Le Quotidien du 6 avril 2023

Le Quotidien

Affaires

[Brèves] Publication de la nouvelle partie législative du Code de l’artisanat

Réf. : Ordonnance n° 2023-208, du 28 mars 2023, portant partie législative du code de l'artisanat N° Lexbase : L2963MH9

Lecture: 3 min

N4955BZK

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par Vincent Téchené

Le 05 Avril 2023

► Une ordonnance, publiée au Journal officiel du 29 mars 2023, adopte la nouvelle partie législative du Code de l'artisanat. Cette codification réalisée à droit constant vise à regrouper l'ensemble des dispositions législatives et, à terme, réglementaires, régissant l'artisanat.

Cette ordonnance part d’un constat : le cadre juridique applicable au secteur de l'artisanat souffre d'un manque de lisibilité. Les textes régissant l'artisanat sont épars et difficilement accessibles.

Le Conseil d'État a d’ailleurs, à plusieurs reprises, appelé de ses vœux une refonte complète du Code de l'artisanat, en déplorant les imperfections de ce code, qui ne distingue pas entre les dispositions législatives et réglementaires et laisse hors de son champ de nombreuses dispositions législatives et réglementaires.

La codification intervient donc à droit constant, sous la réserve de modifications rendues nécessaires afin d'assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit et abroger les dispositions obsolètes ou devenues sans objet

Le code annexé à l’ordonnance se compose de cinq livres.

Le livre Ier intitulé « Des activités relevant du secteur des métiers et de l'artisanat » traite pour l'essentiel des conditions d'exercice des activités artisanales, notamment l'immatriculation au registre national des entreprises et de la qualification professionnelle exigée pour l'exercice de certaines professions. La liste des activités relevant du secteur des métiers et de l'artisanat, prévue en annexe au décret n° 98-247, du 2 avril 1998, relatif à la qualification artisanale et au répertoire des métiers N° Lexbase : L1473AIE, est codifiée dans la partie réglementaire de ce livre.

Par ailleurs, plusieurs articles renvoient à des dispositions d'autres codes régissant les conditions d'accès particulières à certaines professions artisanales (Code des transports pour les taxis, Code de la santé publique pour les ambulanciers, etc.), ainsi qu'aux dispositions législatives relatives à la délivrance du label « entreprise du patrimoine vivant », eu égard à son importance pour le secteur de l'artisanat et au titre de maître restaurateur codifié au sein du Code de la consommation.

Le livre II est consacré aux personnes relevant du secteur des métiers et de l'artisanat et regroupe l'ensemble des dispositions relatives à la qualité d'artisan et ses dérivés ainsi qu'aux titres et labels.

Le livre III est consacré aux institutions de l'artisanat que sont les chambres de métiers et de l'artisanat de région et CMA France. La commission supérieure de codification a approuvé le transfert, au sein de ce livre, des alinéas 8 à 12 de l'article 1601 du Code général des impôts N° Lexbase : L9721L78 relatifs à l'usage et aux principes concernant la répartition de la taxe pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat.

Le livre IV n'a pas été complété et servira à accueillir, lors d'une codification ultérieure, les dispositions relatives au droit local d'Alsace-Moselle qui nécessite un travail de vérification de la conformité des dispositions en cause à des normes supérieures, de recensement des dispositions encore applicables et des concertations indispensables au regard de leur grande spécificité. Pour des raisons de cohérence légistique, seules les dispositions accessoires d'adaptation relatives à l'Alsace et à la Moselle ont été codifiées, lorsqu'elles accompagnent des dispositions correspondantes pour le reste du territoire métropolitain.

Le livre V rassemble les dispositions concernant les adaptations nécessaires pour l'outre-mer.

newsid:484955

Assurances

[Brèves] Hip hip hip… L’alignement des chambres de la Cour de cassation sur la notion de faute dolosive

Réf. : Cass. civ. 3, 30 mars 2023, n° 21-21.084, FS-B+R N° Lexbase : A53099L9

Lecture: 3 min

N4966BZX

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 05 Avril 2023

► L’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute dolosive de son assuré ; la faute dolosive s’entend d’un acte délibéré de l’assuré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables.

