Jurisprudence : CA Paris, 5, 9, 26-10-2023, n° 22/16446


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 5 - Chambre 9


ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2023


(n° , 5 pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16446 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGN2L


Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Septembre 2022 -Juge commissaire de Paris - RG n° 2022023992



APPELANT


M. [H] [X]

né le [Date naissance 7] 1978 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Localité 4]


Représenté par Me Jean-didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Assisté de Me Jack CANNARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS, toque : 10


INTIMEES


S.A.S. SOCIETE INVESTISSEMENT IMMOBILIER EUROPEEN - SIIE déclarée en liquidation judiciaire selon jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 18 mai 2021, représentée par son ancien Président, Monsieur [N] [V] demeurant [… …]

[Adresse 2]

[Localité 5]


N'ayant pas constitué avocat


S.E.L.A.F.A. MJA, en la personne de Maître [L] [Y], ès-qualités de Mandataire judiciaire Liquidateur de la société INVESTISSEMENT IMMOBILIER EUROPEEN

[Adresse 8]

[Localité 6]


Représentée par Me Vincent GALLET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1719

Assistée de Me Victor THIERRY D'ARGENLIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1719



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été débattue le 14 Septembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sophie MOLLAT, Présidente

Mme Isabelle ROHART, Conseillère

Mme Alexandra PELIER-TETREAU, Conseillère


qui en ont délibéré


Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile🏛.


GREFFIER : Mme Saoussen HAKIRI lors des débats.


ARRET :


- par défaut,

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛,

- signé par Mme Sophie MOLLAT, Présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffier présent lors de la mise à disposition.


**********



Exposé des faits et de la procédure


Par jugement du 18 mai 2021, le Tribunal de Commerce de PARIS a prononcé la liquidation judiciaire de la Société Investissement Immobilier Europeen - SIIE et désigné la SELAFA MJA en qualité de Mandataire Liquidateur.


Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 01.06.2021, Monsieur [H] [X] a déclaré sa créance à la liquidation judiciaire à hauteur de 63 048,77 €.


Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 1er février 2022, la SELAFA MJA en la personne de Maître [L] [Y] a contesté cette créance au motif suivant: Votre créance repose sur une condamnation prononcée à l 'encontre de la société Europe Asset AG placée en liquidation judiciaire le 28 janvier 2020 auprès de la SCP BTSG.



Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 7 février 2022, Monsieur [H] [X] maintenait sa demande d'admission.



Par ordonnance en date du 6 septembre 2022, Monsieur le Juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la SAS SIIE a rejeté la créance.


Par déclaration en date du 21.09.2022, Monsieur [X] a formé appel.


Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 3.03.2023, Monsieur [X] demande à la cour de:

Vu l'article L. 511-7 du Code monétaire et financier🏛 ;

Vu les pièces versées aux débats ;

RECEVOIR Monsieur [H] [X] en son appel et l'en dire bien fondé ;

INFIRMER1'ordonnance de Monsieur le Juge-commissaire en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

DIRE que la créance de Monsieur [H] [X] a été identifiée et a fait l'objet de remboursements par la Société SIIE ;

DIRE que les cheques impayés de la Société SIIE à l'ordre de la CARPA étaient destinés au remboursement en partie de la créance de Monsieur [H] [X] ;

ORDONNER que la créance de Monsieur [H] [X] soit admise pour un montant de 56.183,72 € au passif de la Société SIIE à titre chirographaire

ORDONNER que les dépens soient employés en frais privilégiés de justice .


Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 21.02.2023 la Selafa MJA pris en la personne de Me [Y] demande à la cour de:

DONNER ACTE à la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [L] [Y] ès-qualités de Mandataire Judiciaire Liquidateur de la société INVESTISSEMENT IMMOBILIER EUROPEEN de ce qu'au bénéfice des observations qui précèdent, elle s'en rapporte à justice sur le mérite de I'appel interjeté par Monsieur [H] [X] de I'ordonnance rendue parle Juge-Commissaire le 6 septembre 2022 ;

CONDAMNER Monsieur [H] [X] en tous les dépens.


La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été signifiées à la société SIIE par acte d'huissier en date du 29.11.2022 pour tentative, puis le 5.12.2022 à une autre adresse et enfin le 12.12.2022 au représentant de la société rencontré en l'étude.

Les conclusions de la Selafa MJA ont été signifiées à la société SIIE le 9.03.2023, le procès verbal ayant été transformé en PV 659.

