Jurisprudence : TPICE, 12-07-2001, aff. T-202/98, Tate & Lyle plc, British Sugar plc et Napier Brown & Co. Ltd c/ Commission des Communautés européennes

TPICE, 12-07-2001, aff. T-202/98, Tate & Lyle plc, British Sugar plc et Napier Brown & Co. Ltd c/ Commission des Communautés européennes

A2628AWA

Référence

TPICE, 12-07-2001, aff. T-202/98, Tate & Lyle plc, British Sugar plc et Napier Brown & Co. Ltd c/ Commission des Communautés européennes. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1008801-tpice-12072001-aff-t20298-tate-lyle-plc-british-sugar-plc-et-napier-brown-co-ltd-c-commission-des-co
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Tribunal de première instance des Communautés européennes

12 juillet 2001

Affaire n°T-202/98

Tate & Lyle plc, British Sugar plc et Napier Brown & Co. Ltd
c/
Commission des Communautés européennes





61998A0202

Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre)
du 12 juillet 2001.

Tate & Lyle plc, British Sugar plc et Napier Brown & Co. Ltd

contre

Commission des Communautés européennes.

Concurrence - Marché du sucre - Infraction à l'article 85 du traité CE (devenu article 81 CE) - Amendes.

Affaires jointes T-202/98, T-204/98 et T-207/98.

Recueil de jurisprudence 2001 page 0000

dans les affaires jointes T-202/98, T-204/98 et T-207/98,

Tate & Lyle plc, représentée par MM. R. Fowler, QC, et A. L. Morris, solicitor, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante dans l'affaire T-202/98,

British Sugar plc, représentée par MM. T. Sharpe, QC, D. Jowell, barrister, Mme L. R. Lindsay et M. A. Nourry, solicitors, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante dans l'affaire T-204/98,

Napier Brown & Co. Ltd, représentée par Mme D. Guy, solicitor, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante dans l'affaire T-207/98,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. K. Wiedner, en qualité d'agent, assisté de M. N. Khan, barrister, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 1999/210/CE de la Commission, du 14 octobre 1998, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (Affaire IV/F-3/33.708 - British Sugar plc, affaire IV/F-3/33.709 - Tate & Lyle plc, affaire IV/F-3/33.710 - Napier Brown & Company Ltd, affaire IV/F-3/33.711 - James Budgett Sugars Ltd) (JO 1999, L 76, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(quatrième chambre),

composé de M. P. Mengozzi, président, Mme V. Tiili et M. R. M. Moura Ramos, juges,

greffier: J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 29 novembre 2000,

rend le présent

Arrêt

Régime communautaire du marché du sucre et situation du marché du sucre en Grande-Bretagne

1 Le régime communautaire du marché du sucre est destiné à soutenir et à protéger la production de sucre dans la Communauté. Il comprend un prix minimal auquel le producteur communautaire pourra toujours vendre son sucre aux autorités publiques et un prix de seuil auquel le sucre non soumis à des quotas peut être importé des pays tiers.

2 Le soutien à la production communautaire au moyen de prix garantis est toutefois limité aux quotas nationaux de production (quotas A et B) attribués par le Conseil à chaque État membre, qui les répartit ensuite entre ses producteurs. Le sucre relevant du quota B est soumis, par rapport à celui du quota A, à un prélèvement à la production plus élevé. Le sucre produit en excédent des quotas A et B est dénommé "sucre C" et ne peut être vendu, sauf à être stocké pendant douze mois, à l'intérieur de la Communauté européenne. Les exportations extracommunautaires bénéficient, à l'exception du sucre C, de restitutions à l'exportation. Le fait que la vente avec restitution est, normalement, plus avantageuse que celle effectuée dans le cadre du système d'intervention permet d'écouler les excédents communautaires vers l'extérieur de la Communauté.

3 British Sugar est le seul transformateur britannique produisant du sucre à partir de la betterave, et s'est vu attribuer l'ensemble du quota de betteraves britanniques s'élevant à 1 144 000 tonnes. Tate & Lyle achète du sucre de canne dans les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), qu'elle transforme ensuite.

4 Le marché du sucre en Grande-Bretagne est de nature oligopolistique. En raison du régime du sucre dans la Communauté, Tate & Lyle souffre toutefois d'un désavantage structurel par rapport à British Sugar et il est constant que ce dernier domine le marché en Grande-Bretagne. Ensemble, British Sugar et Tate & Lyle produisent un volume de sucre à peu près égal à la demande totale de sucre en Grande-Bretagne.

