Synthèse : La clôture de l’instruction

  • Synthèse : La clôture de l’instruction

    Dernière modification le 19-04-2024

    • Introduction

      La fin de l’instruction préparatoire constitue un moment important tant en termes de droits qu’au regard de la suite judiciaire que le magistrat instructeur entend donner à l’affaire pour laquelle il est saisi. Les parties vont en effet apprendre quel sort est réservé au(x) mis en examen tout en pouvant formuler observations et demandes d’actes. Si en réaction à la célèbre affaire d’ « Outreau », la loi du 5 mars 2007 (N° Lexbase : L5932HUA) avait fait en sorte de nettement favoriser le contradictoire au stade de la clôture, difficile de nier que la loi du 23 mars 2019 (N° Lexbase : L6740LPC) a considérablement obscurci la procédure applicable, semblant vouloir tendre un véritable piège aux avocats. Quelle que soit la volonté du législateur contemporain, l’article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS) ne constitue plus une garantie destinée à assurer à l’issue de l’information judiciaire un échange équitable et contradictoire entre les différentes parties prenantes. Il y a dès lors de quoi être inquiet quand un législateur ne cherche plus à faire de la procédure pénale un espace de véridiction gouverné par l’échange et la contradiction. Assumer le risque que le dossier ne soit pas équilibré et éclairé par la défense atteste que la procédure pénale tend vers de nombreux objectifs au premier rang desquels ne se trouve pas l’égalité des armes ; ce qui est sans doute logique si le droit répressif est perçu tel un ordre destiné à punir ceux qui par leur infraction ont brisé le lien social.

      L’avis de fin d’information

      Maître du temps. Le juge d’instruction maitrise évidemment la temporalité de l’information judiciaire ; la fin d’information n’échappe pas à son emprise. La clôture de l’instruction dépend peu ou prou, en pratique, du seul rythme qu’il donne à la procédure conformément à la loi (C. proc. pén., art. 175 N° Lexbase : L7482LPS). Toutefois, l’article 175-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7476LPL) permet au mis en examen, au témoin assisté ou à la partie civile de demander au juge d'instruction de prononcer le renvoi ou la mise en accusation devant la juridiction de jugement ou de déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre. Cette demande peut d’ailleurs également être formée lorsque aucun acte d'instruction n'a été accompli pendant un délai de quatre mois. A cet effet, et fort opportunément, l’article 175-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2992IZT) rappelle que la durée de l'instruction ne peut excéder un délai raisonnable au regard de la gravité des faits reprochés au mis en examen, de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité et de l'exercice des droits de la défense.

      Enfin, l'article 221-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3611AZR) permet aux parties, lorsqu'un délai de quatre mois (ramené à deux mois pour la personne en détention provisoire) s'est écoulé depuis le dernier acte d'instruction, de saisir la chambre de l'instruction dans les conditions de l'article 173, alinéa 3, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7455LPS) par déclaration au greffe. Cette juridiction pourra éventuellement dessaisir le magistrat instructeur du dossier.

      Les délais de l’article 175 du Code de procédure pénale

      Avis de fin d’information et réquisitoire définitif

      Délai et notification. Il résulte de l’article 175, I, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS) qu’aussitôt que l'information lui paraît terminée, le juge d'instruction communique le dossier au procureur de la République et en avise en même temps les avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, les parties. Il est ajouté que cet avis de fin d’information est notifié soit verbalement avec émargement au dossier, soit par lettre recommandée. Lorsque la personne est détenue, il peut également être notifié par les soins du chef de l'établissement pénitentiaire, qui adresse sans délai au juge d'instruction l'original ou la copie du récépissé signé par l'intéressé. Le II de l’article 175 du Code de procédure pénale précise alors qu’une fois l’avis envoyé, le procureur de la République dispose d'un délai d'un mois si une personne mise en examen est détenue ou de trois mois dans les autres cas pour adresser ses réquisitions motivées au juge d'instruction. Copie de ce réquisitoire définitif est adressée dans le même temps par lettre recommandée aux avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, aux parties directement.

      Observations et répliques

      Délai de préservation des droits. Désormais, aux termes du III de l’article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS), dans un délai de quinze jours à compter soit de chaque interrogatoire ou audition réalisé au cours de l'information, soit de l'envoi de l'avis prévu au I du présent article, les parties peuvent faire connaître au juge d'instruction, selon les modalités prévues à l'avant-dernier alinéa de l'article 81 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7468LPB), qu'elles souhaitent exercer l'un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI du présent article. L’article 175, VIII, du Code de procédure pénale dispose que ce délai s’impose également au témoin assisté.

