Jurisprudence : CJCE, 28-03-2000, aff. C-158/97,

CJCE, 28-03-2000, aff. C-158/97,

A4988AWN

Référence

CJCE, 28-03-2000, aff. C-158/97, . Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1010933-cjce-28032000-aff-c15897
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Cour de justice des Communautés européennes

28 mars 2000

Affaire n°C-158/97





61997J0158

Arrêt de la Cour
du 28 mars 2000.

Georg Badeck e.a., en présence de Hessische Ministerpräsident et Landesanwalt beim Staatsgerichtshof des Landes Hessen.

Demande de décision préjudicielle: Staatsgerichtshof des Landes Hessen - Allemagne.

Egalité de traitement entre hommes et femmes - Emplois dans l'administration - Mesures favorisant la promotion féminine.

Affaire C-158/97.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-1875

Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Accès à l'emploi et conditions de travail - Égalité de traitement - Dérogations - Mesures visant à promouvoir l'égalité des chances entre hommes et femmes - Réglementation nationale prévoyant certaines mesures favorisant la promotion féminine dans les secteurs de la fonction publique - Admissibilité - Condition

(Directive du Conseil 76/207, art. 2, § 1 et 4)

L'article 2, paragraphes 1 et 4, de la directive 76/207, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, ne s'oppose pas à une réglementation nationale

- qui, dans les secteurs de la fonction publique où les femmes sont sous-représentées, accorde, à qualifications égales entre candidats de sexe différent, une priorité aux candidats féminins, lorsque cela s'avère nécessaire pour assurer le respect des objectifs du plan de promotion des femmes, à moins qu'un motif ayant, sur le plan juridique, une importance supérieure s'y oppose, à condition que ladite réglementation garantisse que les candidatures font l'objet d'une appréciation objective qui tient compte des situations particulières d'ordre personnel de tous les candidats;

- qui prévoit que les objectifs contraignants du plan de promotion des femmes pour les postes temporaires du secteur scientifique et pour les auxiliaires scientifiques doivent prévoir un pourcentage minimal de personnel féminin correspondant au moins à celui qu'elles représentent parmi les diplômés, les titulaires de doctorat et les étudiants de chaque discipline;

- qui, dans la mesure où elle a pour objectif d'éliminer une sous-représentation des femmes, accorde, dans les professions qualifiées dans lesquelles les femmes sont sous-représentées et pour lesquelles l'État ne détient pas le monopole de formation, au moins la moitié des places de formation aux femmes, à moins que, en dépit des mesures appropriées afin d'attirer l'attention des femmes sur les places de formation disponibles, le nombre de candidatures féminines soit insuffisant;

- qui accorde, à qualifications égales entre candidats de sexe différent, une garantie pour les femmes qualifiées remplissant toutes les conditions requises ou prévues d'être convoquées à des entretiens d'embauche dans les secteurs dans lesquels elles sont sous-représentées;

- relative à la composition des organes représentatifs des travailleurs et des organes d'administration et de surveillance, qui préconise que les dispositions législatives adoptées pour sa mise en oeuvre prennent en compte l'objectif d'une participation au moins égale des femmes au sein de ces instances.

(voir points 38, 44, 55, 63, 66 et disp.)

Dans l'affaire C-158/97,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Staatsgerichtshof des Landes Hessen (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le cadre d'une procédure en contrôle de légalité sur requête déposée par

Georg Badeck e.a.,

en présence de:

Hessische Ministerpräsident

Landesanwalt beim Staatsgerichtshof des Landes Hessen,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 2, paragraphes 1 et 4, de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, J. C. Moitinho de Almeida et R. Schintgen, présidents de chambre, P. J. G. Kapteyn (rapporteur), C. Gulmann, J.-P. Puissochet, G. Hirsch, P. Jann et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. A. Saggio,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Badeck e.a., par M. M. Sachs, professeur à l'université de Düsseldorf,

- pour le Hessische Ministerpräsident, par MM. E. Denninger et S. Simitis, professeurs à l'université de Francfort-sur-le-Main, en qualité d'agents,

- pour le Landesanwalt beim Staatsgerichtshof des Landes Hessen, par M. K. Apel, Landesanwalt,