5 Un élément supplémentaire qui affecte la concurrence sur le marché du sucre en Grande-Bretagne est l'existence de négociants en sucre. Les négociants exercent leur activité de deux manières, soit pour leur propre compte, à savoir en achetant le sucre en vrac à British Sugar, Tate & Lyle ou à des importateurs et en le revendant, soit pour le compte de tiers, à savoir en étant responsable de la passation des commandes, de la facturation aux clients au nom du commettant et du recouvrement des créances. Dans le cas de négoce au compte de tiers, les négociations en matière de prix et de conditions de livraison du sucre ont directement lieu entre British Sugar ou Tate & Lyle et le client final, bien que les négociants soient presque toujours au courant des prix convenus.

Faits à l'origine du litige

6 Entre 1984 et 1986, British Sugar pratiqua une guerre des prix qui mena à des prix anormalement bas sur le marché du sucre industriel et du sucre au détail. En 1986, Napier Brown, qui est un négociant en sucre, renouvela la plainte qu'il avait initialement déposée auprès de la Commission en 1980, dénonçant le fait que British Sugar avait exploité de façon abusive sa position dominante, en violation de l'article 86 du traité CE (devenu article 82 CE).

7 Le 8 juillet 1986, la Commission a adressé une communication des griefs à British Sugar assortie de mesures provisoires visant à mettre fin à la violation de l'article 86 du traité. Le 5 août 1986, British Sugar a proposé à la Commission des engagements quant à son comportement futur, que cette dernière a acceptés par lettre du 7 août 1986 (ci-après les "engagements").

8 La procédure entamée à la suite de la plainte de Napier Brown a été clôturée par la décision 88/518/CEE de la Commission, du 18 juillet 1988, relative à une procédure d'application de l'article 86 du traité (IV/30.178 - Napier Brown - British Sugar) (JO L 284, p. 41), qui constatait la violation de l'article 86 du traité par British Sugar et lui imposait une amende.

9 Entre-temps, le 20 juin 1986, une réunion avait eu lieu entre les représentants de British Sugar et ceux de Tate & Lyle pendant laquelle British Sugar a annoncé la fin de la guerre des prix sur les marchés du sucre industriel et du sucre au détail au Royaume-Uni.

10 Cette réunion a été suivie, notamment, jusqu'au 13 juin 1990, par 18 autres réunions concernant les prix du sucre industriel, auxquelles ont également participé les représentants de Napier Brown et de James Budgett Sugars, principaux négociants de sucre au Royaume-Uni (ci-après les "négociants"). Pendant ces réunions, British Sugar a donné des renseignements à tous les participants concernant ses prix futurs. Au cours d'une de ces rencontres, British Sugar a également distribué aux autres participants un tableau de ses prix pour le sucre industriel par rapport aux volumes d'achats.

11 En outre, jusqu'au 9 mai 1990, Tate & Lyle et British Sugar se sont rencontrées à huit reprises pour discuter des prix du sucre au détail. British Sugar a remis ses barèmes de prix à Tate & Lyle en trois occasions, une fois cinq jours et une fois deux jours avant leur mise en circulation officielle.

12 Le 4 mai 1992, à la suite de deux lettres adressées par Tate & Lyle à l'Office of Fair Trading anglais, en date du 16 juillet et du 29 août 1990, et dont copie a été envoyée par Tate & Lyle à la Commission, cette dernière a ouvert une procédure contre British Sugar, Tate & Lyle, Napier Brown, James Budgett Sugars et certains producteurs de sucre d'Europe continentale et leur a envoyé, le 12 juin 1992, une communication des griefs faisant état d'une violation des articles 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) et 86 du traité.

13 Le 18 août 1995, la Commission a adressé à British Sugar, Tate & Lyle, James Budgett Sugars et Napier Brown une seconde communication des griefs dont le contenu était plus limité que celui de la communication des griefs du 12 juin 1992 en ce qu'elle ne faisait état que de la seule violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

14 Le 14 octobre 1998, la Commission a adopté la décision 1999/210/CE, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité (affaire IV/F-3/33.708 - British Sugar plc, affaire IV/F-3/33.709 - Tate & Lyle plc, affaire IV/F-3/33.710 - Napier Brown & Company Ltd, affaire IV/F-3/33.711 - James Budgett Sugars Ltd) (JO 1999, L 76, p. 1, ci-après la "décision attaquée"). Dans cette décision, adressée à British Sugar, Tate & Lyle, James Budgett Sugars et Napier Brown, la Commission constate la violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité par ces derniers et impose, notamment, à l'article 3, une amende de 39,6 millions d'écus à British Sugar et de 7 millions d'écus à Tate & Lyle pour la violation de l'article 85, paragraphe 1, sur les marchés du sucre industriel et du sucre au détail et une amende de 1,8 million d'écus à Napier Brown pour la violation de l'article 85, paragraphe 1, sur le marché du sucre industriel.