Que cette décision fait plaisir à lire. Impossible de se lasser de cette motivation, aux allures d’attendus de principes, qui se réfère expressément à la jurisprudence, bien établie maintenant, de la deuxième chambre civile sur la faute dolosive (pour un exemple récent, Cass. civ. 2, 20 janvier 2022, n° 20-13.245, FS-B N° Lexbase : A79527ID).

En l’espèce, pour les besoins de son activité de design et d’architecture intérieure, une société souscrit une assurance RC. La société est chargée de travaux de décoration de « restaurants » Mac Donald’s. À la suite d’une réclamation d’un ayant droit d’un designer, la société déclare le sinistre à son assureur qui refuse sa garantie, aux motifs que son assuré aurait commis une faute dolosive en raison du caractère flagrant et massif de la contrefaçon.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence, dans un arrêt rendu le 20 mai 2021, rejette les demandes de l’assuré contre son assureur (CA Aix-en-Provence, 20 mai 2021, n° 18/08231 N° Lexbase : A37454SI). Les conseillers ont retenu qu’un simple examen visuel des œuvres attribuées au contrefait et celle utilisée par le contrefacteur permet de constater le caractère flagrant de leur exacte similitude. Ce faisant, elle a pris un risque ayant pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire disparaître l’aléa rattaché à la couverture du risque.

Un pourvoi est formé mais la Cour de cassation le rejette. L’appréciation du caractère dolosif de la faute est une question de fait dont elle n’exerce qu’un contrôle de motivation. Ce faisant, la troisième chambre civile reprend, mot pour mot, la définition de la faute dolosive donnée par la deuxième chambre. Cet alignement est salvateur, non seulement pour l’uniformisation de la règle juridique mais, encore, pour différencier la faute intentionnelle de la faute dolosive.

Au-delà des clauses d’exclusion stipulées dans les polices, le Législateur a instauré notamment deux cas d’exclusion, assez difficiles à caractériser. L’article L. 113-2 du Code des assurances N° Lexbase : L9563LGB permet, en effet, à l’assureur de refuser sa garantie en cas de faute intentionnelle ou dolosive.

Jusqu’alors, la faute d’une particulière gravité était très difficile à sanctionner. Rapporté au droit de la construction, il suffit, pour illustrer, de rappeler les débats et jurisprudences relatives aux clauses de violation délibérée des règles de l’art (pour exemple, Cass. civ. 3, 7 octobre 2008, n° 07-17.969, F-D N° Lexbase : A7234EA8). Alors, nombreux sont ceux qui ont tenté de se tourner vers les exclusions légales. Toujours rapportée au droit de la construction, la difficulté est que l’exclusion de faute intentionnelle ne reçoit pas vraiment d’application. Aucun constructeur ou maître d’ouvrage ne cherche l’action ou l’omission mais encore le dommage lui-même. L’intention de nuire, en cette matière, est probatio diabolica.

Il était donc temps que la faute dolosive soit autonome. Il faut que l’assuré ait la volonté de créer le dommage tel qu’il s’est produit. L’assuré doit s’être placé dans une situation qui rend le dommage inéluctable.

newsid:484966

Collectivités territoriales

[Brèves] Désignation par le maire du « correspondant défense » des communes

Réf. : CE, 1°-4° ch. réunies, 30 mars 2023, n° 468012, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A77819LR

Lecture: 1 min

N4959BZP

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par Yann Le Foll

Le 05 Avril 2023

► La désignation du « correspondant défense » des communes échoit au maire, au titre de l'administration de la commune.

Rappel. Une instruction du 8 janvier 2009 du ministre de la Défense et du secrétaire d'État chargé de la Défense et des Anciens combattants invite les communes à désigner un « correspondant défense », interlocuteur privilégié des autorités civiles et militaires pour ce qui concerne les questions de défense.

Solution. Les modalités de désignation de ce correspondant défense n'étant précisées par aucune disposition législative ou réglementaire, il revient au maire, seul chargé de l'administration communale en vertu de l'article L. 2122-18 du Code général de collectivités territoriales N° Lexbase : L4844LUX, de procéder, le cas échéant, à une telle désignation, sur laquelle il lui reste loisible de recueillir l'avis du conseil municipal.

 

newsid:484959

Comité social et économique

[Brèves] Accord GPEC : quand le CSE doit-il être consulté ?

