Jurisprudence : CJCE, 21-09-1999, aff. C-124/97, Markku Juhani Läärä, Cotswold Microsystems Ltd et Oy Transatlantic Software Ltd c/ Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (Etat finlandais)

CJCE, 21-09-1999, aff. C-124/97, Markku Juhani Läärä, Cotswold Microsystems Ltd et Oy Transatlantic Software Ltd c/ Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (Etat finlandais)

A1690AWI

Référence

CJCE, 21-09-1999, aff. C-124/97, Markku Juhani Läärä, Cotswold Microsystems Ltd et Oy Transatlantic Software Ltd c/ Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (Etat finlandais). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1008050-cjce-21091999-aff-c12497-markku-juhani-laara-cotswold-microsystems-ltd-et-oy-transatlantic-software-
Copier
Cour de justice des Communautés européennes

21 septembre 1999

Affaire n°C-124/97

Markku Juhani Läärä, Cotswold Microsystems Ltd et Oy Transatlantic Software Ltd
c/
Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (Etat finlandais)



61997J0124

Arrêt de la Cour
du 21 septembre 1999.

Markku Juhani Läärä, Cotswold Microsystems Ltd et Oy Transatlantic Software Ltd contre Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (Etat finlandais).

Demande de décision préjudicielle: Vaasan hovioikeus - Finlande.

Libre prestation des services - Droits exclusifs d'exploitation - Machines à sous.

Affaire C-124/97.

Recueil de Jurisprudence 1999 page I-6067

Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale réservant à un organisme de droit public l'exploitation des machines à sous - Justification - Protection des consommateurs et de l'ordre social

(Traité CE, art. 59 (devenu, après modification, art. 49 CE))

$$Une législation nationale qui accorde à un seul organisme de droit public des droits exclusifs d'exploitation des machines à sous sur le territoire national et qui empêche ainsi les opérateurs des autres États membres, directement ou indirectement, de mettre eux-mêmes des machines à sous à la disposition du public en vue de leur utilisation contre rémunération, constitue, même si elle est indistinctement applicable, une entrave à la libre prestation des services.

Toutefois, cette entrave, dans la mesure où la législation en cause ne comporte aucune discrimination selon la nationalité, peut être justifiée par des motifs tenant à la protection des consommateurs et de l'ordre social. S'il est vrai que ladite législation n'interdit pas l'utilisation des machines à sous mais réserve leur exploitation à un organisme public autorisé, la détermination de l'étendue de la protection qu'un État membre entend assurer sur son territoire en matière de loteries et autres jeux d'argent fait partie du pouvoir d'appréciation dont disposent les autorités nationales. Il appartient à celles-ci, en effet, d'apprécier si, dans le contexte du but poursuivi, il est nécessaire d'interdire totalement ou partiellement des activités de cette nature ou seulement de les restreindre et de prévoir à cet effet des modalités de contrôle plus ou moins strictes. Dans ces conditions, la seule circonstance qu'un État membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par un autre État membre ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des décisions prises en la matière. Celles-ci doivent seulement être appréciées au regard des objectifs poursuivis par les autorités nationales de l'État membre intéressé et du niveau de protection qu'elles entendent assurer.

Dans l'affaire C-124/97,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Vaasan hovioikeus (Finlande) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Markku Juhani Läärä,

Cotswold Microsystems Ltd,

Oy Transatlantic Software Ltd

Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä),

Suomen valtio (État finlandais),

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'arrêt de la Cour du 24 mars 1994, Schindler (C-275/92, Rec. p. I-1039), et des articles 30, 36, 56, 59 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE, 30 CE, 46 CE et 49 CE) et 60 du traité CE (devenu article 50 CE),

LA COUR,

composée de MM. P. J. G. Kapteyn, président des quatrième et sixième chambres, faisant fonction de président, J.-P. Puissochet (rapporteur) et P. Jann, présidents de chambre, C. Gulmann, J. L. Murray, D. A. O. Edward, H. Ragnemalm, L. Sevón et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. A. La Pergola,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Läärä et Oy Transatlantic Software Ltd, par Me P. Kiviluoto, avocat à Jyväskylä,

- pour Cotswold Microsystems Ltd, par M. H. T. Klami, professeur à l'université d'Helsinki,

- pour le gouvernement finlandais, par Mme T. Pynnä, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement belge, par M. J. Devadder, directeur d'administration au service juridique du ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement, en qualité d'agent, assisté de Mes P. Vlaemminck et L. Van Den Hende, avocats au barreau de Gand,