Les conclusions en réplique de Monsieur [X] ont été signifiées à la société SIIE le 21.03.2023.


La société SIIE n'a pas constitué avocat.



MOTIFS DE LA DECISION


Monsieur [X] expose que par ordonnance du 6 septembre 2017, le tribunal de Commerce de Caen a condamné la Société Europe Asset AG Ltd au paiement des sommes réclamées par Monsieur [H] [X] majorées des intérêts de retour à compter du 3 août 2017, que l'ordonnance et une autre décision condamnaient la même société à régler des sommes à Messieurs [P] et [B], que Monsieur [N] [V], en sa qualité de Président de la Société Europe Asset AG Ltd., reconnaissait devoir cette somme au titre des comptes courants d'associés des associés [X]-[P] et [B], qu'un premier virement était effectué aux consorts [X]-[P]-[B] sur le compte Carpa de leur avocat par la société Investissement Immobilier Européen SIIE le 8.11.2018 également dirigé par Monsieur [V], que d'autres virements étaient effectuées le 8.11.2018 (50.000 euros), le 26.02.2019 (25.000 euros), et le 21.05.2019 (15.000 euros), que des virements étaient également effectués par la société Oprirevenus les 28.03.2019 (25.000 euros) et 9.05.2019 (20.000 euros).


Il fait valoir que trois chèques ont été adressés par la SIIE à l'ordre de la Carpa (25.05.2019 pour 35.000 euros, 25.06.2019 pour 35.000 euros, 25.07.2019 pour 91.133,01 euros) qui couvraient les soldes restant dus aux trois créanciers dont la somme de 56.183,72 euros pour lui, mais que ces chèques ont été rejetés du fait de la clôture du compte de la société SIIE.


Il fait valoir le courrier de Monsieur [V] pour le compte de la société Europe Asset filiale de la société Europe Asset AG Ltd, autorisant la SAS SIIE à rembourser des comptes d'associé dont celui de Monsieur [H] [X], qui a été rejeté à tort par le juge commissaire alors que le versement de la somme de 50.000 euros le 18.11.2018 authentifie l'autorisation.


Il expose l'existence d'une convention de trésorerie entre les sociétés aux termes de laquelle les différentes entités d'un même groupe peuvent réaliser des avances de trésorerie lorsqu'une d'elles a un besoin d'un financement, et fait valoir qe la société Europe Asset AG LTD est l'associée de la SAS SIIE et l'associée unique de la SARL Europe Asset France et que le dirigeant des trois sociétés, Monsieur [V], était autorisé par l'article L 511-7, à rembourser les comptes courants d'associés dans la mesure où les liens capitalistiques sont avérés.


Il précise que la créance déclarée par Monsieur [B] pour les mêmes raisons -chèques impayés- a été admise par le juge commissaire le 6.09.2022.


Il rappelle l'obligation pour un avocat de déposer les fonds qu'il reçoit sur un compte Carpa.


En réponse à l'argumentation selon laquelle l'apurement de dettes ne pouvait être fondé sur la convention centralisée de trésorerie dans la mesure où chacune des parties continuait à assumer ses obligations, il expose qu'il s'agit là d'un contre sens juridique car :

- la convention de trésorerie régit les transferts de trésorerie entre les différentes entités d'un Groupe de sociétés et ce conformément aux dispositions de l'article 511-7 du Code monétaire et financier ;

- elle restreint le risque d'une qualification pénale d'une opération en abus de biens sociaux;

- elle est opposable à l'Administration fiscale et restreint également le risque de qualification d'une opération en distribution immobilière ;

- elle permet davantage de flexibilité quant à la gestion du Groupe ;

- le règlement opéré par la société SIIE est, par conséquent, dans la droite ligne de la convention de trésorerie dont il est fait état ;

- les termes de l'article 6 de la convention de trésorerie n'ont que pour seule utilité de restreindre le risque de confusion de patrimoine.


La Selafa MJA expose que le capital de la SAS SIIE dont l'activité est l'investissement immobilier, l'achat, la rénovation et la vente de biens immobiliers , est détenue par Europe Asset AG Ltd pour 36 actions, Monsieur [V] pour 27 actions, Mme [Aa] pour 10 actions et la SCI Prime Invest pour 7 actions et fait partie d'un groupe de sociétés contrôlées par Monsieur [V] dont certaines ont des liens capitalistiques entres elles.


