un ministère de service public ; que X... a reconnu que des fonds avaient été demandés aux dirigeants d'entreprises qui voulaient obtenir des marchés de l'OPHLM de Toul ou qui désiraient l'agrément de la CDUC pour l'implantation de grandes surfaces ; qu'il a déclaré avoir remis une partie des fonds versés par ces derniers à Gérard Y... ;

Que le juge d'instruction a communiqué la procédure au procureur de la République qui, le 16 décembre, a présenté à la chambre criminelle une deuxième requête fondée sur l'article 681 du Code de procédure pénale et visant les faits de corruption qui auraient été commis à l'occasion des marchés passés avec l'OPHLM de Toul ;

Que le juge d'instruction a également, le 16 décembre, donné commission rogatoire au SRPJ de Nancy pour entendre, sur les déclarations faites par A... et X... et relatives au partage des fonds versés par les dirigeants de grandes surfaces, Gérard Y..., lequel avait été inculpé le 16 novembre 1988 pour avoir, lors d'une perquisition faite à la chambre de commerce au mois de juin 1988, retiré des dossiers d'instruction des demandes d'implantation de grandes surfaces, et qui étaient soumis pour avis consultatif à la chambre de commerce, des annotations manuscrites du président de cette chambre, Michel C... ; qu'après son audition par la police il a été inculpé le 19 décembre de recel d'abus de biens sociaux et de corruption active et passive de citoyens chargés d'un ministère de service public ;

En cet état :

Sur le second moyen de cassation proposé par Y... et pris de la violation des articles 105, 118, 170 et suivants, 203 et 593 du Code de procédure pénale, 802 du même Code, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de constater l'irrégularité de la procédure tirée de l'audition en qualité de témoin du demandeur ;

" aux motifs que le demandeur, inculpé selon procès-verbal de première comparution du 19 décembre 1989, de recel d'abus de biens sociaux et de corruption passive ou active de citoyens chargés d'un ministère de service public avait déjà été inculpé le 16 novembre 1988 de destruction de documents susceptibles de faciliter la recherche de délits ou de découverte de preuves ; qu'il ne pouvait plus, selon son conseil, être entendu en qualité de témoin dans cette affaire comme tel a été le cas les 17 et 18 décembre 1989 ; qu'il résulte de l'information que les faits de corruption qui lui étaient imputés par A... dans sa déclaration du 12 décembre 1989 constituaient des faits entièrement distincts de ceux du 14 juin 1988 et sans rapport de connexité avec eux, au sens de l'article 203 du Code de procédure pénale ; qu'ils autorisaient par conséquent son audition à titre de témoin, la réunion de procédures dans le même dossier ne modifiant en rien les pouvoirs habituellement reconnus au magistrat ; que la défense soutient, en outre, que l'inculpation du demandeur a été tardive ; que certes, Y... a été entendu à plusieurs reprises les 17 et 18 décembre et, notamment, après les déclarations du 15 décembre de X... le mettant en cause après A..., mais les déclarations de ces deux personnes, qui se reconnaissaient elles-mêmes coupables, n'avaient valeur que de soupçons n'interdisant nullement au magistrat instructeur de faire recueillir les explications de la personne suspecte en qualité de témoin ; ce faisant, il ne manifestait aucunement l'intention de faire échec aux droits de la défense ; la tardiveté de l'inculpation en raison des premiers aveux ne saurait elle non plus être retenue " ;

Vu lesdits articles ;

Attendu qu'une personne qui a été inculpée d'un crime ou d'un délit ne peut, dans une même procédure, être entendue sur d'autres faits, qu'il soient ou non connexes de ceux qui ont donné lieu à son inculpation, en dehors des conditions prévues par l'article 118 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation de Gérard Y... qui soutenait qu'ayant déjà été inculpé, le 16 novembre 1988, de destruction de pièces dans l'information d'abord ouverte contre personne non dénommée des chefs de faux en écritures de commerce et abus de biens sociaux, il ne pouvait être entendu comme témoin dans la même procédure sur d'autres faits, la chambre d'accusation énonce que les faits de corruption sur lesquels Y... a été entendu comme témoin avant d'être inculpé de ce chef le 19 décembre 1989 étaient entièrement distincts de ceux qu'il aurait commis au mois de juin 1988 et pour lesquels il avait été inculpé le 16 novembre 1988, la réunion de procédures dans le même dossier ne modifiant en rien le pouvoir du magistrat instructeur ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi alors qu'une seule procédure avait été ouverte, la chambre d'accusation a méconnu le principe ci-dessus énoncé, et que la cassation est encourue de ce chef ;

Sur le premier moyen de cassation du mémoire personnel de X... : (sans intérêt) ;

Et sur le premier moyen de cassation proposé par le mémoire ampliatif de X..., repris par Y... et relevé d'office en ce qui concerne Z... : (sans intérêt) ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés :

CASSE ET ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nancy, en date du 20 février 1990, en ses dispositions relatives aux demandeurs,

Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar ;

Et vu les articles 659 et 681 du Code de procédure pénale,

DESIGNE ladite chambre d'accusation pour connaître de l'ensemble de l'information.

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