Jurisprudence : TA Paris, du 19-10-2023, n° 2322706

TA Paris, du 19-10-2023, n° 2322706

A64961PB

Référence

TA Paris, du 19-10-2023, n° 2322706. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/100860655-ta-paris-du-19102023-n-2322706
Copier

Références

Tribunal Administratif de Paris

N° 2322706


lecture du 19 octobre 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2023, le centre de contrôle auto de Claye Souilly et le centre de contrôle Poids Lourds de Mitry Mory, représentés par Me Crespelle demandent au juge des référés, sur le fondement des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative🏛 :

1°) d'annuler la décision du 22 septembre 2023 par laquelle le préfet de police a rejeté l'offre que le centre de contrôle auto de Claye Souilly a déposée pour le lot n°1 contrôle technique des véhicules légers et utilitaires ( 3,5 T (y compris véhicules électriques et hybrides : services situés sur le périmètre de Paris (75) et du département des Hauts-de-Seine (92) " ;

2°) d'enjoindre à la préfecture de police, si elle entend aller au terme de la procédure d'attribution du lot n°1, de la reprendre au stade de l'analyse des offres en se conformant à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ou à défaut d'annuler la procédure de passation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Ils soutiennent que :

- la préfecture de police a interprété de manière erronée l'article 5.7 du cahier des clauses particulières; la notion d'implantation géographique prévue à cet article s'applique au lieu d'implantation du service utilisateur du véhicule à contrôler ; cet impératif serait en contrariété avec l'obligation du cahier des clauses particulières d'effectuer le contrôle dans le centre agréé le plus proche du lieu d'implantation du service utilisateur du véhicule à contrôler ;

- l'obligation pour les soumissionnaires de disposer d'un centre de contrôle dans le ressort géographique du lot constitue une limitation géographique illégale contraire aux principes de libre accès à la commande publique et à l'égalité de traitement ; cette limitation géographique n'est pas justifiée par l'objet du marché ; cette limitation trahit une mauvaise définition et une mauvaise expression de son besoin par le préfecture de police ; cette limitation géographique ne peut être justifiée par l'urgence éventuelle d'une commande au sens de l'article 5.1 du cahier des clauses particulières ; elle n'est pas non plus justifiée par des considérations environnementales au sens du 1.7.2 du même cahier pas plus que par des considérations techniques au sens de l'article 4 du même cahier ;

- les sociétés Contrôle-plus ont été lésées par ce manquement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné Mme Le Roux, vice-présidente de section, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Roux,

- et les observations de Me Tassi, représentant les centres de contrôle auto de Claye Souilly et Poids Lourds de Mitry Mory, de Mmes A et Fernandez et de M. C, représentant le préfet de police et de M. B, représentant la société groupement Action contrôle technique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis d'appel public à concurrence publié le 7 avril 2023 au bulletin officiel des annonces de marchés publics, la préfecture de police, a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert, en application des articles R.2162-1 à R. 2162-6 et R. 2162-13 et R. 2162-14 du code de la commande publique🏛🏛🏛🏛, pour la passation d'un accord-cadre à bons de commande, ayant pour objet des prestations de contrôle technique des véhicules utilitaires et des poids lourds, y compris les véhicules hybrides et électriques des parcs automobiles de la préfecture de police, du secrétariat général pour l'administration du ministère de l'intérieur Ile-de-France, des services associés du ministère de l'intérieur. L'accord-cadre a été divisé en 9 lots. Les sociétés centre de contrôle auto de Claye Souilly et centre de contrôle poids lourds de Mitry Mory ont présenté une offre pour le lot n° 1 " services situés sur le périmètre de Paris (75) et du département des Hauts-de-Seine (92). Par un courrier du 22 septembre 2023, la préfecture de Paris a informé les sociétés du rejet de son offre pour irrégularité. Par la présente requête, les sociétés centre de contrôle auto de Claye Souilly et centre de contrôle poids lourds de Mitry Mory demandent au juge des référés, sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, d'annuler la décision du 22 septembre 2023.

2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, la délégation d'un service public ou la sélection d'un actionnaire opérateur économique d'une société d'économie mixte à opération unique. / Il peut également être saisi en cas de manquement aux mêmes obligations auxquelles sont soumises, en application de l'article L. 521-20 du code de l'énergie🏛, la sélection de l'actionnaire opérateur d'une société d'économie mixte hydroélectrique et la désignation de l'attributaire de la concession. / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat ". En vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d'être lésées par de tels manquements. Il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l'opérateur économique qui le saisit se prévaut de manquement qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésé ou risquent de le léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant un opérateur économique concurrent.

