Les autorités de police d'un Etat membre participant à l'acquis de Schengen peuvent être investies d'une compétence de contrôle d'identité dans une zone de 20 kilomètres en deçà de sa frontière. Cependant, l'application de cette compétence doit être encadrée pour éviter que l'exercice de ces contrôles d'identité n'ait un effet équivalent à celui des contrôles aux frontières. Telle est la solution dégagée par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt rendu le 22 juin 2010 (CJUE, 22 juin 2010, aff. C-188/10, Aziz Melki
N° Lexbase : A1918E3G). En l'espèce, deux ressortissants algériens, en situation irrégulière en France, ont été contrôlés par la police française, dans la zone comprise entre la frontière terrestre de la France avec la Belgique et une ligne tracée à 20 kilomètres en deçà de cette frontière. Le 23 mars 2010, ils ont, chacun, fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière et d'une décision de maintien en rétention administrative. Devant le juge des libertés et de la détention, saisi par le préfet d'une demande de prolongation de leur rétention, ils ont contesté la régularité de leur interpellation et soulevé l'inconstitutionnalité de la disposition du Code de procédure pénale (C. pr. pén., art. 78-2
N° Lexbase : L2006IEZ). Le juge des libertés et de la détention a transmis la question portant sur la constitutionnalité de la disposition du Code de procédure pénale à la Cour de cassation (France), qui doit statuer sur le renvoi de ladite question au Conseil constitutionnel français. La Cour de cassation a donc posé une question préjudicielle à la juridiction européenne (Cass. QPC, 16 avril 2010, n° 10-40.002, ND
N° Lexbase : A2046EX3). Dans un premier temps, la CJUE rappelle que, afin d'assurer la primauté du droit de l'Union, le fonctionnement du système de coopération entre elle-même et les juridictions nationales nécessite que le juge national soit libre de saisir, à tout moment de la procédure qu'il juge approprié, et même à l'issue d'une procédure incidente de contrôle de constitutionnalité, la Cour de justice de toute question préjudicielle qu'il juge nécessaire. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si la législation nationale peut être interprétée conformément à ces exigences du droit de l'Union. Ensuite, la Cour énonce que le droit de l'Union s'oppose à une législation nationale conférant aux autorités de police de l'Etat membre concerné la compétence de contrôler, uniquement dans une zone de 20 kilomètres à partir de sa frontière terrestre, l'identité de toute personne afin de vérifier qu'elle respecte les obligations de détention, de port et de présentation des titres et des documents prévus par la loi, sans garantir, à défaut d'encadrement nécessaire, que l'exercice pratique de cette compétence ne puisse pas revêtir un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières.
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