Jurisprudence : CA Bordeaux, 26-10-2023, n° 21/01718, Infirmation partielle


COUR D'APPEL DE BORDEAUX


CHAMBRE SOCIALE - SECTION B


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ARRÊT DU : 26 OCTOBRE 2023


SÉCURITÉ SOCIALE


N° RG 21/01718 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MAN5


S.A.S. [2] ([3])


c/

URSSAF AQUITAINE


Nature de la décision : AU FOND


Notifié par LRAR le :


LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :


La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).


Certifié par le Greffier en Chef,


Grosse délivrée le :


à :


Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 février 2021 (R.G. n°16/03395) par le pôle social du TJ de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 22 mars 2021.



APPELANTE :


S.A.S. [2] ([3]), agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège -RCS PARIS 343.403.531 - [Adresse 1]


ayant pour avocat Me Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX, postulant

et Me Michel JOLLY de la SELARL CAPSTAN SUD OUEST, avocat au barreau de TOULOUSE substitué par Me LEPLAIDEUR


INTIMÉE :


URSSAF AQUITAINE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 4]


représentée par Me Françoise PILLET de la SELARL COULAUD-PILLET, avocat au barreau de BORDEAUX



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été débattue le 13 septembre 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :


Monsieur Eric Veyssière, président,

Madame Sophie Lésineau, conseillère,

Madame Valérie Collet, conseillère,


qui en ont délibéré.


Greffière lors des débats : Mme Aa Ab,


ARRÊT :


- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile🏛.



EXPOSE DU LITIGE


La SAS [2] (ci-après société [3]) a fait l'objet d'un contrôle par un inspecteur du recouvrement de l'Urssaf Aquitaine portant sur l'application de la législation sociale sur la période courant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.


Le 14 octobre 2015, l'Urssaf Aquitaine a notifié une lettre d'observations à la société [3] portant sur 17 chefs de redressement pour un montant total de 1 494 122 euros.


Le 20 novembre 2015, la société [3] a formulé des observations sur le redressement.


Par courrier du 15 décembre 2015, les inspecteurs du recouvrement ont minoré les chefs de redressement n° 5 et 6 et a maintenu le redressement pour un montant ramené à la somme de 1 402 232 euros..


Le 23 décembre 2015, l'Urssaf Aquitaine a mis en demeure la société [3] de lui payer la somme de 1 623 307 euros, dont 1 402 232 euros de cotisations et 221 075 euros de majorations de retard.


Le 20 janvier 2016, la société [3] a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf Aquitaine aux fins de contestation de cette mise en demeure.


Par décision du 27 septembre 2016 notifiée le 18 octobre 2016, la commission de recours amiable de l'Urssaf Aquitaine a maintenu le redressement.


Le 2 novembre 2016, la société [3] a saisi, par requête, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde d'une contestation de la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable.


Par jugement du 26 février 2021, le Pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- débouté la société [3] de ses demandes,

- validé la mise en demeure n° 51378429 du 23 décembre 2015 pour son montant total de 1 623 307 euros, dont 1 402 232 euros en cotisations et 221 075 euros de majorations de retard,

- condamné la société [3] au paiement de la somme de 1 623 307 euros, dont 1 402 232 euros et 221 075 euros de majorations de retard,

- condamné la société [3] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛, ainsi qu'aux dépens.


Le 22 mars 2021, la société [3], par voie électronique, a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.



Par ordonnance du 9 mars 2023, le magistrat chargé d'instruire l'affaire a :

- ordonné à l'Urssaf Aquitaine de communiquer le rapport de contrôle de l'inspecteur du recouvrement transmis au directeur de l'Urssaf dans le cadre du contrôle de la société [3], dans un délai de 15 jours à compter de la décision,

- réservé les dépens,

- renvoyé l'affaire à l'audience du 13 septembre 2023 à 10 heures 30.



A cette date, la société [3], reprenant oralement ses conclusions transmises le 5 septembre 2023 par voie électronique et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits et des moyens, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de :

- prononcer l'annulation des opérations de contrôle effectuées par l'Urssaf Aquitaine, de la mise en demeure du 23 décembre 2015 et des redressements subséquents,

- subsidiairement, annuler les chefs de redressement,

- condamner l'Urssaf Aquitaine à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.


Subsidiairement, elle conteste les chefs de redressement 5, 6 et 7 concernant respectivement les allocations forfaitaires de frais et les temps de pause, les heures 'normales' et la réduction générale des cotisations sociales, et l'assujettissement au chômage des fonctionnaires détachés faisant valoir d'une part que pour les chefs 5 et 6, la méthode d'échantillonnage mise en place par l'Urssaf est irrégulière pour ne pas respecter les prescriptions de l'article R.243-59-2 du code de la sécurité sociale🏛 et d'autre part que pour les chefs 5,6 et 7 le redressement n'est pas justifié.