Procédure

15 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 décembre 1998, Tate & Lyle a introduit le recours enregistré sous le numéro T-202/98.

16 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 décembre 1998, British Sugar a introduit le recours enregistré sous le numéro T-204/98.

17 Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 25 janvier 1999, British Sugar a introduit une demande en référé visant, d'une part, à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'article 4 de la décision attaquée, fixant les modalités de paiement de l'amende infligée, et, d'autre part, à ce que soient prononcées toutes mesures provisoires nécessaires concernant les conditions de paiement de ladite amende.

18 Par ordonnance du président du Tribunal du 11 octobre 2000, la demande en référé de British Sugar, à la suite du désistement de cette dernière, a été radiée du registre du Tribunal, conformément à l'article 99 du règlement de procédure du Tribunal. Les dépens relatifs à cette procédure ont été réservés.

19 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 décembre 1998, Napier Brown a introduit le recours enregistré sous le numéro T-207/98.

20 Par ordonnance du 20 juillet 2000, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé de joindre les trois affaires aux fins de la procédure orale et de l'arrêt.

21 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l'audience du 29 novembre 2000.

Conclusions des parties

22 Dans l'affaire T-202/98, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- annuler l'article 3 de la décision attaquée dans la mesure où il la concerne;

- condamner la Commission aux dépens.

23 La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours;

- condamner la requérante aux dépens.

24 Dans l'affaire T-204/98, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- annuler la décision attaquée dans son intégralité, ou, à titre subsidiaire, partiellement;

- si la décision attaquée devait être maintenue intégralement ou partiellement, annuler les articles 3 et 4 ou réduire le montant de l'amende;

- condamner la Commission aux dépens.

25 La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours;

- condamner la requérante aux dépens.

26 Dans l'affaire T-207/98, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- annuler la décision attaquée dans la mesure où celle-ci la concerne;

- annuler l'amende qui lui a été imposée en vertu de la décision ou en réduire le montant;

- condamner la Commission aux dépens;

- condamner la Commission à lui rembourser les frais encourus pour la constitution d'une garantie en vue du paiement de l'amende.

27 La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours;

- condamner la requérante aux dépens.

En droit

Observations préliminaires

28 Les requérantes dans les affaires T-204/98 et T-207/98 fondent leur demande principale en annulation de la décision attaquée sur trois moyens. En premier lieu, elles estiment que la Commission a commis des erreurs manifestes de fait et de droit en considérant que les pratiques reprochées constituaient un accord ou une pratique concertée et, en particulier, une erreur dans la détermination de ce qui constitue un accord ou une pratique concertée et une erreur dans la définition de l'objet anticoncurrentiel des faits reprochés. En second lieu, elles considèrent que la Commission a été en défaut de prouver un effet anticoncurrentiel consécutif aux faits reprochés. En troisième lieu, la requérante dans l'affaire T-204/98 soutient que la Commission a commis une erreur manifeste de droit dans l'analyse de la condition relative à l'incidence de la conduite des participants aux réunions litigieuses sur le commerce entre États membres.

29 À l'appui de leur demande subsidiaire en annulation relative au montant de l'amende qui leur a été infligée, British Sugar et Napier Brown invoquent plusieurs moyens. En particulier, elles contestent le calcul desdites amendes, en affirmant que la décision attaquée, d'une part, viole le principe de proportionnalité dans l'application des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les "lignes directrices") et, d'autre part, n'a pas pris en compte la structure du marché et le contexte économique des comportements incriminés. La requérante dans l'affaire T-204/98 ajoute que la Commission a commis une violation des formes substantielles en omettant de considérer l'ensemble des arguments des participants aux réunions litigieuses, notamment, en ce qui concerne son traitement différencié par rapport à Tate & Lyle, le caractère non intentionnel de l'infraction, l'inutilité de toute mesure dissuasive supplémentaire et sa coopération avec la Commission pendant la procédure. Enfin, les deux requérantes maintiennent que le retard de la Commission dans l'adoption de la décision attaquée aurait engendré une augmentation du niveau de leurs amendes.

30 La requérante dans l'affaire T-202/98 ne conteste que la partie de la décision concernant le calcul de l'amende. Par son premier moyen, elle affirme que la décision attaquée applique de façon erronée la communication de la Commission concernant la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur les ententes (JO 1996, C 207, p. 4, ci-après la "communication sur la coopération") et, par son deuxième moyen, elle invoque un défaut de motivation de la décision sur ce point.

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