Un contrat conclu entre personnes privées est, en principe, un contrat de droit privé, hormis le cas où l'une des parties au contrat agit pour le compte d'une personne publique. Les contrats, prévus à l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 (
N° Lexbase : L4327A3N), entre la société EDF, qui n'exerce dans ce domaine aucune mission pour le compte d'une personne publique, et les producteurs autonomes d'électricité sont conclus entre personnes privées. Or, l'avant-dernier alinéa de l'article 10 de la loi du 10 février 2000, en sa rédaction issue de l'article 88 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 (
N° Lexbase : L7066IMN), dispose que "
les contrats régis par le présent article sont des contrats administratifs qui ne sont conclus et qui n'engagent les parties qu'à compter de leur signature. Le présent alinéa a un caractère interprétatif". La modification ainsi apportée ne se borne pas à reconnaître, sans innover, un droit préexistant qu'une définition imparfaite aurait rendu susceptible de controverses mais change, rétroactivement, la nature des contrats en cause et, partant, la juridiction compétente pour en connaître. Or, si la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction est, en principe, par elle-même, sans incidence sur le droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la CESDH (
N° Lexbase : L7558AIR), les stipulations de cet article s'opposent, sauf d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges, quelle que soit la qualification formelle donnée à la loi et même si l'Etat n'est pas partie au procès, notamment par l'adoption d'une disposition législative conférant une portée rétroactive à la qualification en contrats administratifs de contrats relevant du droit privé. En l'espèce, la qualification de contrats administratifs conférée par la loi du 12 juillet 2010 aux contrats conclus entre la société EDF et les producteurs autonomes d'électricité, avec une portée rétroactive, alors qu'un litige était en cours entre eux, n'est justifiée par aucun motif impérieux d'intérêt général. Dès lors, les demandes d'achat d'électricité présentées par les sociétés productrices d'électricité à la société EDF, tenue de conclure les contrats d'achat correspondants, ne peuvent conduire qu'à instaurer entre ces personnes de droit privé des relations contractuelles de droit privé, de sorte que le litige y relatif relève de la juridiction judiciaire. Telle est la solution énoncée par le Tribunal des conflits dans un jugement du 13 décembre 2010 (T. conf., 13 décembre 2010, n° 3800
N° Lexbase : A4565GPR).
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