L'Urssaf Aquitaine, reprenant oralement ses conclusions transmises le 4 septembre 2023 par voie électronique et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits et des moyens, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter la société [3] de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.



MOTIFS DE LA DÉCISION


Sur la régularité des opérations de contrôle


La société [3] soutient que les opérations de contrôle ont été réalisées de manière irrégulière, soulignant que l'Urssaf a procédé à la notification d'une mise en demeure sans avoir préalablement obtenu le complet procès-verbal de fin de contrôle tel que défini par l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa version applicable en 2015. Elle précise qu'il manque la lettre qu'elle a écrite ainsi que la réponse formulée par l'Urssaf Aquitaine. Elle estime que cette irrégularité affecte les actes en découlant et notamment la mise en demeure.


L'Urssaf Aquitaine prétend que la société [3] ne démontre pas en quoi le rapport litigieux serait incomplet ni quels éléments débattus entre les parties n'y figureraient pas ni quels éléments non communiqués y figureraient et qui seraient susceptibles de constituer une violation du contradictoire. Elle rappelle que l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable en 2015 prévoyait seulement la transmission 's'il y a lieu' de la réponse de la société et de son propre courrier de réponse sans prévoir aucune sanction si les courriers n'étaient pas joints. Elle fait observer qu'à compter du 1er janvier 2020, le texte est venu simplement prévoir que l'agent chargé du contrôle transmet à l'organisme effectuant le recouvrement le rapport de contrôle faisant état des échanges prévus au III.


*****


Aux termes de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version issue du décret n°2013-1107 du 3 décembre 2013🏛, tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail🏛. Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé " Charte du cotisant contrôlé " présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document, dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable, et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande.


L'employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu à l'alinéa précédent.


Les employeurs, personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7, dénommés inspecteurs du recouvrement, tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.


Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature.


A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 envisagés. En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, il précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L. 243-7-6. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l'employeur ou du travailleur indépendant. Le constat d'absence de mise en conformité et le constat d'absence de bonne foi sont contresignés par le directeur de l'organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu'il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix.


En l'absence de réponse de l'employeur ou du travailleur indépendant dans le délai de trente jours, l'organisme de recouvrement peut engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement.


Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant a répondu aux observations avant la fin du délai imparti, la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant qu'il ait été répondu par l'inspecteur du recouvrement aux observations de l'employeur ou du travailleur indépendant.


L'inspecteur du recouvrement transmet à l'organisme chargé de la mise en recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de la réponse de l'intéressé et de son propre courrier en réponse.


L'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.


Les formalités de l'article R. 243-59, destinées à assurer le caractère contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense, sont qualifiées de 'substantielles' par la jurisprudence et leur omission entraîne la nullité tant des opérations de contrôle et de redressement que de la procédure subséquente.


En l'espèce, les inspecteurs du recouvrement ont notifié une lettre d'observations à la société le 14 octobre 2015.


Par courrier du 20 novembre 2015, la société a formulé des remarques sur les chefs de redressement qu'elle contestait.


Le 15 décembre 2015, les inspecteurs du recouvrement ont adressé leurs conclusions à la société et le 16 décembre 2015, ils ont transmis à l'Urssaf Aquitaine le rapport de contrôle.


Le rapport de contrôle, communiqué par l'Urssaf sur décision du magistrat chargé d'instruire l'affaire, détaille pour chaque chef de redressement les textes visés, les méthodes utilisées, la documentation consultée, les constatations des inspecteurs du recouvrement, les observations de la société, les réponses apportées par les inspecteurs du recouvrement, les modifications éventuelles apportées et leurs conclusions.


Ainsi, ce rapport, qui n'est soumis à aucun formalisme, reprend l'ensemble des échanges ayant eu lieu entre les inspecteurs du recouvrement et la société ; il a été établi avant la mise en demeure en date du 23 décembre 2015 ; il respecte donc les dispositions de l'article R 243-59 tant en ce qui concerne les délais impartis que les exigences du principe du contradictoire, la société ne critiquant pas sur ce point le contenu du rapport et en particulier la reprise par les inspecteurs du recouvrement des observations qu'elle avait formulées au cours de la période contradictoire.


Le jugement sera , en conséquence, confirmé par substitution de motifs, en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de la mise en demeure pour irrégularité des opérations de contrôle


Sur la régularité de la méthode d'échantillonnage pour les chefs de redressement 5 et 6


Les inspecteurs du recouvrement ont recouru à la procédure d'échantillonnage pour le chef de redressement n° 5 relatif aux allocations forfaitaires de frais et temps de pause et le chef de redressement n° 6 relatif aux heures normales et la réduction générale de cotisations sociales.