- pour le gouvernement allemand, par MM. E. Röder, Ministerialrat au ministère fédéral de l'Économie, et C.-D. Quassowski, Regierungsdirektor au même ministère, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement espagnol, par M. L. Pérez de Ayala Becerril, abogado del Estado, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement néerlandais, par M. A. Bos, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement autrichien, par M. F. Cede, Botschafter au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement portugais, par MM. L. Fernandes, directeur du service juridique de la direction générale des Communautés européennes du ministère des Affaires étrangères, A. Cortesão Seiça Neves, membre du même service, et J. Ramos Alexandre, inspecteur général des jeux au ministère de l'Économie, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement suédois, par M. E. Brattgård, departementsråd au département du commerce extérieur du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. J. E. Collins, Assistant Treasury Solicitor, en qualité d'agent, assisté de M. M. Brealey, barrister,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. A. Caeiro, conseiller juridique, et Mme K. Leivo, membre du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Läärä et Oy Transatlantic Software Ltd, représentés par Me P. Kiviluoto, de Cotswold Microsystems Ltd, représentée par M. H. T. Klami, du gouvernement finlandais, représenté par Mme T. Pynnä, du gouvernement belge, représenté par Mes P. Vlaemminck et L. Van Den Hende, du gouvernement allemand, représenté par M. E. Röder, du gouvernement espagnol, représenté par Mme M. López-Monís Gallego, abogado del Estado, en qualité d'agent, du gouvernement irlandais, représenté par Mme M. Finlay, SC, du gouvernement luxembourgeois, représenté par Me K. Manhaeve, avocat au barreau de Luxembourg, du gouvernement néerlandais, représenté par M. M. A. Fierstra, conseiller juridique adjoint au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement portugais, représenté par MM. L. Fernandes et A. Cortesão Seiça Neves, du gouvernement suédois, représenté par Mme L. Nordling, rättschef au secrétariat juridique (UE) du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par M. J. E. Collins, assisté de M. M. Brealey, et de la Commission, représentée par M. A. Caeiro et Mme K. Leivo, à l'audience du 30 juin 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 4 mars 1999,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 21 mars 1997, parvenue à la Cour le 25 mars suivant, le Vaasan hovioikeus (cour d'appel de Vaasa) a posé à la Cour, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), trois questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'arrêt de la Cour du 24 mars 1994, Schindler (C-275/92, Rec. p. I-1039, ci-après l'"arrêt Schindler"), et des articles 30, 36, 56, 59 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE, 30 CE, 46 CE et 49 CE) et 60 du traité CE (devenu article 50 CE), en vue d'apprécier la compatibilité avec ces dispositions d'une législation nationale qui réserve à un organisme public le droit d'exploiter des machines à sous sur le territoire de l'État membre concerné.

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant M. Läärä, la société de droit finlandais Oy Transatlantic Software Ltd (ci-après "TAS") et la société de droit anglais Cotswold Microsystems Ltd (ci-après "CMS"), appelants au principal, au Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) (procureur de district de Jyväskylä) et au Suomen valtio (État finlandais), au sujet de l'exploitation de machines à sous en Finlande.

La réglementation nationale

3 En Finlande, en vertu de l'article 1er, paragraphe 1, de l'arpajaislaki (1.9.1965/491) (loi n° 491 du 1er septembre 1965 sur les jeux de hasard, dans sa version en vigueur à l'époque des faits au principal, ci-après l'"arpajaislaki"), les jeux de hasard ne peuvent être organisés, avec l'autorisation de l'administration, qu'afin de recueillir des fonds dans le cadre d'une action de bienfaisance ou dans un autre but désintéressé prévu par la loi. Selon l'article 1er, paragraphe 2, de l'arpajaislaki, sont notamment considérés comme jeux de hasard, au sens de cette loi, l'activité de casino, les machines à sous et autres appareils de jeux ou les jeux dans lesquels, en échange d'une somme d'argent, le joueur peut recevoir un lot consistant en de l'argent, en une marchandise ou en un autre avantage appréciable en argent, ou encore en des jetons susceptibles d'être convertis en argent, marchandises ou avantages.

4 L'article 3 de l'arpajaislaki prévoit notamment que l'administration peut délivrer à un organisme de droit public l'autorisation de faire fonctionner, contre rémunération, des machines à sous et autres appareils de jeux ou d'exploiter une activité de casino, afin de recueillir des fonds destinés à différentes actions d'intérêt général, énumérées par cette disposition. Il ne peut être délivré qu'une seule autorisation couvrant ces activités, pour une période donnée.