Elle expose que Monsieur [X] a déclaré une créance prononcée par le tribunal de ommerce de Caen à l'encontre de la sociéré Europe Asset Ag Ab, qu'il n'était donc à l'origine titulaire d'aucune créance envers la société SIIE, son créancier étant la société Europe Asset AG Ltd mais que la société SIIE serait devenue débitrice de la dette par suite:

- de la déclaration souscrite par Monsieur [N] [V] sur papier à entête de la SARL Europe Asset, autorisant la société SIIE à rembourser les comptes courants d'associés, notamment de Monsieur [H] [X], et

- de trois chèques tirés par la société SIIE libellés à l'ordre de la CARPA et rejetés en raison de la clôture du compte.


Elle fait valoir qu'interrogé par elle sur l'utiIisation de la trésorerie de la société SIIE pour le règlement de dettes qui n'étaient pas les siennes, Monsieur [N] [V] a notamment communiqué une convention centralisée de trésorerie signée le 13 avril 2018 entre la société SIIE, en qualité de « Gestionnaire '', et les autres sociétés de son groupe, dont la société Europe Asset AG Ltd, en qualité de « Mandantes '', que cependant l'utilisation de la trésorerie de la société SIIE pour l'apurement de dettes qui n'étaient pas les siennes n'apparaît pas pouvoir être fondée sur la convention centralisée de trésorerie au regard de l'article 6 qui prévoit précisément que chacune des parties continue d'assumer ses obligations et que la déclaration établie par Monsieur [Ac] sur papier à en-tête de la SARL Europe Asset n'est pas de nature à engager la société SIIE.


Elle expose qu'il est également contestable que l'imputabiIité de la créance à la société SIIE puisse procéder des chèques tirés par cette dernière et rejetés, lesquels étaient libellés à l'ordre de la CARPA et non de MonsieurAd[H] [X].


Sur ce


La société Europe Asset AG Ltd a été condamnée à verser la somme de 97746,05 euros à Monsieur [X] par ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Caen.


Par ailleurs Messieurs [B] et [P] ont également obtenu condamnation à leur profit de la société pour les montants que celle ci leur devait.


La société Europe Asset AG Ltd faisait partie d'un groupe de société dont faisait également partie la société SIIE.


Par courrier non daté Monsieur [V] président de la société Europe Asset AG Ltd mais également de la société SIIE a autorisé cette dernière à rembourser 'les comptes courants d'associés des associés suivants: [B] [K], [X] [H], [P] [A] de la Holding Europe Asset AG Ldt'.


La société SIIE a donc émis des chèques à l'ordre de la Carpa en exécution des condamnations prononcées au profit des trois associés de Europe Asset AG Ltd.


Les trois derniers chèques émis sont revenus impayés.


La société SIIE a été placée en liquidation judiciaire.


Monsieur [X] a déclaré sa créance pour un montant de 63.048,77 euros à titre chirographaire mais le juge commissaire a rejeté l'admission.


Monsieur [X] fonde sa demande devant la cour d'appel sur l'article L.511-7 du code monétaire et financier autorisant les opération de trésorerie entre les sociétés dépendant d'un même groupe.


Cependant la convention de trésorerie versée aux débats applicable, entre autres, dans les rapports entre SIIE et Europe Asset AG Ltd stipule dans son article 6 que les parties restent totalement indépendantes et continueront d'assumer de façon autonome la direction et la gestion de leurs responsabilités et de leurs obligations.


L'existence d'une convention de trésorerie ne peut donc constituer le fondement juridique d'une transmission d'une obligation de paiement entre la société Europe Asset AG Ltd et SIIE à l'égard de MonsAdeur [X].


Aucun autre élément n'est versé aux débats rapportant la preuve d'une transmission de l'obligation de paiement entre la débitrice originelle la société Europe Asset AG Ltd et la société SIIE et aucun autre fondement juridique que la convention de trésorerie dont on a vu qu'elle ne pouvait constituer une transmission d'une obligation de paiement entre les sociétés qui en faisaient partie, n'est articulé de telle sorte qu'il convient de débouter Monsieur [X] de sa demande d'admission de sa créance au passif de la société SIIE.


La décision entreprise est donc confirmée.



PAR CES MOTIFS


Confirme la décision entreprise


Laisse les dépens à la charge de MonsAdeur [X].


Le greffier La présidente

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