La société [3] soutient qu'une fois le contrôle exhaustif de l'échantillon retenu, les inspecteurs ne l'ont pas associée aux résultats obtenus avant de passer à la 4ème phase consistant à extrapoler lesdits résultats. Elle fait observer que l'Urssaf ne justifie pas avoir communiqué entre le 13 juillet 2015, date à laquelle la société a transmis les éléments exhaustifs de vérification de l'échantillonnage, et le 14 décembre 2015, date de l'envoi de la lettre d'observations finales, les résultats de l'examen exhaustif de l'échantillon avant extension à l'ensemble de la population concernée.


L'Urssaf Aquitaine prétend que la procédure d'échantillonnage a été appliquée pour les chefs de redressement 5 et 6, que les différentes étapes de la procédure prévue par l'article R.243-59-2 du code de la sécurité dans sa version antérieure au 11 juillet 2016 ont été respectées, que la lettre d'observations fait référence à la communication à la société de l'ensemble des éléments prévus à l'article R.243-59-2 et que la société [3] était parfaitement informée lors des opérations de contrôle mais n'a jamais formulé de remarques sur les résultats des vérifications de l'échantillonnage et n'en formule pas dans le cadre de la présente instance.


Aux termes de l'article R.243-59-2 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige, les inspecteurs du recouvrement peuvent proposer à l'employeur d'utiliser les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Au moins quinze jours avant le début de cette vérification, l'inspecteur du recouvrement remet à l'employeur un document lui indiquant les différentes phases de la mise en oeuvre des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation et les formules statistiques utilisées pour leur application. Il lui remet également l'arrêté mentionné au présent article.


Dès lors que l'employeur entend s'opposer à l'utilisation de ces méthodes, il en informe l'inspecteur du recouvrement, par écrit et dans les quinze jours suivant la remise des documents mentionnée à l'alinéa précédent. Dans ce cas, l'inspecteur du recouvrement lui fait connaître le lieu dans lequel les éléments nécessaires au contrôle doivent être réunis ainsi que les critères, conformes aux nécessités du contrôle, selon lesquels ces éléments doivent être présentés et classés. L'employeur dispose de quinze jours après notification de cette information pour faire valoir, le cas échéant, ses observations en réponse. A l'issue de ce délai, l'inspecteur notifie à l'employeur le lieu et les critères qu'il a définitivement retenus. La mise à disposition des éléments ainsi définis doit se faire dans un délai déterminé d'un commun accord entre l'inspecteur et l'employeur, mais qui ne peut être supérieur à soixante jours. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, l'opposition de l'employeur à l'utilisation des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation ne peut être prise en compte.


Lorsque ces méthodes sont mises en oeuvre, l'inspecteur du recouvrement informe l'employeur des critères utilisés pour définir les populations examinées, le mode de tirage des échantillons, leur contenu et la méthode d'extrapolation envisagée pour chacun d'eux.


L'employeur peut présenter à l'inspecteur du recouvrement ses observations tout au long de la mise en oeuvre des méthodes de vérification par échantillonnage. En cas de désaccord de l'employeur exprimé par écrit, l'inspecteur du recouvrement répond par écrit aux observations de l'intéressé.


Le document notifié par l'inspecteur du recouvrement à l'issue du contrôle, en application du cinquième alinéa de l'article R. 243-59, précise les populations faisant l'objet des vérifications, les critères retenus pour procéder au tirage des échantillons, leur contenu, les cas atypiques qui en ont été exclus, les résultats obtenus pour chacun des échantillons, la méthode d'extrapolation appliquée et les résultats obtenus par application de cette méthode aux populations ayant servi de base au tirage de chacun des échantillons. Il mentionne la faculté reconnue au cotisant en vertu du sixième alinéa du présent article.


Dans le délai de trente jours fixé par le cinquième alinéa de l'article R. 243-59, l'employeur peut informer, par lettre recommandée avec avis de réception, l'organisme de recouvrement de sa décision de procéder au calcul des sommes dont il est redevable ou qu'il a indûment versées pour la totalité des salariés concernés par chacune des anomalies constatées sur chacun des échantillons utilisés.


Lorsque, au terme du délai fixé par l'alinéa précédent, l'employeur n'a pas fait connaître à l'organisme de recouvrement sa décision de procéder au calcul des sommes dont il est redevable, la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant la réponse de l'inspecteur du recouvrement aux éventuelles observations de l'employeur.


Lorsque l'employeur a fait connaître dans le délai imparti sa décision de procéder au calcul des sommes dont il est redevable, l'engagement de la procédure de recouvrement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de trente jours courant à compter de la réception par l'organisme de recouvrement de la décision de l'employeur. Avant l'expiration de ce délai, ce dernier adresse à l'inspecteur du recouvrement les résultats de ses calculs accompagnés des éléments permettant de s'assurer de leur réalité et de leur exactitude. L'inspecteur du recouvrement peut s'assurer de l'exactitude de ces calculs, notamment en procédant à l'examen d'un nouvel échantillon. La mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai de trente jours et avant la réponse de l'inspecteur du recouvrement aux éventuelles observations de l'employeur.