      1er délai : réponse au « 175 ».  Selon le IV de l’article 175 du Code de procédure pénale, si les parties ont indiqué souhaiter exercer ces droits, elles disposent, selon les cas mentionnés au II, d'un même délai d'un mois ou de trois mois à compter de l'envoi de l'avis prévu au I pour adresser des observations, formuler des demandes ou présenter des requêtes.  A l'expiration du délai de trois mois si le mis en examen est libre, un mois s’il est détenu, les parties ne sont plus recevables à adresser de telles observations ou à formuler ou présenter de telles demandes ou requêtes. Le VIII de l’article 175 du Code de procédure pénale précise que le témoin assisté peut formuler ces observations.

      2ème délai : réplique au réquisitoire définitif. En vertu de l’article 175, VI, du Code de procédure pénale, si les parties ont indiqué qu'elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III, elles disposent d'un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des observations complémentaires, pour répliquer aux réquisitions du procureur, et ce « à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées ». Le témoin assisté a également la possibilité de répliquer en application de l’alinéa VIII de l’article 175 du Code de procédure pénale.

      3ème délai : réplique du procureur par réquisitions complémentaires. La loi distingue désormais dans un alinéa spécifique le cas où le procureur répond aux observations formulées par les parties dans le cadre du 1er délai. L’article 175, V, du Code de procédure pénale énonce ainsi que si les parties ont adressé des observations en application du 1° du IV, le procureur de la République dispose d'un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des réquisitions complémentaires, et ce à compter de la date à laquelle ces observations lui ont été communiquées.

      Ordonnance de règlement. Le VII de l’article 175 du Code de procédure pénale dispose qu’à l'issue, selon les cas, du délai d'un mois ou de trois mois prévu aux II et IV (observations primaires des parties et réquisitions du procureur), ou du délai de dix jours ou d'un mois prévu aux V et VI (répliques), le juge d'instruction peut rendre son ordonnance de règlement. Selon l’article 385, alinéa 3, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3791AZG), lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par l'article 175 du code aient été respectées, les parties demeurent recevables à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure.

      Les actes de l’article 175 du Code de procédure pénale

      Droit nouveau (similarité avec le droit ancien). Aux termes de l’article 175, IV, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS), il est acquis que, si elles « ont indiqué souhaiter exercer ces droits dans les conditions prévues au III, les parties disposent, selon les cas mentionnés au II, d'un même délai d'un mois ou de trois mois à compter de l'envoi de l'avis prévu au I pour :

      2° Formuler des demandes ou présenter des requêtes, selon les mêmes modalités, sur le fondement du neuvième alinéa de l'article 81, des articles 82-1 et 82-3, du premier alinéa de l'article 156 et du troisième alinéa de l'article 173, sous réserve qu'elles ne soient pas irrecevables en application des articles 82-3 et 173-1 ».

      L'ordonnance de règlement

      Les différentes ordonnances de règlement

      Généralités sur l'ordonnance de règlement

      Appréciation souveraine des charges. Une fois les délais épuisés à la suite de l’avis d’information, le juge d’instruction doit « régler » l’affaire. Il doit en effet rendre une ordonnance de règlement par laquelle il doit examiner, conformément à l’article 176 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2972IZ4), s'il existe contre la personne mise en examen des charges constitutives d'infraction, dont il détermine la qualification juridique.

      Qualification. En vertu de l’article 184 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2974IZ8), l'ordonnance doit préciser la qualification légale du fait imputé et pourquoi il existe ou non des charges suffisantes. Depuis la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 (N° Lexbase : L5930HU8), le texte ajoute que la motivation est prise au regard des réquisitions et observations des parties, en précisant les éléments à charge et à décharge. L’article 176 du Code de procédure pénale renvoie également à la qualification juridique.

      Validité formelle et couverture des vices. Si la validité formelle de l’ordonnance est acquise, il en résulte par effet de la loi (C. proc. pén., art. 178 N° Lexbase : L6709LGL, 179 N° Lexbase : L8054LAK et 181 N° Lexbase : L2990IZR) que lorsqu'elle devient définitive, l'ordonnance de renvoi couvre, s'il en existe, les vices de la procédure.