3. Aux termes de l'article L. 2111-1 du même code : " La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale ". Aux termes de l'article R. 2132-1 du même code : " Les documents de la consultation sont l'ensemble des documents fournis par l'acheteur ou auxquels il se réfère afin de définir son besoin et de décrire les modalités de la procédure de passation, y compris l'avis d'appel à la concurrence. Les informations fournies sont suffisamment précises pour permettre aux opérateurs économiques de déterminer la nature et l'étendue du besoin et de décider de demander ou non à participer à la procédure. ".

4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2152-7 du même code : " Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. Les modalités d'application du présent alinéa sont prévues par voie réglementaire. // Le lien avec l'objet du marché ou ses conditions d'exécution s'apprécie conformément aux articles L. 2112-2 et L. 2112-4. ". Aux termes de l'article L. 2112-2 de ce code : " Les clauses du marché précisent les conditions d'exécution des prestations qui doivent être liées à son objet. // "

5. Aux termes de l'article 5.7 du cahier des clauses techniques de l'accord-cadre relatif aux lieux d'exécution des prestations : " Les opérations de contrôle technique sont réalisées sur le site du centre de contrôle agréé du titulaire de l'accord-cadre ou éventuellement sur le site d'un membre de son réseau ou encore de son sous-traitant ou de sa concession éventuellement./ La liste des centres de contrôle de son réseau ou de sa concession est fournie en annexe de son mémoire technique établi sur la base de l'annexe n°1 au règlement de la consultation./ Le contrôle s'effectue dans le centre de contrôle agréé le plus proche du lieu d'implantation du service utilisateur du véhicule à contrôler, dans la limite du périmètre géographique du lot considéré./ Le titulaire met obligatoirement à disposition un accueil dédié aux véhicules (dépôt et retrait des véhicules) des services de sécurité intérieur des diverses entités : parking privé et gratuit pour parquer les véhicules suite à leur acheminement, leur reprise après contrôle. ".

6. Aux termes de l'article L. 2152-1 du code de la commande publique🏛 : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées. " L'article L. 2152-2 du même code dispose : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. ".

7. Il résulte de l'instruction que le représentant du pouvoir adjudicateur a, par courrier du 22 septembre 2023, rejeté l'offre des sociétés requérantes au motif qu'elle ne respectait pas l'article 5.7 du cahier des clauses techniques de l'accord-cadre. Les sociétés requérantes font valoir d'une part, que le pouvoir adjudicateur a interprété de manière erronée l'article 5.7 du cahier des clauses techniques et d'autre part, que le pouvoir adjudicateur a mal défini son besoin et que cette clause méconnaît les principes de libre accès à la commande publique et à l'égalité de traitement.

8. D'une part, il ressort des termes mêmes des stipulations de l'article 5.7 du cahier des clauses techniques, qui fixent les obligations des candidats à l'accord-cadre et non celles des utilisateurs des centres de contrôle technique, que leur offre doit prévoir au moins un centre de contrôle technique agréé situé sur le périmètre géographique de chaque lot, notamment le lot

n° 1. Contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, cette obligation n'est pas contraire à la clause selon laquelle le contrôle doit s'effectuer dans le centre de contrôle agréé le plus proche du lieu d'implantation du service utilisateur du véhicule à contrôler dès lors que l'article 5.7 en litige précise que cette obligation s'exécute dans la limite du périmètre géographique du lot considéré. Enfin les sociétés requérantes ne peuvent utilement se prévaloir des stipulations du précédent accord-cadre pour contester l'interprétation faite par le pouvoir adjudicateur de ces stipulations.

9. D'autre part, il résulte de l'instruction que pour tenir compte de l'expérience acquise lors de l'exécution du précédent accord cadre, le pouvoir adjudicateur a imposé qu'au moins un centre proposé par les candidats soit situé sur le périmètre géographique du lot, afin de garantir un éloignement raisonnable pour l'ensemble des sites de la zone couverte par le lot et de réduire les temps d'indisponibilité des véhicules et des agents les convoyant. L'obligation d'un centre de contrôle dans le périmètre géographique du lot considéré est, dès lors, justifiée par l'objet du marché et ses conditions d'exécution, alors même qu'il existerait des hypothèses où un service utilisateur du véhicule à contrôler serait plus proche d'un centre de contrôle technique situé dans le périmètre géographique d'un autre lot. Dans ces conditions, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le pouvoir adjudicateur aurait entaché d'une erreur manifeste la définition de son besoin et aurait méconnu les principes de libre accès à la commande publique et à l'égalité de traitement.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la requête du centre de contrôle auto de Claye Souilly et du centre de contrôle Poids Lourds de Mitry Mory doit être rejetée, y compris les conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête du centre de contrôle auto de Claye Souilly et du centre de contrôle Poids Lourds de Mitry Mory est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au centre de contrôle auto de Claye Souilly, au centre de contrôle Poids Lourds de Mitry Mory et à la préfecture de Paris.

Fait à Paris, le 19 octobre 2023.

Le juge des référés,

M.-O. Le Roux

La greffière,

F. RAJAOBELISON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus