ETUDE : Le débat contradictoire de prolongation de détention devant le JLD et l’état d’urgence sanitaire * Rédigée le 23.04.2020
E54583LQ
sans cacheDernière modification le 06-07-2021
E83353LB
C’est au regard de cet état du droit positif qu’il faut rechercher comment l’état d’urgence sanitaire allant du 25 mars 2020 au 10 juillet 2020 inclus, pour l’heure, a nécessité d’adapter les règles de procédure pénale.
E54593LR
E54603LS
La question des débats de prolongation doit être totalement distinguée de celle de l’allongement des délais maximums de détention.
Le rapport n° 381 de Monsieur Philippe Bas fait au nom de la commission des lois du Sénat déposé le 19 mars 2020 comporte en son chapitre IV, intitulé « assurer la continuité du fonctionnement des administrations et les juridictions », une section 2 sur l’adaptation du fonctionnement de l’institution judiciaire rédigée en ces termes : « la durée de la détention provisoire ou de l’assignation à résidence sous surveillance électronique pourrait être prolongée au-delà des durées maximales actuellement prévues par le Code de procédure pénale, afin d’éviter que ces mesures de sûreté n’arrivent à leur terme avant que l’audience n’ait pu être organisée. Cette durée supplémentaire ne pourrait excéder trois mois en première instance et six mois en appel ». Ce dispositif est donc bien distinct « des décisions de prolongation de la détention provisoire ou de l’ARSE qui pourraient être prises par le juge des libertés et de la détention au terme d’une procédure écrite (réquisitions écrites du parquet, observations écrites de la personne ou de son avocat) ».
Le rapport présenté le 20 mars 2020 par Madame Guévenoux, députée, au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale distingue de la même façon « l’allongement, pour une durée de trois mois ou six mois, de la durée de détention provisoire et d’ARSE afin de bénéficier d’un délai étendu pour les audiencements, mais aussi pour l’achèvement des instructions en cours » et « les dispositions adaptant la procédure pénale pour limiter les contacts. Les règles de publicité des audiences et de visioconférence sont concernées ainsi que les règles de garde à vue, de détention provisoire et d’ARSE notamment. Il sera notamment possible d’étendre le recours au huis clos et à la visioconférence ».
E54613LT
Or tel n'est pas le cas en l'espèce puisque la prolongation de plein droit de l'ensemble des détentions provisoires sur le territoire national découle des instructions de la Direction des Affaires criminelles et des Grâces et de la Direction de l'administration pénitentiaire. La garantie d'habeas corpus que contient l'article 5, § 4, vient également appuyer l'idée que la détention prolongée au-delà de la période initiale envisagée appelle toujours l'intervention d'un « tribunal » comme garantie contre l'arbitraire. Enfin, s'agissant d'une privation de liberté, il est nécessaire de satisfaire au principe général de la sécurité juridique. Il est donc impératif que les conditions de privation de la liberté en vertu du droit interne soient clairement définies et que la loi elle-même soit prévisible dans son application de façon à remplir le critère de légalité fixé par la Convention. Ce critère exige que toute loi soit suffisamment précise pour permettre aux citoyens de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à dériver d'un acte déterminé.
En guise de conclusion... L’intention du législateur concernant les débats de prolongation de détention s’est traduite dans l’article 11, I, d), de la loi d’habilitation qui permet de procéder aux débats contradictoires de façon aménagée. À aucun moment dans l’élaboration de ce dispositif, lors des travaux et débats parlementaires, dans la loi d’habilitation et l’article 19 de l’ordonnance du 25 mars 2020 n’a été envisagée la possibilité de supprimer purement et simplement, pendant la durée d’urgence sanitaire, les débats contradictoires de prolongation de détention devant le juge des libertés. Face à ce constat, est-il sérieusement envisageable de demander au juge judiciaire de se conformer à la circulaire du 26 mars 2020 et d'appliquer une législation d'exception en l'interprétant à l'encontre de l'intention expresse de la loi d'habilitation et en supprimant de façon rétroactive une liberté fondamentale ? |
Utilisation des cookies sur Lexbase
Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.
Parcours utilisateur
Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.
Données analytiques
Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.