      Ordonnances partielles. Les dispositions de l’article 182 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2973IZ7) précisent que des ordonnances de non-lieu partiel peuvent intervenir en cours d'information. Peuvent intervenir, pareillement, des ordonnances de renvoi partiel ou de transmission partielle des pièces en cas de charges suffisantes.

      Dessaisissement. L'ordonnance de clôture de l'information entraîne ipso jure le dessaisissement du magistrat instructeur : celui-ci ne peut plus procéder au moindre acte d'instruction (v. Cass. crim., 24 juill. 1961 : Bull. crim. 1961, n° 353).

      L'ordonnance de non-lieu

      Non-lieu de droit commun

      Fondement. Le non-lieu est envisagé à l’article 177 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2988IZP). Ainsi, dès lors que le juge d'instruction estime que les faits ne constituent aucune infraction, ou si l'auteur est resté inconnu, ou s'il n'existe pas de charges suffisantes contre la personne mise en examen, il déclare, par une ordonnance, qu'il n'y a lieu à suivre.

      Autorité relative et citation directe. Sur le plan pénal, aux termes de l’article 188 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2975IZ9), « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ».

      Effets du non-lieu. Les personnes mises en examen qui sont provisoirement détenues sont fort naturellement mises en liberté. L'ordonnance met similairement fin au contrôle judiciaire en application de l’article 177 du Code de procédure pénale. Surtout, il résulte des dispositions de l’article 188 du Code de procédure pénale que « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ».

      Autres effets. Lors d’un non-lieu, le juge doit statuer par la même ordonnance sur la restitution des objets placés sous main de justice. Enfin, aux termes de l’article 177-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8710GQN), le juge d'instruction peut ordonner, d'office ou à la demande de l'intéressé soit la publication intégrale ou partielle de la décision de non-lieu, soit la publication d'un communiqué. L'ordonnance de refus, également susceptible d'appel, doit être motivée.

      Amende civile. Le non-lieu à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile, considérée comme abusive ou dilatoire, peut conduire le juge d'instruction, à prononcer contre la partie civile une amende civile ne pouvant excéder 15 000 euros en vertu de l’article 177-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4539AZ7). Cette décision peut être frappée d'appel par la partie civile dans les mêmes conditions que l'ordonnance de non-lieu. L’appel est également ouvert au procureur de la République si le juge d'instruction ne suit pas ses réquisitions.

      La loi n° 2015-993 du 17 août 2015 portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne (N° Lexbase : L2620KG7) a inséré un nouvel article 183-1 dans le Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2761KGD) aux termes duquel : « à la demande de la victime qui a déposé plainte sans s'être toutefois constituée partie civile, l'ordonnance de non-lieu, une fois devenue définitive, est portée à sa connaissance par tout moyen ».

      Dommages et intérêts. En vertu de l’article 91 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7165A47), quand, après une information ouverte sur constitution de partie civile, une décision de non-lieu a été rendue, la personne mise en examen et toutes personnes visées dans la plainte, et sans préjudice d'une poursuite pour dénonciation calomnieuse, peuvent, si elles n'usent de la voie civile, demander des dommages-intérêts au plaignant devant la juridiction répressive.

      Non-lieu spéciaux

      Irresponsabilité pénale ou décès. Si le non-lieu se fonde sur l’article 122-2 (force majeure N° Lexbase : L2167AM9), 122-3 (erreur sur le droit N° Lexbase : L2316AMQ), 122-4 (autorisation de la loi ou commandement de l’autorité légitime N° Lexbase : L7158ALP), 122-5 (état de nécessité N° Lexbase : L2171AMD), 122-7 du Code pénal (légitime défense N° Lexbase : L2248AM9) ou le décès du mis en examen, l'ordonnance doit selon l’article 177 alinéa 2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2988IZP) préciser s'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.