L'inspecteur du recouvrement transmet à l'organisme chargé de la mise en recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de l'ensemble des courriers et documents transmis par l'employeur et de la réponse de l'inspecteur du recouvrement.


Il résulte de ce texte et de l'arrêté d'application du 11 avril 2007 définissant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation que leur mise en oeuvre suit un protocole composé de quatre phases : la constitution d'une base de sondage, le tirage d'un échantillon, la vérification exhaustive de l'échantillon, l'extrapolation à la population ayant servi de base à l'échantillon.


Dans le cadre de la procédure contradictoire, l'employeur est associé à chacune de ces phases et doit notamment être informé à l'issue de l'examen exhaustif des pièces justificatives, correspondant à la troisième phase, des résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant l'échantillonnage et des régularisations envisagées et être invité à faire part de ses remarques afin que les régularisations soient, le cas échéant, rectifiées (Civ. 2ème, 5 janvier 2023, pourvoi n°21-14-706⚖️). A défaut, le chef de redressement est annulé.


En l'espèce, L'Urssaf ne justifie pas pour les chefs de redressement n° 5 et n°6 avoir formellement recueilli les observations de l'employeur à l'issue de la troisième phase sur les résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant l'échantillonnage et les régularisations envisagées ; la mention dans la lettre d'observations selon laquelle les inspecteurs du recouvrement ont communiqué à la société l'ensemble des éléments prévus à l'article R.243-59-2 pour l'élaboration des l'échantillonnage n'est pas, à défaut d'autres précisions, suffisamment probante à cet égard.


Il s'ensuit que ces chefs de redressement doivent être annulés pour non respect des dispositions du protocole relatives à la constitution et à la validation de l'échantillonnage.


Sur ce point, le jugement sera réformé.


Sur le chef de redressement n°7 : assujettissement des fonctionnaires détachés à l'assurance chômage et à l'AGS


Les inspecteurs du recouvrement ont constaté que la société exonérait de cotisations d'assurance chômage les rémunérations versées aux fonctionnaires détachés qu'elle emploie en violation d'une directive de l'Unedic qui prévoit que les personnes ayant le statut de fonctionnaire exerçant une activité salariée dans une entreprise privée tenue d'assurer ses salariés contre le risque de privation d'emploi, doivent contribuer au régime d'assurance chômage.


La société ne critique pas cette règle et ne discute pas la réalité des constatations des inspecteurs du recouvrement. Elle fait valoir qu'elle a subi un précédent contrôle de l'Urssaf sur l'application de la législation sociale pour les années 2012-2014 et qu'elle n'a pas fait l'objet d'observations sur l'application de cette règle de sorte qu'en vertu des dispositions de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale, l'Urssaf ne peut, dans le cadre du présent contrôle, lui notifier un redressement de ce chef.


Selon le dernier alinea de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale, l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification dés lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause.


Il incombe, toutefois, à l'employeur d'établir l'existence d'un accord antérieur de l'Urssaf de nature à faire obstacle au caractère rétroactif du redressement, étant précisé que le silence gardé par cet organisme ne peut à lui seul être assimilé à une acceptation implicite.


Or, en l'espèce, la société ne rapporte pas la preuve que le précédent contrôle a porté sur ce chef de redressement ; le seul fait que les inspecteurs aient consulté les bulletins de paie de certains fonctionnaires détachés n'est pas un élément suffisamment probant à cet égard dés lors que les inspecteurs en charge du précédent contrôle avaient expressément indiqué dans la lettre d'observations du 24 septembre 2014 que les contributions d'assurance chômage et cotisations à la garantie des salaires régies par des règles d'assujettissement et de calcul spécifiques n'ont pas été vérifiées et pourront faire l'objet d'un contrôle ultérieur.


Il s'en déduit que la société ne peut valablement prétendre que les inspecteurs se sont prononcés sur la question de l'assurance chômage pour les fonctionnaires détachés dans l'entreprise en toute connaissance de cause lors du précédent contrôle.


Le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a validé ce chef de redressement.


Sur les autres demandes


La société [3] qui succombe en partie dans ses demandes supportera la charge des dépens.


L'équité ne commande pas de faire droit aux demandes d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Par ces motifs


confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a validé les chefs de redressement n° 5 et 6


statuant à nouveau dans cette limite,


annule les chefs de redressement n° 5 et 6,


rejette les demandes d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,


condamne la société [3] aux dépens.


Signé par monsieur Eric Veyssière, président,et par madame Sylvaine Déchamps, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Ac Ab Ad Ae

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