Réf. : Cass. soc., 29 mars 2023, n° 21-17.729, FS-B+R N° Lexbase : A39249LW

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N4935BZS

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par Lisa Poinsot

Le 05 Avril 2023

En présence d'un accord relatif à la GPEC, le CSE n'a pas à être consulté sur cette gestion prévisionnelle dans le cadre de la consultation récurrente sur les orientations stratégiques ;

En revanche, les mesures ponctuelles intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise sont soumises à consultation, notamment celles de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, quand bien même elles résulteraient de la mise en œuvre de l'accord de GPEC.

Faits et procédure. Un accord de groupe relatif à la GPEC est conclu au sein d'un groupe afin de favoriser le développement professionnel et l’emploi par des démarches d’anticipation.

Rappel. Dans les entreprises d’au moins cinquante salariées dotées d’un CSE, ce dernier doit être consulté annuellement sur les orientations stratégiques de l’entreprise ce qui nécessite d’aborder, en l’absence d’accord ayant déterminé le contenu de cette consultation, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (C. trav., art. L. 2312-24 N° Lexbase : L9906LLH).

Une société, comprise dans le périmètre de l’accord, a, quelques mois plus tard, informé le CSE d’un établissement de l’état d’avancement d’un projet d’adaptation des compétences intitulé « Plan équilibre ». L’employeur considère que ce plan est une mise en œuvre de l’accord de GPEC n’ayant pas à être soumis à une consultation du CSE.

Estimant au contraire qu’ils devaient être consultés sur ce plan préalablement à sa mise en œuvre, le CSE central et le CSE de l’établissement concerné saisissent le tribunal judiciaire.

La cour d’appel retient que le « Plan équilibre », portant sur deux sites, prévoit une adaptation des compétences de quinze à vingt postes afin de redéployer des salariés sur des postes de cybersécurité pour lesquels les compétences sont très recherchées.

Elle fait ainsi ressortir l’existence d’une mesure de nature à effectuer le volume ou la structure des effectifs, au sens de l’article L. 2312-8 du Code du travail N° Lexbase : L6660L7S.

Elle en déduit que le défaut de consultation constitue un trouble manifestement illicite.

De plus, l’accord de groupe relatif à la GPEC prévoit la consultation du CSE central sur les évolutions prévisibles des emplois et qualifications par établissement et la consultation du CSE d’établissement en cas d’impact sur l’emploi dans un des établissements. Le « Plan équilibre » vise une adaptation de quinze à vingt postes par mutations ou détachement, de sorte que le non-respect des obligations d’information et de consultation du CSE d’établissement concerné par cette mesure constitue bien un trouble manifestement illicite.

Par conséquent, la cour d’appel ordonne :

  • d’ouvrir une consultation du CSE central et du CSE d’établissement sur le projet, de leur communiquer l’ensemble des informations nécessaires pour leur permettre d’appréhender le projet de « Plan équilibre » et ses conséquences sur les conditions de travail et l’emploi des salariés ;
  • de suspendre la mise en œuvre du plan que la consultation du CSE central et du CSE d’établissement n’aurait pas été menée à son terme.

L’employeur forme alors un pourvoi en cassation en soutenant notamment que le projet entre dans le champ d’application de l’accord de groupe relatif à la GPEC, de sorte qu’elle est exemptée de consulter le CSE central et le CSE d’établissement concerné.

À noter. Par un arrêt du 21 septembre 2022, la Chambre sociale de la Cour de cassation considère que la consultation ponctuelle sur la modification de l’organisation économique ou juridique de l’entreprise ou en cas de restructuration et compression des effectifs n’est pas subordonnée au respect préalable par l’employeur de l’obligation de consultation du CSE sur les orientations stratégiques de l’entreprise (Cass. soc., 21 septembre 2022, n° 20-23.660, FS-B+R N° Lexbase : A25208KK).

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi sur le fondement de l’article L. 2312-14, alinéa 3 du Code du travail N° Lexbase : L8247LGK, les articles L. 2312-24, alinéa 1er N° Lexbase : L9906LLH et L. 2312-37 N° Lexbase : L1434LKC du même code ainsi que les articles 1er, § 2, et 5 de la Directive n° 2002/14/CE, du 11 mars 2002 N° Lexbase : L7543A8U.