      Surtout, la loi n° 2008-174 du 25 février 2008 (N° Lexbase : L8204H3A) a créé un cadre spécifique de règlement en cas de trouble mental : l'ordonnance d'irresponsabilité pénale qui relève du juge d'instruction (C. proc. pén., art. 706-120 N° Lexbase : L6266H9X), ou l'arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale qui ressort à la chambre de l'instruction (C. proc. pén., art. 706-124 N° Lexbase : L6262H9S] : pour une analyse différentielle de ces procédures v. S. Detraz, La création d'une nouvelle décision de règlement de l'instruction : la décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, RSC, 2008, p. 873). La situation visée par la loi est la suivante : malgré l'existence de charges suffisantes à l'encontre d'une personne, cette dernière doit être déclarée irresponsable en raison de troubles psychiques ou neuropsychiques ayant aboli son discernement conformément à l’article 122-1 du Code pénal (N° Lexbase : L9867I3T).

      L'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel

      La décision de renvoi

      ORTC et mesures de contrainte. L’article 179 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8054LAK) définit le cadre juridique de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (ORTC). Si le juge estime que les faits constituent un délit, il prononce, par ordonnance, le renvoi de l'affaire devant le tribunal correctionnel. Cette ordonnance précise, s'il y a lieu, que le prévenu bénéficie des dispositions de l'article 132-78 du Code pénal (N° Lexbase : L0432DZZ) afférent aux causes de diminution ou d’exemption de peine en cas de collaboration avec la justice. Surtout la loi ajoute que l'ordonnance de règlement met fin à la détention provisoire, à l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou au contrôle judiciaire.

      Détention provisoire. Le juge d'instruction peut, par ordonnance distincte spécialement motivée, maintenir le prévenu en détention, sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou encore sous contrôle judiciaire jusqu'à sa comparution devant le tribunal. La loi exige que l'ordonnance de maintien en détention provisoire soit exclusivement motivée par référence aux 2°, 4°, 5° et 6° de l'article 144 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9485IEZ).

      Mandats. Si le mandat d'arrêt conserve sa force exécutoire, en revanche, les mandats d'amener ou de recherche cessent de pouvoir recevoir exécution. Le juge d'instruction a toutefois la possibilité de délivrer un mandat d'arrêt contre le prévenu.

      Purge des vices. L’article 179 du Code de procédure pénale en son dernier alinéa consacre la purge des vices de la procédure jusqu’ici suivie : « lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance mentionnée au premier alinéa couvre, s'il en existe, les vices de la procédure ». Cette disposition trouve son pendant à l’article 385 du code (N° Lexbase : L3791AZG) qui dispose en son alinéa 1er que : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction ». L’alinéa 4 poursuit ainsi : « Lorsque la procédure dont il est saisi n'est pas renvoyée devant lui par la juridiction d'instruction, le tribunal statue sur les exceptions tirées de la nullité de la procédure antérieure ».

      Limite à la purge : irrégularité de l’ORTC. Nonobstant la purge des nullités, l’article 385, alinéa 2, du Code de procédure pénale ouvre à la défense la possibilité d’attaquer la régularité de l’ordonnance de renvoi.

      Exception à la purge : irrégularité de la fin d’information. En revanche, l’article 385 du Code de procédure pénale contient une véritable exception à l’article 179, dernier alinéa, du code : lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par l'article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS) aient été respectées, le prévenu est autorisé à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure.

      Exception à l’exception : personne en fuite. Selon la Cour de cassation, il se déduit de l'article 134 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7628IP9) qu'une personne en fuite et vainement recherchée au cours de l'information n'a pas la qualité de partie au sens de l'article 175 du Code de procédure pénale relatif à l’avis de fin d’information. Dès lors, elle ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 385, alinéa 3, du Code de procédure pénale (permettant de soulever les nullités devant le tribunal correctionnel), l'ordonnance de renvoi ayant, comme le prévoit l'article 179 du code, purgé les vices de la procédure (Cass. crim., 3 avril 2007, n° 06-89.315, F-P+F+I N° Lexbase : A9203DUE ; Cass. crim., 3 octobre 2007, n° 07-81.030, F-P+F N° Lexbase : A8638DYL ; Cass. crim., 15 mai 2018, n° 17-82.866, F-P+B N° Lexbase : A4499XNX).

      Exception à la purge : presse. La spécificité du droit de la presse affecte également le jeu de l’article 179, alinéa 6, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8054LAK). En principe, lorsque la juridiction correctionnelle est saisie par l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction, les parties sont irrecevables à soulever les exceptions tirées de la nullité de la procédure antérieure.

      Dessaisissement du juge d’instruction. Bien que la loi ne le mentionne pas expressément, il est évident que l’ordonnance de renvoi dessaisit le magistrat instructeur.

      Pour finir, précisons que toute ordonnance renvoyant le mis en examen devant les tribunaux de police ou correctionnel l'informe en application de l’article 179-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5357LCE), qu'il doit signaler par lettre recommandée avec accusé de réception auprès du procureur, jusqu'au jugement définitif, tout changement d'adresse, et que toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne.

      Correctionnalisation

      Correctionnalisation judiciaire et légale. La correctionnalisation permet à l’institution judiciaire de recourir à une qualification délictuelle quand bien même la réalité des faits commis imposerait une dimension criminelle.

      Surtout ces dispositions vont de pair avec l’article 469, alinéa 4, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3000IZ7). Le 1er alinéa permet certes au tribunal correctionnel, s’il estime que le fait déféré sous la qualification de délit est de nature à entraîner une peine criminelle, de renvoyer le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il avisera. Toutefois, l’alinéa 4ème ajoute : « lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction, le tribunal correctionnel ne peut pas faire application, d'office ou à la demande des parties, des dispositions du premier alinéa, si la victime était constituée partie civile et était assistée d'un avocat lorsque ce renvoi a été ordonné ». Le texte réserve toutefois le cas de poursuites exercées pour un délit non intentionnel s'il résulte des débats que les faits sont de nature à entraîner une peine criminelle parce qu'ils ont été commis de façon intentionnelle. L’affaire peut alors être renvoyée au procureur aux fins de mieux se pourvoir.

      Contenu de l’appel contre la correctionnalisation. Outre ce risque, la Cour a longtemps fait peser une incertitude quant au sort réservé à l’appel de l’ordonnance de renvoi.

      En son dernier état, la Cour de cassation estime donc que « la recevabilité, au regard des dispositions de l'article 186-3 du code de procédure pénale, de l'appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, portant requalification des faits, peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l'instruction » (Cass. crim., 29 novembre 2017, n° 17-84.566, FS-P+B, (N° Lexbase : A4616W4Q).

      Les alternatives au renvoi

      CRPC : variation autour de l’action publique. Depuis la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 (N° Lexbase : L3703IRL), une innovation a pénétré le Code de procédure pénale. Alors que l’action publique a été déclenchée par la saisine d’un magistrat instructeur, il est possible en cours d’information d’emprunter une voie de dérivation en ayant recours à une comparution sur reconnaissance de culpabilité.

      CJIP : dépassement. Suivant la logique initiée par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 avec la « CRPC-instruction », la loi du n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (N° Lexbase : L6482LBP) a également opté pour un mécanisme de dérivation de l’action publique en permettant de recourir à une convention judiciaire d’intérêt public, nouvellement créée, au cours de l’information judiciaire. Toutefois, si le mécanisme intégré à l’article 180-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0497LTL) se rapproche par l’esprit de la CRPC, il s’en éloigne sur un point cardinal : si la CRPC reste une poursuite (certes hétérodoxe), la CJIP constitue une alternative aux poursuites n’entraînant aucune condamnation pénale, donc aucune inscription au casier judiciaire (C. proc. pén., art. 41-1-2, II, al. 4 et 5 N° Lexbase : L0484LT4). Pire : « l'exécution des obligations prévues par la convention éteint l'action publique » (C. proc. pén., art. 41-1-2, IV, al. 2). La célèbre (légendaire ?) indisponibilité de l’action publique en sort évidement affaiblie.

      Pour conclure, il n’est pas inutile d’observer qu’au 1er janvier 2020, sur huit CJIP conclues, cinq furent des dérivations d’instruction (v. ainsi les CJIP « HSBC » du 30 octobre 2017 (N° Lexbase : L5191LI4) ; « EGIS AVIA » 28 novembre 2019 (N° Lexbase : L7864LUS) ; « SAS Poujaud » du 4 mai 2018 (N° Lexbase : L7866LUU) ; « Kaefer Wanner » du 15 février 2018 (N° Lexbase : L5193LI8) ; et « SAS Set Environnement » du 14 février 2018 (N° Lexbase : L5195LIA).

      La CJIP est donc pour le moment davantage une alternative aux poursuites engagées qu’une alternative à l’engagement des poursuites !

       

      L'ordonnance de mise en accusation

      « OMA ». A l’instar de l’article 179 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8054LAK), l’article 181 du même code (N° Lexbase : L2990IZR) dispose que, « si le juge d'instruction estime que les faits retenus à la charge des personnes mises en examen constituent une infraction qualifiée crime par la loi, il ordonne leur mise en accusation devant la cour d'assises ».