- pour le gouvernement néerlandais, par M. A. Bos, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement finlandais, par M. H. Rotkirch, ambassadeur, chef du service des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. J. Grunwald, conseiller juridique, et Mme M. Wolfcarius, membre du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Badeck e.a., représentés par M. M. Sachs, du Hessische Ministerpräsident, représenté par MM. E. Denninger et S. Simitis, du Landesanwalt beim Staatsgerichtshof des Landes Hessen, M. K. Apel, du gouvernement néerlandais, représenté par M. J. S. van den Oosterkamp, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement finlandais, représenté par Mme T. Pynnä, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, et de la Commission, représentée par M. J. Grunwald et Mme M. Wolfcarius, à l'audience du 13 octobre 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 10 juin 1999,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 16 avril 1997, parvenue à la Cour le 24 avril suivant, le Staatsgerichtshof des Landes Hessen a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), une question préjudicielle sur l'interprétation de l'article 2, paragraphes 1 et 4, de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40, ci-après la "directive").

2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'une procédure en contrôle de légalité ("Normenkontrollverfahren") sur requête déposée par M. Badeck e.a., en présence du Hessische Ministerpräsident (ci-après le "Ministerpräsident") et du Landesanwalt beim Staatsgerichtshof des Landes Hessen (ci-après le "Landesanwalt").

Cadre juridique

A - Dispositions communautaires

3 L'article 2, paragraphes 1 et 4, de la directive dispose:

"1. Le principe de l'égalité de traitement au sens des dispositions ci-après implique l'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l'état matrimonial ou familial.

...

4. La présente directive ne fait pas obstacle aux mesures visant à promouvoir l'égalité des chances entre hommes et femmes, en particulier en remédiant aux inégalités de fait qui affectent les chances des femmes dans les domaines visés à l'article 1er paragraphe 1."

4 Selon le troisième considérant de la recommandation 84/635/CEE du Conseil, du 13 décembre 1984, relative à la promotion des actions positives en faveur des femmes (JO L 331, p. 34), "les normes juridiques existant sur l'égalité de traitement, qui ont pour objet d'accorder des droits aux individus, sont insuffisantes pour éliminer toute forme d'inégalité de fait si, parallèlement, des actions ne sont pas entreprises, de la part des gouvernements, des partenaires sociaux et d'autres organismes concernés, en vue de compenser les effets préjudiciables qui, pour les femmes dans la vie active, résultent d'attitudes, de comportements et de structures de la société". Se référant explicitement à l'article 2, paragraphe 4, de la directive, le Conseil recommandait aux États membres:

"1) d'adopter une politique d'action positive destinée à éliminer les inégalités de fait dont les femmes sont l'objet dans la vie professionnelle ainsi qu'à promouvoir la mixité dans l'emploi, et comportant des mesures générales et spécifiques appropriées, dans le cadre des politiques et pratiques nationales et dans le plein respect des compétences des partenaires sociaux, afin:

a) d'éliminer ou de compenser les effets préjudiciables qui, pour les femmes qui travaillent ou qui cherchent un emploi, résultent d'attitudes, de comportements et de structures fondés sur l'idée d'une répartition traditionnelle des rôles entre les hommes et les femmes dans la société;

b) d'encourager la participation des femmes aux différentes activités dans les secteurs de la vie professionnelle où elles sont actuellement sous-représentées, en particulier dans les secteurs d'avenir, et aux niveaux supérieurs de responsabilité, pour obtenir une meilleure utilisation de toutes les ressources humaines;

..."

5 Depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, le 1er mai 1999, l'article 141 CE dispose, en ses paragraphes 1 et 4:

"1. Chaque État membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur.

...

4. Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un État membre de maintenir ou d'adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l'exercice d'une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou compenser les désavantages dans la carrière professionnelle."

6 La déclaration n° 28, relative à l'article 141 (ex article 119), paragraphe 4, du traité instituant la Communauté européenne, annexée au traité d'Amsterdam, prévoit:

"Lorsqu'ils adoptent les mesures visées à l'article 141, paragraphe 4, du traité instituant la Communauté européenne, les États membres devraient viser avant tout à améliorer la situation des femmes dans la vie professionnelle."

B - Dispositions nationales

7 Le Hessische Gesetz über die Gleichberechtigung von Frauen und Männern und zum Abbau von Diskriminierungen von Frauen in der öffentlichen Verwaltung (loi du Land de Hesse relative à l'égalité entre hommes et femmes et à l'élimination des discriminations relatives à l'encontre des femmes dans la fonction publique, ci-après le "HGlG") a été adopté le 21 décembre 1993 (GBVBl. I, p. 729). La durée de sa validité est fixée à treize ans à compter de son entrée en vigueur le 31 décembre 1993.