5 Cette autorisation a été délivrée à la Raha-automaattiyhdistys (association pour la gestion des machines à sous, ci-après la "RAY"), en vertu de l'article 1er, paragraphe 3, du raha-automaattiasetus (29.12.1967/676) (règlement n° 676 du 29 décembre 1967 sur les machines à sous, dans sa version en vigueur à l'époque des faits). Selon l'article 6 de ce règlement, la RAY a le droit, afin de réaliser son objet qui est de recueillir des fonds destinés à couvrir les besoins cités à l'article 3 de l'arpajaislaki, de faire fonctionner, contre rémunération, des machines à sous et d'exercer une activité de casino, ainsi que de fabriquer et de vendre des machines à sous et des appareils de loisirs. Les articles 29 et suivants du même règlement précisent les conditions dans lesquelles le produit net des activités de la RAY, dont le montant figure au budget de l'État, doit être versé au ministère des Affaires sociales et de la Santé puis réparti entre les organismes et fondations qui ont pour objet la satisfaction des besoins précités.

6 En vertu de l'article 6, paragraphe 1, de l'arpajaislaki, celui qui, sans autorisation, organise des jeux de hasard pour lesquels une autorisation est requise est passible d'une amende ou d'une peine de prison pouvant atteindre six mois. En outre, selon l'article 16 du titre 2 de la rikoslaki (13.05.1932/143) (loi pénale finlandaise dans sa version résultant de la loi n° 143 du 13 mai 1932), tout instrument appartenant à l'auteur de l'infraction ou à son commettant et qui a servi à la commission de l'infraction, ou qui a été fabriqué ou acquis uniquement à cette fin, peut être confisqué.

Le litige au principal

7 Il ressort de l'ordonnance de renvoi que CMS a confié à TAS, dont M. Läärä est le président, l'exploitation en Finlande de machines à sous dites "AWP", de type Golden Shot, qui restent, selon les termes du contrat passé entre les deux sociétés, la propriété de CMS. Ces appareils contiennent des rouleaux qui tournent sur eux-mêmes et sur lesquels figurent des dessins de fruits. Lorsque les rouleaux s'immobilisent, soit d'eux-mêmes, soit par l'action du joueur sur une poignée, et que la séquence formée par les dessins est répertoriée au barème des gains, la machine délivre au joueur un gain unitaire qui peut atteindre au maximum 200 FIM (pour une mise comprise entre 1 et 5 FIM).

8 M. Läärä a été poursuivi pénalement, en sa qualité de responsable de TAS, devant le Jyväskylän käräjäoikeus (tribunal de première instance de Jyväskylä) pour avoir fait fonctionner ces machines en Finlande sans autorisation. Soutenu par TAS et CMS, appelées dans la cause, il a contesté l'infraction qui lui était reprochée au motif, notamment, que la possibilité de gains offerte par les machines Golden Shot ne reposait pas essentiellement sur le hasard mais aussi, pour une part considérable, sur l'habileté du joueur, de sorte que ces machines ne pouvaient être qualifiées de jeux de hasard, et que la législation finlandaise était en contradiction avec les règles communautaires qui régissent la libre circulation des biens et des services. Le käräjäoikeus, qui n'a pas fait droit à ses arguments, l'a condamné à une amende et a ordonné la confiscation des machines.

9 Les intéressés ayant fait appel de ce jugement devant le Vaasan hovioikeus, celui-ci a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

"1) L'arrêt rendu par la Cour le 24 mars 1994 dans l'affaire C-275/92, Her Majesty' s Customs and Excise/Gerhart Schindler et Jörg Schindler, doit-il être interprété en ce sens qu'il est possible de considérer qu'il se rapporte à une affaire analogue à la présente (voir l'arrêt rendu le 6 octobre 1982 dans l'affaire 283/81, Srl Cilfit et Lanificio di Gavardo SpA/Ministère de la Santé) et que les dispositions du traité CE doivent être interprétées ici de la même façon que dans l'affaire précitée?

Si la réponse à la première question s'avère négative, en tout ou en partie, le hovioikeus pose les questions suivantes:

2) Les dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des biens et des services (articles 30, 59 et 60) s'appliquent-elles aussi aux machines à sous du type de celles en cause ici?

3) En cas de réponse affirmative à la deuxième question,

a) les articles 30, 59 ou 60, ou tout autre article du traité CE, font-ils obstacle à ce que la Finlande limite le droit de gérer des machines à sous au monopole de la Raha-automaattiyhdistys (association de droit public pour la gestion des machines à sous) et cela indépendamment du fait que la restriction s'applique en vertu de la même loi aux organisateurs de jeux tant nationaux qu'étrangers et

b) cette restriction est-elle susceptible d'être justifiée, eu égard aux motifs exposés dans la loi sur les jeux de hasard, ou dans ses mesures d'application, ou pour d'autres motifs, par les principes contenus aux articles 36 ou 56 ou à tout autre article du traité CE; par ailleurs, le montant du gain susceptible d'être procuré par les machines à sous et son origine, selon qu'il est dû au hasard ou à l'habileté du joueur, influent-ils sur la réponse à cette question?"

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.