      Contraintes. Le contrôle judiciaire ou l'assignation à résidence avec surveillance électronique dont fait l'objet l'accusé continuent à produire leurs effets.

      Si l'accusé est placé en détention provisoire, le mandat de dépôt décerné contre lui conserve sa force exécutoire et l'intéressé reste détenu jusqu'à son jugement par la cour d'assises, sous réserve des dispositions des deux alinéas suivants et de l'article 148-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L1744IPB).

      En revanche, la détention provisoire, l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou le contrôle judiciaire des personnes renvoyées pour délit connexe prend fin, sauf pour le juge à recourir à ordonnance distincte spécialement motivée conformément à l’article 179, alinéa 3, du Code de procédure pénale. Le délai de comparution devant la juridiction criminelle est porté à six mois.

      Transmission. Le juge d'instruction transmet le dossier avec son ordonnance au procureur de la République. Celui-ci est tenu de l'envoyer sans retard au greffe de la cour d'assises. Les pièces à conviction, dont il est dressé état, sont transmises au greffe de la cour d'assises si celle-ci siège dans un autre tribunal que celui du juge d'instruction.

      Appel sans recours en nullité. La particularité de l’ordonnance de mise en accusation est la possibilité pour le mis en examen de l’attaquer par la voie de l’appel.

      La reprise de l'information sur charges nouvelles

      Autorité relative de l’ordonnance de non-lieu. On a pu voir que l’ordonnance par laquelle un magistrat instructeur dit n’y avoir lieu à suivre bénéficie d’une autorité relative de chose jugée. Aux termes en effet de l’article 188 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2975IZ9), « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ». L’ordonnance a autorité… jusqu’à apparition de nouvelles charges.

      Monopole de la réouverture attribué au procureur : constitutionnalité. Selon l’article 190 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4325AZ9), « il appartient au ministère public seul de décider s'il y a lieu de requérir la réouverture de l'information sur charges nouvelles ».

      L’appel contre certaines ordonnances de renvoi

      Généralités. La lettre du Code de procédure pénale limite l’appel à l’endroit des ordonnances de règlement. L’article 186, alinéa 1er, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2763KGG) interdit ainsi en principe l’appel par les parties privées d’une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. L’ordonnance de mise en accusation peut en revanche être querellée par le biais de l’appel devant la chambre de l’instruction. L’article 186-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4956K83) précise que « la chambre de l'instruction statue dans les quatre mois suivant la date de déclaration d'appel, faute de quoi, si la personne est détenue, elle est mise d'office en liberté ».

      Enfin l’alinéa deuxième dispose que la « partie civile peut interjeter appel des ordonnances de non-informer, de non-lieu et des ordonnances faisant grief à ses intérêts civils. Toutefois, son appel ne peut, en aucun cas, porter sur une ordonnance ou sur la disposition d'une ordonnance relative à la détention de la personne mise en examen ou au contrôle judiciaire ».

      Appel d’une « ORTC » complexe. Si le principe est l’interdiction de l’appel à l’endroit d’une « ORTC, » par exception l’appel est parfois ouvert. Cette ouverture est parfois le fait de la loi. Il en est ainsi des ordonnances portant correctionnalisation (C. proc. pén., art. 186-3, al. 1 N° Lexbase : L7478LPN) ou encore en cas de cosaisine, en l'absence de signature par tous les juges d'instruction cosaisis (C. proc. pén., art. 186, al. 2). Hors ces deux cas, la loi précise que « l'appel formé par la personne mise en examen ou la partie civile contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est irrecevable et donne lieu à une ordonnance de non admission de l'appel par le président de la chambre de l'instruction conformément au dernier alinéa de l'article 186 ». Il en est de même s'il est allégué que l'ordonnance de règlement statue également sur une demande formée avant l'avis de fin d’information (C. proc. pén., art. 175 N° Lexbase : L7482LPS) mais à laquelle il n'a pas été répondu, ou sur une demande d’actes formée en application du 2° du IV du même article 175, alors que cette demande était irrecevable ou que le président considère qu'il n'y a pas lieu d'en saisir la chambre de l'instruction conformément à l'article 186-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8650HWB).

    Plan de l'étude

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