La Cour de cassation s’est alors prononcée sur l’application du dernier alinéa de l’article L. 2312-14 du Code du travail qui, par les termes « dans ce domaine », semble porter tant sur la conclusion de l’accord portant sur la GPEC que sur sa mise en œuvre.

Pour aller plus loin :

  • lire J. Cadot, Articulation entre consultation du CSE sur les orientations stratégiques et consultation ponctuelle, Lexbase Social, octobre 2022, n° 918 N° Lexbase : N2689BZM ;
  • v. ÉTUDES : Les attributions du comité social et économique dans les entreprises d’au moins 50 salariés, La consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise et économiques N° Lexbase : E1962GAW et La consultation en cas de projet de restructuration et de compression des effectifs N° Lexbase : E1974GADin Droit du travail, Lexbase.

 

newsid:484935

Contrats et obligations

[Brèves] Preuve du contrat de vente et mandat : peu importent les intentions réelles du mandataire quant à la livraison effective

Réf. : Cass. civ. 1, 29 mars 2023, n° 22-10.001, FS-B N° Lexbase : A39219LS

Lecture: 2 min

N4972BZ8

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 05 Avril 2023

► La vente étant parfaite en cas d’accord sur la chose et sur le prix, il n’y a pas lieu de tenir compte d’un éventuel détournement de ses pouvoirs par le mandataire à qui incombe de vendre le bien, dès lors que ses engagements engagent le mandant, sauf si le tiers avait connaissance du détournement ou ne pouvait l’ignorer. 

Faits et procédure. Les faits ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 29 mars 2023 par la première chambre civile ne sont sans doute pas étrangers à la publication de ce dernier au bulletin.

En l’espèce, le propriétaire d’un véhicule avait donné mandat à une société de vendre un véhicule. Le représentant social avait accepté de livrer la chose à un tiers acquéreur, mais aucun certificat de cession n’avait été remis à cet acquéreur et le mandataire avait conservé la possession effective du bien, une voiture. Le représentant social a été mis en examen des chefs d’abus de confiance aggravés et d’escroquerie commis au préjudice, notamment du mandant et du tiers acquéreur. Saisis par le mandant d’une demande tendant à voir constater la vente inexistante, les juges du fond refusèrent d’admettre une telle demande, au motif que la preuve du contrat de vente n’était pas rapportée et que les déclarations du représentant social ne pouvaient être retenues car s’inscrivant dans un ensemble d’opérations frauduleuses (CA Paris, 25 novembre 2021, n° 19/07236).

Solution. L’arrêt est cassé au visa des articles 1583 N° Lexbase : L1669ABG, consacré au contrat de vente, et 1998 N° Lexbase : L2221ABU, relatif aux effets du mandat à l’égard du mandant. Elle précise que « même lorsque le mandataire détourne ses pouvoirs au détriment du mandant, les engagements pris par le mandataire à l’égard d’un tiers obligent le mandant, sauf si le tiers avait connaissance du détournement ou ne pouvait l’ignorer ».

Reproche est fait à la cour d’appel de ne pas avoir tiré les conséquences légales de ses constatations « desquelles il résultait que le mandataire s’était engagé à vendre le véhicule (au tiers) selon le prix fixé, peu important ses intentions réelles quant à la livraison ».

Ainsi, peu importe le comportement frauduleux du représentant social du mandataire. En l’absence de connaissance de ce caractère par le tiers, le mandant est tenu. Aussi fallait-il tenir compte des déclarations du représentant social pour rapporter la preuve de l’existence du contrat.

newsid:484972

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Rappel du principe de non-ingérence de l’administration fiscale dans la gestion de l’entreprise et théorie de l’acte anormal de gestion

Réf. : TA Nîmes, 17 février 2023, n° 2023794 N° Lexbase : A26479ER

Lecture: 4 min

N4952BZG

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par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Le 05 Avril 2023

Dans la lignée de la jurisprudence du Conseil d’État, le tribunal administratif de Nîmes a rendu un arrêt le 17 février 2023 relatif au principe de non-immixtion de l’administration fiscale dans le cadre d’une opération d’augmentation de capital.