8 Selon son article 1er, le HGlG a pour objectif l'égalité d'accès des hommes et des femmes aux postes de la fonction publique par l'adoption de plans de promotion relatifs aux conditions d'accès, de travail et de carrière des femmes, comportant des objectifs contraignants.

9 Il ressort de l'ordonnance de renvoi que les autres dispositions pertinentes du HGlG aux fins de l'affaire au principal sont les suivantes:

"Article 3 - Principes

1. Les services de l'administration ont l'obligation de contribuer à l'égalité des hommes et des femmes dans la fonction publique et à l'élimination de la sous-représentation des femmes ainsi que l'obligation de supprimer les discriminations fondées sur le sexe et la situation familiale, par l'intermédiaire de plans de promotion des femmes (articles 4 à 6) et autres mesures de promotion (articles 7 à 14).

2. Les femmes sont sous-représentées lorsque, au sein du champ d'application d'un plan de promotion des femmes (article 4), moins de femmes que d'hommes sont employées dans un grade de l'échelle des salaires, rétributions ou traitements d'une carrière. Pour les grades de base d'une carrière, les femmes sont considérées comme sous-représentées lorsque, sur l'ensemble de la carrière, le nombre de postes occupés par les femmes est inférieur au nombre de postes occupés par des hommes. La deuxième phrase est également valable pour les postes de début de carrière de la magistrature du siège et du parquet. Dans le cadre du champ d'application d'un plan de promotion des femmes, chaque grade de l'échelle des traitements d'une carrière, chaque grade de l'échelle des salaires et rétributions représente un secteur. Le service qui élabore le plan de promotion des femmes peut procéder à d'autres subdivisions.

3. Les hommes et les femmes ne peuvent faire l'objet de discrimination fondée sur le sexe ou la situation familiale...

Article 5 - Contenu du plan de promotion des femmes

...

3. Le plan de promotion des femmes contient, pour une durée de deux ans, des objectifs contraignants relatifs au pourcentage de femmes dans les postes ouverts au recrutement ou à la promotion visant à augmenter la proportion de femmes dans les secteurs où celles-ci sont sous-représentées. Les particularités des différents secteurs et services sont déterminantes pour la fixation de ces objectifs.

4. Dans chaque plan de promotion des femmes, plus de la moitié des postes à pourvoir dans un secteur dans lequel les femmes sont sous-représentées doit être destinée à des femmes. Cette règle ne s'applique pas lorsque l'appartenance à un sexe particulier constitue une condition indispensable pour l'exercice d'une activité. S'il est démontré de façon vraisemblable qu'il n'y a pas suffisamment de femmes ayant la qualification requise, il est possible de prévoir en conséquence un nombre inférieur de postes destinés aux femmes. En cas de promotion sans attribution de poste dans des secteurs dans lesquels les femmes sont sous-représentées, il y a lieu de prévoir un pourcentage de femmes correspondant au moins au pourcentage de femmes employées dans le secteur de la catégorie de traitement immédiatement inférieure. La troisième phrase est également d'application. Lorsque des mesures d'économie du personnel sont prévues, consistant en la fermeture ou en la suppression de postes, il convient de garantir, par l'intermédiaire du plan de promotion des femmes, que le pourcentage de femmes dans les secteurs concernés reste au moins inchangé.

...

7. Les postes du service scientifique qui, conformément à l'article 57 a conjointement avec l'article 57 b, paragraphe 2, premier ou troisième alinéa, du Hochschulrahmengesetz (loi-cadre sur l'enseignement supérieur), sont pourvus pour une durée déterminée doivent être occupés par un pourcentage de femmes qui correspond au moins à celui qu'elles représentent dans la répartition des diplômées et des diplômés de la discipline concernée. Les postes du service scientifique qui sont pourvus pour une durée déterminée en application de l'article 48 du Hochschulrahmengesetz doivent être occupés par un pourcentage de femmes correspondant au moins à celui qu'elles représentent parmi les titulaires de doctorat de chaque discipline. Les moyens prévus pour l'emploi d'auxiliaires scientifiques non diplômés doivent être utilisés au profit d'un pourcentage de femmes au moins équivalent à celui qu'elles représentent au sein des étudiants de chaque discipline.

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