Par un arrêt « Société Musel SBP et Brunner » rendu le 10 juillet 1992 (CE Contentieux, 10 juillet 1992, n° 110213 N° Lexbase : A7494ARY), le Conseil d’État a rappelé le principe selon lequel une opération conférant un avantage à un tiers mais qui n’est pas contraire aux intérêts d’une entreprise ne suffit pas à lui donner un caractère anormal.

Rappel des faits

  • La société holding SAS Titan détient l’usufruit de 99 % du capital de la SCI Sersotan, propriétaire du terrain et des murs d’un hypermarché. La SCI procède à une augmentation de capital afin de financer un projet d’extension de l’hypermarché.
  • L’usufruit temporaire des parts émises pour une durée de 16 ans est évalué à 94 % de la valeur des parts en pleine propriété.
  • La société holding fait l’objet d’un contrôle comptable pour la période comprise entre le 1er novembre 2014 et le 31 octobre 2016. À la suite des opérations de contrôle, une proposition de rectification en matière dimpôt sur les sociétés et de taxe sur les salaires lui est notifiée.

 

La position de l’administration fiscale

  • L’administration remet en cause les amortissements pratiqués par la SAS Titan au cours des exercices 2015 et 2016 et estime que la société holding s’est livrée à une gestion anormale lors de l’augmentation du capital de la SCI.
  • Au soutien de ses prétentions, l’administration estime d’une part que l’opération litigieuse aurait conduit à favoriser le nu-propriétaire de la SCI au détriment de la holding. 
  • D’autre part, l’administration fiscale remet en cause la méthode de valorisation de la nue-propriété et estime que le prix de la souscription aurait été largement surestimé.
  • Par ailleurs, l’administration estime que la société holding aurait dû souscrire la pleine propriété des parts au lieu de souscrire l’usufruit temporaire sur 16 ans à hauteur de 94 % de la valeur des parts.
  • Enfin, l’administration fiscale juge que la holding aurait favorisé ce même nu-propriétaire lors de la cession d’un terrain par la SCI en prévoyant une clause spéciale de répartition en sa faveur.

 

La position de la société holding

  • Selon la société holding, l’augmentation de capital réalisée se justifie par sa volonté de renforcer ses capitaux propres et de rassurer les banquiers par cette incorporation du compte courant en leur évitant d’avoir à suivre une dette subordonnée.
  • Le choix de souscrire à hauteur de 94% l’usufruit temporaire sur 16 ans relève de la libre détermination de l’entreprise, laquelle détient seule la faculté de déterminer le quantum de sa participation dans une autre société. Seul le taux d’actualisation doit être retenu pour procéder à la valorisation des droits économiques et financiers du nu-propriétaire et de l’usufruitier.

 

Question de droit. Était posée au tribunal administratif de Nîmes la question suivante :  L’administration fiscale peut-elle apprécier le bien-fondé d’une opération postérieure et étrangère à une augmentation de capital sur le fondement de la théorie de l’acte anormal de gestion ?

 

Solution

Par une décision en date du 17 février 2023, le tribunal administratif de Nîmes juge que l’administration fiscale ne saurait remettre en cause l’augmentation de capital réalisé par la société holding au détriment d’une avance en compte courant sur le terrain de l’acte anormal de gestion.

Le simple fait qu’une opération comporte un avantage éventuel au profit d’un tiers n’est pas de nature à lui conférer un caractère anormal et ne peut dès lors être contraire ou étranger aux intérêts de la société.

Le choix d’une société de souscrire un usufruit temporaire sur 16 ans relève de la libre détermination de l’entreprise si ce choix ne conduit pas à un appauvrissement et n’est pas contraire ou étranger à ses intérêts.

Enfin, les juges considèrent qu’une opération même anormale, postérieure et étrangère à l’augmentation de capital ne peut être une circonstance justifiant le caractère anormal de gestion.

newsid:484952

Procédure pénale

[Brèves] Opposition à l’exécution d’une ordonnance pénale : nul besoin d’un pouvoir spécial pour l’avocat

Réf. : Cass. crim., 4 avril 2023, n° 22-86.375, F-B N° Lexbase : A18429M8

Lecture: 2 min

N4971BZ7

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par Adélaïde Léon

Le 02 Mai 2023

► L’avocat qui, pour son client, forme opposition à l’exécution d’une ordonnance pénale n’a pas à justifier d’un pouvoir spécial.

Rappel de la procédure. Un individu est déclaré coupable par ordonnance pénale de conduite sous l’empire d’un état alcoolique et refus d’obtempérer. Il est condamné à une amende de 200 euros.

L’avocat de l’intéressé forme opposition à cette ordonnance. Le tribunal correctionnel rejette cette opposition.

Le prévenu et le ministère public ont relevé appel du jugement.

En cause d’appel. La cour a déclaré irrecevable l’opposition formée au motif que celle-ci avait été faite par un avocat qui ne justifiait pas d’un pouvoir spécial pour former ce recours.

Le prévenu a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel.

Motifs du pourvoi. Il était fait grief à l’arrêt d’avoir fondé l’irrecevabilité de l’opposition en se fondant sur l’absence de pouvoir de son auteur alors que l’article R. 41-8 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L8670IYR n’exige pas un tel pouvoir spécial.

Décision. La Chambre criminelle casse l’arrêt d’appel au visa des articles 495-3, alinéa 3 N° Lexbase : L7514LPY et R. 41-8 du Code de procédure pénale.

Selon la Cour, il se déduit de ces textes que lorsqu’il souhaite former opposition à l’exécution d’une ordonnance pénale, le prévenu peut agir lui-même ou par avocat ou par fondé de pouvoir spécial en adressant une lettre au greffier en chef du tribunal qui a rendu la décision attaquée ou par déclaration au greffier en chef.

Ces dispositions distinguent donc l’avocat du fondé de pouvoir spécial, le premier n’ayant précisément pas à justifier d’un tel pouvoir.

En se prononçant comme elle l’a fait, la cour d’appel avait donc méconnu les textes visés.

Pour aller plus loin : v. J.-B. Thierry, Étude : Les voies de recours, L’opposition, Les conditions de l’opposition, in Procédure pénale, (J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E1599ZM8.

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Salaire

[Brèves] La preuve du paiement du salaire incombe à l’employeur

Réf. : Cass. soc., 29 mars 2023, n° 21-19.631, F-D N° Lexbase : A01179MB

Lecture: 2 min

N4969BZ3

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par Charlotte Moronval

Le 05 Avril 2023

► Il résulte de la combinaison des articles 1353 du Code civil et L. 3243-3 du Code du travail que, nonobstant la délivrance d'une fiche de paie, l'employeur doit prouver le paiement du salaire, notamment par la production de pièces comptables.

Faits et procédure. Un salarié saisit la juridiction prud’homale d’une demande en paiement d’un rappel de salaires.

La cour d’appel rejette sa demande. Elle retient que :

  • pendant plusieurs mois, le salarié a bien été destinataire de bulletins de salaire à en-tête de la société, comportant les mentions conformes au contrat de travail à temps partiel qu’il a signé ;
  • les relevés de compte bancaire ont été transmis de façon très parcellaire par le salarié et ne permettaient pas de conforter ses allégations ;
  • les trois attestations écrites de la même main et dans des termes similaires n'ont pas d'effet probant ;
  • à l'inverse, la production d'un contrat de travail écrit, d'une déclaration unique d'embauche et de bulletins de salaire conformes attestent d'une relation de travail régulière ;
  • et les allégations du salarié, qui aurait travaillé plus de huit mois sans être payé et sans jamais réclamer ses salaires, tout en acceptant ses bulletins de paie apparaissent peu vraisemblables.

L’employeur forme un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse ce raisonnement.

Elle rappelle notamment que l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir, de sa part, renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en vertu de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat.

En l'espèce, la cour d'appel a violé les articles 1353 du Code civil N° Lexbase : L1013KZK et L. 3243-3 du Code du travail N° Lexbase : L7243IAI en mettant à la charge du salarié la preuve de l'absence de paiement du salaire.

Pour aller plus loin :

  • v. déjà, par exemple : Cass. soc., 16 juin 2021, n° 19-25.344, F-D N° Lexbase : A65314WS : nonobstant la délivrance d’un bulletin de paie, c’est à l’employeur, débiteur de cette obligation, qu’il incombe de prouver le paiement du salaire et celui de l’indemnité de congés payés ;
  • v. ÉTUDE : Le paiement du salaire, Les conséquences de l'acceptation par le salarié du bulletin de paie, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0940ETY.

 

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